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tées par les préfets, et le ministre de la police est devenu fe grand électeur du royaume. Ris d'une part, murmures de l'autre. Rétablissez la religion et la morale, dit M. Cornet d'incourt, et vous aurez de bons députés. M. Courvoisier repousse, dans un discours long et improvisé, les objections contre le projet. Il combat particulièrement M. de Villèle, et dans une digression sur l'origine et les effets du gouvernement représentatif, il avance que ce fut l'orgueil de la noblesse qui amena la révolution de 1789. Il regarde le projet comme sagement médité, et adresse quelques reproches aux adversaires. La séance est levée à cinq heures.

Le 30 décembre, an continue la discussion sur les élections. M. le marquis de Montcalm parle contre le projet. La Charte, dit-il, a voulu écarter la multitude des élections, elle a voulu que ceux qui y concourroient fussent riches et propriétaires. Le projet est contraire à cet esprit; il tend à donner la majorité à de nouveaux propriétaires, à des ac quéreurs de biens d'émigrés, à une classe attachée à la révolution. M. de Montcalm finit par un éloge de la noblesse et de son courage à défendre le trône, et s'étonne qu'on ait pu la taxer d'avoir amené la révolution par son égoïsme et son orgueil. M. Faget de Baure réduit le projet à trois points principaux, qu'il discute successivement. L'uniformité qu'on se plaint de n'y pas trouver est une chimère. Le droit d'élection étant plus important dans les pays pauvres y fixera les anciennes familles, y ramènera d'utiles habitans, y augmentera la valeur des biens. L'orateur combat l'idée de M. de Serre sur un college des villes et un des campagnes. M. Benoît croyoit la matière épuisée; mais le discours de M. le commissaire du Ror lui a paru ouvrir un nouveau champ à la discussion, et il y entre avec lui, Il ne s'agit ici ni d'une discussion grammaticale, ni de métaphysique; il s'agit de la propriété, et l'opinant, divisant les propriétaires en trois classes, a cru voir qu'ils seroient fort inégalement représentés dans les élections. Il est entré, à cet égard, dans des calculs assez longs qui ne supportent pas l'analyse, et a fini par l'éloge des colléges électoraux tels qu'ils existent, qui, quoique créés sous Buonaparte, ont assez montré leur bon esprit. M. Benoît vote donc pour qu'on reste dans l'état actuel. M. Beugnot professe une doctrine contraire. L'intérêt général, dit-il, est d'appeler aux élections cette classe mi

toyenne qui, par son nombre, et plus encore par ses mœurs et ses habitudes, sa droiture et son zèle, fait la force de la monarchie, tandis que ceux qui ont porté les premiers coups à la monarchie furent ces mêmes notables et ces mêmes parlementaires qui étoient appelés pour la défendre. M. de Bonald combat ceux qui prétendent qu'on ne peut, en ce moment, faire une bonne loi d'élections; c'est une idée enfantée par la légèreté et la paresse. Il avoue qu'il n'étoit pas partisan du gouvernement représentatif en France; mais le Roi nous a donné ce gouvernement, et la force des choses nous l'a imposé; il l'accepte dans son principe et dans ses conséquences, et raisonne dans cette hypothese. Il ne veut pas que l'on regarde les députés comme représentant des individus, mais des communes. Après une discussion grammaticale sur le sens de l'article 40, M. de Bonald répond à ce qu'a dit M. le commissaire du Roi contre ceux qui ne s'élèvent contre le ministère qu'afin de le remplacer. Cette lutte lui paroît dans l'esprit des gouvernemens représentatifs; elle existe en Angleterre. C'est une émulation qui y tient le ministère en haleine. L'Europe vous contemple, a-t-il dit en finissant; c'en est fait de l'ordre social si, par des lois déduites des habitudes révolutionnaires, vous appelez petits propriétaires, et excluez de fait les chefs de la propriété. La séance est levée à cinq heures. Il n'y en a point eu le mardi.

On trouve encore que les Œuvres de Voltaire ne sont pas assez répandues, et on veut en faire une nouvelle édition qui les propage dans toutes les classes, et qui puisse satisfaire tous les goûts. Il seroit fâcheux en effet que les fortunes médiocres ne pussent se procurer une collection si utile, et que le peuple ne pût profiter des leçons de sagesse, de religion et de morale qui respirent dans les Œuvres philosophiques et dans la correspondance du grand homme. En conséquence, on va en donner une nouvelle édition, non pas une édition choisie, où l'on n'admettroit que les ouvrages, dignes de passer à la postérité; mais une édition complète, où entrerout et les poemes immoraux, et les facéties irréligieuses, et les insultes au christianisme, et les critiques indécentes de l'Ecriture sainte, et tout ce qui accuse le plus la partialité et la passion. On se flatte de réduire le tout en 12 gros volumes pour la plus grande commodité des lecteurs. Nous re

viendrons sur cette entreprise qui ne peut qu'affliger les amis de la religion, et contribuer à répandre encore le poison de l'impiété. Il seroit possible d'ailleurs que cette spéculation de librairie fût une annonce un peu trompeuse, et nous dirons là-dessus notre pensée.

Etrennes à ma fille, ou Soirées amusantes de la jeunesse, par Mme. Dufresnoy (1).

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On ne nous fait pas ordinairement l'honneur de nous envoyer des romans, et je ne sais pourquoi il y a eu une exception en faveur de celui-ci. Est-ce une politesse de l'auteur, ou bien le libraire a-t-il pensé que l'ouvrage faisant partie de ce qu'il appelle sa librairie d'Education, rentroit dans nos atributions, et pouvoit nous fournir un article qui contribueroit au débit de ses livres? Il est fâcheux pour nous de ne pouvoir répondre à ce procédé ou à cette attente. Mais en conscience nous ne saurions dire que ces Etrennes conviennent à une jeune personne, ni que ce soit un bon ouvrage d'éducation. Des aventures invraisemblables et d'éternels récits de la plus dangereuse des passions, font de ces Etrennes un roman comme tant d'autres. Et que l'auteur ne dise pas que ses histoires ont un but moral. Souvent il néglige même d'en faire sortir la morale, ou bien elle est si peu naturelle et tirée de si loin, qu'elle ne fait aucune impression. Ce qui en fait beaucoup plus, ce sont des peintures et des tableaux qui attachent et qui égarent l'imagination des jeunes personnes. Nous croyons donc qu'on peut leur procurer de beaucoup meilleures lectures que celles de ces Etrennes. Il nous semble même, quoique nous soyons peu exercés à juger ces sortes d'ouvrages, et que nous n'ayons pas lu celuici dans son entier, qu'il est loin d'être un modèle Sous le rapport littéraire. Les aventures sont sans vraisemblance, les moyens sont forcés, les intrigues mal conduites, le dénouement mal amené. Il n'y a ni naturel ni intérêt. Jadis une Mme. de Gomez publia, sous le nom de Soirées amusantes, un ouvrage passablement ennuyeux. Il paroît que ce titre porte malbeur à ceux qui le prennent; et en effet, l'on n'amuse jamais moins que quand on promet qu'on va amuser.

Nous avons lieu de croire que Mme. Dufresnoy et M. Eymery ne nous enverront plus leurs livres d'éducation.

- (1) 2 vol. in-12. Chez Alexis Eymery.

(Samedi 4 janvier 1817.)

(No. 251.)

Nous avons inséré dans notre numéro 243, samedi 7 décembre, un essai de circonscription des diocèses, qui nous a attiré quelques lettres et observations, et l'on a réclamé contre la suppression de certains siéges qui se trouvoit indiquée dans cet essai. Nous pouvons faire d'abord à ces réclamations une réponse générale et fort consolante pour les personnes intéressées; c'est que l'auteur de l'article n'a prétendu donner que ses idées, qu'il n'a aucun crédit, que son travail n'influera probablement pas sur la circonscription qui sera arrêtée de concert par les deux puissances, et que les siéges qu'il supprime n'en existeront sans doute pas moins. Il répondroit, en second lieu, en supposant qu'on voulût donner à son plan plus d'importance qu'il n'en mérite, que les sup pressions sont une chose très-fâcheuse, qu'il le sait trèsbien, qu'il gémit de la nécessité de restreindre le nombre des diocèses; mais que puisqu'on paroît décidé à n'en pas admettre au-delà d'un certain terme, il a fallu se régler sur cette hypothèse. Il répondroit encore, qu'il n'est aucun siége qui ne puisse faire valoir de bonnes raisons en sa faveur, et que, dans une semblable mesure, où l'on est obligé de faire des sacrifices, il faut seulement voir de quel côté il y a le moins d'inconvéniens, et considérer plutôt l'avantage général que les intérêts par ticuliers. Il diroit enfin, qu'il a plaidé lui-même pour qu'il y eût le moins de suppressions possibles, qu'il a fait valoir les droits de plusieurs siéges, et qu'il a in sisté sur l'avantage qu'il y auroit à maintenir quelques diocèses de plus que le nombre indiqué. Ainsi, il a témoigné son regret de ne pouvoir conserver en ce moment Toul, Saintes, Béziers, et d'autres évêchés, qui semblent demandés par les besoins de l'Eglise. Mais il est plutôt favorable aux réclamans qu'il ne leur est contraire, et Tome X. L'Ami de la Religion et du Ron

loin de combattre leurs raisons, il seroit plutôt disposé à les soutenir de tout son pouvoir, s'il en avoit. C'est dans cet esprit que nous allons donner l'extrait de quelques lettres que nous avons reçues. Les premières surtout nous paroissent faites pour mériter l'attention.

Un ecclésiastique du diocèse de Toul s'étonne qu'on puisse ne pas songer à faire revivre un siége si ancien. Quelques-uns ont fait remonter la fondation de l'évêché au second siècle; mais il paroît que saint Mansuy, premier évêque de Toul, vivoit au quatrième siècle. Il planta la foi dans l'immense territoire qui s'étend depuis les limites du pays Messin jusqu'aux Vosges, et qui, jusqu'à ces derniers temps, relevoit de Toul. Ce ne fut qu'après la mort de M. de Drouas que l'on détacha de Toul les évêchés de Nanci et de Saint-Diez, et même après ce démembrement, Toul avoit encore plus de six cents paroisses et annexes. On ne pourroit le supprimer qu'en augmentant les diocèses voisins qui sont déjà fort étendus. Ne seroit-il pas permis de faire valoir l'illustration de ce siége occupé par tant de saints évêques, dont huit reçoivent un culte public? Brunon, qui fut depuis Pape, sous le nom de Léon IX, avoit été évêque de Toul pendant vingt-deux ans. L'évêque éloit prince du Saint-Empire et doyen des trois évêques de Metz, Toul et Verdun. Toul a conservé sa cathédrale, construite dans le goût gothique le plus élégant, et dont le portail seulement a été endommagé par le délire révolutionnaire. Le palais épiscopal, bâti par M. de Bégon, est fort beau, et subsiste, ainsi que le séminaire, dont les vastes bâtimens pourroient facilement être réparés et distribués selon leur ancienne destination. Ces édifices semblent d'eux-mêmes provoquer le rétablissement ́ de ce siége. Seroit-il juste que des siéges nouveaux fussent substitués à l'Eglise mère d'où ils sont sortis, et des combinaisons de circonstances doivent-elles prévaloir contre des droits légitimes, contre une possession qui remonte si haut, contre les besoins d'une vaste con

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