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comte de Saint-Aldégonde, le comte de la Bourdonnaie, Try, le comte de Salaberry, Albert, le comte d'Hautefeuille, Dubruel. La troisième commission pour la comptabilité intérieure est composée de MM. de Cotton, Sartelon, d'Augier, Soullier, Ruinart de Brimont, du Fougeray, Lormand, le Frogne et Usquin.

Le 14, la chambre s'est d'abord formée en comité secret pour délibérer sur le projet d'adresse au Roi. Les membres qui doivent la présenter ont été tirés au sort. Ce sont: MM. Meynard, Hay, Moysen, d'Argenson, Thésan de Biran, Cornet d'Incourt, de Saint-Cricq, Ravez, le Marchand de Gomicourt, Rupéron, Usquin, Tournemine, BeaussierMathon, Garnier-Dufougeray, de Pracontal, de Puymaurin, de Calvet-Madaillan, Dupuy, de Villefranche et André. La chambre lève l'ajournement à l'égard de MM. Augier, Gagneur, Clément et Bégouen. Le président donne lecture d'une ordonnance du Roi qui nomme MM. Duvergier de Hauranne et Fornier de Saint-Lary, pour questeurs. La séance est suspendue quelque temps; elle est reprise à trois heures. M. le duc de Richelieu et M. le comte Corvetto, ministres, sont introduits avec MM. de la Bouillerie et Tabarié, sous-secrétaires d'Etat des finances et de la guerre, et MM. Dudon, de Saint-Cricq et de Barante, con eillers d'Etat. M. Corvetto monte à la tribune, et dit:

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« Messieurs les députés, les finances touchent à la destinée des empires; nous sortions à peine des troubles où nous avoient entraînés des événemens inattendus, quand on nous a présenté le budget de 1816. Notre situation, au moment où nous vous présentons celui de 1817, est sans doute moins désavantageuse; mais cependant elle est grave. L'Etat, ébranlé par nos discordes civiles, s'affermira par la conciliation des esprits, par l'amour, par le besoin de la paix. Ce sont là sans doute vos sentimens, ce sont ceux que vous devez propager. Le but où vous devez tendre vous est indiqué par la volonté bien prononcée du Roi que le ciel nous a rendu. C'est dans l'exécution de la Charte, ce monument immortel qui a sauvé la France, que nous devons chercher notre salut. Nous avons acquis, par bien des maux, la triste expérience que les hommes ont besoin d'institutions vigoureuses qui les protègent contre les révolutions. La plus efficace de toutes est, sans contredit, un bon systême de finances. C'est le ressort qui fait mouvoir les Etats, qui facilite l'exercice de l'autorité suprême. Nous comptons, pour le succès de celui que nous allons vous soumettre, sur l'appui des plus sages défenseurs de la Charte, des plus zélés serviteurs du Roi, son auguste auteur. Tont vous sera dévoilé avec une entière franchise; l'état des finances vous sera exposé avec les mêmes détails qu'il l'a été

doit

au Roi, et mon rapport vous dira exactement ce que les revenus de l'Etat ont produit. L'arriéré a été diminué de 170 millions. Les années 1814, 1815 et 1816 ont rapporté en total 1,728,825,835 fr.; on a payé 1,683,000,000 on doit encore environ 480,000,000; mais on attend aussi des rentrées qui couvriront une grande partie de cette dette. C'est un phénomène trés-remarquable, que, dans le cours de trois années où l'on a tant souffert, on ait pu trouver d'aussi grandes ressources; mais la nation françoise se distingue surtout par sa grandeur d'ame dans les revers, par ses efforts, par son courage à souffrir. Enfin, quelle que soit la pénurie, les traités avec l'étranger s'exécutent, l'arriéré se paie, le présent est à jour, les effets à terme se soutiennent. Il a été distribué de nombreux secours aux départemens qui ont le plus souffert de l'invasion. On a protégé, autant qu'il a été possible, le commerce, l'industrie et les arts, et l'action du trésor n'a pas discontinué. C'est ce mouvement qu'il faut soutenir, et la prévoyance ouvrir une route qui traverse le présent et conduise jusque dans l'avenir. Il faut que le systême de nos finances assure le paiement de l'arriéré, ménage un excédant pour des circonstances imprévues, obtienne la confiance des capitalistes, donne aux propriétaires une entière sécurité, et présente aux spéculateurs des carrières à parcourir en doublant le crédit du gouvernement. Ce dernier point s'obtiendra en doublant l'amortissement au moyen d'une portion des propriétés de l'Etat : c'est-là la base du budget; c'est par cette ressource que l'on parviendra à rétablir l'équilibre qui se détruit. Le Roi, Messieurs, a voulu que, sur ces points d'intérêt majeur, nous consultassions tous les hommes instruits; votre discussion portera la lumière dans ce qui pourroit encore rester obscur. Le mode de paiement de l'arriéré a été le premier discuté. Aucune altération n'aura lieu dans le paiement des créanciers de l'Etat. Si l'on a ajourné à 1820 tout ce qui n'est pas inscrit au grand livre, on veut donner aux reconnoissances de liquidation la facilité d'entrer en circulation, en proposant d'or donner que dans cinq ans tout soit inscrit ainsi, l'arriéré sera payé intégralement.

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>> Si les recettes nous paroissent énormes, au moins pouvons-nous penser que la paix nous ayant réconciliés avec nos voisins, les débouchés de notre commerce ne seront plus obstrués, et que le terme de nos maux est connu. Les recettes de 1817 doivent être plus fortes que celles de 1816, parce qu'il faut pourvoir à des dépenses qui ne peuvent se combler de la même manière que l'arriére; elles doivent être de 1,088,000,000; la différence est de 249,000,000. Pour couvrir cette différence, le Roi et son auguste famille font le même sacrifice qu'ils ont bien voulu faire en 1816. 5,000,000 seront affectés au service direct de l'Etat; le surplus sera employé à encourager les arts, à soulager les pauvres, à pourvoir aux dépenses de la religion, etc. Les recouvremens devront s'élever à 774,000,000, la contribution foncière étant établie sur la même base qu'en 1816. Sans doute il faut gémir d'être réduit à ne pouvoir faire d'amélioration; mais avec un peuple comme le peuple françois, on peut dire : Encore un effort! Après tous ceux qu'il a faits, et dans l'espoir de l'avenir, celui-ci sera légèr. On ne peut

non plus diminuer l'impôt de patente; mais, pour le rendre moins oné. reux, on y a destiné un fonds de dégrévement de 33 centimes par franc. Il a existé, pour 1815 et 1816, une ressource qui ne peut plus se retrouver; c'est celle des cautionnemens qui a rendu environ 50,000,000. Pour y suppléer, on s'est vu forcé de chercher d'autres matières imposables; ainsi, la contribution personnelle et mobilière sera augmentée de 14,000,000; l'impôt sur les huiles donnera de 4 à 5,000,000; d'autres objets imposés fourniront de 15 à 20,000,000; les droits d'entrée s'étendront sur les villes de quinze cents habitans; les bières, toutes les boissons vineuses seront soumises à des droits; les voitures publiques paieront des rétributions proportionnées; les douanes éprouveront des modifications avantageuses. Le systême suivi dans la direction de l'enregistrement et des domaines a produit 156,000,000. C'est une administration qui paroît arrivée au dernier degré d'amélioration; néanmoins, on y ajoutera la perception d'un droit sur les inscrip tions inventoriées dans les successions. Les postes fourniront environ 20,000,000. Les retenues qui avoient été faites sur les traitemens des fonctionnaires, seront continuées en 1817. On eût voulu pouvoir reconnoître autrement leur zèle; mais après tous les sacrifices qu'ils ont faits, ils se résoudront sans doute encore à celui-ci.

»74,000,000 sont bien loin de 1,000,000,000; mais le crédit peut franchir cette distance, et nous ne devons pas hésiter à appeler l'avenir au secours du présent. Nous laisserons à nos enfans une paix, une sécurité où ils retrouveront les intérêts de tous nos sacrifices. Nous pouvons disposer de 30,000,000 de rente en inscriptions sur le grand livre; c'est-là notre ressource qu'on mettra à la disposition du minis tère des finances, qui rendra le compte le plus régulier de l'emploi de ces fonds. Les dépenses s'augmentent ainsi qu'il suit : la dette publique est de 159,000,000, c'est 26 de plus que l'an dernier; mais c'est la première dette, la dette sacrée, et qu'on ne peut atténuer en aucune façon; les dépenses de la liste civile sont invariables; celles de la chambre des députés doivent s'accroître de 200,000 fr., celles du ministère de la justice de 1,000,000, celles du département des affaires étrangères se réduisent de 1,500,000 fr. Le ministère de l'intérieur demande 57,000,000, c'est 6,000,000 de plus; mais on trouvera cette somme bien médiocre, quand on saura qu'elle doit servir à fixer le sort des ministres de la religion, de l'instruction publique, des hospices, etc. Le service de la guerre est le plus étendu de tous; il fut de 180,000,000 en 1816, et il en faut 212 pour 1817. Tel est le malheur où nous nous trouvons plongés par suite de l'état gigantesque où furent portées les armées francoises, qu'il nous reste d'immenses cadres de soldes de retraite et de réforme, et qu'à peine peut-on rétribuer honorablement la portion qui est en activité, couvrir toutes les dépenses du matériel, et reconstituer enfin l'armée; mais on sera soulagé par des extinctions. La marine, si long-temps négligée, auroit besoin de grands moyens pour reprendre son éclat; mais, en temps de paix, à l'aide des transactions commerciales, clle formera, à moins de frais, des matelots et des officiers; 48,000,000 lui furent assignés en 1816; elle en demande 2 ou 3 de plus. Il est nécessaire d'allouer au ministère des finances,

qui dépense 3,000,000, 700,000 francs de plus; à celui de la police, 200,000 fr. On doit destiner à payer l'intérêt des cautionnemens, etc., 13,860,000 fr., et pour les frais de négociations 15,000,000. Le fonds d'amortissement demande 40,000,000, an licu de 20. C'est beaucoup, sans doute; mais ce fonds est un placement destiné à fructifier au profit de l'Etat. Les résultats de cet utile établissement attestent une vaste amélioration, accroissent le crédit, et soutiennent l'honneur de nos effets. A ce fonds, dont la destination est sacrée, on peut joindre le produit de la vente de 140,000 hectares de bois, qui augmenteront le fonds d'amortissement. Ainsi l'Etat parviendra à éteindre sa dette, et s'enrichira des sacrifices mêmes du moment. C'est-là le grand probléme à résoudre. Dans les dépenses, 10,000,000 sont consacrés à rembourser les avances faites par les départemens, pour fournitures d'habillentent. Quant aux 300,000,000 relatifs au paiement des engagemens contractés par les traités, leur destination n'a pas besoin d'être expliquée; 23,000,000 seront employés à acquitter d'anciens effets que les porteurs ne veulent pas renouveler.

» Nous venons de remplir une tâche pénible; c'est le malheur des temps. Il sera sûrement réservé à nos successeurs de vous offrir des tableaux plus consolans; cependant il se présente encore des motifs de soulagement. A mesure que les années s'écouleront, nos dépenses se dégageront des subsides qui nous sont imposés, et quoique nous restions surchargés des intérêts, ils n'absorberont plus les recettes ordinaires. La marine pourra modérer ses approvisionnemens, et la dette elle-même éprouvera de nombreuses réductions. Il est probable que dès à présent les frais de négociations offriront des améliorations. Ou vous propose de limiter le fonds des pensions, et votre surveillance fortifiant les avantages de l'amortissement, contribuera vivement au bien. Il n'y a pas d'illusion à croire que la paix, le rétablissement du commerce, la sécurité des propriétaires, etc., favorisant les transactions de toute nature, produiront un accroissement dans les rentrées qui viennent des impôts indirects, comme les tabacs, les sels, les postes, la loterie, etc. Ce beau royaume, fatigué par de longues révolutions, par la compression d'un immense état militaire, n'a pu perdre les avantages de sa position et de la fertilité du sol. Un bon Ror qui, après vingt-cinq ans d'absence, a avec ses sujets la conformité du malheur et des intérêts, doit assurer à la France un crédit qu'elle obtiendra par sa fidélité à remplir ses engagemens, et par sa loyauté. Oui, le crédit se rapprochera d'un gouvernement honoré, stable, dont les sujets sont unis de sentimens. Il s'accoutumera à la surveillance austère que vous exercerez; mais il fuiroit, il s'éloigneroit du théâtre des dissentions. Nos efforts doivent être communs pour vaincre la mauvaise fortune. La France, malgré ses traverses, imitera un grand roi qui, après avoir rempli l'Europe du bruit de sa prospérité, l'é- . tonna par son courage dans les revers. Nous connoissons le vœu dominant. Vous, organes de la France, vous y répondrez par votre attachement à la Charte, par laquelle le Roi s'est rendu maître des suites de la révolution, a fixé tous ses résultats. Vous avez vu que l'arriéré payable en rentes est de 400,000,000. Compions sur une amélioration

notable par un amortissement vigoureux. L'impôt sera éloigné des besoins; c'est la confiance seule qui y suppléera; le gouvernement sera soutenu par sa probité et la vôtre; ses principes recevront votre sanction, celle de l'opinion publique et celle de nos voisins. Espérons enfin que la France sortira victorieuse de cette lutte difficile, et se rendra digne de ses hautes destinées ».

M. le conseiller d'Etat Dudon remplace à la tribune M. le comte Corvetto, et donne lecture de l'ordonnance du Roi qui fixe les budgets de 1814, 1815, 1816 et 1817. Celui des deux derniers mois de 1814 s'élève à 609,394,626 fr. 19 cent.; celui de 1815 à 791,317,660 fr et celui de 1816 à 884,492,520 fr. Voici les principales dispositions de l'ordonnance du Roi: Il sera délivré aux créanciers de l'arriéré des inscriptions portant intérêt à 5 pour 100. Le remboursement s'effectuera par cinquième, à partir de 1821, et il leur sera loisible de se faire inscrire au grand livre pour la valeur nominale de leur créance. Un an leur est accordé pour produire leurs titres. Les recettes de 1817 sont fixées à la somme de 1,088,294,957 fr. La contribution foncière, la personnelle et mobilière, les portes et fenêtres, les patentes, les centimes additionnels seront perçus sur le même taux qu'en 1816. Les fonds de non valeur seront de 3 cent. pour la personnelle, de 10 cent. sur les portes et fenêtres, de 5 cent, sur les patentes. Il sera perçu extraordinairement sur les patentes 5 cent., y compris les 33 cent. de dégrèvement; sur les portes et fenêtres, go cent; sur la personnelle, 50 cent. Les négocians, armateurs, etc., paieront en outre de leur patente un droit fixe de 2 à 300 fr., selon la population de la ville qu'ils habitent. Les fabricans de draps, à cinq métiers, paieront une somme de 50 fr., qui sera augmentée de 10 fr. par métier jusqu'à concurrence de 300 fr. Les filateurs qui ont plus de cinq cents broches, paieront 3 fr. par cent broches jusqu'à 300 fr. Les teinturiers, imprimeurs sur étoffe, fondeurs, etc., paieront un droit fixe, établi d'après la population de la ville qu'ils habitent. Les médecins et officiers de santé sont assujettis au droit de patente. Un crédit de 30,000,000 de rentes est ouvert au ministère des finances. La caisse d'amortissement recevra 40,000,000, plus le produit de la vente de 150,000 hectares de bois. Le ministre des finances traitera avec la banque de France pour le paiement de la dette perpétuelle. La solde de retraite, les pensions de réforme et les pensions de retraite seront payées sur les fonds à ce destines. Les pensions civiles s'élèvent à 3,000,000, les pensions militaires à 4,000,000, la solde de retraite et de réforme à 26,000,000. Les affiches seront assujetties au timbre avant l'impression. Les droits de mutation sont remis aux émigrés qui viennent de rentrer dans leurs biens non vendus.

M. de Barante succède à M. Dudon, et il expose la situation des impôts indirects et les améliorations qui s'y sont opérées sous son administration. Il indique quels seront les nouveaux droits sur les huiles, les boissons et les voitures publiques. Il est six heures, une discussion s'engage sur le jour où la chambre se réunira pour examiner les diverses parties du budget: on insiste pour remettre la séance à lundi ; cette proposition mise aux voix est adoptée.

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