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(Mercredi 29 janvier 1817.)

(N. 25%)

La Religion prouvée par la révolution, ou Exposition des préjugés décisifs qui résultent, en faveur du christianisme, de la révolution, de ses causes et de ses effets; par M. l'abbé Clausel de Montals.

PREMIER ARTICLE.

Prouver la religion par la révolution même qui étoit destinée à l'anéantir, paroîtroit peut-être un paradoxe aux esprits légers et peu accoutumés à réfléchir sur les événemens; mais ceux qui observent, qui jugent et qui cherchent d'utiles leçons dans l'histoire, estimeront sans doute, comme nous, que cette idée de l'auteur est aussi juste que féconde, et que le spectacle de la révolution et l'examen de ses causes et de ses effets, peuvent nous fournir de nouveaux motifs de nous attacher à cette religion divine, qui, attaquée alors par tant de moyens, en a triomphé par sa seule force. Elle s'est vue exposée à une des plus terribles épreuves; a-t-on cependant trouvé quelque erreur dans sa doctrine ou quelque endroit foible dans sa constitution? Non, elle s'est montrée pure au milieu des souillures d'une épouvantable corruption, et c'est une chose bien remarquable que quand l'ame, fatiguée de tant d'excès et de crimes dont nous avons été témoins, cherche à se reposer sur des images plus douces, elle n'en peut rencontrer de

(1) Brochure in-8°.; prix, 2 fr. 50 cent. et 3 fr. 25 cent. franc de port. A Paris, chez Egron ; et au bureau du Journal. Tome X. L'Ami de la Religion et du Roi.

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plus touchantes que dans ces traits de courage, de résignation, de charité, de grandeur d'ame qui, grâces à l'esprit de religion et de piété, ont éclaté dans ces jours mauvais, et ont été comme des éclairs au- nrificu d'une nuit horrible. C'est une réflexion que vous empruntons à M. l'abbé Glansel, et par laquelle nous commençons l'analyse de son livre.

On ne vit jamais, dit l'auteur, rien d'égal au déchaînement dont le christianisme a été l'objet depuis un siècle. Il a vu se déclarer successivement contre lui les talens et le pouvoir. La conjuration des écri¬ vains a précédé celle des bayonnettes, et on a employé tour à tour, tantôt les dérisions, les satires, les objections, les sophismes, l'insule; tantôt les emprisonnemens, les déportations, les décrets de pros cription, les arrêts de mort, tous les moyens des Néron et des Dioclétien. Cependant la religion n'est point encore abattue. Elle s'est rassise sur le trône à côté du fils de saint Louis, et elle a vn som Pontife, naguère erraut et captif, rentrer en triomphe dams sa capitale, et reprendre les rênes de l'Eglise, qui, de toutes parts, adressoit pour lui des prières à son pro Lecteur. Tant de persécutions inutiles et un retour si inespéré, annoncent-ils un ouvrage humain, on n'indiquent-ils pas plutôt la main puissante qui peut seule apraiser les tempêtes et soutenir son ouvrage?

Mais outre cette grande preuve qui résulte de la révolution en général, il est encore d'autres considérations prises dans cette grande catastrophe, et qui fout ressortir la force et la divinité de la religion. 1°. Le principe fondamental de la révolution est opposé aux maximes du christianisme; elle proclame la souveraineté du peuple, que l'Ecriture et la tradition

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repoussent également. 2°. A-t-on vu, pendant nos malheurs, les vrais chrétiens, ceux qui croient et qui pratiquent, se mêler à ceux qui nous tyrannisoient et les seconder dans leurs fureurs? Ont-ils, tiguré dans un procés affreux, dans les tribunaux révolutionnaires, dans les comités, dans les clubs? Non, c'étoit l'impiété qui peuploit ces réunions horribles, et les ames religieuses et fidèles ont été victimes et non complices. 3. Deux fois Rome a été envahie, son Pontife envoyé en exil, l'Eglise romaine en proie à la persécution, ses prélats mis en prison où dispersés dans des terres lointaines; deux fois, on se crut assuré d'avoir anéanti ce siége antique, centre de l'unité, et deux fois ses foibles ennemis. ont vu leurs efforts se briser contre cette pierre, 4°. On n'avoit cessé, quarante ans avant la révolution, de décrier les prêtres, d'avilir leur caractère, de les représenter comme des ames lâches, intéressées, hypocrites. Or la conduite de la majorité du clergé a confondu ces imputations passionnées. Sur cent trente-cinq évêques, cent trente-un ont mieux aimé souffrir l'exil et la perte de leurs biens que de manquer à ce qu'ils croyoient de leur conscieuce et de leur honneur. Les prêtres emprisonnés, exilés, traduits devant les tribunaux, frappés de mort, ont tout supporté avec courage. On les a entendus prier pour leurs bourreaux, comme les premiers martyrs, et leur patience a désolé leurs farouches ennemis. Combien n'ont-ils pas présenté de traits de dévouement et de charité? Les uns alloient d'eux-mêmes se rendre en prison plutôt que de 'compromettre ceux qui leur offroient un asile. Les autres bravoient tous les dangers pour porter les secours spirituels aux fidèles. Ceux-ci confessoient la religion

avec intrépidité devant leurs juges; ceux-là périssant lentement dans les déserts de Sinamary, opposoient une résignation invincible à leurs privations et à leurs souffrances. Tels étoient ces hommes que l'on avoit voulu flétrir, et ce qui achève le tableau, c'est que leurs détracteurs, n'ayant pu les forcer à se déshonorer, les persécutoient par dépit et les égorgeoicut par vengeance. 5o. L'impiété feignoit de plaindre ces filles pieuses qui s'étoient vouées à la retraite et à là prière; elle se hâta de leur ouvrir leurs cloîtres et de les lancer dans le monde Eh bien! on les a vues, la terreur passée, reprendre avec joie ces chaînes que la force avoit rompues, suivre, autant qu'elles le pouvoient, l'esprit de leur vocation, se réunir de toutes parts pour servir Dieu, et malgré la séduction du monde et l'empire des lois qui contrarioient leurs vœux, les observer avec une fidélité plus méritoire encore qu'auparavant. 6o. Croit-on que saus la religion, Louis XVI, la Reine, Madame Elisabeth eussent montré tant de calme et de constance? Quoi de plus beau que le Testament du Roi, et n'est-il pas visible qu'il a été dicté par la piété? La Lettre de la Reine n'est-elle pas animée du même esprit? et le dévouement de Madame Elisabeth ne partoit-il pas de la même source? On sait que cette Princessè étoit livrée aux pratiques de la religion, et son confesseur, le célèbre Edgeworth, n'en parloit que comme d'un modèle de toutes les vertus. 7o. L'auteur regarde avec raison la guerre d'Espagne comme un événement qui tourne à l'honneur de la religion. Un peuple d'incrédules n'eût pas déployé ce courage et cette fidélité constante que tant de malheurs ne purent abattre, et l'on n'ignore pas que le

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clergé donna l'exemple de la résistance à l'oppression. Que l'on nous dise comment le peuple le plus catholique lutta seul contre la tyrannie, tandis que toute l'Europe avoit plié sous le joug. 8°. Enfin, dit M. l'abbé Clausel, le christianisme a conservé la foi de la Providence. Cette foi seule a pu consoler les malheureux que faisoit la révolution dans les temps les plus fâcheux. Seule elle a pu soutenir les fidèles dans les dernières années de l'usurpation, lorsque tout espoir paroissoit perdu. Ceux qui parloient alors de Providence et de la protection de Dicu sur l'Eglise, excitoient le sourire de la pitié, et cependant cux seuls voyoient bien.

Après avoir trouvé dans cette réunion de circonstances une preuve de fait en faveur du christianisme, et une preuve d'autant plus décisive qu'elle est à la portée de tous les esprits, et qu'elle est fondée sur des événemens dont nous avons tous été témoins, M. l'abbé Clausel entre dans sa seconde partie; car je crois qu'on peut l'appeler ainsi. Il considère la révolution, nou pas précisément d'une manière directe, mais d'après l'esprit et les opinions qu'elle a accréditées. « La révolution, dit-il, a donné à l'incrédulité des avantages qu'elle n'avoit eus dans aucun temps; le pouvoir a passé dans ses mains, elle a disposé des hommes et des choses; les lois, les trésors, la force publique, tout a été, pour ainsi dire, à sa discrétion. Quels moyens lui ont manqué pour ruiner, pour convaincre de faux le christianisme? Aussi les a-t-elle tous employés avec une application et une årdeur qui n'eurent jamais d'exemple. Ni l'or, ni les encouragemens n'out manqué aux principaux zélateurs des nouvelles doctrines, et si l'on avoit appris qu'il existât au bout

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