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Le 3 février, M. le garde des sceaux, M. le ministre des finances et quatre conseillers d'Etat ont été introduits. M. le garde des sceaux monte à la tribune, et présente un nouveau projet de loi sur la formation de la chambre en cour judiciaire, sur sa compétence, et sur l'instruction et le jugement des causes portées devant elle. Ce nouveau projet a été concerté entre les ministres du Roi et les membres des commissions des deux chambres chargées de discuter l'ancien. M. Pasquier a parlé trèssuccinctement des motifs de ce projet, et a annoncé qu'il alloit présenter à la chambre un autre projet, qui, bien qu'indépendant du précédent par son objet, s'y rattache néanmoins par des liens assez étroits pour qu'il ait paru convenable de le concevoir, de le rédiger et de le présenter en même temps. Ce projet regle tout ce qui a rap port à la responsabilité des ministres. Il avoit été fait dernièrement une proposition sur cette matière à la chambre des pairs. Elle a été sans doute, dit le ministre, un des élémens les plus utiles du travail présenté aujourd'hui à la chambre. Ce travail, dont nous ne pouvons donner aujourd'hui que la substance, porte que tous les ministres sont responsables, que chaque ministre est responsable de tous les actes. du gouvernement dans le département qui le concerne; que la chambre des députés a le droit d'accuser les ministres pour fait de trahison et de concussion, et de les traduire devant la chambre des pairs, qui seule a le droit de les juger, et qu'aucun ordre du Roi ne peut soustraire un ministre aux effets de saesponsabilité, ni suspendre les poursuites légales dirigées contre lui. Le reste du projet determine les cas de trahison et de concussion, et les formes à observer dans l'accusation et le jugement. Un projet de loi, lu par M. le ministre des finan-. ces, autorise des contrats d'échanges de biens entre le gouvernement et différens particuliers. Enfin, un quatrième projet modifie le tarif et la législation des douanes, Tous ces projets seront imprimés et discutés dans les bureaux.

LIVRES NOUVEAUX,

Nouvelle Législation de l'impôt et du crédit public; par M. G. D., ancien magistrat (1).

Essai sur les finances, ou Projet de budget pour 1817; par M. Goussard, conseiller maître des comptes (2).

Du Numéraire et des Moyens de remplacer celui qui sortira de France; par M. Martineau (3).

Il y a déjà assez long-temps que nous avons reçu plusieurs de ces écrits, et leurs auteurs seroient assez en droit de se plaindre de notre

(1) In-8°. Chez Delaunay et Emery.

(2) In-8°. Chez Delaunay.

(3) In-8°. Chez l'auteur et Delaunay,

lenteur à les annoncer. Nous leur donnerons pour excuse l'abondance des matériaux qui nous sont arrivés successivement, et aussi l'objet de ces imprimés qui s'éloignent un peu par leur nature du genre de notre journal. Peut-être cependant jugera-t-on que nous annonçons ces trois écrits dans le moment le plus favorable, puisque c'est celui où l'on va discuter la loi sur les finances.

M. G. D., qui paroît s'être accupé toute sa vie de finances, propose d'établir des banques départementales, qui seront formées par les principaux propriétaires. Il trouve dans cette opération une source de crédit bien plus sûre que dans des emprunts ruineux. Nous craindrions de rendre mal son plan, et surtout ses moyens d'exécution, și nous en entreprenions l'analyse; car nous devons avouer notre ignorance sur les questions de credit, de balance, de change et de tout ce qui regarde l'administration financière. Ce que nous avons mieux compris, c'est que M. G. D. fait administrer ses banques par des assemblées départementales, qu'il regarde comme des intermédiaires entre le gouvernement et les particuliers, et dont il relève singulièrement les avantages, en s'appuyant du suffrage de Malesherbes, de Turgot et de Cor dillac. Nous n'avons pas absolument la même confiance que lui dans l'autorité de ces écrivains; cependant nous croyons qu'il y a dans son livre des idées dont on pourroit profiter.

M. Goussard trace pour cette année un projet de budget qui a paru avant celui que les ministres ont porté à la chambre. Dans son pro、 jet, il y aura entre la recette et la dépense un déficit de 101 millions. Pour pourvoir à ce déficit, et en même temps pour assurer le paiement de toutes les sommes dues aux puissances étrangères, et procurer par-là l'évacuation du territoire françois, il propose une taxe de guerre triple du principal de la contribution foncière. C'est une mesure dont l'auteur ne se dissimule pas les inconvéniens; mais il croft que notre situation exige ce remède extrême, auquel nous ne pensons pourtant pas qu'on soit tenté d'avoir recours. Il y auroit sûrement encore moins de personnes qui approuveroient le moyen imaginé par M. Goussard pour subvenir aux besoins du clergé, c'est une prestation en nature qui seroit déduite sur la contribution foncière, et par conséquent qui n'augmenteroit pas les charges des contribuables. L'auteur s'efforce de' faire disparoître, par des raisons plausibles, la défaveur que présente un tel projet aux yeux de beaucoup de gens aisés à effrayer, et il se flatte de rassurer tous ceux qui ne s'arrêtent pas aux mots, et qui jugent par le fond des choses.

M. Martineau propose aussi des banques départementales qui remplaceront l'argent que nous perdons annuellement; qui rétabliront la confiance et le crédit, parce que tous seront intéressés au maintien de ces établissemens. Il faut voir dans sa brochure son plan et ses moyens qui nous paroissent développés avec clarté, quoique l'auteur commence par dire modestement qu'il n'est point financier. N'auroit-il pas eu tort de faire cette confidence à ses adversaires, qui s'en prévaudront pour rejeter son projet? M. Martineau est le même dont nous annonçà mes dernièrement un Projet de dotation pour le clergé, Nous avons rendu

justice à la pureté des intentions de l'auteur, et nous avons loué quel ques-unes de ses vues. Mais combien il est difficile de contenter tout le monde! Tandis que quelques personnes nous reprochoient d'avoir donné trop d'importance à sa brochure, M. Martineau se plaignoit des observations critiques que vous avons faites sur les moyens qu'il propose. Il nous a écrit en nous priant d'insérer sa lettre dans un de nos numéros, comme elle a trois à quatre pages in-folio, il nous est impossible, avec la meilleure volonté du monde, de lui faire ce plaisir. Nous ne ferons donc mention que de sa réponse à deux de nos observations. Nous avions trouvé qu'il faisoit éclore les millions avec une extrême facilité; il répond qu'il a pu se tromper sur quelques calculs, mais que ce n'est pas une raison pour ne rien entreprendre; qu'avant tout il faut commencer; que toutes les opérations de finances ou de commerce sont sujettes à des mécomptes, et que l'essentiel est qu'il y ait assez de chances de succès pour suppléer à ce qui pourroit manquer. Nous nous étions plaints que l'auteur cut stipulé les intérêts des intérêts; il répond que nous avons une conscience trop étroite; qu'il est tout simple que le trésor convertisse en capitaux les intérêts échus, et que cela se fait tous les jours. Il finit ainsi : On reconnoît que plusieurs de mes moyens sont admissibles ; il ne reste donc plus qu'à savoir si mon projet assurera avec le temps au clergé une dota tion spéciale et independante; ; s'il y a quelque autre moyen de lui en procurer plus sûrement et plus promptement, et si, quelle que soit la durée de la formation de la mienne, ce parti est ou non préférable à l'état précaire actuel, et à des traitemens qui dépendent bien autrement des événemens, tantôt des embarras du trésor, tantôt de la mauvaise volonté des paroissiens. M. Martineau verta du moins que nous ne cherchons point à dissimuler ce qu'il peut y avoir de plausible dans son projet. Quant aux autres articles de så lettre, ils sont pcu importans, et nous meneroient trop loin.

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TOUTES LETTRES QUI NE SEROIENT PAS AFFRANCHIES NE NOUS PARVIENNENT PAS.

(Samedi 8 février 1817.)

(No. 261.)

La Religion prouvée par la révolution, ou Exposition des préjugés décisifs qui résultent, en faveur du christianisme, de la révolution, de ses causes et de ses effets; par M. l'abbé Clausel de Montals (1).

SECOND ARTICLE.

De ces préjugés, que fournit, en faveur du christianisme, la révolution considérée, soit en elle-même, soit dans les opinions qu'elle a accréditées, l'auteur passe à l'examen de ceux que présentent les causes de cette même révolution. La principale et la plus certaine de ces causes, c'est la multitude et la hardiesse des écrits publiés depuis le milieu du dernier siècle contre la religion. Il sera permis sans doute d'en juger librement les auteurs, et nous avons bien autant de droit de relever leurs erreurs, qu'ils en avoient d'iusulter à tout ce que nous révérons. On ne peut plus se dissimuler aujourd'hui que leurs déclamations ont sapé les autels et les trônes, et soulevé les peuples; et en rapprochant ce que nous avons vu de ce qu'ils avoient écrit, on trouve une conformité frappante entre la leçon des maîtres et la conduite des adeptes. Or, quelle fut la conduite des auteurs du complot anti-religieux? et si on pèse les autorités, les vertus et les services, où en trouvera-t-on plus, ou parmi eux, ou parmi les héros et les défenseurs du

(1) Brochure in-8°.; prix, 2 fr. 50 cent. et 3 fr. 25 cent. franc de port. A Paris, chez Egron; et au bureau du Journal. Tome X. L'Ami de la Religion et du Roi. C c

christianisme? D'un côté, les premiers Pères de l'Eglise, ces hommes puissans en œuvres et en paroles; et après eux, et même dans des temps modernes, d'illustres écrivains, des savans recommandables, l'honneur de leurs siècles, les Bacon, les Descartes, les Newton, les Leibnitz, les Bossuct, les Fénélon, les Mallebranche, les Euler, les Gerdil, tous amis et défenseurs de la révélation chrétienne; de l'autre côté, qui nommera-t-on? Voltaire, Rousseau, Montesquieu, Buffon, d'Alembert, Diderot, Helvétius, La Mettrie, d'Argens, Condorcet, Raynal, Naigeon...... Je m'arrête à ce dernier nom, de peur de descendre plus bas encore, et d'arriver à la lie révo– lutionnaire. On conviendra bien que tous ces écrivains ne sont ni d'une égale force, ni d'une égale renommée. Les derniers tombent de plus en plus daus l'oubli. Les quatre premiers peuvent seuls prétendre à quelque supériorité; encore même pourroit-on retrancher Buffon, qui, s'il fut incrédule, n'éleva point l'étendard contre la religion, et n'entra dans aucun complot. Reste done Voltaire, Rousseau et Montesquieu. Or, balanceroient-ils à eux trois, tous les grands noms dont le christianisme s'honore? Admirons, si l'on veut, le style brillant du premier, ses saillies, sa verve, sa prodigieuse facilité; mais peut-il passer pour un génie créateur, et dans quel genre lui assigneroit-on le premier rang? Sans parler de chacun de ses ouvrages en particulier, et sans en faire une critique, qui nous montreroit de grands défauts à côté des beautés, ne peut-on pas dire qu'on y trouve plus d'éclat que de perfection, et que la vivacité même de l'imagination de l'auteur ne lui a pas permis de donner à ses productions ce fini qui leur assure

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