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ainsi avec des armes spirituelles, de celles qui avaient mis des bornes à son ambition. Il succomba bientôt après à une fièvre lente qui le consumait depuis long-temps.

Il avait chargé Michel-Ange de jeter en fonte sa statue. L'artiste ne sachant que lui mettre dans la main, lui fit demander s'il aimerait avoir un livre : « Plutôt une épée, répondit-il: » je sais mieux la manier. »

JEAN DE MÉ

DICIS, né à Florence, et élu en 1513.

en 1521.

LÉON X,

Mort à Rome

218 PAPE.

Élevé au pontificat à l'âge de trente-six ans, Léon apporta dans cette haute dignité l'amour du faste et celui des plaisirs. Quand on lui demanda comment il voulait être traité, il répondit: En grand prince, et il fut obéi. Son entrée dans Rome fut accompagnée d'une grande pompe, et son couronnement se fit avec une magnificence extraordinaire. Doué d'une physionomie aimable, d'un esprit insinuant, d'une humeur douce et enjouée, il était le plus bel ornement de sa cour. On lui trouvait aussi de la noblesse et de la générosité dans les sentimens, quoique dans plusieurs circonstances de

sa vie on s'aperçoive d'un fond d'artifices qu'il sut faire jouer au profit de son ambition. C'est ainsi que pendant la guerre de la France avec l'Espagne, il paraissait à l'extérieur garder une exacte neutralité, et n'en traversait pas moins sourdement les projets de Louis XII. Le zèle qu'il affectait alors pour la réunion des princes chrétiens, n'avait, en effet, d'autre but que l'agrandissement de sa maison."

Ne pouvant empêcher François Io de rentrer en possession du Milanais, Léon lui fit demander une entrevue à Bologne, bien persuadé que le caractère franc et loyal du roi de France céderait à ses souplesses artificieuses, et qu'il en obtiendrait de quoi racheter les pertes qu'il venait de faire. Il lui proposa l'abolition de la pragmatique sanction, dont l'objet principal était le rétablissement de la forme ancienne des élections des évêques, qui devaient être faites par le clergé et le peuple. Le pape ne pouvait souffrir qu'on eût ainsi borné sa juridiction en France, tandis qu'elle était absolue dans les autres États. François s'opposa d'abord à cette innovation; mais le chancelier Duprat, son ministre le plus accrédité, et qui souhaitait ardemment le chapeau de cardinal, donna- l'idée d'un concordat

qui serait substitué à la pragmatique sanction. Ce projet fut accueilli par le roi, surtout lorsque le rusé pontife lui eut fait sentir que les évêques nommés par lui, seraient plus reconnaissans et par conséquent plus fidèles. En vain le clergé de France, le parlement et l'université firent entendre de justes réclamations, elles ne furent point écoutées, et Léon put jouir tranquillement du fruit de ses insidieuses ma

nœuvres.

Mais la magnificence de ce pontife eut bientôt épuisé les finances de l'état romain. Il pensa aux moyens de les réparer, et pour cela il fit accroire à l'Espagne qu'il allait entreprendre une croisade contre les Turcs, et fit en même temps un appel à la générosité du riche clergé de ce royaume. Le célèbre cardinal Ximénès, qui était alors ministre, démêla cet artifice, et lui refusa nettement les secours qu'il demandait. Léon s'imagina alors qu'en intéressant la piété des peuples, il réussirait mieux dans son dessein. En conséquence, il donna ordre de continuer la basilique de Saint-Pierre, et pour mieux déterminer les peuples à l'assister de leurs offrandes, il accorda abondamment des indulgences plénières qui furent prêchées dans

tous les royaumes par des moines choisis pour ce sujet. Cette entreprise n'éprouva de contradictions que dans la Saxe, où un grand nombre de théologiens Augustins s'élevèrent contre cet abus infâme de vendre les trésors spirituels (1). Un d'eux se distingua, parmi tous ses

(1) La manière dont furent prêchées les indulgences, et l'usage qu'on fit de l'argent qu'on en retira, ont été exactement décrits par un historien jésuite. Je vais en citer un passage. « Comme il avait entrepris (Léon X) d'achever le superbe édifice de la basilique de SaintPierre que Jules II avait commencé, et que son épargne était épuisée par les dépenses excessives qu'il faisait en toutes sortes de magnificences, qui étaient beaucoup plus d'un puissant monarque de la terre que du vicaire de celui dont le royaume n'est pas de ce monde, il eut recours aux indulgences qu'il fit publier partout... On dit qu'il ne fit point de difficulté de donner à la prin· cesse sa sœur, ce qui reviendrait de ces indulgences publiées dans la Saxe et dans les pays circonvoisins, jusqu'à la mer Baltique; de plus, il y a des auteurs qui assurent que pour avoir promptement de l'argent comptant, on afferma tout ce qu'on en pouvait tirer, à ceux qui en donnaient le plus, et qui ensuite, non seulement pour se rembourser, mais aussi pour s'enrichir par un commerce si honteux, faisaient choisir des prédicateurs d'indulgences et des quêteurs, qu'ils croyaient les plus

confrères, par son zèle à décrier un trafic aussi honteux. Doué d'une éloquence fougueuse, mais persuasive, il se contenta d'abord de lancer des traits satiriques sur les prédicateurs d'une œuvre que la vraie religion désapprouvait; mais lorsqu'il entendit ses ennemis se déchaîner contre lui et le traiter de novateur, de turbulent, dès-lors il ne garda plus de mé-, nagemens. Plusieurs points de la doctrine catholique lui avaient paru défigurés par les interprétations qu'en faisait la cour de Rome, et

propres..... On exagérait tellement le prix et la valeur des indulgences, qu'on donnait occasion au peuple de croire qu'on était assuré de son salut et de délivrer les âmes du purgatoire, aussitôt qu'on aurait donné l'argent qu'on demandait.... Ce qui pensa plus d'une fois exciter de grands troubles, fut qu'on voyait les commis de ces partisans qui avaient acheté le profit des indulgences, faire tous les jours grande chère dans les cabarets, et employer en toutes sortes de débauches une partie de cet argent, que les pauvres disaient qui leur était cruellement ravi, puisqu'on faisait par cette espèce de trafic et de vente des indulgences, une grande diversion des aumônes qu'on leur eût faites. » (Hist. du Lutheran., liv. 1, Mainbourg.)

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