Page images
PDF
EPUB

il prétendit avoir le droit de les fixer d'après les seules lumières de sa raison.

Léon fit plusieurs tentatives pour qu'on se saisît de sa personne, ou du moins pour qu'on arrêtât l'incendie de ses prédications; mais toute précaution fut inutile. Les princes envieux de secouer le joug de Rome, ou se déclaraient ouvertement en faveur des nouveaux principes, ou laissaient tranquillement se débrouiller des questions dogmatiques dont ils ne comprenaient pas assez l'importance. Alors le pape somma Luther de comparaître à son tribunal, et d'y venir, comme un humble disciple du Christ, rendre compte de sa conduite. Celui-ci crut entrevoir un piége dans cette sommation, et se rappelant le malheureux sort qu'avait subi Savonarole, sous Alexandre VI, il en craignit un semblable. Il refusa donc de comparaître, et appela au futur concile des anathèmes de Léon. Ce qui le confirma dans sa résistance, ce fut de voir les peuples manifester leur affection pour sa doctrine, et ce qu'il y avait de plus éclairé dans le clergé d'Allemagne se ranger sous sa bannière.

[ocr errors]
[ocr errors]

Si la mémoire de Luther doit être flétrie par

mi les catholiques, comme celle d'un factieux,

à quelle exécration ne doit-on pas vouer celle du pontife dont l'amour insatiable des plaisirs a causé une si grande catastrophe? Il n'est pas rare cependant de voir des écrivains l'accabler de louanges, et citer le règne de Léon X comme une époque des plus mémorables. Ils ne comprennent donc pas que la masse du mal étant infiniment plus grande que celle du bien, ce pontife n'a aucun droit aux hommages de la postérité; car, s'il protégea les gens de lettres, s'il sut choisir Michel-Ange pour lui faire jeter un monument qui surpasse toutes les grandes compositions des anciens; en un mot, s'il l'emporta sur tous les princes de son temps par son amour pour la littérature, il fut aussi le corrupteur des peuples par ses mauvais exemples; et, à ce prix, il est indigne de l'estime des gens de bien.

Né à Trect, et élu en 1522.

ADRIEN VI,

Mort en 1523,

219 PAPE.

Ce pontife qui avait su mériter la confiance de Charles V, empereur d'Allemagne, fut élevé sur le saint-siége par les intrigues de ce prince.

Aussi Adrien lui abandonna-t-il le gouvernement de Rome, se contentant de réformer sa cour et le clergé romain. Il retrancha beaucoup d'offices et d'emplois inutiles, réprima les abus qui s'étaient glissés dans la collation des bénéfices, dans les réserves, dans la dispensation des indulgences. Autant son prédécesseur avait aimé les plaisirs de la table, autant celui-ci se montra sobre et frugal. Il désirait étendre la réformation sur tout le clergé; mais son projet rencontrait partout des obstacles. Dans l'instruction qu'il donna à son nonce à la diète de Nuremberg assemblée pour pacifier les différens excités par Luther, il s'exprime ainsi : « Dieu a >> permis cette persécution à cause des péchés. >> des hommes, et surtout des péchés des prêtres » et des prélats.... Nous savons qu'il s'est passé » sur le saint-siège plusieurs choses abomina»bles... Il n'est pas surprenant que la maladie » se soit répandue de la tête dans les membres.> Son zèle ne fut pas assez appuyé, et les abus restèrent les mêmes. Les Romains, aussi malins que corrompus, l'avaient tellement pris en aversion, à cause de sa volonté de réprimer les abus, qu'après sa mort ils écrivirent sur la porte de son médecin : Au libérateur de la patrie.

JULES DE MEDICIS, cousin de Léon X, élu en 1524.

CLÉMENT VII,

220° PAPE.

Mort à Ronze

en 1534.

Fait cardinal contre les lois de l'église qui en excluent les bâtards, Clément sut encore se frayer la route du souverain pontificat. L'intérêt fut le seul mobile de sa politique et la source des malheurs qui lui survinrent. Au lieu de garder une stricte neutralité dans les guerres qui déchiraient l'Allemagne, et de conserver, comme père de tous les fidèles, le caractère de pacificateur, il se ligua contre Charles-Quint, avec François 1e, les princes d'Italie et le roi d'Angleterre. Mais qui pourrait dire toutes les horreurs dont Rome fut le théâtre lorsque les impériaux s'en furent emparés? La basilique de Saint-Pierre fut saccagée, et l'on fouilla jusque dans les tombeaux des souverains pontifes. Toutes les autres églises furent pillées, les reliques foulées aux pieds, les vases saints profanés, toutes les vierges honteusement déshonorées. Ils s'acharnèrent principalement sur les évêques, les abbés, les magistrats, les banquiers, et généralement sur tous ceux qu'on

[ocr errors]

croyait posséder des richesses. On les déchirait coups de fouet, on les brûlait même pour les contraindre à de plus fortes rançons. Le pape. réfugié dans le château Saint-Ange en sortit après six mois, déguisé en marchand, et fut ensuite forcé d'accepter toutes les conditions du vainqueur. On conçoit qu'elles furent très-humiliantes.

Clément VII eut bientôt après un nouveau sujet de chagrin. Ayant refusé des lettres de divorce à Henri VIII, roi d'Angleterre, et se voyant obligé de condamner son commerce avec Anne de Boulen, il lança contre ce prince une bulle qui fut la cause de ce déplorable schisme qui persévère encore de nos jours. On a reproché à ce pontife, entre autres défauts, celui de l'avarice. Entendant parler un jour d'un Romain qui restait vingt jours sans boire et sans manger, il dit avec une vivacité comique : « Il faudrait de tels hommes pour une » armée. » S'il rejeta les sommes d'argent que le roi d'Angleterre avait fait luire à ses yeux pour en obtenir une décision favorable, ce fut moins le zèle de la religion qui le fit agir, que la crainte de déplaire à l'empereur CharlesQuint, par qui il se laissait dominer.

« PreviousContinue »