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vant le Tribunal de commerce de Limoges, pour voir déclarer exécutoire contre eux un jugement qu'il y avait obtenu le 24 pluviôse an 10, et par lequel il avait fait condamner leur père à lui payer quatre lettres de change, montant ensemble à 4,000 francs.

» Les héritiers Montazand avaient décliméle Tribunal de commerce, et demandé leur renvoi devant les juges ordinaires; mais leur déclinatoire avait été rejeté par jugement du 8 fructidor an 10.

» Sur l'appel, un arrêt de la cour de Limoges, du 16 nivôse an 11, avait infirmé ce jugement et accordé le renvoi, attendu, avait-il dit, que les Tribunaux de commerce ne peuvent con. naître de l'exécution de leurs sentences, et qu'aux juges ordinaires seuls appartient le pouvoir de prononcer sur cette exécution.

>>Pastoureau demandait la cassation de cet arrêt, et il fondait son recours sur l'art. 16 du tit. 12 de l'ordonnance de 1673, qu'il préten dait avoir été violé par la cour d'appel de Limoges ; mais par arrêt du 3 brumaire an 12, rendu au rapport de M. Brillat-Savarin, considérant qu'aux termes de l'art. 16 du tit. 12 de l'ordonnance de 1673, les Tribunaux de commerce ne sont compétens,vis-à-vis des veuves et héritiers,qu'autant que les marchands QU'ILS REPRÉSEntent, pourraIENT EUX-MÊMES Y ÉTRE APPELÉS ; que Montazand n'aurait pas pu être traduit de nouveau au Tribunal de commerce, puisqu'ayant déjà été précédemment condamné, tout était dit à son égard; que la demande à fin de déclaration exécutoire, n'est autre chose que le premier acte pour l'exécution du jugement dont la connaissance a toujours appartenu aux tribunaux ordinaires; la section des requêtes a rejeté la réclamation de Pastoureau, et l'a condamné à l'amende.

» De là, deux conséquences également simples la première, que, par cet arrêt, comme par celui du 25 prairial an 11, la cour a décidé que, dans l'art. 16 du tit. 12 de l'ordonnance de 1673, les mots contre lesquels on pourrait se pourvoir pardevant les juges et consuls, ne se rapportent pas aux veuves et héritiers, mais bien aux marchands, négocians et autres; la seconde, que du principe universelleinent reconnu, que les Tribunaux de commerce ne peuvent pas déclarer exécutoire contre l'héritier d'un marchand, le jugement qu'ils ont rendu contre celui-ci, il ne résulte nullement qu'ils soient incompétens pour statuer sur une demande formée contre l'héritier non marchand d'un nécogiant décédé avant qu'aucun jugement soit intervenu à sa charge.

» Ainsi, la jurisprudence de la cour est par faitement d'accord avec les principes que nous

avons eu l'honneur de vous exposer; et par ces considérations, nous estimons qu'il y a lieu de casser et annuler le jugement dont il s'agit ». Par arrêt du 20 frimaire an 13, au rapport de M. Boyer,

Vu l'art. 16 du tit. 12 de l'ordonnance de commerce de 1673;

» Et attendu qu'aux termes de cet article, les héritiers des marchands, encore qu'ils ne soient pas marchands eux-mêmes, peuvent être traduits devant les juges de commerce, pour raison des engagemens souscrits ou des obligations contractées par leurs auteurs, dans tous les cas où ceux-ci auraient élé justiciables des ces mêmes juges ;

» Que, si quelques commentateurs semblent avoir émis une opinion différente, en se fondant sur ces expressions de l'édit du mois de novembre 1563, connaitront lesdits juges et consuls de tous procès et différends qui seront ci-après mús entre marchands, pour fait de marchandises seulement, leurs veuves, marchandes publiques, il paraît que cette opinion a pour base l'absence du signe disjonctif entre les mots, leurs veuves et marchandes publiques, signe qui manque, en effet, dans quelques éditions modernes de l'édit, quoiqu'il se trouve dans les plus anciens et les plus authentiques exemplaires de cette loi; mais qu'au surplus les doutes même qui pourraient naître du contexte de l'édit de 1563, doivent s'évanouir à la lecture de l'art. 16 précité de l'ordonnance de 1673, dont la disposition est précise et ne présente aucune ambiguite;

» Attendu d'ailleurs qu'il est de principe, en cette matière, que la compétence des juges de commerce est spécialement déterminée par la nature commerciale de la contestation;

» Attendu, enfin, qu'il est dans l'intérêt même du commerce, que celui qui, ayant contracté avec un marchand, a dû compter sur tous les avantages qui peuvent résulter en sa faveur, soit de l'attribution à la juridiction commerciale des contestations auxquelles ce contrat peut donner lieu, soit de la forme de procéder particulière à cette juridiction, ne soit pas privé de ces mêmes avantages par le décès de celui avec qui il a contracté ;

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» Qu'ainsi, dans l'espèce, la matière de l'action étant telle que le demandeur en cassation aurait été fondé, du vivant de Cailletel, à le traduire devant les juges de commerce en paiement du reliquat de compte dont il s'agit, cette même action a pu être également portée devant les mêmes juges, contre la fille et héritière dudit Cailletel; et qu'en accueillant le déclinatoire proposé par le tuteur de cette dernière, le tribunal de Mayenne a contre

venu à l'art. 16 sus-énoncé de l'ordonnance de péremption n'a pas lieu dans les affaires por1673; tées devant ces tribunaux.

» Par ces motifs, la cour casse et annulle le jugement rendu par le tribunal d'arrondissement de Mayenne, le 18 messidor an 11.....; sur le fond, renvoie les parties devant le même tribunal d'arrondissement, jugeant en matière de commerce, pour leur être fait droit, ainsi qu'il appartiendra........ ».

VII. Les Tribunaux de commerce peu vent-il ordonner l'impression et l'affiche de leurs jugemens aux frais de la partie

condamnée ?

V.le plaidoyer et l'arrêt du 4 frimaire an 9, rapportés à l'article Monnaie décimale.

§. VIII. Un Tribunal de commerce peut-il statuer en dernier ressort sur la question de savoir s'il y a société entre deux personnes, à l'effet de juger si l'une d'elles est passible d'une deute au-dessous de 1,000 francs, contractée par l'autre ? Le peut-il, lorsque celui des deux associés prétendus qui n'était pas originairement en cause, intervient sur la demande en garantie formée contre lui par son prétendu associé, et prend contre le demandeur originaire des conclusions excédant la somme de 1,000 francs, mais étrangère à l'objet de la demande principale ?

V. l'article Dernier ressort, §. 17.

§. IX. Est-ce de l'autorité des Tribunaux de commerce, ou de celle des tribunaux ordinaires, que doivent être vendus les immeubles des négocians faillis?

V. l'article Vente, §. 8.

§. X. 10 La péremption a-t-elle lieu dans les affaires qui sont portées devant les Tribunaux de commerce?

20 Parmi les dispositions du Code de procédure civile concernant les tribunaux inférieurs en général, y en a-t-il d'autres applicables aux Tribunaux de commerce, que celles qui sont comprises dans le tit. 25 du liv. 2 de la première partie de ce Code P

On aperçoit, du premier coup-d'œil, que ces deux questions n'en font, à proprement parler, qu'une.

En effet, si la forme de procéder dans les Tribunaux de commerce, n'est réglée que par le tit. 25 du liv. 2 de la première partie du Code de procédure civile, il est évident que la

Et il est d'une égale évidence que l'opinion contraire doit prévaloir, si toutes les règles tracées aux tribunaux inférieurs par les titres généraux du Code de procédure civile, sont applicables aux Tribunaux de commerce, en tant qu'elles sympathisent avec l'organisation de ces tribunaux et qu'elles ne sont pas modifiées par les dispositions du tit. 25 du liv. 2 de la première partie qui leur sont spéciales.

Entre ces deux partis, je me suis prononcé pour le second dans des conclusions données à l'audience de la cour de cassation, le 28 mars 1815, sur la question de savoir si les affaires commerciales sont soumises, en matière de reddition de comptes, aux dispositions du tit. 4 du liv. 5 du Code de procédure civile; et l'arrêt dont elles ont été suivics, le même jour, a implicitement consacré la même opinion (1).

La question s'est représentée depuis, relativement à la péremption, devant la cour royale de Rouen qui l'a jugée dans le sens contraire.

Le sieur Lettré avait fait citer le sieur Doré devant le Tribunal de commerce de Rouen, par trois assignations sur lesquelles celui-ci s'était laissé condamner par défaut. Le dernier des trois jugemens était du 25 janvier 1813; et le sieur Lettre ne lui avait donné aucune suite, non plus qu'aux deux précédens.

En mai 1817, le sieur Doré forme, devant le Tribunal de commerce, une demande en péremption des trois instances, et la fonde sur l'art. 397 du Code de procédure civile.

Réponse du sieur Lettre que cet article est inapplicable à la procédure commerciale. Et le Tribunal de commerce le juge ainsi, en rejetant la demande en péremption.

Appel de la part du sieur Doré; et le 16 juillet de la même année, arrêt ainsi conçu :

« Vu l'art. 642 du Code de commerce, portant: La forme de procéder devant les Tribunaux de commerce, sera suivie telle qu'elle a été réglée par le tit. 25 du liv. 2 de la première partie du Code de procédure ;

» Attendu qu'il n'y a d'exception à cette régle qu'en ce qui concerne les jugemens par défaut auxquels l'art. 543 déclare les art. 156, 158 et 159 du Code de procédure applicables; qu'ainsi, et hors ce cas, il n'y a rien de commun entre la forme de procéder devant les Tribunaux de commerce, et celle de procéder devant les tribunaux ordinaires de première instance;

» Attendu que le tit. 25 du Code de procé(1) V. l'article Compte courant, §. 2.

dure, sur la forme à suivre dans les Tribunaux de commerce, ne contient aucune disposition qui autorise la demande en péremption dans ces juridictions, ou qui leur applique les règles établies au tit. 22 sur les péremptions, les quelles, par leur nature, prouvent qu'elles n'ont été instituées que pour les matières civiles ;

» La cour met l'appellation au néant..... ».

Il faut convenir que, si cet arrêt était bien d'accord avec la loi, l'on aurait une grande inconséquence à reprocher au législateur. Quel est le but de la péremption? C'est de mettre un terme aux procédures. Or, quelles sont les procédures à l'accélération desquelles le légis lateur montre le plus d'intérêt? Ce sont, sans contredit, celles qui se font devant les Tribunaux de commerce. Tout le tit. 25 du liv. 2 de

la première partie du Code dont il s'agit, en contient la preuve. Et cependant le législateur aurait exclu la péremption de ces procédures! Il l'en aurait exclue, tandis qu'elle avait incontestablement lieu dans les juridictions consulaires (1), qui n'étaient sous un autre nom que ce que les Tribunaux de commerce sont aujourd'hui ! Il n'est pas croyable que telle ait été son intention.

Et la section de législation du tribunat le pensait si peu, que, dans l'examen qu'elle a fait des dispositions du tit. 5 du liv. 2 de la première partie du Code de procédure, relatives à la police des audiences, elle a dit en toutes lettres, comme l'atteste M. Locre (2), d'après le procès-verbal même de cette section, « qu'elle ne croyait pas qu'on eût be» soin d'un article particulier qui rendît ces » dispositions communes aux Tribunaux de >> commerce, attendu que le titre de la pro»cédure devant ces tribunaux, ne contient » que des règles spéciales; et qu'ainsi, les rè» gles générales leur sont applicables ».

Effectivement, si les Tribunaux de com

(1) Voici ce que dit, à ce sujet, Monelet, dans son Traité des péremptions des instances, §. 15, page 37.

« Les péremptions ont aussi lieu aux présidiaux, aux bureaux des finances et aux juges-consuls,

>> Quant aux présidiaux, ès-chefs qui se jugent en dernier ressort, on a douté si un procès mis en état pardevant eux, se peut périmer, et il a été décidé qu'oui, parcequ'on peut leur faire des sommations en déni de justice: c'est l'avis de Brodeau sur M. Louet, lettre P, S. 18, no 2. Il faut appliquer ceci aux bureaux des finances et aux juges-consuls, ès-cas où ils peuvent juger sans appel. V. Brodeau sur la coutume du Maine, page 617 ».

(2) Esprit du Code de commerce, tome 9, pages 7 et 8.

merce n'avaient d'autres règles à consulter dans le Code de procédure, que celles qui sont consignées dans le tit. 25 du liv. 2 de la première partie, quelle serait leur boussole pour les recusations, pour les expertises, pour les désistemens, pour les redditions de comptes, pour le serment décisoire ou supplétif, et pour une foule d'autres objets sur lesquels de titre ne leur prescrit absolument rien ?

Que les Tribunaux de commerce ne soient pas soumis aux dispositions du Code de procédure, qui, sans être expressément écartées ou modifiées par celles du titre qui leur est propre, sont incompatibles avec leur organisation ou la marche qui leur est tracée par la loi, rien de plus évident.

Ainsi, il n'ya, dans les Tribunaux de commerce, ni avoués, ni officiers du ministère public, ni instruction par écrit ; et vous conclurez de là avec certitude que l'on ne doit ni ne peut leur appliquer les dispositions du Code de procédure qui sont relatives à l'instruction par écrit, au ministère public,

aux avoués

Mais si vous allez jusqu'à les affranchir des dispositions de ce Code que ne repoussent à leur égard ni l'organisation que la loi leur a donnée, ni la marche qu'elle leur a prescrite, ni les règles particulières qu'elle leur a imposées, vous les plongez dans le chaos, vous les livrez à un arbitraire aussi pénible pour eux qu'effrayant pour les parties. Vous faites même plus: vous violez formellement la loi; car le liv. 2 de la première partie du Code de procédure civile n'est pas intitulé: des tribunaux civils de première instance; il est intitulé : des tribunaux inférieurs; et cette rubrique est l'ouvrage du législateur luimême. Or, les Tribunaux de commerce sont certainement des tribunaux inférieurs,comme les tribunaux civils de première instance. Ils sont donc, comme ceux-ci, soumis à toutes les dispositions contenues dans ce livre, auxquelles il n'est pas spécialement dérogé, à leur égard, par celles que renferme le tit. 25; et c'est ce que je crois avoir démontré dans le Répertoire de jurisprudence, aux mots Opposition (tierce), §. 1, no 5.

Vainement, au surplus, la cour royale de Rouen a-t-elle, dans l'arrêt ci-dessus transcrit, argumenté, en faveur du système contraire, de l'art. 543 du Code de commerce.

L'argument serait sans doute concluant, s'il n'y avait rien dans le tit. 25 du liv. 2 de la première partie du Code de procédure, qui exceptât les jugemens des Tribunaux de commerce de la disposition des art. 156, 158 et 159 du même Code. Dans cette hypothèse,

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en effet, on serait fondé à dire qu'en déclarant, par l'art. 543 du Code de commerce, que néanmoins ( ou, en d'autres termes, nobstant la disposition de l'article précédent qui veut que « la procédure devant les Tribu»naux de commerce, soit suivie telle qu'elle » a été réglée par le tit. 25 du liv. 2 de la » première partie du Code de procédure »), les art. 156, 158 et 159 du même Code relatifs aux jugemens par défaut rendus par les tribunaux inférieurs, seront applicables aux jugemens par défaut rendus par les Tribunaux de commerce, le législateur a clairement fait entendre que, sans cette disposition exceptionnelle, les jugemens par défaut des Tribunaux de commerce ne seraient pas susceptibles de l'application des art. 156, 158 et 159 du Code de procédure; et que ce n'est qu'en vertu de dispositions spéciales aux Tribunaux de commerce, que peuvent leur être appliquées les règles générales de la procédure non rappelées dans le tit. 25 du liv. 2 de la première partie.

Mais reportons-nous à l'art. 436 qui est placé sous ce dernier titre, et nous verrons. s'évanouir l'argument sur lequel repose l'arrêt de la cour royale de Rouen. Cet article portait que l'opposition aux jugemens par défaut des Tribunaux de commerce, ne serait plus recevable après la huitaine du jour de la sig. nification; et c'était, comme l'on voit, une dérogation bien manifeste à la règle établie par les art. 156, 158 et 159 pour les jugemens par défaut des tribunaux ordinaires. Mais lorsqu'on s'occupa du Code de commerce, on crut devoir faire disparaître cette dérogation; et de là le néanmoins par lequel débute l'art. 543 de ce dernier Code. L'objet de cc néanmoins n'est donc pas d'établir, relativement aux jugemens par défaut, une exception à la prétendue limitation générale des Tribunaux de commerce aux dispositions écrites dans le tit. 25 du liv. 2 de la première partie du Code de procédure, mais uniquement d'effacer de ce dernier titre une disposition qui faisait, pour les jugemens par défaut des Tribunaux de commerce, une exception aux règles générales des jugemens par défaut rendus par les tribunaux ordinaires.

Aussi y a-t-il un arrêt de la cour royale d'Amiens, du 28 juin 1826, qui, en confirmant un jugement du Tribunal de commerce de la même ville, du 17 mars précédent, décide nettement que la péremption d'instance a lieu dans les juridictions commerciales comme dans les juridictions ordinaires,

« Attendu, en droit, qu'il est de principe que les règles générales sont applicables aux matières régies par des règles spéciales, toutes

les fois qu'il n'y a point de dérogation, soit expresse, soit tacite ;

» Attendu qu'aux termes de l'art. 397 du Code de procédure, la péremption doit frapper sur toute instance, par le seul fait de discontinuation de poursuites pendant trois ans;

» Qu'il n'existe, ni dans le tit. 25 du Code de procédure, ni dans le Code de commerce, aucune dérogation à cette règle générale;

» Que toutes les dispositions spéciales relatives aux Tribunaux de commerce, concourant à l'accélération de la procédure, l'esprit de la loi est loin de s'opposer à ce qu'on applique à ces matières la péremption dont le but est d'empêcher les procédures de se perpétuer indéfiniment;

» Que le silence de la loi et son esprit sont, au surplus, suffisamment expliqués par la combinaison des art. 648 du Code de commerce et 469 du Code de procédure qui appliquent la péremption, en effet, aux matières commerciales, sans que la raison indique aucun motif de différence à cet égard, entre la procédure de première instance et celle d'appel;

» Sans s'arrêter aux fins, moyens et conclusions de l'appelant, dont il est débouté, confirme.... (1) ».

§. XI. Un Tribunal de commerce français est-il compétent pour connaître, entre deux étrangers, soit d'un acte de commerce qu'ils ont fait dans son arrondissement, et qui y a reçu son exécution par la livraison de la marchandise, soit d'un acte de commerce qu'ils ont fait, n'importe où, mais avec obligation de payer dans ce même arrondissement ?

Cette question revient à celle de savoir si la règle de compétence qui, relativement aux Tribunaux de commerce, est écrite dans l'art. 420 du Code de procédure civile, copiée mot pour mot sur l'art. 17 du tit. 12 de l'ordonnance de 1673, est applicable aux étrangers qui contractent entre eux, comme il l'est aux Français qui contractent, soit les uns avec les autres, soit avec des étrangers.

La cour de cassation s'était prononcée pour la négative, par un arrêt contradictoire du 6 février 1822, que je me suis permis de critiquer dans le Répertoire de jurisprudence, au mot Étranger, §. 2; mais elle est revenue depuis à l'opinion contraire, par un arrêt du 26 novembre 1828, dont le bulletin civil (tome 28, page 259) nous retrace ainsi l'espèce

et le texte :

(1) Journal des audiences de la cour de cassation, année 1827, partie 2, page 180.

« Le sieur de Wolmar, anglais, d'origine, s'était fixé en France. Il y avait fait diverses opérations de commerce.

» En 1817, il conclut avec le gouvernement français plusieurs marchés pour fourniture de grains aux troupes.

» Les sieurs Harris, négocians anglais, lui vendirent, à Paris, des grains qu'il s'était obligé de livrer à Rouen.

» Une partie du prix fut payée ; mais pour le surplus, les sieurs Harris exercèrent des saisies-arrêts entre les mains de quelques débiteurs du sieur de Wolmar. Elles lui furent dénoncées avec assignation, devant le tribunal civil de la Seine, pour les voir déclarer valables.

» Le sieur de Wolmar déclina la juridiction des tribunaux français, attendu son extranéité

et celle des sieurs Harris.

» Le 6 janvier 1825, jugement par lequel le tribunal se déclare incompétent,

» Attendu que la cause portée devant lui ne s'agite qu'entre des étrangers; qu'il est tout-àfait indifférent, pour la validité de l'opposi tion, qu'elle ait été formée entre les mains de Français, puisque ces Français ne sont pas en cause et qu'il n'y a point de contestation avec eux; attendu, d'ailleurs que, si la convention, quelle qu'elle soit, a été passée en France, si la livraison des grains y a été faite et si le paiement devait y avoir lieu, ces faits, propres à des étrangers, ne peuvent forcer la compétence du juge français.

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Appel de ce jugement. Arrêt (du 15 avril 1825) par lequel la cour royal de Paris, adoptant les motifs des premiers juges, confirme leur décision.

» Pourvoi, de la part des sieurs Harris, pour violation de l'art. 420 du Code de procédure civile.

» Le défendeur a fait défaut, et la cour a cassé l'arrêt attaqué, par les motifs suivans:

» Ouï le rapport fait par M. le conseiller Henry-Larivière, les observations de Delagrange, avocat des demandeurs, ensemble les conclusions de M. Joubert, premier avocat général, et après qu'il en a été délibéré en la chambre du conseil;

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» Vu l'art. 420 du Code de procédure civile; Considérant, en fait, qu'il a été reconnu par les tribunaux, qu'il s'agissait, dans la cause, d'un acte de commerce, que la marchandise était livrable à Rouen ; qu'elle a été livrée dans cette ville; que le paiement devait être effectué à Paris, et qu'il y a été effectué, du moins en grande partie ;

» Considérant, en droit, que l'art. 420 du Code précité qui, en matière de commerce, permet d'assigner le débiteur dans le lieu où

la promesse la été faite, n'établit pas de dis tinction entre les étrangers et les Français, et qu'il n'était pas dans l'esprit du législateur d'en établir aucune, puisque, d'après l'ancienne jurisprudence et les principes reconnus lors de la discussion du Code civil, il est certain les tribunaux français sont tenus de prononcer sur les actes de commerce faits en France par des étrangers;

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que

Considérant, d'ailleurs, que l'art. 17 du Code civil ne renferme pas de disposition contraire;

» D'où il suit que la cour royale de Paris a violé l'art. 420 du Code de procédure civile, en jugeant, par le seul motif de l'extranéité des parties, que le tribunal civil de Paris était incompetent pour connaître de l'action intentée par les demandeurs contre le défendeur, en paiement du reste du prix des grains qu'ils lui avaient vendus et livrés ;

» Par ces motifs, la cour casse et annulle l'arrêt rendu par la cour royale de Paris, le 15

avril 1825.......

§. XII. Autres questions sur la juridiction et la procédure commerciale. V. les articles Commerce (acte de) et Domicile élu, §. 4, no 4.

TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE. §. I. Quel nombre d'hommes de loi un Tribunal de première instance peut-il s'adjoindre pour se compléter à l'effet de rendre un jugement ?

V. l'article Avocat, §. 2.

§. II. Dans quel cas lesTribunaux de première instance peuvent-ils juger en dernier ressort ?

V. les articles Dernier ressort, Fruits et Rente foncière, §. 16, no 2.

§. III. Les Tribunaux de première instance pouvaient-ils, avant le Code de procédure civile,connaître des demandes en nullité de sentences arbitrales? Dans quels cas le peuvent-ils aujourd'hui ? V. l'article Arbitre, §. 4.

§. IV. Quel était, avant le Code de procédure civile, l'effet d'un arrêt qui cassait un jugement de première instance, pour avoir été mal à propos rendu en dernier ressort? Les parties devaientelles, après un pareil arrêt, se pourvoir à la cour d'appel ? Ou devaient-elles retourner devant le Tribunal de première instance ?

V. l'article Rente foncière, §. 11.

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