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mais toute Voie de fait n'est pas violence. Ici, il n'y a point eu de violence de la part du cit. Gaudner; il n'a pas pu même y en avoir, puisqu'il n'a éprouvé aucune résistance de la part de son voisin, et qu'il n'a pas eu besoin, par conséquent, pour faire ce qu'il a fait, de le repousser, de le forcer, de l'intimider la par force. Mais certainement il y a eu Voie de fait, puisque c'est de son autorité privée qu'il a détourné des eaux dont un jugement confirmé par une possession subséquente de huit années, assurait le droit et l'usage au cit. Muller. Et nous devons ajouter que, s'il y a eu Voie de fait, il y a eu délit ou au moins faute punissable; car troubler ou déposséder, par Voie de fait, celui qui possède publiquement, depuis l'an et jour, c'est contrevenir à l'une des règles fondamentales de l'ordre public; et cette contravention prend un caractère bien plus grave encore, lorsqu'elle est commise au mépris de l'autorité de la chose jugée. Il serait donc bien étonnant que la loi eût oublié d'infliger une peine quelconque à un pareil délit ; mais il s'en faut bien que nous ayons ce reproche à lui faire. L'ordonnance de 1667, tit. 18, art. 6, allait jusqu'à obliger les juges civils devant lesquels on s'était pourvu au possessoire pour Voie de fait, de condamner l'auteur de la Voie de fait à l'amende. Aujourd'hui les juges civils n'ont plus ce pouvoir,, mais il existe encore tout entier dans les tribunaux de police; et l'art. 605 du Code des délits et des peines veut expressément que, pour Voies de fait, ils puissent condamner, non seulement à l'amende de la valeur de trois journées de travail, mais aussi à l'emprisonnement de trois jours.

» Du reste, prétendre, comme le fait le cit. Gaudner, que la loi ne parle, dans cet article, que des Voies de fait qui ont lieu dans les rixes, c'est vouloir restreindre arbitrairement une disposition qui, par sa nature et par la nécessité des choses, est générale. Nous disons par sa nature, parceque le mot Voie de fait s'applique, par lui-même, à toute espèce d'attentat sur les biens comme sur les les personnes ; nous ajoutons, par la nécessité des choses, parcequ'il faut bien supposer que le législateur n'a pas voulu laisser impunies des actions qui attaquent l'ordre social, en substituant la force individuelle à l'exercice de l'autorité publique.

» Il est bien clair, au surplus, que la loi n'a pas seulement en vue les Voies de fait qui ont lieu dans les rixes, puisqu'elle énonce séparément les rixes et les Voies de fait : Les auteurs de rixes attroupemens injurieux ou nocturnes, Voies de fait et violences légères,pourvu qu'ils n'aient blessé ni frappé personne. Comme

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» Ce n'est pas avec plus de fondement que le cit. Gaudner argumente de ces mots. pourvu qu'ils n'aient blessé ni frappé personne cette restriction n'a été mise dans la loi que pour réserver aux jugemens des tribunaux correctionnels, et par conséquent punir de peines plus fortes, les Voies de fait et les violences qui s'exerceraient sur les per- | sonnes, soit par des blessures, soit seulement par des coups; et il serait souverainement déraisonnable de conclure de là, que les Voies de fait exercées sur les choses, ne fussent pas soumises à la disposition de cet article. Eu deux mots, la loi veut que les Voies de fait soient punies de peines de simple police; elle ne distingue pas entre les Voies de fait exercées sur les choses, et les Voies de fait exercées sur les personnes ; seulemnet elle ajoute que, lorsqu'elles sont exercées sur les personnes, avec des violences suivies de blessures ou de coups, il y aura lieu à des peines plus graves: ainsi, ce cas excepté, les peines de simple police s'appliquent aussi bien aux Voies de fait réelles qu'aux Voies de fait personnelles; et c'est ainsi que vous l'avez jugé le 15 prairial dernier, au rapport du cit. Schwendt, et sur nos conclusions, en cassant un jugement du tribunal de police du canton de Chastel Censoir, département de l'Yonne.

» En résumant, vous voyez que le tribunal de police a prononcé compétemment, qu'il n'a commis dans l'instruction aucune irrégularite, qu'il a appliqué exactement la loi; nous estimons, en conséquence, qu'il y a lieu de rejeter la demande en cassation et de condamner le cit. Gaudner à l'amende ».

Conformément à ces conclusions, arrêt du 18 messidor an 8, au rapport de M. Vallée, par lequel,

« Considérant, sur le premier moyen, que la possession des eaux du ruisseau avait été jugée entre les parties, et qu'il ne pouvait être question, dans le cas particulier, que du fait par lequel Muller se plaignait d'avoir été privé de l'eau dont il devait jouir;

» Sur le second moyen, que c'était au réclamant de produire ses témoins à l'audience, s'il prétendait justifier que le cit. Muller avait joui de l'eau nécessaire pour le besoin de sa

aison, ainsi qu'il en doit jouir, ce qu'il n'a pas fait ;

» Sur le troisième moyen, que le tribunal de police n'ayant à juger qu'une Voie de fait, il a fait une juste application de la loi ;

» Le tribunal rejette le pourvoi du cit. Gaudner...... »,

J'aurais sûrement conclu, et il est permis de croire que la cour de cassation aurait jugé tout autrement, si j'avais mieux pesé les termes du no 8 de l'art. 605 du Code des délits et des peines du 3 brumaire an 4, et surtout si je m'étais souvenu que, dans la rédaction du projet de cet article, j'en avais emprunté le no 8, de l'art. 19 du tit. 1er de la loi du 22 juillet 1791.

En effet, d'une part, il est au moins douteux que l'art. 605 du Code du 3 brumaire an 4 ait en vue les Voies de fait purement réelles, lorsqu'il déclare passibles des peines de simple police, « les auteurs de rixes, attroupemens injurieux ou nocturnes, Voies » de fait et violences légères, pourvu qu'ils » n'aient ni blessé ni frappé personne...., au» quel cas ils ne peuvent être jugés que par » le tribunal correctionnel; car ces mots, pourvu qu'ils n'aient ni blessé ni frappé personne, ne peuvent certainement s'appliquer qu'aux Voies de fait et violences légères qui sont exercées sur les personnes ; et il est, dès-là, bien naturel d'en conclure que les Voies de fait et les violences exercées sur les personnes, sont les seules dont la loi s'occupe dans cet article. Mais s'il y a là-dessus quelque doute, quelle est l'interpretation qui doit prévaloir? C'est sans contredit la plus douce; c'est par conséquent celle qui exclud de la disposition de cet article les Voies de fait purement réelles.

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D'un autre côté, l'art. 19 du tit. 1er de la loi du 22 juillet 1791 était ainsi conçu : « En cas » de rixes ou disputes avec ameutement du peuple, en cas de Voies de fait ou violences légères DANS LES ASSEMBLÉES OU LIEUX PU» BLICS, en cas de bruit et attroupemens noc» turnes, ceux des trois premières classes >> mentionnées en l'art. 3, seront, dès la pre»mière fois, punis ainsi qu'il sera dit au titre » de la police correctionnelle. Les autres se>>ront condamnés à une amende du tiers de >> leur contribution mobilière, laquelle ne » sera pas au-dessous de douze livres, et » pourront l'être selon la gravite du cas, à >> une détention de trois jours dans les cam»pagnes, et de huit jours dans les villes ».

Assurément, dans cet article, les mots Voies de fait et violences légères, ne pouvaient s'entendre que des Voies de fait et vio

lence légères qui s'exerçaient sur les personnes. Comment donc pourraient-ils, dans le no 8 de l'art. 605 du Code du 3 brumaire an 4, s'entendre des Voies de fait et violences légères qui sont exercées sur les choses ? En les empruntant de la loi du 22 juillet 1791, le Code du 3 brumaire an 4 n'en a pas changé ni étendu le sens. Ils doivent donc être restreints dans dans l'un, comme ils l'étaient dans l'autre, aux Voies de fait ou violences exercées sur les personnes.

Au surplus, si la question était tant soit peu douteuse sous le Code du 3 brumaire an 4, publication de l'avis du conseil d'état du 4-8 elle a certainement cessé de l'être depuis la février 1812, rapporté dans le Répertoire de jurisprudence, aux mots Offense à la loi,

no 2.

réelles qui ont pour objet d'empêcher, d'inEn effet, il décide que les Voies de fait terrompre ou de faire cesser l'exécution d'un acte de l'autorité publique, non seulement la loi du 22 floréal an 2, mais ne peuvent plus ne sont plus passibles des peines portées par donner lieu qu'à une action purement civile. Il décide donc, à fortiori, qu'il en est de même des Voies de fait moins répréhensibles; car il serait souverainement absurde que je pusse, par exemple, vous actionner devant le tribunal de police, pour m'avoir troublé, par Voie de fait, dans la possession d'un imrendu contre vous, meuble dont aucun jugement préalablement priétaire ou possesseur annal, tandis que je ne m'aurait déclaré pron'aurais contre vous qu'une action civile, si, après qu'un jugement vous aurait condamné à me délaisser cet immeuble et aurait reçu son exécution, vous repreniez la possession de cet immeuble par Voie de fait.

arrêt de la cour de cassation, du 1er mai 1828, C'est d'ailleurs ce que juge formellement un qui est ainsi conçu :

chargé par M. le garde des sceaux ministre de « Le procureur - général expose qu'il est la justice de requérir l'annullation d'un jugement rendu par le tribunal de simple police du canton de Claye, arrondissement de Meaux, le 6 juillet 1826.

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» Le 26 juin 1826, le garde champêtre de la commune de Villeparisis constata sieur Messier s'était approprié une partie d'une pièce de terre appartenant à la commune, au lieu dit le chemin du petit marais.

» Traduit, à raison de ce fait, devant le tribunal de simple police, le sieur Messier soutint qu'il avait la possession du terrain faisant l'objet du procès-verbal, tant par lui que par ses vendeurs.

» Le tribunal, considérant cette exception

comme préjudicielle, sursit à statuer jusqu'à la décision de l'autorité compétente.

» Ce sursis ne satisfaisait pas la loi.

» C'est une déclaration d'incompétence absolue qu'elle demandait.

» Une usurpation de terre est une matière purement civile.

De là un arrêt de la cour de cassation, 5 février 1829, par lequel,

« Vu l'art. 456 du Code pénal, portar Quiconque aura, en tout ou partie, com des fossés, détruit des clôtures, de quelqu matériaux qu'elles soient faites...., sera par d'un emprisonnement qui ne pourra étre a

» Aucun article du Code pénal ne s'y appli-dessous d'un mois, ni excéder une année ‚é

que.

» Ce n'est même qu'en forçant le sens de l'art. 28, tit. 2, du Code rural de 1791, et pour le cas où on aurait en même temps coupé de petites parties de blé en vert ou d'autres productions de la terre, qu'on pourrait appliquer ledit article (1).

» Ce considéré, il plaise à la cour de casser et annuler, dans l'intérêt de la loi, le jugement dénoncé, et ordonner qu'à la diligence de l'exposant, l'arrêt à intervenir sera imprimé et transcrit sur les registres. du tribunal de simple police du canton de Claye.

» Fait au parquet, ce 22 avril 1828. Signé

Mourre.

» Oui le rapport de M. le baron Gary, conseiller, et les conclusions de M. le baron de Fréteau de Pény, avocat-général,

» La cour, statuant sur le réquisitoire du procureur-général du roi, et en adoptant les motifs, casse et annulle, dans l'intérêt de la loi, le jugement du tribunal de simple police du cantou de Claye, du 6 juillet 1826... (2) ».

Du reste, il est bien entendu, et je l'ai supposé clairement dans l'intitulé de ce paragraphe, qu'une voie de fait, même purement réelle, donne nécessairement lieu à l'action publique, toutes les fois qu'elle est accompagnée de circonstances qui la font dégénérer en crime, délit ou contravention.

(1) Voici les termes de cet article : « Si quelqu'un, » avant leur maturité, coupe ou détruit de petites » parties de blé en vert, ou d'autres productions de » la terre, sans intention manifeste de les voler, il » paiera en dédommagement au propriétaire une som»me égale à la valeur que l'objet aurait eu dans sa » maturité ; il sera condamné à une amende égale à la » somme du dédommagement, et il pourra l'ètre à la » détention de la police municipale D.

Serait-ce donc forcer le sens de cet article, que de l'appliquer à un individu qui, en s'emparant par voie de fait, d'une lisière de mon champ, couperait ou détruirait les grains en vert dont elle se trouverait emblavée? Non certainement; ce serait, au contraire, en faire la plus juste application; et, rien ne pourrait soustraire à la cassation le jugement en dernier ressort qui déciderait qu'une pareille voie de fait ne peut être poursuivie que par la voie civile. V. l'arrêt de la cour de cassation, du 5 février 1829, que je rapporte à la suite de celui-ci.

33,

(2) Bulletin criminel de la cour de cassation, tome , page 342.

d'une amende égale au quart des restitution et des dommages-intérêts; et qui, dans er ne pourra être au-dessous de 5

cun cas,

francs;

» Que, dans l'espèce, l'arrêt attaqué dé clare Armand, dit Nicolas, prévenu d'avoir. par effraction ou Voie de fait, repris la posses sion d'une maison dont il avait été judiciaire ment expulsé;

» Que, dans l'exposé des faits de la préven tion, ce même arrêt explique que l'effrac tion consistait dans le bris de la fermeture de la maison;

prévenu du délit de destruction de clôture ; » Que, dès-lors, Armand, dit Nicolas, étai

» Que, si le fait d'avoir repris, par violence, la possession de la maison dont il avait été judiciairement expulsé, n'était passible d'aucune peine, d'après l'avis du conseil d'état du 8 février 1812, le fait de destruction de clôture était punissable de la peine portée par l'art. 456 du Code pénal;

>> Que néanmoins l'arrêt attaqué a renvoyé Armand, dit Nicolas, de la prévention portée contre lui, sous prétexte que, d'après l'avis du conseil d'état précité, cette prévention n'entraînerait l'application d'aucune peine;

• En quoi cet arrêt a faussement appliqué l'avis du conseil d'état du 8 février 1812, et violé l'art. 456 du Code pénal;

»Par ces motifs, la cour casse et annulle l'arrêt de la cour royale de Grenoble, chambre des mises en accusation, du 24 décembre dernier, confirmant l'ordonnance de la chambre du conseil du tribunal de Gap, du 14 décem bre 1828 qui déclarait n'y avoir lieu à suivre contre Jean Claude Armand dit Nicolas (1) ».

§. II. Autres questions sur les voies de fait. V. les articles Complainte et Dénonciation de nouvel œuvre.

VOITURE (LETTRE DE ). §. I. 10 Les lettres de Voiture sont-elles sujettes au timbre ?

20 Peuvent-elles étre saisies à défaut de timbre, quand on ne les produit devant aucune autorité, devant aucun officier public?

Ces deux questions sont traitées dans le plaidoyer suivant, que j'ai prononcé à l'au

(1) Ibid., tome 34, page 73.

dience de la section civile de la cour de cassation, le 13 messidor an 9.

» La régie de l'enregistrement s'est pourvue devant le tribunal civil de l'arrondissement de Lyon, pour faire condamner les cit. Jacquier, père et fils, négocians, à l'amende portée par l'art. 9 de la loi du 9 vendémiaire an 6, à raison d'une lettre de Voiture sur papier libre, qui avait été trouvée, signée d'eux, entre les mains d'un voiturier. le fait; et ils ne pouvaient pas le nier, puisque Les cit. Jacquier, père et fils, n'ont pas nié la lettre de Voiture était représentée par la régie. Mais ils ont pretendu que l'action intentée contre eux, manquait de base, sous le prétexte que le procès-verbal da visiteur, qui constatait la saisie de la lettre de Voiture entre les mains de leur voiturier, n'avait pas été revêtu de la formalité de l'affirmation. Et le tribunal de Lyon a adopté cette défense, en renvoyant, par son jugement du 22 messidor an 8, les cit. Jacquier, père et fils, de la demande de la régie.

» La régie se pourvoit en cassation de ce jugement; et nous devons nous hâter de dire qu'elle y est incontestablement fondée, s'il n'y a ici à considérer que le motif qui a déterminé les juges ».

Après avoir détruit ce motif par les développemens rappelés à l'article Procès-verbal, §. 1, j'ai ajouté:

« Sur le point de savoir si les cit. Jacquier, père et fils, étaient ou n'étaient pas en contravention aux lois sur le timbre, il y a trois lois différentes à consulter: celle du 9 vendémiaire an 6, celle du 13 brumaire an 7 et celle du 6 prairial suivant.

» Les art. 56 et 60 de la première de ces lois ne permettent pas de douter que les lettres de Voiture ne soient indispensablement soumises au timbre, et que tout négociant qui en remet une à un voiturier, sur papier libre, ne soit sujet à l'amende.

» L'art. 56 porte: Les lettres de Voiture, les connaissemens, chartes-parties et polices d'assurance, les cartes à jouer, les journaux, gazettes, feuilles périodiques ou papiersnouvelles, les feuilles de papier de musique, toutes les affiches, autres que celles d'actes émanés d'autorité publique, quels que soient leur nature et leur objet, seront assujétis au timbre fixe ou de dimension.

» Et l'art. 60 ajoute: Ceux qui auront répandu des journaux ou papiers-nouvelles, et autres objets compris dans l'art. 56 ci-dessus, et apposé ou fait apposer des affiches, sans avoir fait timbrer leur papier, seront condam TOME XVI.

nés à une amende de cent francs pour chaque contravention; les objets soustraits aux droits, seront lacérés.

» Ces dispositions sont claires ; les commenter, serait les obscurcir: mais sont-elles encore en vigueur?

» L'art. 22 de la loi du 13 brumaire an 7 porte: Toutes lois et dispositions d'autres lois sur le timbre des actes civils et judiciaires, et des registres, sont et demeurent abrodécrétés le 9 vendémiaire an 6, ne font plus gées pour l'avenir. » Ainsi, d'après cette loi, les art. 56 et 60 loi par eux-mêmes pour les lettres de Voiture. Mais cette même loi ne les a-t-elle pas refon. dus dans ses propres dispositions ?

» Il est certain que les lettres de Voiture sont comprises dans l'art. 12, par lequel sont assujétis au droit du timbre, établi en raison de la dimension, tous les papiers à employer pour les actes et écritures, soit publics, soit privés; savoir: 1o les actes des notaires...., ceux des huissiers...., les actes et procèsverbaux des gardes...., les actes et jugemens de la justice de paix....., les actes entre particuliers, sous signature-privée..............., et généRALEMENT TOUS ACTES ET ÉCRITURES, EXTRAITS, COPIES ET EXPOSITIONS, SOIT PUBLICS, SOIT PRIVÉS, DEVANT OU POUVANT FAIRE TITRE, OU ÉTRE PRODUITS POUR OBLIGATION, DÉCHARGE, JUSTIFICATION, DEMANDE OU DÉFENSE......; 20 les registres des administrations centrales et municipales, tenus pour objets qui leur sont particuliers...., les répertoires de leurs secrétaires, ceux des notaires, huissiers, et autres officiers ministériels ; ceux des receveurs des droits et revenus des communes ; ceux des fermiers des postes et messageries ; ceux des compagnies, etc.

» Avant d'aller plus loin, convenons d'une vérité qui est d'une grande importance : c'est que la loi assujétit les lettres de Voiture au timbre, par cela seul qu'elle y assujétit tous actes et écritures, soit publics, soit privés, devant ou pouvant faire titre, ou être produits pour obligation, décharge, justification, demande ou défense.

» Mais, dit-on, ces actes ne sont soumis au timbre que pour le cas où ils sont produits en justice.

» S'il en était ainsi des actes mentionnés dans cet alinéa de l'article, il en serait donc de même des autres actes et des registres dont le même article présente la nomenclature ! Il faudrait donc dire la même chose des actes des notaires, de leurs protocoles, des registres de receveurs des droits et revenus communaux, de ceux des fermiers des postes et mes

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sageries, etc.! Car la loi, dans cet article, met sur la même ligne tous les actes, toutes les écritures dont elle contient l'énumération'; et si cette conséquence est fausse, si elle est absurde, le principe ne peut pas être vrai. » Mais avançons, la loi elle-même lèvera, tous les doutes; l'art. 16 porte : Sont exempts du droit et de la formalité du timbre (tels et tels actes publics )..... les doubles, autres que celui du comptable, de chaque compte de rentes ou gestion particulière et privée......, toutes quittances entre particuliers, pour créances en sommes non excédant 10 francs... Ainsi, voilà deux espèces d'actes sous seingprivé, que la loi affranchit du timbre.

» Passons maintenant à l'art. 30: Les écritures privées qui auraient été faites sur papier non timbré, sans contravention aux lois du timbre, quoique non comprises nommément dans les exceptions, ne pourront être produites en justice sans avoir été soumises au timbre extraordinaire ou au visa pour timbre, à peine d'une amende de 30 francs, outre le droit de timbre. Il résulte évidemment de cet article, qu'il est des écritures privées qui, quoique non comprises nommément dans les exceptions déterminées par l'art. 16, ne sont pas sujettes au timbre : quelles sont ces écritures privées? La loi ne le dit pas; mais à coup sûr, elles ne peuvent pas être du genre de celles qu'énumère et que caractérise l'art. 13; car la loi ne peut pas dire à la fois, qu'elles sont sujettes au timbre, et qu'elles en sont exemptes.

» Et ce qui prouve invinciblement que l'art. 12, en assujetissant au timbre les écritures privées dont il parle, n'a pas entendu les y assujétir seulement dans le cas où elles seraient produites en justice, c'est que l'art. 30 y assujetit, dans ce cas même, les écritures privées qui, par leur nature,en sont exemptes. Nous ne saurions trop appeler votre attention sur cette disposition de la loi, elle est véritablement décisive.

» Mais, au surplus, s'il pouvait rester làdessus le moindre doute, la troisième loi dont il nous reste à vous entretenir, celle du 6 prairial an 7, l'aurait bientôt dissipé.

» Cette loi n'a pas, comme son titre paraît du premier abord l'annoncer, pour objet principal le timbre des avis imprimés; elle roule aussi sur le timbre des feuilles de supplément des journaux, sur le timbre des connaissemens et chartes-parties, sur le timbre des polices d'assurance, sur le timbre des billets et obligations non négociables, sur le timbre des mandats à terme ou de place en place, enfin, sur le timbre des lettres de Voiture. Et d'ail

leurs, pour connaître l'objet d'une loi, ce n'est jamais à son titre qu'il faut s'attacher. Le titre d'une loi n'est point l'ouvrage du législateur : les lois se décrètent sans titre, et le titre que chacune d'elles porte dans le bulletin, n'y a été mis que par le directeur de l'im. primerie nationale, sous l'inspection du ministre de la justice. C'est un point de fait dont la certitude ne saurait être contestée.

» Au surplus, que porte la loi dont il s'agit ? » Art. 1. Les avis imprimés, quel qu'en soit l'objet, qui se crient et se distribuent dans les rues et lieux publics, ou que l'on fait circuler de toute autre manière, seront assujétis au droit de timbre, à l'exception des adresses contenant la simple indication de domicile ou le simple avis de changement.

» 2. Le droit établi par l'article précédent, sera de cinq centimes pour la feuille d'impression ordinaire au dessous de trente décimètres carrés, de trois centimes pour la demifeuille et au-dessous, de huit centimes pour la feuille de trente décimètres carrés et audessus, et de quatre centimes pour la demifeuille, sans qu'en aucun cas le droit puisse étre moindre de trois centimes pour chaque

annonce ou avis.

» 3. Les feuilles de supplément jointes aux journaux et papiers-nouvelles, paieront le droit de timbre comme les journaux mêmes, et selon le tarif porté en la loi du 9 vendémiaire an 6.

4. Les contraventions aux dispositions de la présente seront punies, indépendamment de la restitution des droits fraudés, d'une amende de 25 francs pour la première fois, de 50 francs pour la seconde, et de 100 francs pour chacune des autres récidives.

»5. Les lettres de Voiture, connaissemens, chartes parties et polices d'assurance, seront inscrits à l'avenir sur du papier du timbre d'un franc.

» 6. A compter de la publication de la présen te, les billets et obligations non négociables, et les mandats à terme ou de place en place, ne pourront être faits que sur papier du timbre proportionnel, comme il en est usé pour les billets à ordre, lettres de change et autres effets négociables, sous la même peine.

»7. La loi dug vendémiaire an 6 continuera d'être exécutée selon sa forme et teneur, dans toutes les dispositions auxquelles il n'est pas expressément dérogé par la présente.

» Ce dernier article vous paraîtra certainement décisif. Le préambule de la loi avait annoncé que l'intention du législateur était d'élever les revenus publics au niveau des besoins nés de la guerre ; et c'est pour mettre le

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