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PROCLAMATION.

Au Golfe-Juan, le 1er mars, 1815.

Napoléon, par la Grâce de Dieu et les Constitutions de l'Etat, Empereur des Français, &c. &c. &c.

Français,

AU PEUPLE FRANÇAIS.

La défection du Duc de Castiglione livra Lyon sans défense à nos ennemis; l'armée dont je lui avais confié le commandement, était, par le nombre de ses bataillons, la bravoure et le patriotisme des troupes qui la composaient, à même de battre le corps d'armée Autrichien qui lui était opposé, et d'arriver sur les derrières du flanc gauche de l'armée ennemie qui menaçait Paris.

Les victoires de Champ-Aubert, de Montmirail, de Château-Thierry, de Vauchamp, de Mormans, de Montereau, de Craone, de Reims, d'Arcy-sur-Aube et de Saint-Dizier, l'insurrection des braves paysans de la Lorraine, de la Champagne, de l'Alsace, de la Franche-Comté et de la Bourgogne, et la position que j'avais prise sur les derriéres de l'armée ennemie en la séparant de ses magasins, de ses parcs de réserve, de ses convois et de tous ses équipages, l'avaient placée dans une situation desespérée. Les Français ne furent jamais sur le point d'être plus puissans, et l'élite de l'armée ennemie était perdue sans ressource; elle eût trouvé son tombeau dans ces vastes contrées qu'elle avait si impitoyablement saccagées, lorsque la trahison du Duc de Raguse livra la capitale et désorganisa l'armée. La conduite inattendue de ces deux généraux qui trahirent à la fois leur patrie, leur prince et leur bienfaiteur, changea le destin de la guerre. La situation désastreuse de l'ennemi était telle, qu'à la fin de l'affaire qui eut lieu devant Paris, il était sans munitions, par la séparation de ses parcs de réserve.

Dans ces nouvelles et grandes circonstances, mon cœur fut déchiré: mais mon ame resta inébranlable. Je ne consultai que l'intérêt de la patrie: je m'exilai sur un rocher au milieu des mers: ma vie vous était, et devait encore vous être utile, je ne permis pas que le grand nombre de citoyens qui voulaient m'accompagner partageassent mon sort; je crus leur presence utile à la France, et je n'emmenai avec moi qu'une poignée de braves, nécessaires à ma garde.

Elevé au trône par votre choix, tout ce qui a été fait sans vous est illégitime.-Depuis vingt-cinq ans la France a de nouveaux intérêts, de nouvelles institutions, une nouvelle gloire, qui ne peuvent être garantis que par un gouvernement national et par une dynastie née dans ces nouvelles circonstances. Un prince qui regnerait sur vous, qui serait assis sur mon trône par la force des mêmes armées qui ont ravagé notre territoire, chercherait en vain à s'étayer des principes du droit féodal, il ne pourrait assurer l'honneur et les droits que d'un petit nombre d'individus ennemis du peuple, qui depuis vingt-cinq ans les a condamnés dans toutes nos assemblées nationales. Votre tranquillité intérieure et votre considération exterieure seraient perdues à jamais.

Français dans mon exil, j'ai entendu vos plaintes et vos voeux; vous réclamez ce gouvernement de votre choix qui seul est légitime. Vous accusiez mon long sommeil, vous me reprochiez de sacrifier à mon repos les grands intérêts de la patrie.

J'ai traversé les mers au milieu des perils de toute espèce; j'arrive parmi vous, reprendre mes droits, qui sont les vôtres. Tout ce que des individus ont fait, écrit ou dit depuis la prise de Paris, je l'ignorerai toujours; cela n'influera en rien sur le souvenir que je conserve des services importans qu'ils ont rendus, car il est des événemens d'une telle nature qu'ils sont au-dessus de l'organisation humaine.

Français il n'est aucune nation, quelque petite qu'elle soit, qui n'ait eu le droit, et ne se soit soustraite au déshonneur d'obéir à un Prince imposé par un ennemi momentanément victorieux. Lorsque Charles VII. rentra à Paris et renversa le trône éphémère de Henri VI. il reconnut tenir son trône de la vaillance de ses braves, et non d'un prince régent d'Angleterre.

C'est aussi à vous seuls, et aux braves de l'armée, que je fais et ferai toujours gloire de tout devoir."

(Signé)

Par l'Empéreur,

NAPOLEON.

Le Grand-Maréchal faisant fonctions de Major-Général de

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No. IV.

Proclamation of Louis on flying from Paris, given in the Moniteur of the 20th of March.

PROCLAMATION.

Paris, le 19 mars.

Louis, par la grâce de Dieu, Roi de France et de Navarre, à nos amés et féaux, les pairs de France et les deputés des departemens :

La Divine Providence, qui nous a rappelés au trône de nos pères, permet aujourd'hui que ce tròne soit ebranlé par la défection d'une partie de la force armée qui avait juré de le defendre; nous pourrions profiter des dispositions fidèles et patriotiques de l'immense majorité des habitans de Paris pour en disputer l'entrée aux rebelles; mais nous frémissons des malheurs de tous genres qu'un combât dans ses murs attirerait sur les habitans.

Nous nous retirons avec quelques braves que l'intrigue et la perfidie ne parviendront point à détacher de leurs devoirs, et puisque nous ne pouvons point défendre notre capitale, nous irons plus loin rassembler des forces et chercher sur un autre point du royaume, non pas des sujets plus aimans et plus fidèles que nos bons Parisiens, mais des Français plus avantageusement placés pour se déclarer pour la bonne

cause.

La crise actuelle s'appaisera; nous avons le doux pressentiment que les soldats égarés dont la défection livre nos sujets à tant de dangers, ne tarderont pas à reconnaître leurs torts, et trouveront dans notre indulgence et dans nos bontés la recompense de leur retour.

Nous reviendrons bientôt au milieu de ce bon peuple à qui nous ramenerons encore une fois la paix et le bonheur. A ces causes, nous avons déclaré et déclarons, ordonné et ordonnons ce qui suit:

Art. 1er. Aux termes de l'article 50 de la Charte constitutionnelle, et de l'article 4 du titre 2 de la loi du 14 août 1814, la session de la chambre des pairs, et celle de la chambre des députés des départemens pour 1814, sont déclarées clòses. Les pairs et les députés qui les composent se sépareront à l'instant.

2. Nous convoquons une nouvelle session de la chambre des pairs et la session de 1815 de la chambre des députés.

Les pairs et les députés des départemens se reuniront le plus tôt possible au lieu que nous indiquerons pour le siège provisoire de notre Gouvernement.

Toute assemblée de l'une ou de l'autre chambre qui aurait lieu ailleurs, sans notre autorisation, est dès-à-présent déclarée nulle et illicite.

3. Notre chancelier et nos ministres, chacun dans ce qui le concerne, sont chargés de l'execution de la présente proclamation qui sera portée aux deux chambres, publiée et affiche, tant à Paris que dans les départemens, et envoyée à tous les préfets, sous préfets, cours et tribunaux du royaume. Donné à Paris, le 19 mars de l'an de grâce 1815, et de notre règne le vingtième.

LOUIS.

(Signé)

Par le Roi,

Le Chancelier de France,

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Letter of the Minister of the Interior to the Prefects, announeing the Return of the Emperor.

MINISTERE DE L'INTERieur.

Paris, le 22 mars, 1815.

Le ministre de l'intérieur, comte de l'Empire, à M. le préfet du département de

Monsieur le préfet, vous avez été prévenu par une lettre du ministre-secretaire-d'état, du 21 de ce mois, que l'Empereur est rentré dans sa capitale, et que vous alliez recevoir des instructions du ministre de l'intérieur que S. M. allait

nommer.

L'Empereur a bien voulu m'honorer de son choix, et je me felicite des relations qu'il va me donner avec vous; je suis bien sûr qu'elles me seront très-agréables, parce que votre zèle, votre dévouement et vos efforts seront infatigables pour répondre dignement à la confiance de S. M.

L'Empereur, entouré de l'armée et du peuple, a traversé ses états au milieu des plus douces emotions: sa marche presentait par-tout l'aspect d'une pompe triomphale; et cette pompe dont l'enthousiasme seul a fait les frais, n'a pas couté une larme à un seul de ses sujets, qu'il appelait par-tout ses enfans, qui revoyaient en lui un père tout occupé de leur bonheur et de la gloire nationale. Quelle confiance, quelle securité un tel retour doit inspirer à vos administrés!

Des princes faibles, imposés par l'étranger, devenus étrangers eux-mêmes à nos lois, à nos mœurs, ont tenté, pendant un interrègne de onze mois, de nous ramener aux tems de la feodalité; ils déguisaient mal leurs vues sous le manteau de quelques idées libérales qui n'etaient que dans leur bouche: mais ce qu'ils n'ont pu déguiser, c'est cette poignée d'hommes attachés à leur cause, minorité effrayante qui les a laisse voir presque seuls fuyant une patrie qui, pour la seconde fois, les repousse de son sein.

"

Déjà les pièces officielles, imprimées au Moniteur, vous ont fait connaître les magnanimes intentions de notre légitime souverain: ne perdez pas un moment pour les répandre parmi vos administrés, en les faisant publier et afficher. Rappelez à leur poste les fonctionnaires municipaux qui en ont été éloignés à cause de leurs opinions politiques, de leur qualité d'acquéreurs de domaines nationaux, etc. Partout où le bien du service de l'Empereur et de la nation, qui ne sauraient aujourd'hui être séparés, vous paraîtra rendre cette mesure convenable ou nécessaire, vous ferez ce rappel, ou des nominations provisoires dont vous ne manquerez jamais de m'informer dans les vingt-quatre heures. Vous joindrez à votre lettre un tableau nominatif, accompagné de notes propres à fixer mon opinion, toutes les fois qu'il s'agira de présentations à faire à l'Empereur pour des nominations definitives. Lorsqu'il ne s'agira que de fonctionnaires qui avaient déja été nommés par S. M. et que vous rappellerez à leur poste, vous vous bornerez à m'en envoyer les noms, en vous référant aux notes qui seraient déjà dans mes bureaux.

Pénétrez-vous bien, Monsieur, des intentions que l'Empereur a exprimées pour le bonheur du peuple, et unissons nos efforts pour faire chérir un prince qui nous est rendu par la Providence, et qui garantit à nous et à nos enfans l'égalité des droits civils, la jouissance de toutes les propriétés, et celle non moins précieuse de l'honneur national.

Je compte sur votre zèle, pour rendre à votre correspondance son ancienne activité; je ne manquerai jamais d'y don, ner tous mes soins et toute mon attention.

Recevez, Monsieur, l'assurance de ma parfaite considération.

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