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famille tomberait entre mes mains, de lui donner toute facilité pour gagner les frontières.

Le témoin. Je le dis en homme d'honneur. C'est au baron Menu que vous avez parlé. Vous avez dit tant d'outrages de la famille royale, que les bonapartistes eux-mêmes en ont été indignés. Vous avez dit que c'était une famille pourie. Ne nous avez-vous pas dit aussi que plusieurs maréchaux voulaient la république? L'avez-vous dit, oui ou non? Avant votre arrivée le drapeau blanc flottait encore à Landau, quoique toutes les communes des environs eussent arboré le drapeau tricolore. Aussitôt après votre arrivée, on le prit à Landau, et le général Girard, quand il vous a vụ, a fait crier vive l'empereur!

Me. Berryer, Précisez l'époque.

Le témoin. C'est dans le courant d'avril. Vingtième témoin. M. de Balincourt, colonel du régiment de cuirassiers de Condé, a déposé:

« Je n'ai aucune connaissance des faits imputés au maréchal. J'ai été appelé le 20 novembre pour déposer d'un ouï-dire que j'ai répété.

» L'un de mes parens, capitaine au 75. régiment, m'a rapporté que le maréchal avait dit à Philippeville qu'en partant de Paris, il avait dans șa voiture une proclamation qu'il a lue à ses troupes, avant de passer à l'ennemi. »

M. Bellart a interpellé le témoin Grison de déclarer s'il ne connaissait pas quelqu'un qui pût déposer dans le même sens que lui.

« Oui, a répondu M. Grison, un capitaine qui est ici. >>

On l'a introduit. Il se nomme Casse, capitaine au 42o. régiment (vingt-unième témoin.)

Sa déposition n'étant qu'un simple renseignement, il n'a pas prêté serment.

Il a déposé qu'après l'arrivée de Bonaparte à Paris, le maréchal a dit, à Condé, mille horreurs du Roi; que sa cause était perdue, que c'était une famille pourie; que le Roi n'était ni Français ni légitime, que c'était à Bonaparte qu'il fallait obéir. M. le président. Avez-vous entendu ces paroles personnellement?

Le témoin. Oui, le 24 ou le 25 mars, dans la maison du gouverneur, avec tous les officiers du régiment. Vous avez dit davantage, vous avez dit Nous faisions notre cour au Roi, mais il n'avait pas nos cœurs; ils étaient toujours à l'empereur; le Roi nous aurait donné vingt fois la valeur des Tuileries, que jamais nous ne l'aurions eu dans nos cœurs.

Vingt-deuxième témoin, M. Cailsoué, bijoutier, au Palais-Royal.

Il a déposé que M. le maréchal Ney, arrivant

à Paris avec Bonaparte, lui envoya, par son valetde-chambre, toutes ses décorations à changer. C'est le 25 mars que M. le maréchal a eu ces objets, et c'est le 25 mars que je les ai inscrits sur mon livre que voici.

Le témoin a ouvert alors le registre sommaire de sa maison.

Il y a lu le compte suivant : le 25 mars, doit M. le maréchal Ney, médaillon de deux croix grand-cordon, n°. 75, 50 francs; une croix no.1, 12 francs; médaillon de la croix no. 6, 6 francs; deux portraits or émaillé, 30 francs chacun, 60 francs.

L'accusé. Vous voyez, Monseigneur, que, d'après ce compte, je ne pouvais pas avoir les décorations que les témoins prétendent m'avoir vues à Lons-le-Saulnier.

M. le président a demandé au témoin s'il n'avait point, à la même époque, arrangé pour l'accusé une plaque de la légion d'honneur.

Le témoin a répondu que non.

Il a répondu, sur les renseignemens qu'on lui demandait relativement à ces plaques, que le médaillon pouvait se changer à volonté, et que c'était dans ce médaillon qu'existait la seule différence qui distingue les plaques données par l'ancien gouvernement, de celles données par S. M.

M. Bellart a fait observer que le maréchal n'avait dû faire changer que les décorations royales; qu'à l'égard des décorations à l'aigle, 's'il en avait, il n'y avait rien à y faire; qu'ainsi la déposition avait bien peu d'importance.

Vingt-troisième témoin. M. Devaux, aide-decamp du maréchal. Il a dit :

« J'étais à Lons-le-Saulnier à l'époque du 14 mars; je n'ai remarqué aucun changement dans les décorations du maréchal, ni ce jour-là ni les jours suivans. Il portait une plaque et des rubans rouges. »

Vingt-quatrième témoin. M. Batardy, notaire à Paris. Il a déposé:

« Au mois de février, M. le maréchal était dans sa terre des Coudreaux. Le 3 mars, il m'a fait écrire pour lui envoyer des renseignemens sur sa

dotation et son traitement du mois de février. Il me chargea d'envoyer 3000 francs à M....... à Vienne, qui stipulait les intérêts des donataires devant le congrès. Je passai chez le beau-père de M. le maréchal, pour aviser aux moyens de lui faire passer aux Coudreaux le reste des fonds que j'avais touchés pour lui.

me que

› On dit cela était inutile, parce qu'on venait d'expédier un courrier au maréchal, et qu'il allait arriver à Paris.

>> Le maréchal y arriva. J'étais chez lui lorsqu'il descendit de voiture. Il embrassa d'abord le plus jeune de ses fils, qui était dans les bras de sa nourrice. Il s'adressa ensuite à moi, et me dit : Qu'y a-t-il de nouveau? Cette question, celle qu'il m'adressait toujours, s'entendait des affaires de M. le maréchal. Nous entrâmes dans ses apparte mens. J'étais fort surpris que le maréchal ne me parlât de rien. Je lui dis: Vous ne savez donc pas que l'empereur est débarqué à Cannes? Le maréchal en parut étonné. Il s'expliqua fort durement sur le compte de Bonaparte, et il ajouta : Il n'aurait pas osé débarquer, s'il n'y avait pas eu en France de la division et du mécontentement. Je puis assurer sur mon honneur, et je resterai convaincu toute ma vie, que non-seulement il ne savait pas que Bonaparte dût descendre à Cannes, mais même qu'il ne le désirait pas. »

Vingt-cinquième témoin, M. le duc de Mailhé, pair de France, premier gentilhomme de la chambre de S. A. R. Monsieur, maréchal des camps et armées du Roi, et chevalier de Saint-Louis.

Il a connu le maréchal Ney depuis le retour du Roi. Il a fait sa déposition à peu près dans les ter

mes suivans:

« Je suis parti le 9 mars de Lyon, le lendemain du départ de Monsieur qui se portait en avant;

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