Page images
PDF
EPUB

cette interdiction; je désire néanmoins connaître l'avis de MM. les pairs.

M. le comte Garnier. Le moyen que l'accusé pourrait tirer de cette convention est sans fondement; il ne peut être entendu, parce que c'est tout-à-fait un moyen préjudiciel. Les défenseurs ne sont plus recevables à rien présenter de semblable, depuis l'arrêt qui leur a ordonné de produire tous leurs moyens préjudiciels.

M. le comte Lanjuinais. Je demande la parole.

M. Desèze. Il y a arrêt, vous ne pouvez pas parler contre un arrêt.

M. le comte Lanjuinais. Oui, c'est cela même ; je veux parler contre cet arrêt.

« La convention faite sous Paris a été stipulée précisément pour les délits politiques, et il s'agit dans ce moment du sort d'un militaire illustre ! Cette convention. fournit une exception, non pas seulement préjudicielle, mais péremptoire, puisqu'elle détruit l'accusation. Les exceptions péremptoires peuvent s'opposer à toutes les périodes de la procédure, jusqu'à ce qu'il y ait condamnation. Cela est reconnu, écrit dans tous les livres, reçu dans tous les temps, admis dans tous les pays.

Quant à l'arrêt, il n'est dans sa nature qu'interlocutoire, que préparatoire : jamais les juges

ne sont liés

par de tels actes; c'est encore là un des premiers principes de procédure.

[ocr errors]

M. le président. Lorsqu'on opinera, ce moyen pourra être discuté; cependant il convient d'interdire la lecture de l'art. 12 de la convention.

M. le comte Molé. Cette convention est purement militaire ; si on pouvait en faire l'application au prévenu, l'ordonnance du Roi du 24 juillet n'aurait pas été rendue.

Le président a mis la question aux voix, et la chambre a décidé qu'on ne permettrait pas la lecture de l'article.

La séance ayant été reprise, M. Berryer a continué :

« Je crois avoir complètement justifié M. le maréchal Ney sur le fait de la préméditation dans le crime qui lui est imputé; je crois avoir démontré jusqu'à la dernière évidence que le maréchal n'avait rien prévu, rien médité. Dans toute sa conduite, dans toutes ses actions, il n'a eu d'autre objet en vue que la patrie. Quelle que soit la nature des gouvernemens qui se sont succédés en France, le maréchal Ney, dans tous ces orages politiques, n'a jamais cessé d'être guidé par l'amour de son pays. Ne l'a-t-on Ne l'a-t-on pas vu, dans le mois de mars de l'an dernier, à Fontainebleau, dictant, en faveur de la France, à Bonaparte, l'abdication de son

l'arrêt que la cour a rendu pour fermer la discussion sur la question préjudicielle, je déclare que les commissaires du roi s'opposent formellement à ce que les défenseurs de l'accusé s'écartent plus longtemps du point de fait qu'ils sont appelés à discuter. M. Bellart a lu un réquisitoire conforme, qu'il a déposé sur le bureau.

M. le président. En vertu du pouvoir discrétionnel qui m'est attribué, j'aurais pu m'opposer à ce que les défenseurs développassent les moyens étrangers qu'ils voudraient invoquer; cependant j'ai consulté la chambre sur ce point, et, à une grande majorité, elle s'est rangée de mon opinion. J'interdis aux défenseurs de raisonner d'un traité auquel le Roi n'a eu aucune participation; d'un traité qui est plus qu'étranger à S. M., puisque vingt-un jours plus tard, et en présence même des souverains alliés, elle a rendu son ordonnance du 24 juillet. Je défends donc aux défenseurs de s'écarter des moyens qui n'ont aucun rapport avec le fait de l'accusation.

Me. Dupin. Nous avons trop de respect pour les décisions de la cour, pour nous permettre aucune réflexion sur l'arrêt qu'elle vient de rendre: l'observation que je veux faire maintenant ne se rapporte qu'au dernier traité, celui du 20 novembre, qu'il est assurément permis d'invoquer. En vertu de ce traité, Sar-Louis ne fait plus partie de la France, et

nous avons vu que les individus nés dans un pays cédé à un autre, avaient besoin de lettres de naturalisation pour conserver les droits attachés à leur état primitif. M. le maréchal Ney est né à SarLouis; il n'est pas seulement sous la protection des lois françaises, il est sous la protection du droit général des gens. Il est toujours Français de cœur; mais enfin il est né dans un pays qui n'est plus soumis au roi de France; il est dans les termes de l'article 16 du traité du 30 mai (1); j'ai cru devoir faire cette observation dans l'intérêt de M. le maréchal..

[ocr errors]

......

« Le maréchal a vivement interrompu son défenseur, et a dit avec attendrissement :

[ocr errors]

>> Oui, je suis Français, je mourrai Français !

:

» Jusqu'ici ma défense a paru libre; je m'aper

(1) Cet article est ainsi conçu :

Les hautes parties contractantes, voulant mettre >> et faire mettre dans un entier oubli les divisions qui ont agité l'Europe, déclarent et promettent que dans les » pays restitués et cédés par le précédent traité, aucun » individu, de quelque classe et condition qu'il soit, ne

»

pourra être poursuivi, inquiété, ni troublé dans sa per»sonne et dans sa propriété, sous aucun prétexte, ou à cause de sa conduite ou opinion politique, ou de son

"

attachendent, soit à aucune des parties contractantes, naoit cades youvernemens qui ont cesse d' exister, ou pour » toute autre raison, si ce n'est pour les dettes contractées envers les individus, ou pour des actes postérieurs au présent traité. »

[ocr errors]

»çois qu'on l'entrave à l'instant. Je remercié mes généreux défenseurs de ce qu'ils ont fait et de » ce qu'ils sont prêts à faire; mais je les prie de » cesser plutôt de me défendre tout-à-fait, que de » me défendre imparfaitement. J'aime mieux » p'être pas du tout défendu, que dé n'avoir qu'un » simulacre de défense.

»Je suis accusé contre la foi des traités, et on » ne veut pas que je les invoque!

Je fais comme Moreau; j'en appelle à l'Eu» rope et à la postérité! »

[ocr errors]

M. Bellart. « Il est temps de mettre un terme à ce système de longanimité qu'on a constamment adopté. On a fait valoir des maximes bien peu françaises. On a poussé jusqu'à la licence la liberté de la défense. Doit-il être permis à un accusé d'intercaler dans sa défense des matières qui y sont absolument étrangères ? Les défenseurs ont eu plus de temps même qu'ils n'en avaient demandé. A quoi bon des dérogations du fait capital auxquelles ils se livrent ? Ce n'est porter aucune atteînté à la défense, que de vouloir la faire circonscrire dans les faits de l'acte d'accusation. Les commissaires du Roi, quelles que soient les résolutions de M. le maréchal, persistent dans leur réquisitoire.»

[ocr errors]

9.1

Le président. Défenseurs, continuez la défense n vous renfermant dans les faits, int tab,

« PreviousContinue »