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Nous attacherions beaucoup d'importance, a répliqué M.. Berryer, à ce qu'ils fussent entendus oralement; la plupart donneraient des détails précieux sur la journée du 14 mars. Dans une déposition écrite, tous ces détails seront perdus.

M. le président ayant invité l'avocat à énoncer les noms des témoins et les faits sur lesquels il voudrait les faire entendre;

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Mr. Berryer a citéles noms de M. le baron de Préchamp, le marquis de Saurans, M. de SaintAmour, qui étaient présens à l'armée le 14; de M. le baron de Montgenet, de MM. Guyet Bessières, qui ont vu le maréchal le 13; de M. Heudelet, avec qui il a eu une correspondance importante sur la situation de Dijon, l'esprit public, celui des troupes, de la gendarmerie. Ces détails ne sont pas dans sa déposition écrite.

M. le président a dit alors : « Précisez le délai que vous demandez. >>

M. Berryer a déclaré qu'il s'en rapportait entièrement à la prudence de la cour; il a réclamé l'intervention du ministère public pour la signification des ajournemens, afin d'abréger encore les délais.

M. Bellart, s'est opposé à ce que le délai fût accordé : il a invoqué les dispositions du code d'instruction criminelle. «Quand les débats sont ouverts, a-t-il dit, il n'est plus possible de les interrompre.

TOME II.

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Telle est la règle prescrité pour les cours d'assises. Si dans le cours des débats on juge nécessaire d'entendre des témoins sur un fait douteux, le président a le droit de suspendre les débats pour les faire entendre. Le ministère public le requerra même, s'il y a vraiment nécessité de les entendre. Il n'a d'autre désir que que de voir luire la vérité.

» Mais après toutes les concessions faites ar maréchal, après les preuves acquises par la notoriété publique, quand on ne parle que, de faits antérieurs au fait principal, il ne peut s'empêcher de persister à croire que ce n'est pas dans l'intérêt qué de la cause, mais dans le seul but de prolonger de quelques jours l'incertitude actuelle du sort du maréchal, qu'on demande des délais; il conclut ; en conséquence, à ce à ce que les débats soient incon tinent ouverts, sauf au président à prendre telles mesures qu'il croira convenables à l'égard des témoins dont l'audition lui paraîtra nécessaire.' >>

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Me. Dupin a répliqué: « On nous oppose que les débats étant commencés, il faut les continuer; mais les débats ne sont pas ouverts, puisque le réquisitoire du procureur du Roi tend à ce qu'ils commencent incontinent. On nous oppose encore les règlemens des cours d'assises : l'argumentation devient difficile; tantôt nous procédons comme des conseils de guerre, tantôt comme des cours d'as

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sises, tantôt comme des cours spéciales: quel est en définitif celui de ces trois modes que nous devons suivre? J'accepte celui des cours d'assises puisque c'est le dernier dont on a parlé. Eh bien! devant les cours d'assises, le jour de la comparution est fixé long-temps d'avance; ici les pièces ne nous ont été communiquées que le 18; c'est le 18 seu lement que nous avons reçu l'acte d'accusation : pouvions-pous, faire assigner des témoins avant.de savoir si nous étions accusés, de quoi nous étions accusés ?

» Je réduis la cause à ce point: A-t-il été possible, en passant toutes les nuits, en consacrant notre existence toute entière à la cause du maréchal, de nous préparer à le défendre aujourd'hui ? Avons-nous pu, avec la rapidité de l'éclair, envoyer nos citations aux témoins domiciliés sur tous les points du royaume? On pourra y suppléer, diton, avec l'instruction écrite. Eh quòi! tous les té moins à charge seront entendus verbalement, et nous n'aurons à leur opposer que de simples renseignemens! C'est du choc des dépositions que naîtra la lumière. Si nous n'avons qu'un papier mort

opposer à des discours animés, la partie n'est pas égale. Il ne suffit pas que le maréchal soit déchargé des faits antérieurs au 14 mars; mais il faut encore que la chambre sache dans quelle situation d'esprit

il se trouvait quand le fait qu'on lui reproche s'est passé.

» En droit, il n'y a eu nul délai préfix; en fait, nous ne sommes légalement accusés que du 18. Il est évident qu'en quatre jours de temps nous n'avons pu assigner les témoins. Si nous demandons qu'ils soient cités à la requête du ministère public, c'est afin qu'il n'y ait pas de temps perdu. Nous ne demandons que le délai rigoureusement nécessaire, et nous nous en rapportons pleinement à votre justice.

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M. Bellart a dit : « Je ne reprends la parole que pour redresser un fait. A entendre le maréchal, il semblerait qu'il n'est prévenu que depuis quatre jours de l'accusation dirigée contre lui. Mais n'a-t-il pas déjà été traduit en jugement? Si le maréchal avait entendu, le 18, pour la première fois, parler des charges qui s'élèvent contre lui, il serait parfaitement fondé; mais après avoir essuyé une première instruction, cette prétention n'est pas soutenable. Les témoins sont inutiles à entendre; le ministère public ne peut interposer son autorité pour les faire comparaître. Je persiste dans mes conclusions. >>

Mr. Berryerarépondu : « Je ne me permets qu'une remarque, c'est devant les conseils de guerre il n'y a jamais d'acte d'accusation. L'attaque n'y est

que

jamais connue. Nous ne pouvions donc pas être avertis des chefs multipliés qu'on nous impute, et auxquels se rattachent quinze textes du code pénal au code militaire. Le conseil de guerre, malgré son inflexible sévérité, a mis de niveau les moyens d'attaque et les moyens de défense; la cour des pairs ne sera pas moins équitable. »

La chambre s'est retirée, pour délibérer, à cinq heures et demie ; à six heures et demie, elle est ren; trée en séance, et M. le chancelier a prononcé l'arrêt suivant :

« La chambre des pairs, faisant droit sur la de >> mande de l'accusé, tendante à l'ajournement des » débats à tel jour qu'il lui plaira fixer, après avoir > entendu les conclusions des commissaires du Roi, s'ajourne à lundi 4 décembre, dix heures du ma» tin, , pour tout délai, pour l'examen, l'ouverture » des débats et le jugement, toutes les assignations. >> aux témoins tenant. »

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Après ce jugement, la seconde audience a été lovée.

Les débats ont recommencé le 4 décembre.

M. le chancelier, président, a de nouveau demandé au maréchal ses noms, prénoms, âge, lieu de naissance, domicile, etc.; il a répondu comme précédemment.

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