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anglaises ont été amenées par des causes semblables à résider et à dépenser leurs revenus hors de leur pays; elles échappent ainsi aux impôts qui, en Angleterre, pèsent sur les consommations, et l'État ne peut plus obtenir la même somme de ressources qu'en faisant retomber sur la population les charges dont les émigrants se sont affranchis. De toutes les causes qui peuvent déterminer les émigrations de ce genre, l'insécurité est la plus puissante. Les troubles politiques qui ont agité les populations du continent européen, dans ces derniers temps, avaient déterminé un grand nombre de familles riches à se réfugier en Angleterre, bien que la vie y soit plus coûteuse que partout ailleurs.

A. CLÉMENT.

ACCAPAREMENT. L'accaparement consiste à s'emparer, par des acquisitions considérables, de la totalité ou de la majeure partie des marchandises et denrées, ou des moyens de production, qui se trouvent dans un lieu ou dans une circonscription plus ou moins étendue, afin d'être le seul détenteur de ces objets sur le marché, et de pou- | voir, à la faveur de la suppression ou de la limitation de la concurrence, exiger et obtenir des prix | plus élevés.

Jusqu'ici, les Économistes se sont uniquement préoccupés de l'accaparement qui peut s'exercer sur les produits, et ils ont entièrement négligé celui qui s'exerce sur les moyens de production, bien qu'il ait une influence beaucoup plus importante que le premier sur les phénomènes économiques, et en particulier sur la distribution des richesses. C'est principalement sous ce dernier point de vue que nous nous proposons d'examiner la question dans cet article; mais nous consacrerons d'abord quelques lignes à l'accaparement praticable sur les denrées ou marchandises.

En restreignant leurs observations à ce dernier objet, Adam Smith et la plupart de ses successeurs se sont généralement bornés à justifier le commerce de spéculation sur les grains, et à en faire ressortir l'utilité. Ce commerce rend, en effet, d'incontestables services, et le préjugé qui a longtemps flétri du nom d'accapareurs les spéculateurs qui, dans les moments d'abondance, se chargent du soin d'accumuler et de conserver les denrées dont il s'agit, pour les rendre à la circulation lorsqu'ils peuvent le faire avec avantage, c'est-à-dire au moment du besoin; ce préjugé, disons-nous, a nui considérablement à l'approvisionnement régulier des marchés, et il a réduit à peu de chose l'atténuation que les opérations auxquelles il s'attachait auraient pu apporter aux disettes, si elles eussent été mieux appréciées dans leurs effets, et par conséquent plus approuvées, plus libres et plus puissantes.

Cette hostilité de l'opinion contre le commerce des grains avait probablement été corroborée, en France, par le souvenir d'une association odieuse, formée au dix-huitième siècle, et qui a reçu de l'indignation publique la dénomination de pacte de famine. D'aussi infames spéculations sont heureusement devenues impraticables de nos jours, mais elles ont dû contribuer à faire réprouver indistinctement toutes celles qui s'appliquaient au méme objet. Les Économistes, trouvant le préjugé dans toute sa force, ont dù s'attacher à le combat

tre, et grâce à leurs travaux il n'existe plus guère aujourd'hui que dans les esprits tout à fait incultes. On peut donc désormais, sans crainte de le faire renaître, prémunir l'opinion contre les spéculations spoliatrices qui peuvent s'accomplir et s'accomplissent, en effet, par voie d'accaparement.

En ce qui concerne les denrées ou marchandises, l'accaparement n'est facilement praticable que sur des articles dont la quantité est restreinte, et ne peut être accrue rapidement par de nouveaux arrivages. Dans les ports de mer, par exemple, certains produits exotiques d'une provenance éloignée, et dont l'approvisionnement se fait par des opérations n'ayant pas une suite constante et régulière, peuvent se trouver parfois en quantité insuffisante relativement à la demande que l'on en fait, et l'accaparement de ces marchandises, par un seul ou par un petit nombre de détenteurs, peut alors permettre d'en élever plus ou moins le prix. Mais ce cas n'arrive guère que pour des produits d'une consommation peu étendue; ceux dont l'usage est général donnent lieu à des envois si multipliés et si fréquents, à des approvisionnements si considérables et si divisés, que l'accaparement n'en est presque jamais praticable, à moins que le commerce ne vienne à étre empêché ou entravé.

Plus les échanges sont libres, et les moyens de transport perfectionnés, et plus il devient difficile d'accaparer, même aux époques de rareté, les denrées ou marchandises d'un usage très répandu. Parmi ces denrées, les céréales ont été le sujet le plus ordinaire des craintes d'accaparement, ct assurément ce sont celles qui se prétent le moins à une semblable opération. Pour que dans un pays comme la France, par exemple, des associations d'accapareurs pussent retirer de la circulation une quantité de grains suffisante pour déterminer une hausse importante dans les prix, il faudrait qu'elles eussent à leur disposition d'immenses capitaux, et qu'elles établissent, sur tous les points du pays, de vastes magasins, afin d'y concentrer une grande partie des approvisionnements existants. Or, cette opération ne pourrait s'accomplir qu'en faisant hausser rapidement les prix chez tous les détenteurs, et en faisant ainsi échoir à ces derniers le bénéfice qu'auraient voulu s'attribuer les accapareurs. Ceux-ci auraient, d'ailleurs, à soutenir la concurrence des détenteurs qui n'auraient pas voulu leur livrer, et celle des arrivages quotidiens de l'extérieur. Enfin, il faudrait, pour que l'opération fût tentée, oublier les dangers de toute espèce qu'elle susciterait contre ceux qui auraient à y prendre part. Il serait probablement très difficile de trouver, en France, un seul individu, jouissant de sa raison, qui fût disposé à livrer des capitaux pour des spéculations soumises à de telles éventualités.

Les craintes sur l'accaparement des grains aux époques de rareté sont tout à fait chimériques, car c'est précisément en temps de rareté que les spéculations de cette nature offriraient le plus de dangers et le moins de chances de bénéfice. En temps ordinaire, il est radicalement impossible que de telles opérations puissent s'accomplir, sur une échelle assez vaste pour influer dommageablement sur les prix, sans des moyens d'action analogues

à ceux qui furent employés par l'association du pacte de famine, c'est-à-dire sans la connivence et le concours de l'autorité publique, conditions qui ne sont plus réalisables aujourd'hui.

L'accaparement sur les produits ne peut donc avoir lieu, dans quelques cas exceptionnels, que pour des articles spéciaux et d'un usage restreint. Sous un régime de liberté, ses effets ne sauraient être durables, ni bien étendus, et il est généralement peu à redouter. Mais il n'en est pas ainsi de celui qui peut s'opérer sur les moyens de production, et dont nous allons nous occuper.

Il n'est pas de branche de production où la concurrence soit entièrement illimitée. Indépendamment des restrictions légales, cette concurrence est bornée, dans l'Industrie agricole, par l'étendue des terres cultivables possédées par chaque nation et par le degré de concentration de la propriété territoriale. Dans les industries manufacturières et commerciales, elle est limitée par la quantité des capitaux et par le degré de leur agglomération entre les mains d'un nombre plus ou moins restreint de détenteurs. Mais il est certaines exploitations dans lesquelles ses limites naturelles sont plus restreintes que dans toutes les autres: telles sont, en général, les exploitations de substances minérales.

préoccupée du soin de maintenir dans ces exploitations une concurrence suffisante, et la preuve de cette préoccupation se retrouve dans la discussion des principaux actes législatifs qui régissent la matière, notamment de la loi du 21 avril 1810, ainsi que dans la plupart des actes de concession. Néanmoins, le texte de la loi de 1810 a si mal rendu, à cet égard, les intentions du législateur, ou plutôt, l'autorité s'est montrée si favorable à l'interprétation qu'il convenait aux spéculateurs de donner à cette loi, que l'on a pu réunir, accaparer les concessions que le gouvernement avait divisées, et supprimer ainsi la concurrence qu'il avait voulu garantir. Cela a été fait, depuis longtemps, pour les mines d'Anzin, qui, dans l'origine, avaient été divisées en dix ou douze concessions, devenues, depuis, la propriété d'une seule compagnie. Cela a été fait, tout récemment, pour l'important bassin houiller de la Loire, qui fournit à lui seul près de la moitié du combustible minéral annuellement produit en France, et dans lequel le gouvernement, pour maintenir une concurrence suffisante, n'avait pas jugé devoir établir moins de soixante-trois concessions rivales. Vers la fin de 1847, les sept huitièmes de l'exploitation effective de ce bassin houiller avaient été accaparés par une seule compagnie, la concurrence était déjà complétement annulée, et malgré les réclamations unanimes des populations intéressées, le monopole fondé par cet accaparement subsiste encore.

Les moyens de production ainsi monopolisés permettent à ceux qui en disposent d'élever le prix de leurs produits bien au-dessus des frais de production, et d'accroitre, en outre, les bénéfices de l'entreprise par l'abaissement du salaire des ouvriers employés, attendu qu'une entreprise qui n'a pas de rivale, au moins dans la même contrée, peut toujours mettre ces ouvriers dans l'alternative d'accepter ses conditions ou d'abandonner leur profession. Cela explique comment la moyenne du salaire quotidien des ouvriers mineurs

En France, par exemple, l'exploitation des minéraux, et en particulier des mines de houille, est incontestablement, de toutes les branches de la production, celle où la concurrence est le plus restreinte, eu égard à l'étendue et à l'urgence des besoins auxquels elle est destinée à pourvoir. La | raison en est que nos gisements exploitables de combustible minéral sont clair-semés, qu'ils sont séparés les uns des autres par de trop grandes distances pour qu'il puisse se faire, sur des produits aussi lourds et aussi coûteux à transporter que ceux dont il s'agit, une concurrence efficace; que les emplois industriels de combustible se sont énormément accrus depuis vingt ans, et qu'ils prennent de jour en jour un plus grand dévelop-d'Anzin a pu être abaissée au-dessous de un franc pement; enfin, qu'il n'y a plus à compter, pour ces emplois, sur le concours des combustibles gétaux, à raison de leur rareté progressive et du prix élevé qu'ils ont atteint sur tous les points.

Par une suite de ces diverses conditions, l'accaparement des mines de houille serait naturellement plus praticable en France qu'en Angleterre, où la multiplicité et l'abondance des gisements de ce combustible en rendent l'accaparement à peu près impossible. Mais notre législation sur les mines avait mis à cette opération un obstacle qui devait paraitre insurmontable; les gisements de minéraux, au lieu d'appartenir, comme en Angleterre, au propriétaire de la surface du sol, et de pouvoir être exploités par lui et par tous ceux à qui il en donne la faculté, sont considérés, en France, comme une sorte de propriété publique, tant qu'ils n'ont pas été concédés par le gouvernement; le propriétaire du sol, lui-même, ne pourrait les exploiter sans cette concession. Il est résulté de là que, chez nous, l'autorité publique est restée maitresse des conditions générales de l'exploitation des mines, et qu'il lui eût été très facile d'empêcher absolument tout accaparement sur cette branche de production. Elle s'est, en effet, constamment

cinquante centimes. On peut prédire que le même résultat se produira, après quelques années, dans les travaux des mines de la Loire, si l'œuvre des accapareurs y est maintenue.

Tous les bénéfices ainsi obtenus se résolvent en accroissement de la valeur vénale des actions représentant des parts d'intérêt dans les entreprises. C'est ainsi que la valeur originaire des actions des mines d'Anzin a pu s'accroitre généralement dans la proportion de un à dix; la seule perspective des bénéfices que promettait l'accaparement des mines de la Loire a pu faire monter, en quelques mois, des parts d'intérêt qui représentaient à peine 200 fr. jusqu'à 1150 fr.; des fortunes considérables ont été fondées tout à coup par cette manœuvre.

Des conditions semblables à celles que l'on a faites à l'exploitation de nos mines de houille ont favorisé l'accaparement dans les entreprises de forges. Certaines de ces entreprises ont été plus favorisées que d'autres par les concessions de minerais, et elles en ont profité pour rester maîtresses du marché dans des circonscriptions plus ou moins étendues ; d'autres sont arrivées au même résultat en ruinant les entreprises rivales

BIBLIOGRAPHIE.

A. CLÉMENT.

par des réductions temporaires sur les prix de | lement à rendre plus complets les monopoles leurs produits. C'est en usant de ce dernier fondés par certaines entreprises métallurgiques. moyen d'accaparement que les fabriques de SaintGobain et de Saint-Quirin sont parvenues à s'attribuer le monopole de la fabrication des glaces en France. Le même mode d'accaparement a été aussi pratiqué dans d'autres industries, et notamment dans les grandes entreprises de messageries.

Tous ces moyens d'accaparer certaines branches de production, de restreindre ou d'annuler la concurrence, d'élever le prix des produits ou des services au-dessus de leur taux naturel, ne sont pas, comme on l'a dit, des conséquences de la liberté de l'industrie; ce sont, au contraire, des atteintes très positives à cette liberté, et elles devraient trouver leur répression dans une législation vraiment équitable et protectrice des intéréts généraux. En ce qui concerne l'exploitation des mines, il est dérisoire d'admettre que ceux qui ont obtenu du gouvernement la faveur de concessions gratuites, puissent abuser impunément de cette faveur en supprimant la concurrence que le gouvernement a voulu maintenir entre eux, en réunissant ce qu'il a divisé, en annulant les garanties qu'il a voulu réserver aux consommateurs, et en faisant de moyens de production concédés dans l'intérêt de tous un moyen de monopole an profit de quelques-uns. Un examen approfondi de notre législation des mines nous a convaincu qu'elle n'est pas impuissante contre de pareils abus, et que son inefficacité doit étre imputée à la faiblesse ou à la partialité de ceux qui sont chargés de l'appliquer, bien plus qu'à l'insuffisance de ses prescriptions.

Quant aux procédés d'accaparement consistant à ruiner les entreprises rivales par des réductions temporaires sur les prix, il nous semble qu'il ne serait pas très difficile d'en empêcher l'emploi, et certaines dispositions de l'article 419 du Code pénal paraissent, d'ailleurs, avoir prévu le cas, en réprimant les manœuvres par lesquelles on amènerait les prix au-dessus ou au-dessous du taux qu'aurait déterminé la concurrence naturelle et libre du commerce; mais alors même que notre législation actuelle n'aurait rien d'applicable à la répression des procédés déloyaux dont il s'agit, rien n'empêcherait de la modifier. Ne pourrait-on, par exemple, donner ouverture à une action en dommages-intérêts, de la part de ceux contre lesquels ces procédés auraient été dirigés, et leur assurer gain de cause chaque fois qu'ils parviendraient à prouver que les prix auraient été abaissés au-dessous des frais de production, et que cet abaissement n'aurait eu d'autre objet que de supprimer leur concurrence? Il est probable que cette preuve pourrait être faite assez souvent pour rendre la manœuvre dont il s'agit beaucoup moins aisément praticable.

Dans tous les cas, les pouvoirs publics devraient au moins s'abstenir de favoriser directement de semblables abus; or, l'autorité concourt, en France, à assurer à la compagnie de Saint-Gobain et de Saint-Quirin le monopole qu'elle s'est attribué, en prohibant l'introduction des glaces étrangères. Les droits prohibitifs opposés à l'introduction des fers et des aciers concourent éga

Pour ce qui regarde les principes relatifs au sujet, voir :

Adam Smith, Recherches sur la richesse des nations. (Collect. des princ. économ.); digression sur le commerce et la législation des grains, liv. 4, ch. 5.

J. B. Say, Cours complet d'économie politique pratique, 2e éd., 2° partie, ch. 14; Différentes manières de faire le commerce;

Et Dict. du commerce et des marchandises (éd. Guillaumin), au mot Accaparement.

Chez les Romains, la lex Julia, de annona, punissait l'accapareur d'une amende de vingt écus d'or. Voyez 1. 6, p D., de Extraord. crim., et 1. 2, D., de lege Jul., de ann.; Cujas, Obs., X, 19.

Voyez aussi la loi 6 C., de monopolis et conventu negociatorum illicito; laquelle défend toute espèce d'association tendant à augmenter le prix des denrées, sous peine de confiscation de tous biens et d'un exil perpétuel.

En France, c'est dans les Capitulaires de Charlemagne qu'on trouve la première et la plus ancienne loi que nous ayons contre les accaparements. Depuis, une foule d'ordonnances de nos rois et d'arrêts des parlements ont été successivement rendus sur le mème sujet.

La Convention a rendu également plusieurs décrets sur ce sujet. Le décret des 26-28 août 1793 définit l'accaparement l'action de dérober à la circulation des marchandises on des denrées de première nécessité, en les tenant renfermées dans un lieu quelconque sans les mettre en vente journellement et publiquement, ou en les laissant gåter volontairement. Vient ensuite l'énumération des objets qui doivent être considérés comme denrées de première nécessité. La loi y comprend le miel, le sucre, le papier, etc. Un autre décret vint y ajouter les brais, les goudrons, etc. Tout accapareur de pareils objets était puni de mort.

Les art. 419 et 420 du Code pénal sont venus adoucir cette législation draconienne. Ils laissent toute liberté aux spéculateurs d'un commerce franc et loyal, et punissent seulement de l'emprisonnement et de l'amende les manoeuvres frauduleuses tendant à produire une hausse ou une baisse exagérée des prix et des fonds publics.

Lettres sur les émeutes populaires occasionnées par la cherté des grains, par Turgot, 4768.

Halle aux blés de Nancy: subsistances, boulangers, accapareurs, etc., par C. J. A. Mathieu. 1818.

La législation anglaise est aussi très riche en dispositions pénales pour prévenir ou pour punir les accaparements. Dans la digression d'Adam Smith citée plus haut, on trouve déjà un aperçu historique des statuts qui ont servi de base à sa critique et à sa belle argumentation. On peut consulter encore:

The laws against ingrossing, forestalling, regrating and monopolizing.- Lois contre l'accaparement, l'emmagasinement, la revente et le monopole, par Stephen Brown. Londres, 1765, in-8.

A short inquiry into the nature of monopoly and Courtes réflexions sur la nature du forestalling. monopole et de l'emmagasinement, par Edwards Morris, 3e édit., avec des additions, in-8. Londres, 1800. An address to the good-sense and candour of the people, etc. Appel au bon sens et à la bonne foi du peuple en faveur des marchands de blé, avec des réflexions sur un procès récent fait à un revendeur. In-8, Londres, 1800.

« Le procès auquel M. Turton fait allusion est celui qui fut intenté à un nommé Rusby, marchand de ble, accusé d'avoir acheté et revendu, le même jour et au même marché, une certaine quantité de blé, en béné.

ficant de denx shelings par quarter environ 83 centimes par nec.itre. Les statuts optre ce genre de speculation ayant été rapportés en 1772. Rosby farge d'après le droit commin. L'a. sention qui fut Proconces à cette occasion par le chef de justice, lord Kenyon, qui pres.dait dans celte affaire, proova combien ce magistrat avait encore peu prosté du tal act pembent si concinant de Smith sur cette matière. Busby fit convaincu da fait; mais comme plusieurs juges dosterent si son action était réellement parissable d'après la loi commune, le procès n'eut pas d'astres conséquences pour l'act use. C'a été le dernier exemple donné par les tribunaux anglais d'une igno rante participation aux préjugés populaires coutre one des classes d'hommes les plus utiles de la société. Un semblable procés n'aurait plus lien aujourd'hui.» M. C. Voyez Grains.

ACCUMULATION. C'est à la faculté d'accumu ler, d'épargner, de conserver (trois termes qui, en économie politique, sont à peu près équivalents,, que nous devons tous nos capitaux, toutes nos richesses.

Toutes les utilités de création humaine sont susceptibles d'accumulation, soit que ces utilités s'identifient aux hommes eux-mêmes, comme celles qui consistent en connaissances acquises, en perfectionnements apportés à nos facultés physiques, intellectuelles ou morales, soit qu'elles s'ajoutent aux objets extérieurs.

Parmi les accumulations d'utilités de cette dernière classe, les plus importantes sont celles réalisées dans les exploitations agricoles. Elles consistent dans le défrichement et l'assainissement du sol; dans l'accroissement de sa fécondité naturelle par les engrais, les irrigations ou autres aménagements; dans la substitution des plantes utiles à l'homme à toutes celles dont la terre serait couverte, sans égard pour nos besoins, si elle était abandonnée à elle-même; dans la multiplication et l'éducation des bestiaux ou des bêtes de somme employés comme forces ou destinés à l'alimentation; et enfin, dans les bâtiments, constructions, machines ou instruments servant aux exploitations. Chez tous les peuples dont la civilisation est avancée, ce sont les accumulations de cette espèce qui forment la grande masse des richesses matérielles.

Viennent ensuite, dans l'ordre d'importance, les accumulations réalisées sous forme de maisons d'habitation, de fabriques, d'usines, de machines et outils, de routes, de chemins de fer, de canaux, de ponts, de navires, de ports, etc., en un mot, toutes les créations de l'industrie destinées à faciliter les opérations manufacturières ou commerciales, ou à satisfaire le besoin d'asile, ou ceux de relation, de communication, etc.

donnés aux facultés industrielles, dénomination sous laquelle nous comprenons : 1° toutes les connaissances positives pouvant servir à rendre nos travaux plus fructueux; 2° l'art d'appliquer ces connaissances et l'esprit d'invention; 3° l'habileté dans l'exécution de toutes les opérations de détail qu'exigent les travaux ; 4° enfin, la pratique des habitudes privées ou collectives les plus favorables au développement et à la puissance des facultés industrielles, ainsi qu'à la bonne harmonie des relations.

On voit que les accumulations d'utilités, de capitaux on de richesses, peuvent s'opérer et s'opèrent réellement sous une multitude de formes diverses. Parmi ces formes, nous n'avons pas compris celle d'argent monnayé ou de numéraire; c'est que, en effet, les accumulations n'exigent nullement un accroissement dans la quantité de ce produit particulier, et qu'il est indubitable qu'un peuple pourrait doubler et décupler ses richesses sans que son numéraire fût accru d'un centime; les accumulations n'affectent guère cette forme que dans les pays producteurs de métaux précieux.

Cependant, l'opinion presque universelle est que la plupart des accumulations ou des épargnes se réalisent sous forme de numéraire, et comme cette fausse notion est la source d'une multitude d'erreurs économiques, il nous parait utile de montrer clairement que, bien qu'un grand nombre d'accumulations se manifestent passagèrement sous forme de numéraire, elles consistent, en réalité, en tout autre chose. C'est ce que nous allons faire au moyen de quelques exemples.

Un ouvrier terrassier, en travaillant assidument pendant six mois, a desséché un marais; la valeur de son travail est réglée à 400 francs; sur cette somme l'ouvrier a dépensé 300 francs pour ses besoins personnels, et il lui reste 100 francs qu'il dépose dans une caisse d'épargne. Voilà donc une accumulation réalisée, égale en valeur à 100 francs, et, toutes les circonstances restant les mêmes, cette valeur doit se trouver en plus dans le pays, sous une forme ou sous une autre. Est-ce sous forme de numéraire? Évidemment, non; car les 100 francs, avant d'être dans la caisse d'épargne, étaient dans celle du propriétaire, qui avait pu les recevoir de son fermier, lequel avait pu les recevoir du boucher, lequel à son tour les avait reçus du consommateur de viande, etc.; bref, ce numéraire existait dans le pays avant comme après l'opération; l'accumulation n'existe donc pas sous forme de numéraire, Après ces accumulations, les plus importantes, et on ne peut la retrouver que dans l'amélioration dans l'ordre matériel, se présentent sous forme apportée au terrain par les travaux du terrassier, d'approvisionnement de produits, soit que ces amélioration égale en valeur à 400 francs, et suproduits soient destinés à la satisfaction immé-périeure de 100 francs à la valeur des objets condiate de nos besoins, comme les meubles, les sommés par l'ouvrier. ustensiles, le combustible, les denrées alimentaires, le linge, les vêtements, etc., dont chaque ménage est plus ou moins pourvu, soit qu'ils aient à subir encore diverses transformations ou préparations pour être amenés à l'état consommable.

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Parmi les utilités qui s'identifient à l'homme, celles dont l'accumulation ou l'extension importent le plus consistent dans les perfectionnements

Un entrepreneur de bâtiments construit une maison; il dépense à cette construction, en salaires, matériaux, achat de terrain, etc., une somme de 110,000 francs; puis il vend la maison 120,000 francs; l'excédant de 10,000 francs forme son bénéfice ou le prix de ses services; sur cette dernière somme 5,000 francs ont été absorbés en consommations improductives, et 5,000 sont ajoutés aux capitaux qu'il emploie dans son

|

moyens de travail ou de satisfaction dont elle aurait été privée sans cela. Celui qui épargne rend donc à la société des services proportionnés aux valeurs épargnées; il est vrai qu'il acquiert ainsi le droit de lui réclamer en retour des services équivalents; mais tant qu'il ne les réclame pas effectivement, tant qu'il s'abstient d'en absorber la valeur pour ses besoins personnels, cette valeur sert à d'autres qu'à lui.

industrie. L'accumulation consiste-t-elle en numéraire ? Nullement, puisque ce numéraire existait auparavant dans les mains de l'acquéreur; elle se trouve dans la valeur de la maison, excédant de 5,000 francs toutes celles qui ont été absorbées. L'acquéreur de cette maison reçoit, dans l'année, de ses locataires, une somme de 6,000 francs; il applique les deux tiers de cette somme aux besoins personnels de sa famille, et il place les 2,000 francs de surplus chez un banquier. Voilà donc une nouvelle accumulation égale en valeur à 2,000 francs, qui, bien qu'elle ne provienne d'aucun travail nouveau, doit exister en plus dans | le pays, sous une forme quelconque, et, pas plus que dans les cas précédents, cette forme n'est le numéraire, puisque les mêmes écus existaient déjà, | et qu'ils n'ont fait que changer de mains. En quoi donc peut consister la nouvelle valeur acquise par la société? Pour le découvrir, il faut remarquer que le service rendu aux locataires par la maison est réellement égal en valeur à 6,000 francs, puisqu'ils ont librement consenti à payer cette somme pour en user; ils auraient pu appliquer ce service à un usage industriel, et retrouver son prix dans celui des produits créés; mais nous supposerons qu'ils l'ont consommé improductivement pour leurs besoins personnels; or, même dans ce cas, l'épargne du propriétaire n'ajoute pas moins une valeur de 2,000 francs aux richesses du pays, et cette valeur doit s'y retrouver sous une forme autre que le numéraire. C'est ce que l'on comprendra facilement en observant que, sans cette épargne, il aurait fallu ajouter à la consommation improductive du service des locaux d'autres consommations improductives que le propriétaire aurait accomplies jusqu'à concurrence d'une valeur de 2,000 francs; l'épargne doit donc se retrouver, dans ce cas, sous la forme des diffé-il rents objets que le propriétaire s'est abstenu de consommer, objets dont la conservation a diminué la somme totale des consommations du pays, et, par conséquent, accru d'autant sa richesse effec-sommations personnelles et improductives ne fait tive, la production étant, d'ailleurs, restée la

même.

On pourrait prendre ainsi, l'une après l'autre, toutes les épargnes individuelles accumulées dans un an, et l'on reconnaitrait que toutes ont accru la richesse générale, dans la proportion de leur importance, soit en ajoutant aux utilités que le pays possedait déjà, soit en conservant une plus grande partie de celles-ci par la restriction des consommations. On reconnaitrait en même temps que ces accumulations se réalisent sous une multitude de formes diverses, autres que le numéraire, bien que la plupart se manifestent pour un instant sous cette dernière forme.

Ainsi, ce que l'on accumule en réalité, ce n'est pas de l'a. gent, ce sont des objets propres à servir à nos besoins, des utilités de formes variées.

Il est à remarquer que ces utilités ne restent presque jamais dans les mains de ceux à qui elles sont dues, car, même lorsqu'elles sont échangées contre de l'argent, cet argent est ordinairement livré à d'autres par ceux qui en ont accumulé la valeur; or, mettre à la disposition de la société une utilité, sous cette forme ou sous une autre, c'est lui rendre un service, c'est lui fournir des

Ainsi, par exemple, un propriétaire de terres ou de capitaux qui obtient de ces fonds productifs un revenu annuel de 10,000 francs, et qui, chaque année, en épargne la moitié, livre à la société, tous les ans, un nouveau service valant 5,000 fr., et, bien qu'il se réserve la faculté de réclamer plus tard toute la somme de ces services, accrue du montant de l'intérêt, il n'est pas moins évident qu'aussi longtemps qu'il s'abstient de les demander et de les consommer, la société en jouit à sa place. Une famille qui, pendant plusieurs générations, pendant deux siècles par exemple, aurait ainsi épargné constamment la moitié de son revenu, aurait très réellement pendant toute cette durée admis la société à partager également avec elle les moyens de production et de satisfaction que pouvait comporter ce revenu; en d'autres termes, elle aurait fourni à la masse des jouissances communes deux fois plus qu'elle n'en aurait retiré; et les moyens de création de nouvelles richesses ou de satisfaction dont elle se serait dessaisie auraient été acquis à d'autres; la seule jouissance exclusive que lui auraient procurée ses épargnes eût consisté dans le sentiment de sécurité résultant de la faculté qu'elle conservait de réclamer à la société, en cas de besoin, des services égaux à ceux qu'elle lui avait cédés.

Ces résultats de l'épargne sont incontestables; s'ensuit qu'elle ne profite pas exclusivement à ceux qui l'accomplissent, et qu'elle est très positivement un bienfait public. Le riche qui absorbe chaque année la totalité de son revenu en con

qu'user de son droit, mais il ne rend ainsi aux autres que des services exactement équivalents à ceux qu'il en reçoit; il est donc moins utile à autrui, et par conséquent moins digne d'approbation et d'estime, sous ce rapport, que le riche qui épargne.

Cependant l'opinion commune est plus disposée à approuver celui qui absorbe la totalité de son revenu pour ses besoins personnels que celui qui en épargne une partie. Chose bizarre! celui des deux qui conserve à sa famille et à la société le plus d'utilités de tout genre, et cela en restreignant ses jouissances personnelles, est précisément celui que le vulgaire est enclin à taxer d'égoïsme, tandis qu'il attribue des sentiments louables et généreux à celui qui vit honorablement en ne se refusant rien.

On affirme, pour motiver cette injuste appréciation, que celui dont les besoins personnels sont restreints n'active pas la circulation, qu'il prive l'industrie et le commerce des débouchés, des encouragements que ses consommations auraient pu leur donner; on arrive ainsi à croire et à professer que chacun rend d'autant plus de services qu'il consomme improductivement plus de valeurs,

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