ns les ateliers industriels. En Angleterre surut (nous parlons de l'Angleterre proprement te, en exceptant l'Irlande), cette séparation est esque entièrement consommée. Mais il n'en est as de même pour le rouissage et le teillage, qui ntinuent d'appartenir presque partout à l'instrie rurale. Il est facile de prévoir cependant 'ils s'en détacheront un jour. Déjà dans quelques arties de la Belgique, là où la culture du lin est rivée à son plus haut degré de perfection, il n'est as rare de voir un cultivateur vendre sa récolte e lin sur pied, ou après l'arrachage, à des inustriels qui se font du rouissage et du teillage une pécialité. Il est vrai que ces industriels opèrent acore, pour la plupart, dans les champs, parce ue les conditions actuelles du rouissage l'exigent; mais supposez qu'on vienne à résoudre une bonne is le problème, tant de fois étudié et dont la soution est d'ailleurs si désirable, d'effectuer le ouissage par des moyens chimiques, il est à croire que cette opération, aussi bien que le teillage qui a suit, se détacherait promptement de l'industrie urale, pour venir accroitre, après tant d'autres, e domaine de l'industrie urbaine. II. — C'est ainsi que, dans la succession des temps, à mesure que le progrès s'opère, l'industrie manufacturière grandit et s'étend, en détachant chaque jour quelqu'un des rameaux de cette industrie mère d'où elle est sortie. L'agriculture, qui se compliquait à son origine d'un grand nombre d'opérations étrangères à sa nature propre, se dégage peu à peu de ces fonctions parasites; elle les abandonne aux ateliers des villes, dont elles sont l'apanage, pour se renfermer de plus en plus dans ses fonctions spéciales, l'amendement et la culture du sol. 1 Quant aux causes qui favorisent ce mouvement, ce sont les mêmes que celles qui le déterminent à son début : c'est le progrès des arts, l'accroissement de la richesse, et, par-dessus tout, l'accroissement de la population. Dans un état de civilisation un peu avancé, pour que la séparation devienne chaque jour plus nette entre les arts manufacturiers et l'industrie agricole, il faut avant tout que les échanges soient faciles entre la campagne et la ville, de manière que le cultivateur puisse toujours, sans trop de peine, porter à la ville les produits bruts que son industrie lui donne, et en retirer les produits ouvrés qu'il consomme. Si le nombre des voies de communication contribue, ce qui n'est pas douteux, à cette facilité des échanges, elle exige pourtant aussi, on le conçoit, une population dense, qui multiplie les bourgs et les villes, de manière que celles-ci ne soient jamais trop distantes d'aucune partie du pays. De tous les pays de l'Europe, et probablement du monde entier, l'Angleterre (nous parlons toujours de l'Angleterre proprement dite) est celui où la séparation des arts manufacturiers d'avec l'industrie agricole a fait le plus de progrès; elle doit cet avantage à sa richesse, à ses lumières, au nombre et à la perfection de ses routes et canaux, mais surtout à la densité de sa population. Avec une somme de richesses comparativement presque égale, avec autant de lumières dans les masses et un développement de routes et de canaux très considérable aussi, l'Amérique du Nord est à cet égard beaucoup moins avancée, parce que la population y est disséminée sur de très grands espaces. Là le cultivateur, souvent fort éloigné des villes, surtout dans les contrées de l'ouest qui sont les moins peuplées, retient sur son exploitation la plus grande partie des arts manufacturiers qui pourvoient aux besoins les plus ordinaires de la vie; il est presque en même temps cultivateur et fabricant, quoiqu'il ne fabrique que pour la consommation des siens. C'est le contraire en Angleterre, où le cultivateur est exclusivement cultivateur; dans ce pays l'agriculture est réduite, ou peu s'en faut, à son expression la plus simple, et c'est ce qui explique un phénomène intéressant dont on s'est souvent préoccupé, sans le rapporter, que nous sachions, à sa véritable cause; savoir l'infériorité numérique de la population agricole de l'Angleterre, comparativement à celle de tous les autres pays. L'agriculture anglaise, dit-on, produit énormément, et beaucoup plus, toute proportion gardée, que celle d'aucun autre pays, notamment de la France, et cependant elle occupe moins d'hommes; ce qui est vrai : d'où l'on conclut qu'elle a acquis une immense supériorité dans les procédés d'exploitation. La supériorité de l'agriculture anglaise est réelle sans doute, mais non pas telle qu'il semble résulter de ces rapprochements. Ce qui fait surtout qu'elle emploie moins d'hommes pour arriver néanmoins à une production plus forte, c'est qu'elle est plus simple, c'est-à-dire plus dégagée d'éléments étrangers; c'est que les hommes qu'elle occupe, elle les emploie uniquement à l'accomplissement de ses fonctions spéciales, l'amendement et la culture du sol, tandis qu'ailleurs les forces de ces mêmes hommes se partagent encore entre un grand nombre de travaux divers. On se demande quelquefois si cette émigration dans les villes des arts manufacturiers qui formaient d'abord l'accessoire des travaux des champs, est en elle-même un bien ou un mal. A considérer la question d'une manière générale, il ne peut y avoir sur ce sujet ni hésitation ni doute. La séparation des travaux manufacturiers d'avec les travaux agricoles est le commencement et comme le point de départ de cette division du travail qui fait la richesse des nations policées, et qui a porté si haut la puissance de l'homme c'est la première condition du progrès; on pourrait dire que c'est le progrès même. Demander s'il est bon que cette séparation s'opère, c'est demander en d'autres termes si la civilisation vaut mieux que la barbarie. Mais pour qu'elle soit réellement favorable, il faut qu'elle se produise dans ses conditions normales, c'est-à-dire lentement, progressivement, et sous l'influence des causes naturelles qui la déterminent partout autrement, elle pourrait devenir en effet l'occasion de cruelles souffrances et de déchirements funestes. Et c'est sans doute parce qu'on l'a vue quelquefois, de nos jours, se déclarer brusquement, violemment, sous l'influence d'excitations artificielles ou de lois restrictives, qu'on s'est pris à se demander si elle n'était point un mal. III. A mesure que l'industrie agricole se dégage des éléments étrangers qui la compliquaient, elle acquiert plus d'énergie, plus de puissance. Le culti vateur, dont l'attention se partageait d'abord entre | tances données certains ateliers industriels teus Mais c'est surtout l'industrie manufacturière A peine sont-ils concentrés dans ces villes qu'ils Tout cela ne veut pas dire, et nous en avons Plus l'industrie manufacturière, considérée dans industries ainsi réunies et condensées une sorte IV. Le pays manufacturier par excellence Cette conclusion, déduite des seules donnees de la Russie et celles de l'Amérique méridionale viendront au dernier rang. Dans un mème pays, on remarquera quant à ce, d'une province à l'autre, des différences notables, selon que les populations y seront plus ou moins pressées. Le Lancashire, par exemple, si riche et surtout si peuplé, l'emportera de beaucoup, quant au déve tre, présente avec elle, quant au point particuier qui nous occupe, le plus éclatant contraste. Son système manufacturier est relativement aussi rriéré que celui de l'Angleterre est avancé. Et ourquoi? Parce que les populations y sont disséninées, particulièrement dans les contrées de 'ouest, sur de très grands espaces. Cette dispersion des populations n'a pas permis que les artsloppement manufacturier, sur tous les autres commanufacturiers s'y séparassent aussi complétement qu'ailleurs de l'industrie agricole, et voilà pourquoi ces arts n'y ont pas suivi dans leur développement le progrès général de la richesse. A cette considération s'en joint une autre qui n'est pas moins décisive. Tant que les populations, disséminées sur d'assez grands espaces, se trouvent à l'aise sur le territoire qu'elles occupent, et que le sol ne manque point à leurs labeurs, elles ont une tendance naturelle à se livrer de préférence à la culture, et elles s'y livrent, en effet, presque sans partage, en entremêlant seulement, comme nous le disions tout à l'heure, aux travaux agricoles quelques travaux de fabrication assez grossiers. Cela est vrai surtout lorsqu'elles peuvent facilement écouler au dehors les produits surabondants de leurs cultures, et obtenir en retour les articles manufacturés qu'elles ne confectionnent pas elles-mèmes. Mais lorsqu'une fois ces mêmes populations commencent à se presser, à se condenser sur un territoire restreint, et que la culture du sol ne suffit plus pour les occuper toutes, elles cherchent naturellement ailleurs un nouvel aliment à leur activité. C'est communément dans l'exercice des arts manufacturiers qu'elles le trouvent. Ces arts se développent alors avec une irrésistible puissance; ils se multiplient et se perfectionnent d'autant plus que l'exubérance d'activité est plus grande, et comme ils ne tardent guère en pareil cas à écouler au loin une notable partie de leurs produits, ils trouvent dans l'extension même des débouchés qu'ils s'ouvrent, et dans la division croissante du travail qui en est la conséquence naturelle, un nouveau moyen de perfectionnement et de progrès. Ces observations si simples, et pourtant si fertiles en conséquences, mettent au néant bien des systèmes. Elles dispensent de chercher aussi loin qu'on l'a fait quelquefois le principe de la supériorité manufacturière de tel ou tel pays. A richesse égale, cette supériorité tient essentiellement, on le voit, à la densité relative de la population. D'autres circonstances peuvent y concourir sans doute, mais ce n'en est pas moins ici la cause première et dominante. Cela ne veut pas dire, comme on le suppose quelquefois, que le pays le plus peuplé doive s'assurer le monopole de l'industrie manufacturière, car un tel monopole n'appartient à personne; mais cela veut dire qu'il doit, selon l'ordre naturel des choses, y occuper le premier rang. Par la même raison, tous les autres pays se placeront à peu près, quant au développement de leur industrie manufacturière, au rang que la densité relative de leur population leur assigne. Après l'Angleterre, par exemple, viendront la France et la Belgique; puis, quelques États de l'Allemagne et la Suisse; et, enfin, en suivant une échelle décroissante, les contrées presque désertes tés de l'Angleterre. En France, les départements du Nord, de la Seine-Inférieure et du Haut-Rhin, sans parler du département de la Seine, l'emporteront, par la même raison, sur tous les autres départements français. Aux États-Unis enfin, les États de l'est les plus anciennement occupés, et pour cette raison les plus peuplés, seront les seuls où les arts manufacturiers auront acquis quelque puissance, tandis que les États de l'ouest, plus jeunes, y seront encore presque entièrement étrangers. On peut dire, il est vrai, que si la densité de la population influe sur le développement de l'industrie manufacturière, l'accroissement de cette industrie, favorisé par certaines circonstances locales, influe à son tour sur l'accroissement de la population. Ainsi l'effet réagirait sur la cause et deviendrait cause à son tour. Qui sait même, dira-t-on, si nous n'intervertissons pas ici les rôles? Est-ce à cause de la densité relative de sa population que le Lancashire l'emporte, quant au développement des arts manufacturiers, sur toutes les autres provinces de l'Angleterre? ou n'est-ce pas plutôt à sa supériorité manufacturière, due elle-même à d'autres causes, qu'il faut attribuer la densité relative de sa population? Ne la doit-il pas, cette supériorité, aux avantages exceptionnels dont il a joui depuis longtemps, à la richesse et à la facilité d'exploitation de ses mines de houille, au grand nombre et à la commodité des voies d'eau qui le sillonnent, à la proximité du port de Liverpool, si commode pour son approvisionnement en matières premières et pour l'exportation de ses produits ouvrés, enfin à la liberté relative dont ont joui plusieurs de ses cités industrielles, affranchies de meilleure heure que toutes les autres de la tyrannie abrutissante des corporations de métiers? Ces scrupules sont fondés sans aucun doute, et nous sommes loin d'en méconnaitre toute la force. Appliquée à certaines localités restreintes, l'observation peut même se trouver rigoureusement exacte. Mais il n'en est pas moins vrai que la densité de la population, à quelque cause qu'elle soit due, et elle peut venir uniquement de l'ancienneté de la nation, est une des conditions nécessaires, nous pouvons même dire la condition première et essentielle de la supériorité manufacturière d'un pays. Les avantages de situation dont jouit le Lancashire ne lui sont pas tellement particuliers que d'autres contrées ne les partagent. Il y a, par exemple, tel district des États-Unis d'Amérique où les mines de houille ne sont pas moins riches ni moins faciles à exploiter, où les voies navi❤ gables ne sont pas moins nombreuses, où la liberté industrielle est aussi grande, où le crédit, autre source d'activité et de puissance, est aussi large, où l'on jouit même de cet autre avantage que le Lancashire n'a pas, d'avoir la matière pro | pire. 1 mière presque sous la main, sans que pourtant pide? Au contraire, nous oserions soutenir, çə les arts manufacturiers y aient pris jusqu'à pré- que nous n'ayons pas l'intention de nous ayesent le même essor. C'est que l'Amérique du Nord, santir ici sur ce côté de la question, qui sera pur pays neuf, n'a pas encore en le temps, malgré les convenablement examiné ailleurs; Dous (etes avantages réels dont elle jouit, de se couvrir d'une soutenir, disons-nous, que par-là on a pišit ne population égale à celle qui se presse dans les ré- tardé qu'activé ses progrès ; et si quelque ami gions anciennement explorées de l'Europe occi- pu en cela précipiter le cours du temps, c'est un dentale. Cette population, elle la possédera peut- moins l'excitation factice qu'on leur a man, être un jour, et c'est alors, mais alors seulement, que la jouissance par elle d'une liberte pariak. qu'elle pourra rivaliser pour la perfection de ses Oui, sans doute, par des faveurs excep manufactures avec l'Europe. A l'opposé des États- par des prohibitions ou par des primes, on pat Unis, la Chine ne jouit presque d'aucun des avan- faire surgir çà et là quelques manufactures avut tages que le Lancashire possède, sauf toutefois le le temps; mais les faire prospérer, c'est nombre et l'étendue de ses canaux. Elle n'a point chose. Et à quel prix obtient-on alors éretion de mines de houille, ou ne sait point en faire de ces établissements malingres? Au prix des usage. Les ressources de la mécanique, qui con- crifices onéreux pour le pays; au prix d'un és tribuent tant à élever la puissance industrielle de tournement fàcheux des capitaux, qui se retreat notre Europe, lui sont presque inconnues; elle des voies plus fécondes où ils étaient engages; a ne connaît guère davantage, à ce qu'il nous prix enfin d'un resserrement relatif de la custar semble, la merveilleuse puissance du crédit, et du sol. On ne réussit done, en effet, par-ia qu'i enfin le déplorable système qu'elle a suivi jusqu'à amoindrir ses ressources naturelles, à ralentir par présent de se refuser à toute communication régu- conséquent l'accroissement de la population, et i lière avec les autres peuples, a privé son indus- retarder en fin de compte l'avènement nature, trie tout à la fois de ce stimulant actif que lui | l'avénement définitif et vraiment fructueux de m donne la concurrence étrangère, et de cet acerois-même système manufacturier vers lequel on a sement de vigueur qu'elle reçoit de l'étendue du | débouché. Avec cela, pourtant, le peuple chinois est V. Il n'entre pas dans notre pensée, au surpina supérieur au peuple américain dans presque toutes de méconnaître ce que le développement des aris les branches de l'industrie manufacturière, sauf la manufacturiers ajoute à l'éclat, à la grandeur, i mécanique. Il est même supérieur, à bien des égards, la puissance de la civilisation d'un grand pava au peuple anglais, sur lequel il l'emporte tout au | Amis des arts libéraux, aussi bien que des sammen moins par la finesse ingénieuse des procédés et positives, dont ils réclament à chaque instant » par la perfection de la main-d'œuvre. Et à quelle concours, les arts manufacturiers contribuest, circonstance attribuer cette supériorité, si difficile plus qu'aucune autre puissance, à les attire à expliquer d'ailleurs, si ce n'est à la densité et à les fixer à côté d'eux. Par les commonsextraordinaire de la population chinoise, qui s'est cations incessantes qu'ils établissent entre is accrue et multipliée sur un même territoire pen-hommes, ils favorisent le progrès des lumeres dant une longue série de siècles? Tant il est vrai dans tous les genres, et contribuent même pusque cette circonstance est dominante, et qu'elle samment en cela au perfectionnement de l'mis triomphe même des obstacles de divers genres trie agricole à laquelle ils paraissent étrangers. qu'une nation peut rencontrer. C'est à eux, et au commerce qui les seconde, qu'on doit la plus grande partie des travau de tilité publique, des routes, des canaux, des chemins de fer, des ports et des grands monumer'> d'architecture qui s'exécutent dans un pays. In écrivain allemand, dont le nom a acquis une œttaine célébrité de l'autre côté du Rhin, a, dựa un ouvrage d'ailleurs peu recommandable au fond développé cette thèse avec bonheur, quoiqu'il a presque partout exagéré la vérité et noyé desengsidérations justes dans les flots d'une imaginat exubérante. Quoi qu'il en soit, nous pourres dire avec Fr. List: oui, le développement des art manufacturiers est un des plus puissants vel cules du progrès; ancune circonstance peut-e ne contribue aussi puissamment à faire épan la civilisation sous toutes ses faces. Mais faul→ en conclure, avec cet écrivain, qu'il soit bes utile et nécessaire de violenter ce développement de s'efforcer de le produire avant le temps par des moyens factices; au contraire: outre qu are semblable tentative échouerait sans aucun doute, elle ne ferait, répétons-le, que reculer le but. Que n'a-t-on pas essayé pour intervertir cet ordre naturel des choses? Quels systèmes n'a-t-on pas imaginés et mis en pratique? Tous les gouvernements de l'Europe, frappés de l'éclat que l'industrie manufacturière répand sur tous les pays où elle s'exerce, et attachant même à la possession de cette industrie une importance exagérée, ont essayé de devancer les temps en lui imprimant dans les limites de leurs États respectifs un essor factice. Ils ont agi d'abord par les tarifs de douane, combinés de façon à favoriser l'importation des matières premières, et à repousser celle des produits ouvrés, afin d'assurer à leurs propres manufactures, d'une part, la jouissance exclusive du marché national; de l'autre, un avantage plus ou moins grand sur les marchés étrangers. Ils ont fait plus, ils ont encouragé et excité les manufacturiers de leur pays par des faveurs exceptionnelles, par des avances de fonds ou par des primes. Vains efforts! La supériorité dans les arts manufacturiers est demeurée là où la nature des choses l'avait mise, c'est-à-dire au sein des populations denses, à l'activité desquelles ne suffisait plus la culture du sol. A-t-on du moins réussi, par tous les moyens artificiels que l'on a mis en œuvre, à faire marcher cette industrie d'un pas plus ra | En somme, c'est, à quelques égards, un graté désavantage pour un pays qu'une population dense, 1 Économie politique nationale allemand es produits bruts du sol y sont communément | l'on compare l'ancien état des peuples de l'Eulus chers qu'ailleurs et la vie moins facile. En ompensation de ce désavantage, il semble que la Providence ait voulu assurer aux pays très peulés une supériorité naturelle de lumières, de civiisation et d'industrie qui balance les inconvénients elatifs de leur situation. La compensation estelle suffisante? C'est ce que nous n'examinerons as ici; mais on ne peut nier qu'elle existe. Préindre renverser cette loi de la Providence, en assurant à un pays neuf et peu peuplé tous les vantages à la fois, c'est un projet chimérique et insensé. rope à leur état présent. Voyez, par exemple, ce qu'était l'Angleterre au temps de la conquête des Normands et ce qu'elle est aujourd'hui. C'était alors un pays presque exclusivement agricole. L'intérêt agricole, le mouvement agricole dominaient tout. Simple annexe de l'agriculture, l'industrie manufacturière n'occupait à côté de celle-ci qu'une faible place, et comptait à peine dans la balance des intérêts de la nation. Aussi ne fixaitelle que bien rarement l'attention du souverain. Plusieurs pays du continent de l'Europe étaient en cela plus avancés, notamment l'Italie, les Pays-Bas et quelques provinces de la France, où l'on rencontrait dès lors un certain nombre de villes qui avaient su imprimer à l'industrie manufacturière un assez brillant essor; mais là blement prépondérant. De nos jours, au contraire, on se demande, par rapport à l'Angleterre notamment, quel est l'intérêt qui domine, quelle est la grande industrie, l'industrie prédominante, l'industrie vitale du pays. Et sur cette question déjà quelques esprits hésitent. Ce n'est pas que l'agriculture ait décliné en Angleterre, qu'elle y ait resserré, amoindri son domaine; au contraire, elle a suiviune marche ascendante; elle a grandi. Mais l'industrie manufacturière a marché d'un pas bien autrement rapide, au point de conquérir, ou peu s'en faut, le premier rang. VI. Si l'on a bien pesé les considérations que nous exposions tout à l'heure, on a déjà compris qu'il est de la nature des arts manufacturiers d'étendre chaque jour leur domaine et d'acquérir avec le temps une importance relative plus grande. Quoi-même l'intérêt agricole demeurait encore sensique l'industrie agricole ne soit pas à coup sûr stationnaire, qu'elle soit comme toutes les autres branches du travail humain susceptible de progrès, elle a pourtant ses limites, limites marquées à la fois par l'étendue du territoire qu'elle exploite et par le nombre de ses productions; au contraire, le champ de l'industrie manufacturière est sans limites et le nombre de ses productions est infini. « La partie de l'industrie agricole, dit J.-B. Say, qui s'applique à la culture des terres, est nécessairement bornée par l'étendue du territoire. Les particuliers ni les nations ne peuvent rendre leur territoire ni plus étendu, ni plus fécond que la nature n'a voulu; mais ils peuvent sans cesse augmenter leurs capitaux, par conséquent étendre presque indéfiniment leur industrie manufacturière et commerciale, et par-là multiplier des produits qui sont aussi des richesses 1. » On peut bien encore, dans chaque pays, dessécher des marais, mettre en culture des terrains précédemment en friche, donner, par une meilleure culture, une fertilité plus grande à ceux qu'on exploitait déjà; mais le champ de ces améliorations n'est pas infini, et il se rencontre toujours dans l'étendue du territoire qu'on occupe une limite qu'on ne peut pas franchir. Pareillement, le nombre des productions du sol peut s'augmenter avec le temps; mais outre que cette multiplication est elle-même assez bornée, il est à remarquer que la culture de l'une des productions du sol usurpe nécessairement sur la culture de l'autre. Dans l'industrie manufacturière, au contraire, où l'on peut, à l'aide de grands capitaux, produire d'immenses valeurs sur un très petit espace, il n'y a de bornes réelles à la production que l'étendue des capitaux et des besoins. Quant à la variété des produits, elle y est également sans bornes. Il est donc, répétons-le, dans la nature des choses que l'industrie manufacturière grandisse en importance à mesure que la civilisation fait des progrès, tandis que l'industrie agricole, sans perdre son rang d'industrie mère et nourricière des peuples, tend cependant à descendre au niveau de celles qu'elle a dominées longtemps. Ce changement de position, partout sensible dans l'histoire, devient surtout frappant lorsque 1 Cours, 1re partie, ch. YIII. On dit encore aujourd'hui communément, au sein de toutes les assemblées législatives de l'Europe, en parlant de chaque pays en particulier, que l'agriculture est la grande affaire de ce pays, que l'intérêt agricole y est l'intérêt prédominant, Cela se répète souvent en France; cela se dit même en Angleterre, et, à plus forte raison, ailleurs. Peut-être a-t-on encore raison des deux côtés. Mais c'est déjà un grand symptôme qu'on soit obligé d'énoncer et de défendre des propositions de cette sorte, qui étaient autrefois d'une évidence si frappante, que le contraire n'aurait pu même se concevoir. Elles prouvent à elles seules qu'une sorte de changement de front s'opère peu à peu, et que le temps approche où, dans les pays les plus avancés, l'industrie manufacturière occupera décidément le premier rang. Il ne faut point s'en plaindre. Cette place relativement plus grande que l'industrie manufacturière occupe, est le signe le plus évident d'une civilisation croissante. Lorsque, dans les premiers àges du monde, les hommes se contentaient, pour toute nourriture, de la chair rôtie des animaux, pour tout vêtement de leurs peaux brutes, pour tout logement d'un trou dans la terre ou d'une hutte faite de boue et de roseaux, il était tout simple que l'industrie manufacturière eût peu de chose à faire et n'eut qu'une petite place à occuper. Il ne l'est pas moins que son rôle grandisse à mesure que l'espèce humaine demande une nourriture, des logements, des vêtements meilleurs, et que les produits bruts de la terre réclament en conséquence une façon plus compliquée et plus habile. VII.-Pour se faire une juste idée de l'importance que l'industrie manufacturière a prise, dans les so ciétés civilisées, il ne faut pas la considérer seule |