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tionnellement au prix des ventes à eux faites.

Je demanderais à cet égard à l'auteur du projet, si c'est par respect pour l'Eglise qu'il veut que celui qui a acheté d'un seigneur ecclésiastique, soit indemnisé, et que l'autre, qui a acheté le même jour et à la même heure, d'un seigneur laïque ne le soit pas. Si ce n'est pas par respect pour l'Église, je soutiens, aux termes de la Constitution, que l'un et l'autre de ces 2 acquéreurs méritent un égal dédommagement.

Pour me résumer, Sire, que résulte-t-il du décret en question? Il en résulte que plusieurs des membres du Corps législatif actuel, sont censitaires, et que, peu à peu, sans bourse délier, ils veulent se líbérer. Si ceci est dans l'ordre, il ne l'est pas que vous y donniez votre sanction.

Souffrez, Sire, que je termine ma lettre, en vous rappelant ces paroles remarquables d'un de vos augustes et malheureux prédécesseurs : Si la justice et la bonne foi, disait Jean le Bon, étaient bannies du reste du monde, la bouche et le cœur des rois devraient être leur asile.

Je suis avec une profonde vénération, de votre Majesté, Sire,

Le très humble et très fidèle serviteur et sujet.

ASSEMBLÉE NATIONALE LÉGISLATIVE. Séance du mercredi 13 juin 1792, au soir. PRÉSIDENCE DE M. GÉRARDIN, vice-président. La séance est ouverte à six heures du soir. Un de MM. les secrétaires donne lecture des lettres, adresses et pétitions suivantes :

1° Lettre des administrateurs du directoire du département de la Lozère, qui informent l'Assemblée que les circonstances ont exigé de réunir momentanément des brigades de gendarmerie de la ville de Mende à celle de Marvejols, pour faire le service auprès du tribunal criminel; cette lettre est ainsi concu: (1)

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D'après la loi relative à l'organisation de la gendarmerie nationale du mois d'avril 1792, nous avons l'honneur de vous informer que nous avons été obligés de requérir une des brigades de la ville de Mende pour être momentanément réunie à celle de Marvejols, et faire en cette dernière un service commun auprès du directoire du département et du tribunal criminel. Nous aurons soin, en conséquence de la même loi, Monsieur, de vous instruire encore de huitaine en huitaine de la continuité du déplacement de cette brigade jusqu'à ce qu'elle soit rentrée dans sa résidence.

« Les administrateurs du directoire du département de la Lozère.

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Extrait des registres des délibérations du directoire du département de la Lozère du 29 mai 1792. MM. Pelet, Pintard, Pascal, Cayla, Plantier, Bes, Osty.

«Le directoire du département, le suppléant du procureur général, syndic entendu, considérant que le service actuel de l'administration est des plus pénibles et des plus pressants et que la brigade de cette ville composée seulement de quatre gendarmes ne saurait y survenir, a arrêté qu'il y a lieu de requérir comme il requiert d'une manière expresse et particulière le commandant de la gendarmerie nationale de résidence à Mende, de déplacer de cette dernière ville une des brigades qui y sont en séjour et de l'envoyer de suite en cette ville de Marvejols pour être aux ordres et à portée d'exécuter les réquisitions, soit tant du département que du tribunal criminel auquel effet et pour se conformer au présent: Extrait en sera adressé à M. Jaussinet, lieutenant-colonel de ladite gendarmerie, en même temps que copie sommaire de la lettre de M. Nacquard, colonel, en date du 27 de ce mois. >>

2o Lettre des administrateurs du département de la Mayenne, qui invitent l'Assemblée à faire publier et à faire parvenir gratuitement à toutes les municipalités du royaume un bulletin officiel des opérations de nos armées; cette lettre est ainsi conçue (1) :

« Laval, le 10 juin 1792.

⚫ Législateurs,

« Les ennemis de la Constitution s'appliquent à égarer le peuple par des milliers de fausses nouvelles qu'ils font circuler sur les événements de la guerre; leur but est d'exciter le découragement, d'inspirer des soupçons, des inquiétudes, de fomenter l'agitation dans les esprits, même les troubles pour en tirer parti, d'empêcher les nouveaux recrutements, de rehausser enfin les espérances de leurs vils partisans, un bulletin officiel de nos armées publié gratuitement par vos ordres, et répandu dans toutes les municipalités du royaume, rendrait nuls les effets du mensonge et de la perfidie et ôterait à ceux qui ne rougissent pas d'y recourir les ressources méprisables qu'ils y trouvent. Le peuple lirait cette feuille avec d'autant plus de confiance qu'il saurait qu'elle sort du centre des vérités politiques qu'il saurait vous devoir; dans ce moment où le sort de nos armes va fixer celui de la France et peut-être de l'Europe, il importe que l'on sache ce que l'on doit croire ou ne pas croire. La liberté ne peut périr, elle est dans la nature et dans le cœur de tous les bons Français. Les nations esclaves mêmes commencent à la connaître et la désirent, mais vous savez de combien d'erreurs cherchent à l'envelopper les agents soudoyés de la tyrannie, comme ils exagèrent nos pertes, comme ils déguisent nos succès, comme ils tentent d'égarer l'opinion, comme ils se font des triomphes imaginaires, comme ils se disent forts et courageux, pour tâcher de voiler leur faiblesse et leur lâcheté. Législateurs, parlez vous-mêmes au peuple, il n'écoutera que vous, il ne croira que

(1) Archives nationales, Carton 152, dossier, no 270.

vous, et les contre-révolutionnaires, voyant qu'il ne peuvent le tromper, se lasseront peut-être de fabriquer d'inutiles mensonges.

« Les administrateurs du directoire du département de la Mayenne.

« Signé : JOURDAN, JOUSSE, etc. »>

3° Lettre des administrateurs du directoire du département de la Gironde, qui adressent à l'Assemblée une copie de la déclaration que les négociants de l'ile de Guernesey leur ont envoyée, et par laquelle ils s'engagent solennellement à ne s'intéresser ni directement, ni indirectement, dans aucunes mesures hostiles contre la France tant que l'Angleterre sera en paix avec elle (1).

4° Lettre des administrateurs du directoire du département du Calvados, qui réclament le remboursement des frais qu'ont occasionnés la levée et l'enrôlement de 3 bataillons de volontaires qui ont été formés dans ce département.

(L'Assemblée renvoie cette demande aux comités militaire et de l'ordinaire des finances réunis.)

5o Lettre des administrateurs du directoire du département du Bas-Rhin. Ils sollicitent l'Assemblée d'approuver l'autorisation provisoire que le directoire a cru devoir donner au directeur des douanes nationales, pour interdire la libre exportation de toutes les munitions de guerre ; cette lettre est ainsi conçue (2) :

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« Il est de notre devoir de fixer l'attention du Corps législatif sur les dangers qui résulteraient de l'exécution de la loi du 28 septembre dernier qui permet la libre exportation des sabres, épées, poudres, salpêtres, fusils et pierres à fusils.

« Les circonstances actuelles paraissent exiger impérieusement la suspension de cette faculté et si vous voulez bien soumettre ces réflexions à l'Assemblée nationale, nous ne doutons pas qu'elle n'approuve l'autorisation que le directoire du département du Haut-Rhin a déjà donnée au directeur des douanes nationales de défendre provisoirement l'exportation de toutes munitions de guerre, et qu'elle ne confirme, par un décret, cette disposition qui paraît devoir être étendue à tout l'Empire français.

« Les administrateurs du département du Bas-Rhin,

« Signé DOYEN, BURGER, etc. »>

6° Lettre du sieur Lacosne, fondé de pouvoirs du sieur Mathieu, ci-devant religieux capucin et missionnaire en l'ile de Candie, qui réclame le traitement que la loi lui accorde, en observant que son éloignement ne lui a pas permis de connaitre la loi qui fixait l'époque à laquelle devait être faite sa demande et sa déclaration.

(L'Assemblée renvoie cette demande au comité de l'ordinaire des finances.)

7° Lettre de 4 députés extraordinaires des cam

(1) Voy. ci-dessus cette déclaration, séance du 9 juin 1792, au matin, page 2.

1 Archives nationales. Carton 152 dossier, no 270.

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« Monsieur le Président,

«En vertu de la commission à nous déférée par les habitants de plus de 90 paroisses du département du Loiret, nous avons eu l'honneur de paraître le 9 mai dernier à la barre de l'Assemblée nationale et de remettre sur le bureau une pétition relative aux droits féodaux non supprimés.

«L'Assemblée a eu la bonté de nous promettre qu'elle prendrait notre pétition en considération, et l'a renvoyée au comité féodal. Nous sommes bien persuadés que ce comité a préparé son travail à cet égard et que les grandes affaires qui occupent l'Assemblée ont pu seules retarder une décision attendue par tous les cultivateurs de la France. Mais nous ne pouvons vous dissimuler, Monsieur le Président, qu'il est de la plus grande importance que l'Assemblée s'explique promptement à ce sujet, la tranquillité intérieure de la France en dépend. Les approches de la moisson nécessitent l'émission d'un décret clair et précis, qui ôte toute matière de discussion entre les cultivateurs et les propriétaires de champarts et autres droits ci-devant féodaux, et qui éloigne pour toujours les nouveaux malheurs qui pourraient résulter de ces interminables disputes. Nous vous prions donc instamment, Monsieur le Président, de vouloir bien remettre cette affaire sous les yeux de l'Assemblée dont nous connaissons la justice et le zèle infatigable. « Nous sommes, etc.

Les 4 députés extraordinaires du département du Loiret.

་་

Signé CHARRIER, BRUEY,
LOISEAU, ROCHER. »

8° Adresse d'un grand nombre de citoyens de la garde nationale de la ville de Moulins, qui demandent que le service de la garde nationale, dans tout l'Empire, ne puisse être fait que personnellement, et non par remplacement.

9° Adresse des officiers, sous-officiers et canonniers du corps des canonniers-matelots, qui font parvenir à l'Assemblée le juste tribut de leur reconnaissance, relativement à la nouvelle organisation des troupes de l'artillerie et de l'infanterie de marine. Ils protestent de leur inviolable attachement à leurs devoirs.

10° Lettre du sieur Harmand, qui déclare être l'auteur d'un écrit dénoncé à l'Assemblée nationale (2), intitulé: Les complots et avis de la garde nationale, dans lequel il a donné l'indication de projets criminels ourdis contre le roi et contre la Constitution. Il annonce que la suite des propos tenus dans le public lui en a encore dévoilé la chaîne; que la persécution que son écrit éprouve lui fait croire plus que jamais à

(1) Archives nationales, Carton 152, dossier, n° 270. (2) Voy. ci-dessus, séance du lundi 11 juin 1792, au matin, page 78, la lettre du sieur Fraypoul au sujet de cet écrit.

la réalité des projets et qu'il ne cessera de lutter contre les ennemis qui s'acharnent à troubler l'ordre et à avilir les autorités constituées.

(L'Assemblée renvoie cette lettre aux comités de législation et de surveillance réunis.)

11° Adresse des citoyens de la ville d'Arras qui invitent l'Assemblée à adopter le projet qui fui a été présenté par le ministre de la guerre, pour le rassemblement, à Paris, à l'époque du 14 juil let, de 20,000 gardes nationales tirées des 83 départements; cette adresse est ainsi conçue (1) :

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Arras, le 8 juin 1792.

Représentants et législateurs,

Tous les défenseurs de la liberté nationale ne sont pas aux frontières, la France renferme encore beaucoup d'intrépides citoyens.

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Oui, le ministre de la guerre a pressenti le vœu national. Parlez et nous choisirons 5 volontaires par canton, pour aller au 14 juillet renouveler au Champ-de-Mars le serment fédératif des Français, tandis que, dans tout l'Empire, nous jurerons d'exterminer tous les ennemis de l'égalité et de la liberté. Hâtez-vous de prononcer ce décret 'salutaire et mettez-vous à portée de faire des choix exempts de toutes vues cupides et de toutes intentions liberticides.

« Déclarez que tous ceux qui voudront être pour un an les défenseurs exprès de nos lois et de nos représentants dans un camp près de Paris, seront tenus d'adresser leur nom au chef-lieu de district et que la liste des candidats soit renvoyée par les procureurs-syndics au cheflieu de canton, affichée 8 jours à l'avance dans chaque municipalité et communiquée à chaque assemblée primaire afin de les mettre à portée de porter leurs suffrages sur les plus fidèles amis du bonheur public.

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Plusieurs membres : La mention honorable au procès-verbal !

(L'Assemblée ordonne qu'il sera fait mention honorable de cette adresse au procès-verbal.)

Un de MM. les secrétaires donne lecture de 11 lettres adressées à l'Assemblée par divers citoyens de la garde nationale de Paris, qui tous révoquent les signatures et désavouent l'adhésion qu'ils ont donnée à la pétition présentée au Corps législatif pour la révocation du décret qui ordonne le rassemblement à Paris de 20,000 gardes nationales levées dans les 83 départements. Ils ajoutent que leur bonne foi a été surprise par les manoeuvres de l'état-major de la garde nationale parisienne.

(L'Assemblée renvoie ces lettres aux comités de législation et de surveillance réunis.)

(1) Archives nationales, Carton 152, dossier, n° 268. 1 SÉRIE. T. XLV.

Une députation de citoyens et de citoyennes de la rue Féron, section du Luxembourg, est admise à la barre et offre à la patrie 60 livres en espèces. (Applaudissements.)

M. le Président accorde à la députation les honneurs de la séance.

Un de MM. les secrétaires annonce les dons patriotiques suivants :

1o Les membres patriotes de la municipalité de Saintes envoient 130 livres en assignats et 15 livres en espèces.

2o Le procureur de la commune de Bayonne envoie, pour le compte de la Société des Amis de la Constitution, séante en cette ville, 2,100 livres en assignats et une quittance de 24 livres 8 sols.

3o La société des Amis de la Constitution de Castelnaudary envoie 320 livres en assignats et 234 livres 6 sols en espèces, en un bon de la poste.

4o Le sieur Piet fait don de 320 livres pour prime de deux captifs qu'il a introduits à Cayenne; cette somme lui est due par la nation.

5° Un inconnu envoie 200 livres en assignats et 102 livres en espèces.

6o Un inconnu envoie 9 livres en espèces et 131 livres en assignats.

M. Thariot dépose sur le bureau, au nom de la société des Amis de la Constitution de Sézanne, 24 livres en espèces d'or; 34 livres 4 sols en espèces d'argent et 146 livres 15 sols en assignats.

(L'Assemblée accepte toutes ces offrandes avec les plus vifs applaudissements et en décrète la mention honorable au procès-verbal dont un extrait sera remis à ceux des donateurs qui se sont fait connaître.)

Un de MM. les secrétaires donne lecture d'une lettre de M. Guyon, adjudant-général de la 3o légion de la garde nationale parisienne, qui réclame contre les calomnies que les citoyens du bataillon de Saint-Laurent se sont permis contre lui à la barre de l'Assemblée (1); cette lettre est ainsi conçue :

« Monsieur le Président,

« Ce n'est pas sans surprise ni sans indignation, que j'ai lu hier, dans le journal du soir, que les gardes nationaux du bataillon de SaintLaurent s'étaient présentés à la barre de l'Assemblée nationale pour censurer la conduite de l'état-major de la garde nationale, et me dénoncer comme leur ayant lu la pétition présentée la veille, au nom de 8,000 gardes nationaux, et que, non contents de ce premier acte de fausseté, ils m'avaient encore accusé d'avoir distribué d'affreux libelles. Si je n'avais l'honneur d'être fonctionnaire public, je ne ferais aucune attention à cette dénonciation; mais en cette qualité, je dois une justification à l'Assemblée où j'ai été calomnié, aux citoyens et à moimême, afin de ne pas laisser subsister un seul instant un soupçon injurieux dont les suites doivent nécessairement nuire à la confiance que ma place exige. Je dois en conséquence vous instruire, Monsieur le Président, que depuis la création de la garde nationale, la municipalité,

(1) Voy. ci-dessus, séance du lundi 11 juin, au matin, page 85, l'admission à la barre des citoyens du bataillon de Saint-Laurent.

1.2

les sections, qui désirent donner de la publicité, soit à leurs arrêtés, soit à leurs pétitions, sont dans l'usage de les déposer au secrétariat de l'état-major, qui ne reçoit, je vous le proteste, aucun libelle pour les attribuer aux 6 adjudants de semaine qui viennent prendre l'ordre, et le portent dans le chef-lieu de leur légion où la distribution se fait par égale portion entre les 10 bataillons qui la composent. Chaque adjudant reporte ces pétitions dans son bataillon et les luí communique. Voilà, Monsieur le Président, la manière dont se fait cette distribution. Il est du devoir de ma place de la surveiller, et j'ai cela de commun avec les 5 autres adjudants des 5 autres légions. Telle est ma conduite, Monsieur le Président. Soldat de 1789, ferme dans mes principes, j'ai juré de maintenir la Constitution, d'être fidèle à la nation, à la loi et au roi; je saisis avec empressement cette occasion de renouveler en vos mains un serment si cher à à tous les bons Français. Je vous prie, Monsieur le Président, d'engager le comité de surveillance, et je l'attends de votre justice, à faire les recherches les plus scrupuleuses sur cette affaire et de la rapporter le plus promptement possible.

« Je suis avec respect, etc.

:Signé: GUYON. »

(L'Assemblée renvoie cette lettre aux comités de législation et de surveillance réunis.)

5 Lettre de M. Chomel qui adresse à l'Assemblée un mémoire dans lequel il indique les moyens qu'il croit propres à rétablir le crédit des assignats.

(L'Assemblée renvoie le mémoire aux comités de l'ordinaire et de l'extraordinaire des finances réunis.)

Un membre propose que la commune de Bayonne soit autorisée, conformément à la demande qu'elle en a déjà faite, à nommer un second juge de paix pour cette ville.

(L'Assemblée renvoie cette proposition au comité de division.)

M. Rühl. Messieurs, je dois vous rendre compte d'un fait qui mérite toute votre attention. Un des meilleurs citoyens de la ville de Strasbourg, M. Georges Schertz, père d'une nombreuse famille et fortement attaché à la Constitution, juge de paix et membre du conseil général du département du Bas-Rhin, obligé pour une affaire de commerce, de passer le Rhin, muni d'un excellent passeport de la municipalité, a été arrêté à Urloffen, dans l'Ortenau, par un officier autrichien et conduit à Fribourg. La municipalité, instruite de cette arrestation, a demandé à l'officier autrichien pourquoi on avait arrêté un citoyen passant le Rhin pour affaire de commerce. La réponse qu'elle a reçue portait que ce citoyen, étant inscrit dans la garde nationale, devait être regardé comme militaire, et que, comme tel, il était fait prisonnier de guerre. Je crois que cela doit mériter d'autant plus votre attention que nous sommes tous inscrits dans la garde nationale. Je demande que ce fait soit renvoyé aux comités diplomatique et militaire, pour délibérer sur les mesures à prendre dans ces circonstances et présenter un projet de décret à ce sujet.

J'ajoute que, quoique l'on ait dit ce matin que toutes les places des départements du Haut et Bas-Rhin étaient en très bon état, il n'en est pas

moins vrai que nous avons fort peu de troupes, que les Autrichiens rassemblent presque toutes leurs forces de ce côté, et que l'on nous amuse du côté du Nord, pour nous attaquer après cela par ces départements.

Je demande donc, en outre, que le pouvoir exécutif soit chargé de rendre compte du nombre des troupes que contient chacune de nos places fortes, et je vous prie de ne pas vous laisser endormir.

M. Crublier d'Optère. Lorsque je vous ai annoncé que nos places étaient en état de défense, je n'ai entendu parler que des fortifications; car pour ce qui concerne l'état des troupes, vous sentez que ceux qui résident ici depuís 8 mois ne peuvent le garantir.

Plusieurs membres demandent sur ce dernier point la question préalable.

(L'Assemblée renvoie la première proposition de M. Rülh aux comités diplomatique et militaire réunis, et décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur sa seconde proposition.)

M. Brémontier, au nom de la commission de surveillance pour la fabrication des assignats, fait un rapport (1) et présente un projet de décret sur un concours à ouvrir pour la fabrication des assignats; il s'exprime ainsi :

Messieurs, de nouveaux assignats, de nouvelles coupures vont entrer incessamment en circulation; mais déjà, Messieurs, vous prévoyez la nécessité de remplacer dans un temps peu éloigné les assignats de 5 livres qu'une circulation rapide a déjà détériorés en partie. Déjà vous sentez la nécessité de substituer à ce papier national, qu'une émission précipitée et l'inexpérience en ce genre ont laissé très imparfait, un assignat plus soigné, plus difficile à imiter et plus convenable. Ce renouvellement, dont quelques circonstances peuvent commander la prompte exécution, est donc inévitable, et dès lors il convient d'adopter, en avance et dès à présent, tous les moyens d'économie et de perfection dont ce renouvellement est susceptible.

Sans cette précaution vous ne pouvez, Messieurs, obtenir dans les prix de fabrication les réductions que vous avez droit d'attendre;

Vous ne pouvez assurer à la nation cette indépendance dans le choix des divers fabricateurs, indépendance sans laquelle on ne peut se flatter d'obtenir aucun avantage dans les assignats et coupures, qu'il faudra substituer à ceux actuellement circulants.

Les lenteurs et les embarras se reproduiront au moment peut-être où le renouvellement exigera la plus grande célérité; et le renchérissement déjà très sensible dans le chiffon, cette matière première, sera porté à un degré alar

mant.

On sait que pour obtenir des résultats certains, il faut que les épreuves soient réitérées longtemps avant l'émission; on sait qu'une refonte générale des assignats circulant, préparée en avance et promptement exécutable, peut seule rassurer le peuple sur les désordres que la contrefacon peut produire, et déjouer les projets criminels des contrefacteurs.

Ces motifs d'utilité publique n'ont point échappé sans doute à votre comité des assignats et monnaies, et peut-être a-t-il à vous faire quelques

(1) Bibliothèque nationale: Assemblée législative. Monnaies et Assignals, no 30.

propositions du même genre; mais quel que soit le parti que vous preniez, il n'aura pas été inutile de fixer l'attention de l'Assemblée nationale sur l'adoption d'une mesure qui, si elle est avantageuse, ne peut être trop tôt consacrée. Votre commission de surveillance pour les assignats vous propose donc, Messieurs, d'établir actuellement un concours pour toutes les parties relatives à la fabrication des assignats, et d'ordonner que votre comité des assignats et monnaies recevra, dès à présent, les diverses soumissions, soit pour la fourniture du papier ordinaire, ou fabriqué avec toute autre matière plus commune et plus économique, soit pour l'impression, la gravure ou le timbrage, et généralement pour toutes les parties qui entrent dans la composition des assignats et coupures en circulation, ou tels qu'on pourrait les obtenir au moyen des nouveaux procédés que peuvent offrir l'expérience et l'industrie perfectionnées.

Votre choix une fois fait, les formes, le prix de fabrication, les délais accordés pour la fabrication et les genres de responsabilité étant déterminés, l'exécution en sera confiée à des artistes ou entrepreneurs éprouves, qui s'assureront en avance des ouvriers, d'un local, des machines et des matières premières.

L'exercice de la surveillance deviendra plus facile, l'exécution plus prompte; et la nation, instruite de l'époque où elle pourra jouir de ce renouvellement utile, attendra sans impatience cette mesure salutaire.

Telles sont les principales considérations, Messieurs, qui ont fait adopter à votre commission de surveillance pour les assignats, le projet de décret que j'ai l'honneur de vous soumettre.

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Projet de décret.

L'Assemblée nationale voulant adopter en avance tous les moyens d'économie, de perfection et de célérité dans le renouvellement des assignats ou coupures, que les circonstances peuvent nécessiter; considérant que pour obtenir ces avantages, il est nécessaire d'ouvrir, longtemps avant ce renouvellement, un concours pour les entrepreneurs ou artistes jaloux de mériter la préférence par des procédés nouveaux, plus prompts, plus économiques et plus ingénieux dans la fabrication du papier, l'impression, le timbrage et autres parties accessoires de l'assignat, décrète

«Art. 1er. Le comité des assignats et monnaies est dès à présent chargé de recevoir les diverses propositions des artistes ou entrepreneurs qui voudront concourir à la fabrication et fourniture du papier actuellement employé pour les assignats, ou de tel autre papier jugé plus convenable on y recevra également les autres propositions relatives à l'impression, gravure, timbrage, ou autres parties accessoires servant à compléter ou perfectionner les assignats.

« Art. 2. Il sera ouvert à cet effet, au secrétariat du comité des assignats et monnaies, un registre sur lequel seront inscrits, d'un côté, les noms des soumissionnaires et leur domicile; « Le prix de leur soumission;

"Les quantités qu'ils s'obligeront de fournir; «Le délai par eux demandé pour ces fournitures;

«Et enfin la nature et la valeur du cautionnement par eux offert.

« Et de l'autre côté du registre seront appliqués les échantillons de l'espèce du papier par eux proposé, ainsi que les diverses épreuves en gravure, impression, timbrage ou autres parties accessoires.

« Art. 3. Ce registre sera ouvert à cet eff t jusqu'au 31 décembre prochain, terme fixé pour le concours, et à l'expiration duquel la préférence sera accordée à celui des artistes ou entrepreneurs, qui, sur le rapport du comité des assignats et monnaies, aura présenté les résultats les plus certains et les plus avantageux pour la nation, soit pour la fabrication du papier actuellement employé, soit pour un nouveau papier, soit enfin pour toute autre partie accessoire de l'assignat, comme l'impression, la gravure, le timbrage, ou autre caractère additionnel d'une utilité reconnue.

« Art. 4. Immédiatement après que la préférence aura été accordée, l'Administration spécialement chargée de surveiller le renouvellement des assignats et coupures, s'occupera de la confection des marchés et de leur exécution. >>

(L'Assemblée ordonne l'impression du rapport et du projet de décret et ajourne la discussion.) M. Fouquet, au nom des comités de l'extraordinaire des finances et des assignats et monnaies réunis (1), soumet à la discussion un projet de décret sur l'établissement d'une nouvelle Administration pour la confection des assignats; ce projet de décret est ainsi conçu :

Décret d'urgence.

« L'Assemblée nationale, informée que le défaut d'unité qui a eu lieu jusqu'à ce jour dans les différentes parties de l'Administration concernant la confection des assignats, a nui souvent à la célérité comme à la perfection de leur fabrication; voulant empècher ces inconvénients de se reproduire, et considérant que les opérations nécessaires pour l'achèvement des petites coupures, décrétées les 17 et 23 décembre 1791, exigent des dispositions qu'il est convenable de confier incessamment à des administrateurs qui, libres de toutes autres fonctions, puissent en suivre les détails dans toute leur étendue; après avoir entendu le rapport de ses comités de l'extraordinaire des finances et des assignats réunis, décrète qu'il y a urgence.

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