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serré, et les seuls achats d'espèces pour le Trésor public sont suffisants pour porter les assignats au prix actuel de 166 deux tiers 0/0 ou de 33 un tiers au-dessous de la valeur réélle estimée sur un pied de 5 0/0 d'intérêt.

Dans cet état des choses, les achats d'espèces coutent au Trésor public, annuellement, 48 millions de dépense extraordinaire, qui n'existera plus dès que l'on fournira un placement utile aux assignats qui les rendra préférables, en quelque sorte, à l'argent.

J'observe, en second lieu, que les 90 millions levés indirectement sur les porteurs d'assignats, par l'intérêt retenu à leur préjudice par l'Etat, et la défaveur où sont actuellement les assignats, obligent nécessairement tous les citoyens aisés de restreindre leur dépense en consequence de la diminution de leur fortune. Que, par là, il existe malheureusement une diminution de consommation (en y ajoutant le défaut de rapport des capitaux en espèces qui demeurent enfouis) de 150 à 200 millions annuellement. Ces 150 à 200 millions jetés de plus dans la circulation, retomberaient en filets imperceptibles jusque sur la classe indigente qui dans ce moment est augmentée à un point vraiment alarmant, et qui, si l'on n'y pourvoit par des mesures promptes, exigera des sacrifices immenses de la part de l'Etat sacrifices qui ne feront que pallier le mal sans le guérir, parce que des secours gratuits, accordés par le gouvernement, ne tendent qu'à favoriser et propager la paresse sans encourager l'industrie. Si l'on n'y obvie incessamment, les secours indispensables pour prévenir le désespoir de la classe indigente, absorberont, et au delà, les 90 millions qu'on prétend faire gagner à la nation; tandis qu'en demeurant fidèles aux principes de justice, en fournissant aux capitalistes un moyen de faire valoir leurs fonds, ils rejetteront dans la circulation leur superflu, qui se répandra sur la masse totale des citoyens, ranimera l'industrie, facilitera la perception des impositions et en augmentera considérablement la masse, en faisant rentrer dans la classe des contribuables une grande partie de ceux qui, actuellement, réclament au contraire des secours indispensables, et enfin, exemptera l'Etat de subvenir aux besoins urgents des pauvres. Qu'on ne s'y trompe point; je ne plaide point ici la cause des capitalistes, mais celle des pauvres et de l'Etat. En effet, si un homme qui avait 100,000 livres de rente se voit réduit, par la situation actuelle des choses à 60,000 livres, il est clair qu'il est obligé de réduire sa dépense de 40,000 livres. Ces 40,000 livres ne sont pas une perte réelle pour lui, il peut encore satisfaire à ses besoins raisonnables, et à une grande partie de ses caprices; mais, l'homme qui ne vit que de son industrie et du travail journalier est plongé dans la misère par la réduction de la dépense du riche. 100 familles sont réduites à la mendicité par la privation de 400 livres du fruit de leur travail que ce riche ne peut plus verser annuellement dans leurs mains. Je ne fais pas entrer en ligne de compte tous les intermédiaires, qui augmentent cependant considérablement ce fâcheux tableau; car ces 40,000 livres, en passant par une multitude de différentes mains avant de revenir à la classe indigente, produisent des fruits qui en augmentent infiniment la masse. Qu'on juge par ce seul échantillon des suites funestes que doit nécessairement produire la diminution réelle d'environ 200 millions dans la dépense générale, et l'on ne sera

plus surpris de l'état de détresse dans laquelle se trouve la classe indigente ni de l'accroissement alarmant de cette classe infortunée.

Enfin, il est clair que les intérêts des annuités vendues ou transportées aux porteurs d'assignats ne retombent pas à la charge de la nation parce que cette mesure, anéantissant une grande somme d'assignats, l'Assemblée nationale peut en recréer d'autres sur-le-champ, au moyen desquels elle peut étendre les remboursements, et éteindre, par cela même, une masse équivalente de rentes qui se payent actuellement sur le pied des intérêts des annuités.

Après des arguments aussi forts et aussi fondés sur la raison et la justice, il sera sans doute superflu d'y ajouter des considérations moins importantes, parce qu'elles ne sont que politiques. Je ne puis cependant me résoudre à passer sous silence le rétablissement du crédit public, des changes, et surtout l'affermissement de la Constitution, résultat nécessaire de la conversion des assignats en un emprunt fondé sur les annuités.

Le crédit public et les changes ne sont altérés que par le discrédit des assignats. Donnez un écoulement aux assignats surabondants, et à l'instant la confiance renaîtra, la différence entre les espèces et les assignats s'anéantira; les changes se relèveront nécessairement par cela même, et reviendront bientôt à leur taux ordinaire.

En offrant un placement solide aux porteurs d'assignats, la plus grande partie des gens aisés s'empresseront de convertir ce papier stérile en annuités, surtout lorsqu'ils verront la certitude de ne pouvoir être remboursés qu'en espèces. Dès que leur intérêt propre sera ainsi lié avec le maintien de la Constitution, elle n'aura pas de plus zélés défenseurs, tandis que l'état actuel des choses excite un juste mécontentement et fait encore douter beaucoup de bons esprits des avantages de la Révolution. Rétablissez le crédit et l'esprit public reparaîtra dans toute son énergie. On se plaint avec raison que l'esprit public parait anéanti. Mais peut-il se manifester, peut-il même exister, lorsque par l'état incertain des finances toutes les fortunes sont ébranlées, et que tous les citoyens, sans exception, sont dans l'angoisse, et craignent de voir le fruit de leurs travaux, leur subsistance même compromise, sous les ruines de la fortune publique?

Je conclus donc à ce que, sans s'arrêter à une objection dont je crois avoir démontré évidemment la futilité, l'inconvenance et l'injustice, l'Assemblée nationale prenne sans délai les mesures les plus efficaces pour donner un grand mouvement à la réalisation des assignats et à leur échange contre les annuités. Le sacrifice que l'Assemblée fera dans cette occasion, à l'evidente justice, est non seulement nul, mais d'une conséquence très avantageuse aux intérêts de l'Etat, en lui assurant un revenu considérable et permanent. Dès que les porteurs d'assignats verront seulement qu'ils ont la faculté de faire cet échange, à tout instant, toute crainte s'évanouira, et on ne verra plus dans les assignats un papier stérile; on ne les considérera plus que comme une monnaie beaucoup plus commode que les espèces, et si à París seul, dans les temps où la caisse d'escompte jouissait encore de tout son crédit, il y avait pour 130 à 140 millions de billets de la caisse en circulation, si alors ces billets obtenaient encore la préférence sur l'argent, en raison de leur com

modité dans les payements, on peut s'attendre que les assignats, ayant cours dans toute la France, il en demeurera toujours environ un milliard dans la circulation ce qui produira un bénéfice net à l'Etat de 50 millions par an sans aucun désavantage pour les citoyens, parce qu'alors ce n'est plus un impôt forcé, mais purement volontaire, et par cela même insensible, balancé par la commodité des payements, qui forme une économie réelle pour tout négociant.

29 mars 1792.

Plus on réfléchit sur l'objection, tirée du préjudice que l'Etat éprouverait de la vente des annuités, qu'on oppose au plan formé pour retirer de la circulation les assignats surabondants, plus on a lieu d'être surpris que cette objection ait excité la moindre attention. Elle est à tous égards absurde et fausse; elle est contraire à tous les principes d'équité, de loyauté, de bonne foi; elle tend évidemment au détriment de la chose publique, bien loin de lui être avantageuse. Sans répéter ici les observations déjà présentées dans un précédent mémoire, sur ce sujet intéressant, observations auxquelles on se flatte qu'il est impossible de répondre d'une manière satisfaisante, on se bornèra uniquement à quelques réflexions qui paraissent devoir seules décider la question sans réplique.

La vente des biens nationaux s'est faite avec de grandes facilités pour les acquéreurs, relativement aux termes du payement. L'Assemblée nationale, en accordant de longs termes, a eu évidemment en vue (et elle a même avoué ce motif), d'exciter une plus grande concurrence, pour vendre à de plus hauts prix. Elle a complètement réussi dans cette spéculation, Elle a senti, en même temps, qu'elle ne pouvait, sans injustice, obliger les acquéreurs à se soumettre au payement d'un intérêt de 5 0/0, plus longtemps que cela ne leur conviendrait; il y a plus, l'intérêt de l'Etat exigeait impérieusement que l'on laissât aux acquéreurs la faculté de se libérer lorsque cela leur conviendrait. Aussi l'Assemblée nationale a-t-elle accordé cette faculté par un décret exprès. Sans cette faculté les biens nationaux se fussent vendus assurément à un plus bas prix, parce que les acquéreurs, calculant sur la perte qui résultait pour eux d'un intérêt de 5 0/0 payé sur des biens qui ne rapportent guère que 3 0/0, l'impôt déduit, devaient nécessairement réduire leurs enchères en conséquence, s'ils ne conservaient l'espoir de se libérer a volonté. Le taux de l'intérêt fixé à 5 0/0 prouve encore que l'Assemblée nationale, conformément aux lumières de la raison la plus épurée et aux vrais principes de finances, a eu intention de stimuler les acquéreurs à s'acquitter le plus tôt possible et à se libérer d'un engagement onéreux, afin de hàter ainsi la liquidation générale et l'anéantissement des assignats.

La vente des annuités n'est, dans le fond, autre chose qu'un moyen de plus de parvenir, sans perte pour l'Etat, au but que l'Assemblée nationale s'est proposé, et devait tâcher d'atteindre; et ce moyen est même plus avantageux à l'Etat que si tous les acquéreurs des biens nationaux s'acquittaient directement, comme ils en ont incontestablement le droit, et comme ils le feront indubitablement si on n'ouvre point un autre débouché aux assignats surabondants, car qu'on y fasse attention: le Trésor public aura encore de grands besoins cette année, ce

qui nécessitera une nouvelle émission d'assignats. Les assignats, en se multipliant, se dégraderont de plus en plus. Si la crainte d'une guerre vient s'y joindre, on doit s'attendre à voir les assignats réduits au quart de leur valeur et peutêtre au-dessous. Il en résultera nécessairement une hausse prodigieuse dans la valeur de toutes les propriétés. Les acquéreurs des biens nationaux revendront ces biens, ou d'autres propriétés, au quadruple de leur valeur primitive, et avec une légère portion de leur bénéfice ils retireront leurs annuités. L'Etat se trouvera ainsi payé en monnaie discréditée, il n'y aura plus d'intérêts à percevoir, et pour avoir voulu s'approprier la jouissance entière d'un revenu casuel injuste et contraire aux principes, on perdra tout, tandis que le Trésor public restera chargé des frais immenses qui résulteront pour lui du cours d'une monnaie dépréciée.

Quand même on admettrait que la caisse d'échange absorbât toutes les annuités, encore serait-il évident, qu'en prévenant par là le discrédit des assignats, l'Etat y gagnerait immensément. Mais un tel établissement engloutira-t-il toutes les annuités? Il faudrait bien peu connaître les hommes et les opérations de finances pour se le persuader. Il suffit que l'on soit généralement assuré de la faculté de pouvoir employer, à chaque instant, ses fonds avantageusement, pour que tous les esprits se tranquillisent. On ne se hâte point de se défaire d'un effet qu'on est persuadé de pouvoir placer utilement à tout moment. Il ne s'écoulera donc vers la caisse d'échange que les assignats véritablement surabondants, et il parait très assuré que jamais cette caisse n'aura plus de 3 à 400 millions d'annuités en sa garde, en comptant au plus haut. En admettant cette caisse, l'Etat ne perd donc pas la totalité des revenus qu'il retire des annuités; au contraire, en en sacrifiant, en apparence, 15 à 20 millions au plus, il s'assure la jouissance du reste, et en relevant par ce moyen, aussi simple que sage, le crédit des assignats, il épargne les 48 millions que coùtent dès à présent les achats d'espèces; en même temps qu'on assure par là toutes les fortunes particulières, et qu'on éloigne cette inquiétude générale, qui est le plus grand obstacle au retour de le paix intérieure, et de l'établissement de l'esprit public. On ne parle pas ici des services importants que la caisse d'échange peut rendre au gouvernement, parce qu'il ne s'agit que d'examiner la question sous son point de vue direct.

La déclaration de guerre, décrétée dans la séance d'hier au soir, devant nécessairement entraîner de nouvelles émissions d'assignats, et augmenter la différence déjà trop considérable qui existe entre les espèces et les assignats, il parait indispensable de réveiller, sur cet objet important, l'attention des représentants de la nation. C'est le but de ces mémoires, qui, ayant été écrits sans prétention et n'étant point destinés à l'impression, eussent été mis dans un meilleur ordre, si le temps eût permis d'y faire les additions et corrections convenables.

Paris, 21 avril 1792 (1).

(1) A Paris, de l'imprimerie H. J. Jansen, Cloitre Saint-Honoré, 1792.

ASSEMBLÉE NATIONALE LÉGISLATIVE.

Séance du jeudi 14 juin 1792, au matin. PRÉSIDENCE DE M. FRANÇAIS (DE NANTES). La séance est ouverte à neuf heures du matin. Une députation de citoyens, marchands d'habits, des sections de Sainte-Geneviève et de la CroixRouge, est admise à la barre et offre 206 livres en assignats.

M. le Président accorde à ces citoyens les honneurs de la séance.

Un de MM. les secrétaires annonce les dons patriotiques suivants :

1° Un anonyme envoie 835 livres 12 sols en assignats;

2o Le sieur Chevassé, dit Champagne, cocher de M. Lacoste, offre 15 livres en espèces et 5 livres en assignats;

3o Les ouvriers de l'atelier des postes pour les voitures de transport des dépêches envoient 100 livres en assignats.

4° Les administrateurs, procureur général syndic et secrétaire du district de Romans (Drôme) donnent 1400 livres pour les frais de la guerre.

M. Bernard (de Saintes). J'offre, au nom de plusieurs officiers municipaux de la ville de Saintes, une somme de 200 livres.

M. Oudot. J'annonce à l'Assemblée que MM. les juges composant le tribunal du district de Beaune el le commissaire du roi par intérim offrent 600 livres à prendre sur leur traitement, par quart, sur chaque trimestre à compter d'avril.

M. Beaupuy. Je vais lire à l'Assemblée l'état des offrandes faites à la patrie pour le soutien de la guerre, par la garde nationale de la ville de Périgueux, par plusieurs officiers municipaux de la ville de Mussidan (chef-lieu du district du département de la Dordogne) et des communes voisines, et par les citoyens réunis en Société des amis de la Constitution de ladite ville.

La ville de Périgueux: 1o La garde nationale, boucles d'argent, 3 marcs, 6 onces et 5 gros;

2° Mile Montauson, un gobelet d'argent, 2 onces, 6 gros; une croix d'or, un gros et demi et 12 grains.

Mussidan: 1° Les officiers municipaux de cette ville et des communes voisines, 167 livres, 8 sols; 2o La Société des amis de la Constitution, 95 livres 1 sol.

Ensemble 262 livres, 9 sols.

(L'Assemblée accepte toutes ces offrandes avec les plus vifs applaudissements et en décrète la mention honorable au procès-verbal dont un extrait sera remis à tous les donateurs qui se sont fait connaître.)

Un de MM. les secrétaires donne lecture des lettres et pétitions suivantes :

1° Pétition d'un grand nombre de citoyens des communes de Tiffanges, Labussière, Montfauconla-Romagne et autres communes des départements de la Vendée, Loire-Inférieure, Mayenne, Loire, qui instruit l'Assemblée des manœuvres et des attentats commis par des prêtres insermentés, propres à faire éclater dans leur pays la guerre civile. Ils sont parvenus, disent ces citoyens, à semer la division dans les familles; les épouses

fuient leurs époux, les frères s'arment contre leurs frères et la paix est bannie de ces contrées. Ils joignent à leur pétition une série de 12 faits constatés par des procès-verbaux.

M. Cambon. Je demande le renvoi au roi pour qu'il connaisse la vérité. Il a en main le décret qui tend à prévenir les malheurs qui nous menacent et il se convaincra, par la lecture de ces lettres, qu'il faut enfin nous débarrasser de ces monstres qui sèment partout la discorde.

M. Thuriot. J'appuie la motion de M. Cambon, mais en même temps je demande que l'on ordonne au ministre de la justice de presser les tribunaux et de nous rendre compte des poursuites qui ont été ordonnées contre les prêtres perturbateurs.

M. Merlet. Il y a quelques jours que l'on vous a fait part des troubles survenus dans le département de Mayenne-et-Loire. Il existe, dans ce département, un complot dirigé contre la sùreté générale de l'Etat, dans lequel plusieurs municipalités sont impliquées. Le tribunal criminel du département, sur la dénonciation de l'accusateur public, a décerné des mandats d'arrêt contre divers accusés qui sont détenus dans les maisons d'arrêt. Mais, ne se croyant pas compétent pour connaitre de cette affaire jusqu'à jugement définitif, attendu qu'elle intéressé la sûreté générale de l'Etat, il a envoyé à l'Assemblée les pièces de cette procédure, pour attendre sa décision avant d'y donner suite. Vous avez renvoyé les pièces au comité de surveillance, je demande que celle-ci y soit également renvoyée pour vous faire un rapport sur le tout.

M. Thuriot. Si l'on renvoie au comité de surveillance, je demande qu'une copie collationnée de la pétition soit envoyée au roi.

M. Bréard. Je demande que cette copie soit portée au roi par des commissaires de l'Assemblée.

(L'Assemblée renvoie la pétition au comité de surveillance. Elle décide en outre qu'une copie collationnée en sera portée au roi par des commissaires pris dans son sein.)

20 Lettre de plusieurs citoyens, négociants à Bordeaux, datée du 26 mai 1792, qui témoigne leurs inquiétudes sur le payement des lettres de change tirées sur Saint-Domingue. Les objets de leurs cargaisons, disent-ils, ont servi aux besoins urgents des malheureux colons, qui ne leur ont donné en payement que du papier sur le Trésor national. Quoique ces retours soient bien moins avantageux pour le commerce, que s'ils étaient faits en denrées coloniales, les négociants de Bordeaux sont bien éloignés de s'en plaindre, et ils s'estiment heureux d'avoir pu contribuer à soutenir les colons; ils prient seulement l'Assemblée de prendre en considération les intérêts du commerce, en ordonnant que les lettres de change qui leur ont été données en payement seront acquittées par le Trésor de la nation.

(L'Assemblée renvoie cette lettre au comité colonial.)

M. Devaraigne donne lecture d'une lettre des officiers municipaux de la commune de Langres, datée du 12 juin 1792, et relative à une émeute qui a eu lieu dans le canton de Neuilly-l'Evêque (Haute-Marne), à l'occasion de l'élection des officiers de la garde nationale. Pendant cette émeute les officiers municipaux et la garde nationale de Langres se sont comportés avec au

tant de bravoure que de prudence. C'est au zèle de M. César Adnís, commandant de la garde nationale de Langres et aux trois compagnies de grenadiers de la même ville, qu'est dû le rétablissement de l'ordre.

(L'Assemblée décrète la mention honorable au procès-verbal de la conduite des officiers municipaux, de la garde nationale et de son commandant, M. César Adnis, de Langres, et renvoie cette lettre aux comités militaire et de surveillance réunis.)

Un membre: Voici un arrêté des officiers municipaux de la commune de Perpignan, dont l'objet a été de former une association pour le soulagement des pauvres.

Séance du 23 avril 1792, l'an IVe de la liberté.

« Un membre a demandé que, vu l'urgence d'approvisionner la ville de viande, et attendu le peu de moyens qu'offrait la caisse de la commune pour cet objet, le corps municipal fit une invitation aux négociants, pour qu'ils se chargent d'approvisionner la commune au prix fixé par la municipalité le 9 du courant.

« Cette proposition ayant été adoptée, il a été fait incessamment des billets d'invitation à divers négociants, aux fins de se rendre à 7 heures à la maison commune, pour concerter les moyens de fournir de la viande aux citoyens de la commune de Perpignan.

« Les négociants invités s'étant rendus à l'heure indiquée, le maire leur a proposé qu'attendu les probabilités qu'il y avait que la commune de Perpignan manque de viande, les fournisseurs actuels faisant difficulté de continuer cette fourniture, dans l'espoir, sans doute, d'obtenir une augmentation dans le prix des diverses espèces de viande de boucherie, ce qui ne pourrait être qu'au détriment de la classe indigente des citoyens, au secours de laquelle les citoyens aisés doivent se faire un devoir d'accourir, ils voulussent bien former une société, dont l'objet serait d'approvisionner la commune de Perpignan de toute espèce de viande, au prix fixé par la municipalité.

« Cette proposition a été accueillie avec l'enthousiasme du civisme dont sont pénétrés les citoyens invités; et il a été à l'instant convenu et arrêté entre eux qu'ils formeraient la société proposée, renvoyant au lendemain à arrêter les bases d'après lesquelles les membres de la société seraient, au profit de la commune, liés entre eux. »

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« 3° S'il résulte quelque profit de cette association, ce profit sera employé au soulagement des pauvres; et s'il en résulte une perte, elle sera supportée également, et non au marc la livre, par tous les associés; (Applaudissements.)

4o Un bureau, composé de 7 personnes, prises dans le nombre des coassociés, sera chargé de la surveillance et de la direction de la fourniture. Un d'eux fera les fonctions de caissier. Les assemblées de bureau se tiendront chez le caissier, et celui-ci y aura voix délibérative;

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5o Le bureau aura la faculté de nommer, parmi les coassociés, des suppléants pour remplacer les membres absents;

6o Le caissier sera M. Dastros, et les autres 6 membres, composant le bureau, seront MM. Carcassonne, Sébes aîné, Joseph Mathieu, François Malibran, Frigola cadet, et Gros;

« 7° Il sera fait un fonds, composé d'une mise libre et volontaire, de la part de chaque associé; et en cas qu'il fùt nécessaire de faire un supplément de fonds, la somme de ce supplément sera d'abord arrêtée par le bureau, et puis, répartie, par chaque associé, au marc la livre de sa première mise;

« 8° Les assignats qui seront donnés pour faire ces fonds ne pourront être d'une valeur supérieure à 300 livres.

«Et tout de suite chaque associé ayant fait sa mise particulière, il en est résulté que celle de M. Dastros se monte à la somme de. 2,400 liv. MM. Laurent Frigola, à...

Farines, à Pancou, à..

Réalou, à

Delmas-Carla, à..
Saisset et Galet, à .
Louis Claret, à...
Bernard Claret, à.
Sébes aîné, à..
Basset, à..
Bonaure, à..
Vassal, à...
Carcassonne, à..
Méric et Sagone, à..
Vignier et Chalumeau, à
Joseph Mathieu, à .

300

300

300

300

500

1,000

1,000

300

300

300

500

300

500

1,500

300

500

Delanquine, à.

300

Malègue, à..

300

Reynier, imprimeur, à.. Batlle, à.

2,000

500

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Nos enfants possèdent dans leurs cœurs le germe des vertus; ils attendent de vous les moyens de les faire éclore en leur donnant ce code d'éducation si désirė; les plus avances de mes elèves apprennent les droits de l'homme, les plus jeunes délient leurs langues enfantines en prononçant avec moi les mots sacrés de Constitution, de liberté, de soumission aux lois; je grave dans leur memoire les noms des fondateurs de notre liberte; ils entendent souvent lire l'extrait de vos pénibles travaux et ils applaudissent aux noms cités que votre modestie veut que je taise; le mot de classe primaire excite leur émulation, leur vou est d'être instruits d'après votre plan; ils partagent en cela celui de la nation entière. Daignez, sages legislateurs, ordonner le rapport definitif de cet objet si nécessaire à l'Etat : il en est temps, car il existe dans cette capitale des êtres de mœurs peutêtre plus que suspectes qui instruisent la jeunesse; les couvents de femmes sont les repaires où l'aristocratie, étalant l'appareil de ses sophismes trompeurs, séduit et gâte le cœur des filles de nos concitoyens. Etablissez les bases de l'éducation nationale, nos enfants apprendront à devenir des hommes plus fermes que nous dans les principes de la liberté, ils en soutiendront avec plus d'énergie les colonnes et feront pâlir et trembler les tyrans qui voudraient renverser votre ouvrage. Leurs àmes élevées audessus des préjugés où nous avons vécu aimeront des corps dont les bras guerriers porteront des armes protectrices pour leurs représentants et meurtrières pour ceux qui voudraient s'opposer à leurs décisions utiles. Prononcez ce décret régénérateur et la France est sauvée, les instituteurs aux gages des traitres à leur patrie rentreront dans leur néant et nos enfants élevés par des amis de la vérité, n'écouteront plus d'autre voix que celle de la raison. »

M. le Président accorde à M. Amyot et à ses élèves les honneurs de la séance.

M. Arbogast. Je rappelle à l'Assemblée la nécessité de s'occuper enfin du travail présenté par M. Condorcet sur l'organisation des établissements de l'instruction publique, et je demande que cette discussion commence demain et qu'à partir de lundi prochain il soit consacré un jour par semaine à cet objet jusqu'à ce qu'il soit entièrement décrété.

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« L'Assemblée nationale a été informée des troubles qui ont éclaté à Yssingeaux, dans les fètes de Pâques, et des mesures qui ont été prises pour en arrêter les effets, en rechercher et en faire punir les auteurs. L'instruction a été suivie sans relâche jusqu au 4 de ce mois, jour auquel le directeur du jure a fait son rapport au tribunal. Il y expose qu'il résulte des déclarations des témoins entendus depuis le 28 avril jusqu'au 3 juin, des actes et pièces de la procédure, qu'il existait un complot tendant à troubler l'Etat par une guerre civile, en armant les citoyens les uns contre les autres et en résistant la force publique, mise en action pour arrêter l'effet d'un pareil complot, auquel plusieurs officiers municipaux et plusieurs officiers de la garde nationale ont participé.

« Le tribunal, d'après ce rapport et l'examen qu'il a fait de la procédure, a re du, le 4 juin, un jugement par lequel il a renvoyé devant le Corps legislatif, pour statuer s'il y a lieu à accu

sation.

« J'ai l'honneur, Monsieur le Président, de vous transmettre cette procédure que j'ai reçue hier, et de vous prier de la mettre sous les yeux de l'Assemblée nationale, afin qu'elle décide si les délits commis à Yssingeaux sont de nature à être jugés par la haute cour nationale, ou si les tribunaux ordinaires doivent continuer d'en connaître.

"

Je suis avec respect, Monsieur le Président, etc. « Signé DURANTHON. »

« Ce jourd'hui, 4 juin 1792,

«Le tribunal, assemblé dans la salle du prétoire, M. Faure, directeur du juré, a exposé que d'après 2 dénonciations à lui faites, l'une faite par les sieurs Joseph Maurin, Pierre Besson et Joseph Delasme-Lapra, officiers municipaux, Mathieu Desrois et Jean-Claude Delabre, notables. et Jacques Gagne, aussi notable, substitut du procureur de la commune d'Yssingeaux, du 23 avril dernier, et l'autre par M. Lafayolle La Bruyère, commissaire du roi, du 5 mai dernier, contre les auteurs, fauteurs des attroupements séditieux qui ont eu lieu à Yssingeaux les fêtes de Pâques dernières; qu'il résulte des déclarations des témoins et des actes et pièces qui lui ont été remis, qu'il existait un complot tendant à troubler l'Etat par une guerre civile, en armant les citoyens les uns contre les autres et en résistant à la force publique, mise en action pour arrêter un pareil complot; que plusieurs officiers municipaux et officiers de la garde nationale sont prévenus du délit, et comme l'affaire lui a paru de la première conséquence, il en a fait le rapport au tribunal et l'a rèquis de délibérer si elle devait

(1) Archives nationales, Carton 151, dossier n° 266.

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