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(L'Assemblée adopte l'article 26.)

M. Muraire, rapporteur, donne lecture de l'article 27; il est ainsi conçu :

Dans les villes dont la population n'excède pas 6,000 âmes, il pourra n'être tenu qu'un registre double, dans lequel les actes de mariage, naissance et décès seront inscrits de suite. La table mise à la fin de ce registre sera par ordre alphabétique et divisée en 3 parties: l'une pour les naissances, l'autre pour les mariages, la troisième pour les décès. »

Plusieurs membres : La question préalable!

M. Muraire, rapporteur. Avant que vous rejetiez l'article, je dois vous faire part des motifs qui ont déterminé le comité à vous le proposer. Nous avons cru que, dans les municipalités de campagne, par exemple, il pourrait arriver que les naissances, mariages et décès qui auraient lieu pendant une année ne remplissent pas un registre.

Plusieurs membres: La question préalable! (L'Assemblée décrète qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur l'article 27.)

M. Terrier, ministre de l'intérieur: Messieurs, le roi m'a ordonné de faire part à l'Assemblée nationale des nouvelles que je viens de recevoir du département, relativement à la situation actuelle de la tranquillité de Paris. Je vais avoir l'honneur de vous en donner lecture:

Lettre du département.

« J'ai l'honneur, Monsieur, de vous adresser, au nom du conseil général du département, un compte détaillé des avis qu'il a reçus aujourd'hui, sur l'état actuel de la tranquillité de Paris et de la conduite qu'il a tenue.

« J'avais reçu de la section Mauconseil, avant l'ouverture de la séance du..., un avis que vous nous avez adressé ensuite; j'en avais informé sur-le-champ M. le maire de Paris, et j'avais provoqué sa vigilance sur les rassemblements annoncés par cette lettre. Au reçu de la vôtre, je lui ai écrit de nouveau en lui proposant, comme une mesure efficace pour la tranquillité publique, de faire proclamer la loi d'hier, relative aux rassemblements armés. Le conseil, instruit par l'avis d'un commissaire de la section de Montreuil qu'il devait se faire dans cette section un rassemblement, dont le but était de provoquer de nouveaux rassemblements dans Paris, en a donné avis sur-le-champ à M. le maire, par la lettre dont je joins icí copie. La mesure que j'avais proposée a été exécutée. Le corps municipal, qui s'est déclaré permanent ce matin, a arrêté une instruction aux citoyens. Elle a été proclamée en même temps que la loi. Je vous en envoie une copie.

« Le conseil a délibéré sur la conduite qu'il devait tenir, relativement à une insulte qui avait été faite à un officier municipal en fonction par un garde national. Il a pris l'arrêté que je joins ici. Mais en même temps qu'il avait cru devoir donner son improbation, et ordonner la publication de l'arrêté pris par le directoire le 21, il a jugé que la publication simultanée et le rapprochement qu'on pourrait faire de ces deux arrêtés, attesteraient au public qu'en même temps qu'il chercherait à punir les fonctionnaires publics qui manquaient à leur devoir, il voulait leur assurer tout le respect dù à leur qualité d'organes de la loi, et à la magistrature dont ils sont revêtus.

« Le soir, le conseil a conféré avec M. le commandant général et M. le ministre des affaires étrangères sur les divers renseignements qu'il avait reçus. On lui annonçait un rassemblement dans les environs de Paris, et que l'on avait l'intention de l'amener à Paris pour demain ou pour lundi. Il paraît cependant, d'après les rapports des personnes par qui le ministre des affaires étrangères avait été instruit, qu'il devait y avoir des rassemblements dans ces endroits, que ces avis n'étaient pas fondés. Au surplus, le conseil a chargé M. Papillon, capitaine de la première division de la gendarmerie nationale, de se faire instruire, par les officiers et cavaliers répandus dans les 3 départements dont il a le commandement, de la situation des esprits et des premières apparences de fermentation.

On a reçu au conseil une note qu'on a répandue avec profusion dans le faubourg SaintAntoine; la voici :

« Nous nous levons une seconde fois, pour remplir le plus saint des devoirs. Les habitants de quatre faubourgs de Paris, les hommes du 14 Juillet, viennent vous dénoncer un roi faussaire, coupable de haute trahison, indigne d'occuper plus longtemps le trône; nos soupçons sur sa conduite sont enfin vérifiés, et nous demandons que le glaive de la justice frappe sa tête, afin que la punition qu'il mérite serve d'exemple à tous les tyrans. Si vous vous refusez encore à nos vœux, nos bras sont levés, et nous frapperons les traîtres, partout où nous les trouverons, même parmi vous. »

« Cette note a été envoyée au bureau central des juges de paix et au département de la police. On lui a remis en même temps un autre avis, par lequel on le prévient que le projet est de présenter à l'Assemblée nationale, dimanche, une pétition pour lui demander de retirer au roi le veto sur les décrets de circonstances; et dans le cas où elle ne serait pas accueillie, de se porter ensuite aux Tuileries lundi. Le conseil s'est occupé de s'assurer qu'il serait pris des mesures efficaces pour empêcher les suites de cette criminelle entreprise. Il a déclaré positivement à M. le commandant général, qu'il était de son devoir de se concerter avec les officiers de l'état-major de la garde nationale, sous l'autorité de M. le maire, à qui le décret du 29 septembre donne spécialement le droit de commander le service extraordinaire qu'exige le maintien de la tranquillité publique, afin de combiner un système de défense tel que la garde nationale puisse opposer une résistance ferme et immobile, sans être obligé de recourir au dernier degré de la force des armes, avant d'être attaqués d'une manière hostile; que ce système soit tellement connu des officiers de la garde nationale, chargés de l'exécuter, que chacun d'eux puisse y concourir sur-le-champ, pour la portion de service qui lui sera assignée. « J'ai écrit sur cet objet une lettre à M. le maire, dont je vous enverrai copie demain.

« Tels sont, Messieurs, les faits relatifs aux circonstances, qui sont venus à la connaissance du conseil, et les mesures qu'il a prises pour prévenir de nouveaux désastres. Le conseil, avant de se séparer, a été instruit par M. le maire que la proclamation de la municipalité dans les faubourgs Saint-Antoine et Saint-Marceau, n'avait pas eu le succès qu'on en attendait.

« Mais des commissaires se sont rendus dans le faubourg, d'après la lettre du conseil. 11 ne savait pas encore la suite de cette nouvelle dé

marche. Le conseil se rassemble demain, il doit recevoir le rapport de la municipalité, demandé par l'arrêté du directoire du 20 juin, dont je vous ai parlé plus haut. Je m'empresserai de vous rendre compte des mesures qu'il aura jugées nécessaires.

Signé le procureur général syndic du département, ROEDERER. »

M. Terrier, ministre de l'intérieur. Messieurs, le sort de la France est entre vos mains, il dépend peut-être de la mesure que vous prendrez aujourd'hui.

Un membre (à l'extrême gauche) : L'ordre du jour !

Une grande partie de l'Assemblée se soulève en criant: A l'Abbaye! (Murmures et agitation prolongée.)

M. Dehaussy-Robecourt. Je demande que le nom du membre qui a demandé l'ordre du jour soit inscrit avec censure au procès-verbal.

Plusieurs membres : Non, non, à l'Abbaye!

M. Lagrévol. Je demande que l'Assemblée passe à l'ordre du jour, parce que, par son indi. gnation, elle a fait justice de ce fait.

M. Gohier. Quelque extravagante que soit une opinion, il faut laisser à chaque membre la liberté de l'énoncer; je demande le renvoi à la nouvelle commission des Douze, pour en rendre compte ce soir.

(L'Assemblée renvoie le mémoire lu par M. le ministre de l'intérieur à la commission extraordinaire des Douze, pour en faire son rapport à la séance du soir.)

M. Basire. Ce qui a provoqué les troubles, c'est la proclamation du roi, et je la dénonce (1). (Quelques membres à l'extrême gauche applaudissent.)

M. Saladin. M. Roederer annonce des inquiétudes qui ne paraissent avoir aucun fondement. (Murmures à droite.) On demande que le rapport de la nouvelle commission des Douze, sur le renvoi qui vient de lui être fait, soit fait ce soir. J'observe que le renvoi de cette lettre a été fait à la commission extraordinaire à cause de la liaison que les faits dénoncés peuvent avoir avec d'autres faits qui ont eu lieu ces jours derniers, mais qu'il n'y a rien de bien pressant, (Murmures à droite.) parce que vous avez tous remarqué que les faits dénoncés dans cette lettre ne paraissent avoir aucun fondement. On avait dit qu'il devait y avoir des rassemblements dans quelques villages des environs de Paris, le directoire du département, au soin et à la vigilance duquel là police générale est confiée, a envoyé des gendarmes, s'est fait assurer par le ministère de la gendarmerie s'il y avait des rassemblements, et le colonel général lui a assuré qu'il n'y avait aucun rassemblement. Ensuite, s'il y avait quelque rassemblement, la force publique est entre les mains des corps administratifs, et nous pouvons et nous devons nous reposer sur les moyens qu'ils prendront pour maintenir l'ordre et la tranquillité. Ainsi donc il n'y a rien qui nécessite un rapport particulier. Votre commission extraordinaire des Douze est chargée du rapport de tous ces évé

(1) Voy. ci-après, aux annexes de la séance, page 512, le texte de cette proclamation du roi.

nements; elle les liera les uns aux autres, elle les remontera à la source, et je ne serai pas étonné qu'elle découvrît que le placard incendiaire qu'on vous a lu est l'ouvrage des factieux...... (Applaudissements réitérés à l'extrême gauche et dans les tribunes.) et j'appelle factieux ceux qui calomnient le peuple. (Applaudissements des tribunes.)

M. Dumolard. Je demande la parole.

M. Saladin. Je demande donc que le renvoi soit maintenu et que l'on passe à l'ordre du jour sur le reste.

M. Cambon. J'ai entendu dire cent fois que la Constitution ne nous donnait que le pouvoir législatif, et que nous ne devions prendre, sous aucun prétexte, le pouvoir exécutif. Nous devons maintenir ce principe constitutionnel. (Applaudissements à gauche). Si un rassemblement se faisait à Montpellier qui est à 220 lieues d'ici, viendrait-on chercher le pouvoir législatif pour y remédier? Non, Messieurs. Il faut apprendre à tous les départements et même au département de Paris, que le pouvoir exécutif seul est institué pour repousser les rassemblements et faire exécuter les lois. La municipalité de Paris doit les faire exécuter, et, à son défaut, le département. Je demande qu'on se borne à renvoyer à la commission des Douze et qu'on passe à l'ordre du jour.

Un membre: On veut se soustraire à la responsabilité!

M. Lagrévol. Les pouvoirs sont bien distincts et séparés. Sans doute, l'Assemblée nationale n'a pas l'intention d'empiéter sur le pouvoir exécutif; mais, dans les circonstances où nous nous trouvons, il est digne de l'Assemblée nationale de chercher, dans sa sagesse, s'il n'y aurait pas quelques moyens de prévenir, par une loi sage et peut-être de circonstance, que la force publique ne fût déployée dans la ville de Paris. Si vous pensez avec moi qu'il n'est pas impossible que votre comité des Douze trouvé quelque moyen d'empêcher que la loi invoquée par M. Cambon ne soit mise fortement à exécution demain ou après-demain, s'il se présente des rassemblements, n'aurez-vous pas à regretter d'avoir négligé cette mesure? Convaincu que la commission des Douze ne vous présentera que des mesures législatives, je demande que cet objet lui soit renvoyé, pour en faire son rapport ce soir.

(L'Assemblée maintient le décret qui ordonne à la commission extraordinaire des Douze de lui faire un rapport à la séance du soir.) (La séance est levée à 3 heures et demie.)

PREMIÈRE ANNEXE (1)

A LA SÉANCE DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE LÉGISLATIVE DU SAMEDI 23 JUIN 1792, AU MATIN.

Pièces concernant les accusations portées contre M. Dietrich, maire de Strasbourg, et les administrateurs du département du Bas-Rhin, déposées sur le bureau de l'Assemblée par MM. Nois

(1) Voy. ci-dessus, même séance, page 500, le dépôt de ces pièces sur le bureau de l'Assemblée par MM. Noissette et Champy.

sette et Champy, députés extraordinaires de Strasbourg (1).

1° Copie d'une lettre de M. Roland, ministre de l'intérieur, au maire de la commune de Strasbourg, en date du 11 juin 1792.

« Un bruit, Monsieur, qui vous inculpe, ainsi que des administrateurs du département du BasRhin, s'est répandu dans cette ville. On parle d'une conspiration pour livrer Strasbourg aux ennemis de la France; ce bruit est fondé sur des lettres qui m'ont été communiquées, venues de l'étranger et de Strasbourg même. Il en est question ici dans les sociétés patriotiques, dans les papiers publics; il est parvenu au conseil du roi. Je crois devoir vous instruire de cette espèce de dénonciation, puisqu'elle a acquis ce degré de publicité. J'ignore sur quels fondements elle peut s'appuyer; mais je ne doute pas que vous ne preniez de promptes mesures pour détruire les impressions désavantageuses qu'elle ne peut manquer de faire dans le public. Il importe de rassurer toute la France sur le sort d'une ville aussi importante que Strasbourg, et je suis en droit de vous demander tous les renseignements qui peuvent me servir de moyens pour vous conserver la confiance que le roi a dans votre civisme et votre fidélité.

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J'ajouterai qu'on va jusqu'à citer les sommes d'argent répandues pour effectuer la corruption et les infamies dont je viens de vous entretenir.

Signé: ROLAND.

Collationné, signé : RUMPLER,
secrétaire-greffier.

2° Copie d'une lettre de M. Dietrich, maire de Strasbourg, à M. Roland, ministre de l'intérieur, du 16 juin 1792, l'an IV de la liberté.

« J'ai lu au conseil de la commune, et à mes concitoyens qui se sont portés en foule à sa séance, la lettre fort extraordinaire que vous m'avez écrite le 11 de ce mois; et dans laquelle vous paraissez avoir ajouté quelque foi à des bruits, et à une dénonciation qui est appuyée, vous ne savez sur quel fondement. Vous auriez dù, Monsieur, nommer mes dénonciateurs, articuler des faits, et joindre à votre lettre les copies de celles qui vous ont été communiquées. Le cri d'indignation de mes concitoyens, et j'ose l'espérer, de la France entière, sera ma défense. J'ai voulu me transporter moi-même à la barre de l'Assemblée nationale, pour la prier de vous enjoindre de lui remettre, ou à une commission qu'elle aurait nommée, les preuves d'une conspiration qui intéresse aussi essentiellement l'Empire. Le conseil de la commune, qui n'a vu dans les dénonciateurs que des conspirateurs, et dans la dénonciation que le complot de semer la désunion, et faire naitre des troubles dans cette ville, dont l'harmonie désespère les ennemis de la patrie, m'a forcé de rester à mon poste. Il envoie deux députés à l'Assemblée nationale, avec une adresse signée de tous les citoyens qui sont accourus à la maison commune.

« Quoi! Monsieur, vous avez pu balancer un instant entre les délations d'un Laveaux ou d'un prince de Hesse, et la conduite que j'ai constamment tenue depuis le premier jour de la

(1) Bibliothèque nationale Assemblée législative, Le3, n° 95.

Révolution? Non, Monsieur, je ne perdrai point la confiance que le roi a en mon civisme, ni celle de la nation, dont je me crois digne. Elles ne tiennent point à l'opinion de quelques individus. J'ai juré de périr dans le poste dont mes concitoyens m'ont honoré; aucun dégoût, aucune scélératesse ne me le feront abandonner, que le terme fixé par la loi ne soit révolu. Les efforts des agitateurs, des séditieux, des traîtres qui se cachent sous le masque du patriotisme, ne feront que redoubler mon zèle et mon courage à les combattre. Dietrich, maire de la commune de Strasbourg, périra sous ses ruines, avant qu'on puisse le soupçonner.

« Le maire de Strasbourg,

Signé DIETRICH.

Pour copie conforme:

Signé: ALBERT, secrétaire de la mairie.

3o Copie de la lettre de MM. les administrateurs du directoire du département du Bas-Rhin à M. Dietrich, maire de Strasbourg, du 17 juin 1792, l'an IVe de la liberté.

« Nous avons également reçu, Monsieur, une lettre du ministre de l'intérieur, qui nous dénonce que parmi les administrateurs il se trouve des traîtres accusés nommément du projet de livrer la ville de Strasbourg aux ennemis de l'Etat.

« Comme administrateurs, et comme citoyens, nous nous plaisons à vous rendre, Monsieur, toute la justice qui est due à votre activité; nous reconnaissons que c'est à vos soins infatigables, à votre fermeté inébranlable que nous devons la tranquillité, qui jusqu'à présent a régné dans nos murs.

« Nous avons répondu à M. Roland, avec cette force qui fait le caractère de l'innocence. Nous lui avons donné le tableau des troubles et de l'anarchie, que de vils agitateurs ont inutilement cherché à exciter à Strasbourg et dans le département; nous avons exprimé tout le mépris qu'ils ont inspiré dans tous les temps aux véritables citoyens. Vous partagez, nous n'en doutons pas, ces sentiments avec nous, et nous sommes assurés que vous ne manquerez pas de vous réunir à notre opinion dans une circonstance aussi importante.

« Si nous n'avions écouté que les sentiments que nous inspirent des calomnies aussi impudentes, nous les aurions sans doute livrées au mépris qu'elles méritent; mais nous devions moins à nous-mêmes qu'à la confiance de nos concitoyens, de les repousser avec force et avec vigueur.

« Les administrateurs composant le directoire du département du Bas-Rhin,

Signė: DOYEN, vice-président; KUHN, BURGER, STOEBER, LOUIS, BRAUN, GLOUTIER, X. LEVRAULT, procureur général; BARNIER, en l'absence du secrétaire général.

Pour copie conforme :

Signé RUMPLER, secrétaire-greffier.

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4° Extrait des registres du conseil général de la commune de Strasbourg, du jeudi 14 juin 1792. Séance du soir.

<< Monsieur le maire a dit qu'il avait cru devoir convoquer le conseil général, pour lui donner connaissance de quelques lettres qui, par leur importance, lui ont paru mériter toute son attention. Il a fait lecture de 3 lettres, l'une de M. de la Morlière, lieutenant général, commandant l'armée du Rhin, à la municipalité, du présent jour; l'autre, du ministre de la guerre à ce général, du 10 de ce mois; et la troisième du ministre de l'intérieur, à lui maire, du 11.

« Le conseil général a déclaré, et a fait consigner sur ses registres, qu'il ne pouvait considérer les inculpations contenues dans la lettre du ministre de l'intérieur que comme des calomnies atroces contre le maire, suggérées par les ennemis de la chose publique, dans la criminelle intention de semer la défiance et la division parmi les citoyens, et de compromettre la tranquillité et la sûreté de cette importante frontière.

Il a arrêté que cette déclaration sera transmise à l'Assemblée nationale, par une adresse à laquelle sera jointe copie de la lettre du ministre de l'intérieur, et qui exprimera que le conseil général et les citoyens, témoins, depuis 3 ans, du patriotisme du maire, de son zèle inaltérable pour le maintien de la Constitution, et de son dévouement infatigable à procurer le repos et le bonheur à cette cité, sont remplis pour lui des sentiments d'estime, de confiance et d'attachement qu'il mérite à tant de titres, et qu'ils ressentent la plus vive indignation des infâmes délations faites contre lui.

« Après cette délibération, le conseil général a fait inviter le maire, par 2 officiers municipaux, de revenir à la séance; et ayant repris le fauteuil, après que l'officier municipal lui eut annoncé ce qui venait d'être arrêté, il a de nouveau mis sous les yeux la demande de M. de la Morlière, et à la suite des éclaircissements qu'il a donnés sur quelques articles de la lettre du ministre de la guerre à ce général, ouï le substitut du procureur de la commune,

« Le conseil général a arrêté qu'il sera répondu à la lettre dudit général; que le conseil n'a été informé d'aucune des allégations présentées par le ministre comme des faits, à l'exception cependant que le maire a instruit le corps municipal qu'un trompette autrichien n'avait pas été reçu au pont du Rhin avec toutes les formalités requises, par les volontaires nationaux qui étaient de poste audit pont; que néanmoins ce trompette avait été dûment accompagné; que le conseil n'a fait sur aucun de ces objets une démarche officielle vis-à-vis du gouvernement, et que depuis que ce général commande l'armée du Rhin, il ne lui a donné aucun avis, ni porté aucune plainte qui aient été négligés.

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Le inaire a renouvelé ensuite sa demande susdite; il a déduit les raisons qui lui font désirer de se justifier en personne : il a ajouté que sa justification serait d'autant plus facile, que depuis près de 3 ans qu'il est à la tête de cette commune, en qualité de maire, et auparavant déjà, lorsqu'il remplissait en cette ville les fonctions de commissaire du roi, il a été en correspondance suivie avec le ministère; qu'il n'a cessé de donner tous les avis et les enseignements qui pouvaient être nécessaires ou utiles

à la chose publique; que cette correspondance était consignée dans un journal rédigé avec la plus grande exactitude, formant déjà 4 volumes, et que ce journal lui présenterait les moyens les plus victorieux pour détruire les calomnies avancées contre lui.

« Sur quoi, et le maire ayant fait lecture aussi de la lettre adressée sous la date du 11 de ce mois, par le ministre de l'intérieur, au directoire du département, et que celui-ci vient de communiquer à l'instant à la municipalité, laquelle renferme pareillement l'annonce de l'inculpation qu'il existe une conspiration pour livrer cette ville aux ennemis de la France, sans nommer cependant le maire; ouï le substitut du procureur de la commune; le conseil général, pénétré de l'importance dont il est que, dans les circonstances actuelles, la commune ne soit point privée de la présence d'un chef aussi vigilant, aussi actif et aussi dévoué au salut de l'Empire, n'a pas cru pouvoir déférer à la demande du maire; et cependant, convaincu par le fait qu'il existe une trame odieuse dont les circonstances ne tendent qu'à priver les autorités constituées de l'estime, de la confiance et de la considération sans lesquelles elles ne peuvent remplir avec succès, dans ces moments critiques surtout, les importantes fonctions qui leur sont confiées; à inspirer ainsi la défiance et la terreur aux citoyens, à faire succéder l'anarchie à l'ordre, et à nous livrer sans défense aux ennemis de l'Etat; considérant qu'il importe au salut public que le fil de cette trame horrible soit découvert, et que les deux ministres susdits, par les délations qu'ils ont accueillies, doivent pouvoir fournir les renseignements les plus propres à découvrir les auteurs de ces noires machinations; considérant aussi qu'il est essentiel que le département du Bas-Rhin, si intéressant par sa position, soit pourvu d'une force assez imposante pour mettre cette frontière dans un état de défense respectable, le conseil général a arrêté qu'il sera envoyé une députation à l'Assemblée nationale, pour la supplier d'enjoindre au ministre de la guerre, et à celui de l'intérieur, de déposer sur le bureau de l'Assemblée les délations qu'ils ont reçues sur les faits relatés dans les deux lettres, ou de nommer les auteurs de ces délations, pour être statué ensuite sur ces dites délations et contre leurs auteurs, ce qu'elle avisera dans sa sagesse; d'ordonner au ministre de la guerre de porter l'armée du Rhin, trop faible jusqu'à présent pour résister à une attaque hostile considérable, à un degré de force propre à défendre avec succès la rive de ce fleuve, arrête, en outre, que ladite députation sera chargée de présenter l'adresse susmentionnée, laquelle renfermera aussi les demandes susdites, et que ces députés seront nommés par le corps municipal.

«Et l'un des membres ayant proposé que les citoyens soient admis à signer la susdite adresse, le conseil général, sur les sentiments que la nombreuse galerie a manifestés lors de la déclaration qu'il a fait consigner sur les registres, a adopté cette proposition.

« Enfin, il a arrêté qu'il sera publié une adresse dans cette ville, pour donner connaissance aux citoyens et des lettres susdites, et des délibérations qui viennent d'être prises sur ce sujet.

Collationné, signé : RUMPLER, secrétaire-greffier. »

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Les Français n'auront pas appris sans douleur qu'une multitude, égarée par quelques factieux, est venue à main armée dans l'habitation du roi, a traîné du canon jusque dans la salle des gardes, a enfoncé les portes de son appartement à coups de hache; et là, abusant audacieusement du nom de la nation, elle a tenté d'obtenir, par la force, la sanction que Sa Majesté a constitutionnellement refusée à deux décrets.

Le roi n'a opposé aux menaces et aux insultes des factieux, que sa conscience et son amour pour le bien public.

Le roi ignore quel sera le terme où ils voudront s'arrêter; mais il a besoin de dire à la nation française, que la violence, à quelque excès qu'on veille la porter, ne lui arrachera jamais un consentement à tout ce qu'il croira contraire à l'intérêt public. Il expose sans regret sa tranquillité, sa sûreté; il sacrifie même sans peine la jouissance des droits qui appartiennent à tous les hommes et que la loi devrait faire respecter chez lui, comme chez tous les citoyens mais comme représentant héréditaire de la nation française, il a des devoirs sévères à remplir, et s'il peut faire le sacrifice de son repos, il ne fera pas le sacrifice de ses devoirs.

Si ceux qui veulent renverser la monarchie ont besoin d'un crime de plus, ils peuvent le commettre. Dans l'état de críse où elle se trouve, le roi donnera jusqu'au dernier moment, à toutes les autorités constituées, l'exemple du courage et de la fermeté, qui seuls peuvent sauver l'Empire en conséquence, il ordonne à tous les corps administratifs et municipalités de veiller à la sûreté des personnes et des propriétés. Fait à Paris, le 22 juin 1792, l'an IVe de la liberté.

Signé : LOUIS.

Et plus bas TERRIER. (Certifié conforme à l'original.)

(1) Voy. ci-dessus, même séance, page 509, la dénonciation de cette proclamation par M. Basire. (2) Bibliothèque de la Chambre des députés. Collection des lois, tome 9, page 399.

ASSEMBLÉE NATIONALE LÉGISLATIVE.

Séance du samedi 23 juin 1792, au soir. PRÉSIDENCE DE M. GÉRARDIN, vice-président.

M. Rougier-La-Bergerie, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du vendredi 22 juin 1792, au matin.

(L'Assemblée en adopte la rédaction.)

Les pensionnaires de Saint-Aure sont admises à la barre.

La demoiselle de Saint-Huruge offre, en leur nom, 30 livres en assignats.

M. le Président leur répond et leur accorde les honneurs de la séance.

(L'Assemblée accepte cette offrande avec les plus vifs applaudissements et en décrète la mention honorable au procès-verbal, dont un extrait sera remis aux donatrices.)

Un pétitionnaire du district de Crépy est admis à la barre.

Au nom de quarante pères de famille, il réclame contre une décision de ce district, confirmée par le département de l'Oise, qui a jugé bien national différentes sommes payées à la dame de Calignon par les jeunes pensionnaires dont elle entreprenait l'éducation.

M. le Président répond au pétitionnaire et lui accorde les honneurs de la séance.

(L'Assemblée renvoie la pétition au comité de l'extraordinaire des finances.)

M. Merlet, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance du vendredi 22 juin 1792, au soir.

(L'Assemblée en adopte la rédaction.)

Un de MM. les secrétaires donne lecture des lettres, adresses et pétitions suivantes :

1° Lettre de M. Terrier, ministre de l'intérieur, qui fait passer à l'Assemblée l'arrêté du département du Pas-de-Calais, relatif à la demande du sieur Pégord, ci-devant maire d'Aire-en-Gohelle. (L'Assemblée renvoie la lettre au comité des domaines.)

2o Lettre de M. Terrier, ministre de l'intérieur, qui demande une loi interprétative qui fixe à quelle époque les lois sont obligatoires.

Un membre: J'observe que depuis longtemps le comité de législation est chargé de faire un rapport sur cette question et que le rapport est prêt.

(L'Assemblée décrète que le rapport sera fait sous trois jours.)

3° Lettre de M. Duranthon, ministre de la justice, qui adresse à l'Assemblée les expéditions des décrets des 27 mai et 8 juin, sur lesquels le roi a apposé la formule constitutionnelle le roi examinera ».

(L'Assemblée décrète que ces expéditions seront remises aux archives.)

4° Lettre de M. Terrier, ministre de l'intérieur, qui demande une interprétation des articles 1er et 5 du titre II du décret relatif à la gendarmerie nationale.

(L'Assemblée renvoie la lettre au comité militaire.)

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