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sent, que le pouvoir législatif usurpe le pouvoir exécutif Jaux voix, aux voix. Murmures).

M. Frochot: Je n'ai qu'un, mot à dire sur la proposition qui a été faite par M. Barnave. Si on établit une convention on aura beau lui dire, que voilà ses devoirs, que voilà ses fonctions, rien ne détruira le germe d'ambition qui est dans tous les corps de s'aggrandir et d'augmenter leur puissance." Par exemple, si le corps législatif vouloit s'arroger le pouvoir seul appartenant au corps, constituant, un homme se leveroit et diroit: Messieurs, vous voulez vous attribuer des fonctions qui sont attachées à l'assemblée de révision; il y a au milieu de nous un vice de forme, et ce vice est celui-ci : il' faudroit être 991, et nous ne sommes que 745. L'assemblée de révision n'est limitée par rien, si vous organisez le pouvoir constituant comme l'assemblée de révision (fermez la discussion).

La discussion est fermée.

M. Prieur: Je regarde le plan de M Frochot comme très-bon; mais il y a une chose à laquelle je crois difficile de répondre; c'est le cas, par exemple, où les législateurs auroient, comme le prévoit l'article de la section proposée par le comité, empiété sur les pouvoirs; alors il me semble difficile de remettre au jugement de ce corps législatif-là, qui est lui même usurpateur, s'il y aura ou non une convention nationale.

M. Blin: L'objection que vient de faire M. Prieur est absolument la même que vient de faire M. Roederer. Il n'y a qu'un mot à y répondre; c'est que le corps législatif est temporaire et que le pouvoir de l'arrêter réside toujours dans le peuple qui fait les élections (applaudissemens).

M. Prieur: Ce n'est pas vrai ( murmures).

:

M. Salle Je propose, pour amendement, qu'une législature ne puisse délibérer sur la question de savoir si un point de la constitution est susceptible d'être soumis à la révision, à moins que sa délibération n'ait été provoquée par la motion d'un de ses membres, appuyée par le quart des suffrages.

M. Prieur: Je crois que M. Frochot propose, dans son projet, un article qui porte que les citoyens auront le droit provoquer la convention ( murmures ). Je demande l'établissement de l'article de M. Frochot.

de

M. d'André : J'ai l'honneur d'observer à M. Prieur que notre intention ne peut pas être d'aliéner le droit de pétition. Le droit de porter des plaintes, de faire des réclamations, est absolument à l'abri de toutes les institutions politiques d'un corps constituant quelconque ; ainsi il est inuTome XXXIII. No. 4.

D

tile de rétablir le premier article, dans ce moment je ne demande que l'établissement d'un principe; c'est-à dire lorsque trois législatures de suite auront éinis un vœeu, le vœu sera présumé le vou national, et qu'en conséquence un corps sera chargé d'examiner, de revoir les articles. ( Aux voix. ) M. Chapelier: Dans la proposition que nous a fait M. d'André vous appercevez certainement deux questions: la premiere est celle de savoir si les législatures pourront émettre le vou présumé dans la nation, et établir que tel ou tel article a besoin d'ètre revu; la seconde est que la quatrieme législature, organisée d'une autre maniere, puisse décider cela. Je demande la division de ces deux questions-là, et que l'on mette aux voix cette question-ci: l'assemblée veut-elle qu'il y ait des conventions, oui ou non?

L'assemblée décrete la premiere partie de la motion de M. d'André.

M. Chapelier: La deuxieme proposition de M. d'André est que la quatrieme législature soit chargée d'examiner les points soumis par les trois législatures à la révision. Il ne faut pas, pour cet assemblée, une assemblée très-nombreuse; il faut une assemblée très-réfléchie. Il ne s'agit pas de mouvement; il s'agit de pcuser, de réfléchir, de rédiger: ainsi le petit nombre de membres est la combinaison la plus heureuse; d'ailleurs si vous ajoutez à une assemblée législative, déjà agitée par tout ce qui l'aura porté à déclarer que tel ou tel point doit étre visé, si vous y ajoutez de nouveaux membres, ils voudront aller d'un point à un autre, et il s'établira dans le corps, composé de 1,200 personnes, une telle fermentation, que, contre votre intention, l'existence du pouvoir constituant dans sa plénitude arrivera, quoique trois assemblées précédentes aient limité ce pouvoir-là, et on peut bien ne pas appercevoir ces inconvéniens; je dis que c'est-là la marche ordinaire des événemens, au lieu qu'avec un corps séparé, qui n'a pas les mêmes passions que l'assemblée législative, qui n'a pas à se mêler, comme l'assemblée législative, de tous les autres objets de la législation et d'administration, ne porte pas dans la réforme de la constitution les mêmes passions que la législature dans la législation; que ce corps-là est le plus propre à suivre les formes que le corps constituant aura adopté. Ainsi mon amendement est que l'assemblée de révision soit une assemblée nommée exprès, et séparée du corps législatif, qui tiendra neanmoins

ses séances.

M. Salle: Messieurs, si nous devons craindre la corrup tion daus un corps délibérant pour les intérêts de la nation,

'est sans doute pour le corps qui sera chargé de la révision; car ce corps sera chargé des plus grands intérêts nationaux. D'ailleurs je crois qu'nne semblable institution nous conduit tout naturellement la corruption de la constitution, c'està dire à un changeinent dans la forme de notre gouvernement. En effet, messieurs, vous devez sentir qu'il s'établiroit une telle opiniâtreté entre ces deux corps ( applaudi) à raison de leur compétence: l'une, et ce seroit l'assemblée de révision, voudroit soumettre à sa puissance l'assemblée législative, voudroit se la subordonner: l'autre résisteroit. Je ne sais, messieurs, où ces disputes pourroient se terminer. Je dis, messieurs, que cet inconvénient nous conduit insensiblement à l'établissement des deux chambres. Je ne vois pas autre chose dans un semblable projet ( applaudi.).

Plusieurs membres : La question préalable. Adopté.

M. d'André: La troisieme question, c'est que ce sera la quatrieme législature qui sera chargée d'examiner les articles sur lesquelles les trois législatures précédentes auront cru qu'il y a des modifications à faire.

La derniere proposition de M. d'André est décrétée.

M. d'André: Je pense qu'avec encore 3 ou 4 articles vous allez finir tout cet objet la. Je demande à présent que vous décrétiez que les membres de la troisieine législature ne pourront être réélus à la quatrieme, et il y a une raison sans replique pour cela, c'est que tout homme cherchant sans cesse à augmenter son pouvoir, les membres de la troisieme législature, dans l'espérance d'être de la quatrieme et de recréer ou de modifier la constitution, pourroient décréter contre la vérité, qu'il y a lieu à modification.

M. Prieur: Le peuple n'ayant que deux moyens pour manifester son intention, il est bien essentiel qu'il puisse nommer ceux qui ont pensé qu'il y avoit lieu à révision. J'oppose au préopinant que, comme tous les hommes qui ont des pouvoirs tentent toujours à les perpétuer, les mêmes hommes ne voudront pas qu'il y ait lieu à révision, parce qu'ils craindront de ne pas être de la législature suivante. ( Murmures.).

L'assemblée décrete la proposition de M. d'André.
M. le président lit la lettre suivante :

M. le président, ayant des affaires pressantes chez moi, et en étant éloigné de 25 lieues, j'ai l'honneur de vous prier de vouloir bien demander un congé pour moi à l'assemblée nationale. Signé d'Ambly. Accordé.

M. Brzot: Vous venez de déterminer un mode par lequel le peuple sera censé avoir émis son vœu pour la révi

sion des articles constitutionnels; mais il est bien entendu, sans doute, que ce mode-là n'est pas purement limitatif, qu'il n'est pas exclusif de tous les autres par lesquels le peuple immédiatement pourroit faire connoître son voeu ( Murmures). Je demande donc que le systême que vous avez adopté ne puisse pas empêcher les assemblées primaires d'émettre leur Voen. Je demande donc qu'on adopte le systême des pétitions individuelles. Eh! messieurs, que sur le fait, s'il y a lieu de savoir s'il y a lieu à révision ou à un nouveau corps constituant, l'assemblée déclare formellement, en interprétant son premier décrét, déclare, dis-je, que les assemblées primaires pourront, toutes fois qu'elles le jugeront à propos, voter sur la question de savoir s'il doit ou non y avoir une convention, nationale. D'après le discours de M. Barnave, il est clair que ceux qui ont adopté le principe de M. Frochot, compromettent leurs premiers principes, s'ils ne s'expliquoient pas de cette maniere : je demande qu'enfin l'assemblée nationale, respectant la souveraineté du peuple (murnures), déclare formellement que les assemblées primaires peuvent délibérer.

Plusieurs voix : L'ordre du jour. Adopté.

M. la Fayette Je demande au moins à proposer un article additionel. L'assemblée vient de décréter que c'étoit à un pouvoir constitué à prononcer sur la question de savoir s'il y avoit des vices à réformer dans les pouvoirs constitués; c'est encore un pouvoir constitué (la quatrieme législature) qui doit prononcer sur ces réformes; la raison qu'on nous en a donné, est que trois législatures feront connoître le vou national, et qu'il s'exprimera par la réélection des membres qui auroient voté sur cette question; mais comment sera-t-il possible, messieurs, de les connoître ces membres, si vous n'adoptez pas une méthode suivie avec succès, en Amérique, et d'après laquelle je propose que, lorsqu'on aura demandé une réforme dans l'organisation du gouvernement, il y ait un appel nominal, imprimé sur une liste à deux colonnes, avec les noms de chaque votant, afin que le peuple y reconnoisse ceux qui auront adopté son

vou.

M. d'André : J'adopte cela. (Aux voix, aux voix.) Plusieers voix : Le renvoi au comité.

La proposition de M. la Fayette est renvoyée au comité. Un de MM. les secrétaires : Voici une lettre de M. Thévenard.

J'ai l'honneur de vous adresser copie d'une lettre de M. Blanchelande, datée du Cap, le 7 juillet dernier, que je

viens de recevoir, avec trois imprimés qui y étoient joints; je vous prie, M. le président, de vouloir bien communiquer les pieces à l'assemblée nationale.

Copie de la lettre de M. Blanchelande à M. Thévenard, ministre de la marine.

Du Cap, le 7 juillet 1791.

aux

Monsieur, j'ai sous les yeux la copie d'une dépêche, no. 132, que j'ai eu l'honneur de vous adresser, pour vous rendre compte de la premiere impression que la connoissance du décret rendu par l'assemblée nationale, séances des 13 et 15 mai, avoit faite dans cette grande île, sur l'esprit des citoyens. Vous verrez, monsieur, par les exemplaires ci-joints, des dépêches de l'assemblée provinciale du nord, que j'avois bien saisi la sensation générale, que la réflexion n'a pas rendu plus calme. Ce n'est donc pas sans raison que je suis alarmé des suites, si le décret n'est pas retiré ou du moins modifié, ou si l'on ne differe l'exécution du décret en faveur des gens de couleur, nés de pere et mere libres, à l'époque où la nature efface la teinte qui forme elle même la ligne de démarcation.

D'après l'article 2 de la loi du 11 février, la majeure partie des paroisses avoit renvoyé la nomination de leurs députés pour une nouvelle assemblée coloniale, à l'arrivée des commissaires; mais pour éviter l'effet du décret du 15 mai, l'assemblée provinciale du nord s'est hâtée d'inviter toute la colonie à nommer ses députés, et à les inviter de se rendre à Léogane, persuadée que le décret redouté ne seroit pas arrivé officiellement avant cette époque. Il paroit que cet avis est généralement suivi. Les 24 députés de la ville du cap, leurs suppléans, et successivement ceux des paroisses de la province du nord, vont se mettre en route. Les raisons qui déterminent la formation de cette assemblée, n'échapperont pas aux gens de couleur intéressés et indiqués par le décret: par bonheur qu'ils ne sont pas nombreux, n'étant pas évalués à 400 dans la colonie. Je pense qu'ils ne hasarderont aucune démarche, d'autant que les affranchis témoignent de la jalousie : quelques propos répandus et l'opinion générale me portent à le croire.

Le choix des députés de la ville du Cap et d'autres citoyens connus des différentes paroisses, paroît être généralement applaudi. Je ne redoute pas moins le travail de la nouvelle assemblée coloniale, relatif au décret du 15 mai.

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