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123.

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- Ainsi, étant serrurier ou exerçant un métier analogue, je m'engage a enseigner la mécanique à l'apprenti qui est placé chez moi. Évidemment, on n'aura pas le droit d'exiger de moi que j'apprenne autre chose de la mécanique que ce qui concerne ma profession spéciale.

ART. 1164. Lorsque, dans un contrat, on a exprimé un cas pour l'explication de l'obligation, on n'est pas censé avoir voulu par là restreindre l'étendue que l'engagement reçoit de droit aux cas non exprimés.

124. Ainsi, un enfant s'engage chez un maître dont la profession peut se décomposer en plusieurs états secondaires et à la connaissance de laquelle on ne peut s'élever qu'après avo traversé différentes étapes. Il s'agit, par exemple, d'un ébéniste : si la convention s'explique seulement sur l'état secondaire de menuisier, il ne faudra point en restreindre l'étendue à l'énonciation de cette profession mais l'appliquer aussi aux différents états qui sont du ressort de l'ébénisterie; ainsi à la peinture, à la serrurerie, à la dorure, etc...

123. — On ne nous reprochera pas, nous l'espérons, d'avoir fait suivre chacun des articles qui précèdent d'exemples, d'explications et de commentaires. Nous nous sommes volontiers livré à ce travail parce qu'il a l'avantage de nous faire connaître bon nombre d'espèces qui sont du domaine de la pratique. Si nous n'avions pas cru devoir quitter le terrain sûr de la théorie, nous nous serions empressé de condenser le sens de tous ces articles, et de les résumer au moyen de cette règle générale de l'article 1156 qui les précède et les domine tous, « qu'on doit, dans les conventions, rechercher quelle a été la commune intention des parties plutôt que s'arrêter au sens littéral des

termes. >>

CHAPITRE IV.

DES CONDITIONS DU CONTRAT.

126. Division du CHAPITRE IV.

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SECTION I.-127. Application à la matière du contrat d'apprentissage de l'art. 1108 du code civil; 128. de l'art. 1109; 129. de l'art. 1110; - 130. de l'art. 1111.131. de l'art. 1112; 132. de l'art 1113; 133. de l'art 1114; 134. de l'art. 1115; 135. de l'art. 1116; 136. de l'art. 1117; 137. de l'art. 1118. SECTION II. 138. Différence au point de vue des conditions spéciales du contrat d'apprentissage entre la loi du 22 germinal an XI et celle de 1851. 139. Interdiction aux mineurs de 21 ans de recevoir des apprentis mineurs; appréciation de cette interdiction. 140. Quid de la limitation du nombre des apprentis?-141. Interdiction pour tout maître célibataire ou veuf de loger comme apprenties des jeunes filles mineures. 142. Amendement à l'art. 5 de la loi de 1851 proposé par M. Morellet. 143. Comparaison des incapacités prononcées par l'art. 4 et 5 avec celles édictées par l'art. 6 de la loi de 1851. 144. Énumération des incapacités résultant de l'art. 6.–145. Faut-il réserver aux mineurs non émancipés le droit de se prévaloir des incapacités présentées par l'art. 6?-146. Quelle autorité sera compétente pour lever les incapacités de l'art. 6? 147. Amendement de M. Benoit et observations de M. Morellet. 148. Conséquence des art. 4, 5 et 6 de la loi de 1851. 149. Quid en cas d'amnistie et en cas de grâce?

126. -«Des conditions du contrat » telle est la rubrique de la section I de la loi de 1851, et le mot conditions y signifie les éléments spéciaux essentiels du contrat, ceux sans lesquels il n'y aurait pas de contrat d'apprentissage. C'est dans le même sens que les rédacteurs du Code civil ont écrit en tête du chapitre II du titre ш, Liv. 3: Des conditions essentielles pour la validité des conventions. Ces conditions sont celles sans lesquelles il ne saurait y avoir aucune convention ou du moins aucune convention valide : aussi peuvent-elles et doivent-elles s'appliquer à toute espèce de convention, à tout genre de contrat.

De même que nous avons cru utile d'appliquer à notre matière tout ce que contient le Code civil au sujet de l'interprétation des conventions, de même il nous semble utile de transporter ici toutes les règles sur les conditions essentielles pour la validité des conventions. Nous diviserons notre Chapitre en deux sections dans la première nous traiterons des conditions essentielles pour la validité des conventions appliquées au contrat d'apprentissage dans la seconde des conditions spéciales au contrat d'apprentissage. De cette manière nous pouvons faire

:

connaître complètement toutes les conditions de validité du contrat d'apprentissage. Un grand nombre de ces conditions, et des plus importantes, étant déjà connues, lorsqu'il nous arrivera de les rencontrer de nouveau, nous ne ferons que les indiquer légèrement et nous renverrons le lecteur aux chapitres et aux sections qui précèdent.

SECTION I

Des conditions essentielles pour la validité des conventions appliquées au contrat d'apprentissage.

127.

ART. 1108. Quatre conditions sont essentielles pour

la validité d'une convention :

Ee consentement de la partie qui s'oblige;

La capacité de contracter;

Un objet certain qui forme la matière de l'engagement;
Une cause licite dans l'obligation.

De ces quatre conditions nous n'aurons à nous occuper que de la première, du consentement. La seconde, en effet, a déjà été traitée dans toute l'étendue qu'elle nous paraît comporter (voir chap. ), la troisième a seulement besoin d'être indiquée; car un objet certain, déterminé forme toujours la matière de l'engagement pris par le maître et par l'apprenti; la quatrième enfin, ne demande aucun développement, puisque l'obligation de l'une des parties contractantes est la cause de l'obligation de l'autre ; que, dans notre contrat la cause de l'obligation soit du maitre soit de l'apprenti est toujours licite.

et

En parlant de la première condition, du consentement de la partie qui s'oblige, il est bien entendu qu'il ne s'agit pas seulement du consentement de l'une des deux parties mais de l'une et de l'autre; car les obligations synallagmatiques exigent que les deux parties consentent en même temps.

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si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol.

D'après cet article, le contrat a pu naître, se former; mais il est non viable, affecté d'un vice qui permet de le faire briser et annuler. C'est ce que l'article 1234 du Code civil et l'article 1304 nous enseignent, l'un en énonçant que l'action en nullité est une des causes d'extinction de l'obligation (art. 1234), l'autre en limitant à dix ans la durée du temps pendant lequel on peut intenter l'action en nullité.

Mais il est certains cas dans lesquels le contrat ne s'est même point formé, où il y a bien eu un consentement, mais un consentement donné par une personne incapable de consentir, partant un consentement nul, qui n'a pas permis au contrat de naître. Ainsi une personne en état d'ivresse, de délire ou de démence a consenti à un contrat d'apprentissage, mais il faudra regarder ce consentement comme absolument dénué d'effet. Bien que quelques auteurs aient contesté cette solution, nous n'hésiterons pas à nous ranger du côté des éminents jurisconsultes (1) qui l'ont approuvée et enseignée.

129.-ART. 1110.-L'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l'objet. Elle n'est point une cause de nullité lorsqu'elle ne tombe que sur la personne avec laquelle on a intention de contracter, à moins que la considération de cette personne ne soit La cause principale de la convention.

On n'ignore pas ce que les jurisconsultes entendent par le mot substance. C'est l'ensemble, la réunion des qualités principales d'une chose, ou bien, encore, la qualité prédominante, constitutive, caractéristique d'une chose; en un mot, ce qui fait qu'on appelle la chose de tel nom, et non point de tel autre; ce qui la fait distinguer par un substantif ou, dit M. Demolonbe,

(1) Marcadé, Explic. théor. et prat. du Code civil, t. IV, p. 358, no 405; Demolombe, Traité des Contrats et Obligations conv., t. I, p. 82, no 81 et 82.

par une réunion de mots employés substantivement. La substance, on le comprend, n'est point susceptible de plus ou de moins; les qualités substantielles, à la différence des qualités accidentelles, sont ou ne sont pas; pour elles il n'y a ni degré ni nuance.

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Dans quel cas, en notre matière, pourra-t-on dire qu'il y a erreur sur la substance? Ne sera-ce point lorsqu'une des parties aura voulu faire apprendre à l'enfant tel métier et que le contrat aura eu pour objet l'apprentissage d'un autre métier? Le métier n'est-il pas la substance et, si, nous pouvons dire, la moelle du contrat; est-il susceptible de plus ou de moins; n'est-ce pas en vue de ses qualités spéciales, de sa manière d'être spéciale que les parties contractent? Ainsi le métier d'ébéniste n'est pas le métier de serrurier et, réciproquement, le métier de serrurier n'est point le métier d'ébéniste. Que si l'on peut dire, en effet, qu'il y a des qualités accessoires, secondaires, communes à ces deux métiers, il n'en est pas moins vrai, constant que le fond du métier, les qualités principales, essentielles qui font que le métier s'appelle ébénisterie et non point serrurerie, constituent la substance. Or, lorsque l'erreur tombera sur la substance, c'est-à-dire sur le métier lui-même, il faudra accorder, aux parties le droit d'intenter l'action en nullité; et ce droit appartiendra à l'une ou à l'autre des parties victime de l'erreur. Tel est le premier cas dans lequel l'erreur est une cause de nullité du contrat. Le second est celui dans lequel l'erreur tombe sur la personne avec laquelle on a intention de contracter, à la condition toutefois que la considération de cette personne soit la cause principale de la convention. Cette espèce pourra être d'une application fréquente dans notre matière. Il est, en effet, habituel que le maître ne soit pas le premier venu, mais une personne déterminée; non pas Pierre ou Paul ou Jacques, mais Jacques seul. Pothier (1) disait au

(1) Pothier, Traité des Obligations, Part. 1, Chap. I, no 19.

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