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ministration ne peut être responsable d'une force majeure constatée.

Les 15,000 francs de traitement extraordinaire étaient une libéralité peu onéreuse à celui qui la faisait ils devaient être payés par le pays conquis, et ne l'ont pas été par le pays délivré.

Quant à l'épée et aux papiers, je crois qu'il serait fort difficile à M. le ministre de la guerre de savoir ce qu'ils sont devenus.

Votre commission propose donc l'ordre du jour sur cette pétition conçue d'ailleurs en termes fort peu mesurés.

(La Chambre passe à l'ordre du jour.)

Le sieur Dalmas, demeurant à Castelnaudary, demande une récompense pour le service qu'il a rendu en supprimant le chômage du canal du Midi.

Voici les faits tels qu'il est possible de les tirer de cet énorme cahier de pièces justificatives. Dans le fond du canal du Midi pousse une grande quantité d'herbes qui le remplissent, entravent la navigation des barques, et qu'on est obligé de faucher annuellement. Pour cette opération, on est obligé de mettre le canal à sec et de supporter un chômage de quarante-cinq jours.

Encouragé, à ce qu'il paraît, par quelques lettres de compliments, le sieur Dalmas a inventé et construit une machine qui aurait arraché les herbes, au lieu de les couper, cela sans interrompre la navigation par la mise à sec du canal. Cette machine a pourri sans avoir été employée dans le bassin de Castelnaudary, et cependant en 1807 et 1808, le sieur Dalmas obtint l'entreprise du curage, et l'opéra par le procédé ordinaire. Sa machine, dit-il, avait besoin d'être perfectionnée.

Il évalue à 68,000 francs les dépenses faites par lui pour cette machine. De plus, il a proposé depuis vingt ans plusieurs autres machines qu'on s'est obstiné à ne pas employer.

En outre, il a écrit plusieurs mémoires. On a profité des vues contenues dans quelques-uns, on ne lui a pas même accusé réception des autres, et il évalue à 40,000 francs la récompense qu'il croit due à ce travail; total 108,000 francs. Au lieu de cela, il a reçu quelque temps de la compagnie des actionnaires, et sous le titre peu flatteur de secours, 50 francs par mois.

Fatigué de solliciter vainement les actionnaires, c'est à vous qu'il s'adresse pour deux raisons: la première, c'est qu'il ne connaît pas de loi qui force à la reconnaissance ceux qui ont été obligés. Et la seconde, c'est qu'il en connaît une du 22 août 1790, qui déclare que l'Etat doit récompenser les services rendus à l'ordre social. Or, ayant travaillé pendant vingt ans dans le but, dit-il, de procurer l'avantage du public et le sien, cette loi doit lui être appliquée.

Votre commission vous propose l'ordre du jour. (L'ordre du jour est adopté.)

Le sieur Jouglard, demeurant à la Seyne (Var), demande que les émigrés propriétaires de rentes sur le clergé et sur les communes soient indemnisés.

Le sieur Jouglard expose qu'en s'emparant des biens du clergé et des communes, l'Etat s'obligea de liquider les créances hypothéquées sur ces biens, et que jusqu'au sénatus-consulté du 6 floréal an X, les créanciers du clergé et des communes eurent la faculté de se faire liquider, mais que, par le fait même de leur absence, ils ne purent pas en profiter. Il désirerait qu'il leur fût accordé une indemnité.

Sans doute, il serait à souhaiter que toutes les pertes occasionnées par les malheurs de la Révolution pussent être réparées; mais les nations,

comme les individus s'arrêtent devant l'impossibilité, et votre commission est obligée de vous proposer l'ordre du jour.(Cette proposition est adoptée.)

M. le Président. Messieurs les questeurs auraient à entretenir la Chambre d'une affaire qui les concerne particulièrement; ils lui proposent, en conséquence de se former lundi en comité secret après la séance publique.

Quelques voix: Pourquoi pas aujourd'hui?

M. le Président. Il est convenable d'attendre à lundi parce qu'ayant à délibérer ce jour-là sur un projet de loi, l'Assemblée sera plus nombreuse. La séance est levée.

(L'Assemblée se sépare à trois heures et demie.)

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.

Réunion dans les bureaux du lundi 8 janvier 1827.

La Chambre des députés, réunie dans ses bureaux avant la séance publique, a procédé à la nomination suivante :

Commission chargée de l'examen du projet de loi relatif au tarif des lettres.

1er Bureau, M. Josse-Beauvoir; 2o, M. le comte d'Effiat 3o, M. le marquis de Bouthillier; 4o, M. le comte de Caumont-Laforce; 5e, M. le marquis de Fraguier; 6o, M. de Bourrienne; 7, M. Masson; 8°, M. le comte de Saint-Cricq; 9o, M. Carrelet de Loisy.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.
PRÉSIDENCE DE M. RAVEZ.

Séance du lundi 8 janvier 1827.

La séance est ouverte à deux heures et demie, à l'issue d'une réunion dans les bureaux.

M. le président du conseil, M. le garde des sceaux, MM. les ministres de l'intérieur et de la marine sont présents.

Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal. La Chambre en adopte la rédaction.

M. le Président. M. le rapporteur du 3o bureau a la parole.

M. de Riocour, rapporteur. Messieurs, vous avez chargé votre 3e bureau de vérifier les opérations relatives à l'élection de M. de Lorimier, nommé député par le 1er arrondissement électoral du département de la Manche. Le nombre des électeurs inscrits était de 346. 256 ont pris part à l'élection. Au 1er tour de scrutin, M. de Lorimier a obtenu 178 suffrages. Il réunit ainsi les deux majorités exigées par la loi. Toutes les formalités ont été exactement remplies. M. de Lorimier a plus de 40 ans ; il paye depuis plus

d'un an plus de 1,000 francs d'impositions. Votre 3 bureau vous propose de l'admettre au serment de député.

M. le Président. Il n'y a pas d'opposition?... Je proclame M. de Lorimier membre de la Chambre des députés.

M. de Lorimier, présent à la séance, prête le serment d'usage entre les mains de M. le président. La Chambre lui donne acte de ce serment.

M. le Président. L'ordre du jour est la discussion du projet de loi relatif à l'imposition extraordinaire votée par le département du Lot, pour l'achèvement de ses routes départementales. M. Leclerc de Beaulieu a la parole.

M. Leclerc de Beaulieu. Messieurs, j'ai l'honneur de prévenir la Chambre que je n'appartiens à aucun des départements pour lesquels on lui demande l'autorisation d'impositions extraordinaires; que je n'ai aucune connaissance des localités qui les réclament. Etranger à toute discussion particulière qui pourrait s'élever sur les projets présentés, j'ai cru que la Chambre me permettrait de lui soumettre quelques observations générales, et sur le nombre toujours croissant de ces sortes de demandes, et sur le mode actuel de les convertir en lois. L'an dernier, à l'occasion de projets de loi semblables à ceux-ci, des observations analogues aux miennes furent faites à une autre tribune (Chambre des pairs, du 27 juin): j'espère que cette Chambre, gardienne spéciale de la bourse des contribuables, voudra bien m'écouter avec quelque indulgence. Un dégrèvement a eu lieu sur les impositions directes aux précédents budgets. M. le ministre des finances ne nous dissimula point les conditions de ce modique allègement. Il nous présenta les impôts directs comme les cautions des emprunts nécessaires en cas de guerre, et il en conclut que, différents en cela des impôts indirects, destinés à conserver en tout temps un juste niveau, les impôts directs devaient diminuer ou augmenter selon l'état pacifique ou hostile de nos relations extérieures. Je conçois que les administrateurs des départements n'aient été frappés que de la diminution de l'impôt, et qu'ils n'aient pas fait attention aux conditions de cette diminution il est tout simple de ne pas étendre sa vue au delà de son horizon; et je comprends fort bien qu'une route départementale occupe davantage un préfet que nos éventualités diplomatiques. Je ne nie pas aussi que tel grand chemin, tel canal, ne puisse changer tellement la face d'un département, qu'il faudrait ou l'entreprendre ou l'achever, quelles que puissent être les circonstances. En certaines questions de ce genre, je serais du même avis que l'administration; mais, en beaucoup d'autres, je ne verrais pas l'opportunité des impositions extraordinaires là où elle la verrait. Je prie MM. les administrateurs de vouloir bien faire l'opération inverse de celle qui se pratiquait au temps du Directoire: l'on calculait alors les traitements des fonctionnaires en hectolitres de blé; qu'ils calculent aujourd'hui ce qu'il nous faut, à nous propriétaires, d'hectolitres de blé pour atteindre à la valeur de leurs traitements; qu'ils calculent, en outre, l'immense part de l'impôt foncier payée par des propriétaires voisins de l'état de misère, peut-être ces réflexions, s'ils voulaient bien les faire, arrê

teraient quelques-uns des projets qui se multiplient chaque année.

En effet, Messieurs, nous arrivons au moment où les impôts extraordinaires deviendront l'état ordinaire des choses, et où les départements réduits aux impôts prévus par le budget formeront l'état d'exception. Je ne saurais deviner, je l'avoue, la cause d'une telle impulsion; car je rendrai justice sur ce point à M. le ministre de l'intérieur : il n'a jamais brusqué l'achèvement des monuments publics confiés à ses soins; il a toujours regardé le temps comme un puissant auxiliaire, et jamais son impatience de finir n'a grevé notre budget. Comment s'expliquer tant de prudence et de réserve d'un côté, tant de vivacité et de demandes d'argent de l'autre? M. le ministre de l'intérieur ne doit-il pas donner à MM. les préfets des instructions en harmonie avec ses propres actions? Serait-ce donc une fatalité attachée à nos ministres que le mépris de leurs conseils au dedans coinme au dehors ?

Mais, Messieurs, ce n'est pas le nombre seul des votes extraordinaires qui m'effraie; je suis encore plus effrayé de leur durée. Nous consacrons des engagements pris pour huit et dix ans : eh! Messieurs, qui peut se permettre une aussi longue prévision? Sans doute, M. le président du conseil fera tous ses efforts pour conserver la paix; j'en ai la conviction la plus intime, et l'idée que je me fais de tout ce qu'il fera pour y parvenir est au-dessus de toute expression. Mais si une seule volonté suffit pour la guerre, une seule volonté ne suffit pas pour la paix. Nous ne pouvons donc calculer de si loin le thermomètre toujours variable de nos impôts directs; et s'il devait s'élever de plusieurs degrés par la nécessité des temps, ne serait-ce pas le faire hausser outre toute mesure, que d'y ajouter des centimes extraordinaires votés précisément en considération d'une baisse momentanée? Conclurai-je de ces réflexions que nous devons rejeter tout impôt extraordinaire? Non; mais j'en conclurai que nous devons, avant de les voter, constater leur nécessité, et substituer au mode actuel un mode plus convenable et plus digne de cette Chambre. Permettez-moi en finissant de vous présenter quelques idées à ce sujet.

D'abord ne semble-t-il pas convenable de faire, pour composer les commissions, le contraire de ce qui se pratique aujourd'hui, c'est-à-dire d'en exclure les députés des départements intéressés ? N'est-il pas en effet dans les règles de la saine logique, comme de l'impartiale justice, que le rapport d'une affaire soit le résultat des informations du magistrat, et non les conclusions de la partie demanderesse? Je voudrais ensuite que la commission recueillit tous les documents que doit avoir le ministère de l'intérieur; qu'elle y suppléât même en cas d'insuffisance ou d'obscurité. Ainsi l'unanimité ou la majorité plus ou moins forte qui a eu lieu dans le conseil votant; les sommaires des motifs allégués de part et d'autre, et les répliques qui ont été faites; les plans des lieux, les devis des ouvrages, les estimations des terrains, les notions statistiques, les calculs des avantages futurs comparés aux charges actuelles, l'aperçu des divers intérêts satisfaits ou compromis tels sont les éléments indispensables pour asseoir un jugement. Je voudrais, en outre, que la commission accueillît les pétitions des propriétaires étrangers aux conseils qui ont voté ; qu'elle les examinât; qu'elle admit même les réclamants à s'expliquer de vive-voix en son sein Des députés qui le désireraient, pourraient pren

dre connaissance des pièces et venir conférer avec les membres de la commission. Le rapport fait à la Chambre ne serait qu'une analyse très succinte de l'information: car ces sortes d'affaires se traitent mieux dans un bureau que dans une Chambre; et la discussion publique n'aurait lieu que dans le cas où toutes les opinions n'eussent pui se concilier ensemble au sein de la commission. Ce sont là, me dira-t-on, des commissions d'enquête, et les commissions d'enquête feraient entrer l'administration dans la Chambre; et moi, je réponds que je ne saurais concevoir le droit de juger séparé du droit de s'instruire. Si la Charte nous le permettait, je demanderais une loi qui attribuât au roi seul le droit d'autoriser les impôts et les emprunts locaux au moins nous rejetterions la responsabilité tout entière sur les ministres, et nous ne grèverions point successivement la France entière d'impôts et d'emprunts, par des votes qu'il nous serait impossible de motiver. L'intérêt que je prends à la dignité de cette Chambre, me fait toujours éprouver un sentiment pénible, lorsque je vois arriver l'un de ces scrutins qui offrent le spectacle d'enfants jouant aux boules, plutôt que celui de députés délibérant gravement sur les intérêts du pays. Prenons garde que la Chambre, lorsque ses votes finissent par ne plus être que de vaines formalités, ne finisse bientôt de même.

Je vote contre les projets de loi, non dans l'intention de résoudre négativement des questions que je ne connais pas, mais parce que, dans l'ignorance où je suis des affaires que l'on m'appelle à juger, je ne puis que demander de plus amples informés.

M. Becquey, directeur général des ponts et chaussées. Messieurs, dans les deux sessions qui ont précédé celles-ci, la Chambre a adopté, sans aucune contradiction, et à peu près à l'unanimité, un grand nombre de projets de loi tout semblables à ceux dont elle va s'occuper aujourd'hui. Cependant, l'honorable député qui m'a précédé à cette tribune, se plaint de ce que des départements, saisissant l'occasion favorable d'un dégrèvement, aient demandé à s'imposer extraordinairement, soit pour diverses contributions, soit pour l'achè vement de leurs routes départementales.

J'observerai que les conseils généraux, quand ils expriment de semblables vœux, correspondent avec l'intention bien connue des habitants, et que c'est un besoin bien universellement senti que celui d'accélérer la création des bonnes communications. De ces bonnes communications, il résulte un tel profit pour l'agriculture, pour le commerce et pour l'industrie, que je ne pense pas qu'il puisse s'élever d'opposition sérieuse contre la création de communications nouvelles, bienfait réclamé non seulement par toute la France, mais encore par l'Europe entière.

Les départements sont chargés par notre législation de construire et d'entretenir les routes départementales. Par quelle voie peuvent-ils pourvoir à cette dépense? Ils ne le peuvent que par leurs revenus ordinaires dont vous connaissez les limites, ou par le moyen de contributions extraordinaires; un grand nombre de demandes de cette espèce ont été faites cette année. Nous ne yous avons présenté encore que les vœux de six départements; mais dix-sept ou dix-huit départements en ont exprimé de semblables, et nous espérons être à même de vous les soumettre dans le cours de la présente session.

La cause de cette augmentation dans le nom

bre des demandes est facile à saisir. Les départements ont pensé que tout en profitant d'une partie du dégrèvement, puisque les sommes qu'ils ont votées ne sont que de trois, quatre, cinq et six centimes pour un seul d'entre eux, ils pouvaient faire jouir le pays de ses nouvelles communications qui sont tant désirées. L'occasion était favorable: ils l'ont saisie.

L'honorable préopinant a rappelé que M. le président du conseil des ministres, en présentant le budget l'année dernière, avait annoncé que, si les circonstances de guerre exigeaient des dépenses extraordinaires, on serait dans le cas de demander aux contribuables une somme plus forte pour y parvenir. Dans la crainte où il est que ces circonstances de guerre ne surviennent, M. de Beaulieu croit que la Chambre devrait se dispenser d'approuver les votes que des conseils généraux ont émis, lorsqu'ils ne pouvaient avoir la prévision de telles circonstances.

Messieurs, ce ne sera pas à l'occasion de routes départementales que Dous agiteróns des questions de politique. Cela n'entre pas dans mes fonctions. Je pourrais à cet égard avouer mon ignorance avec l'honorable député. Je dirai toutefois que si l'on était arrêté par de semblables considérations, on resterait inactifs, stationnaires, et l'on ne pourrait jamais, dans la crainte d'une guerre, profiter des bienfaits de la paix, pour faire exécuter des travaux qui sont réclamés par l'intérêt du pays. Le pays souffrirait pendant la paix, parce qu'il y a des guerres possibles, et assurément encore pendant la guerre. Il n'y aurait donc jamais d'époque pour améliorer l'état du pays.

Dans le cas où la Chambre se déciderait à approuver de semblables votes, l'honorable préopinant voudrait que cette approbation eût lieu dans une autre forme que celle suivie jusqu'à présent; il voudrait, par exemple, que les députés des départements qui sont intéressés à ces votes, s'abstinssent de prendre part au travail des commissions. Je ne crois pas que la Chambre suppose qu'un député appartenant à un département intéressé dans le vote, pût voter autrement qu'il n'a promis de le faire, comme un bon et loyal député. Ainsi, je n'insisterai pas sur cette objection.

Le préopinant à encore supposé que les commissions délibèrent sans être informées des besoins des départements intéressés; c'est là une erreur. S'il avait été mieux informé, il aurait sù que l'administration remet aux commissions non seulement les votes des conseils généraux, mais encore les rapports des ingénieurs sur l'état des routes, sur les dépenses et les voies et moyens pour y parvenir. Toutes ces communications ont été faites à vos commissaires, qui ont pu, par conséquent, délibérer en connaissance de cause.

L'honorable député a pensé que les commissions devaient se mettre en correspondance directe avec les localités, et établir des enquêtes à l'effet de réunir tous les documents que les départements peuvent fournir. Il voudrait en outre que tous les députés se rendissent à la commission pour en prendre connaissance. Mais telle n'est pas, Messieurs, l'organisation de la France. Le roi a l'initiative des propositions de lois. Les Chambres appelées à voter sur ces lois, ont assurément le droit de demander tous les documents dont elles ont besoin, et les ministres, dépositaires de la confiance du roi, ne peuvent refuser lés communications qui leur sont demandées, et

qui ont pour objet de mettre les Chambres à même de voter en connaissance de cause.

Je pense donc que ces objections n'auront aucune influence sur la Chambre, et qu'elles ne l'empêcheront pas d'adopter la loi qui est actuellement en délibération, ainsi que celles du même ordre qui lui seront successivement présentées.

M. de Valon. Messieurs, je ne viens point entretenir la Chambre des intérêts d'une localité; mais avant d'adopter un projet de loi qui doit ajouter aux charges des contribuables, il importe de représenter à M. le directeur général que plus nous étendons nos sacrifices, plus nous devons renouveler nos instances pour l'exécution des travaux mis au compte du Trésor.

Ainsi que l'a déjà dit l'honorable rapporteur de la commission, il existe au centre du royaume une lacune dans le système des routes royales; et puisque l'état de nos finances permet d'ajouter plusieurs millions au budget des ponts et chaussées, le moment est venu de terminer les grandes communications de Paris à Perpignan et à Montpellier par les vallées de la Corrèze et du Lot: Sous l'administration provinciale de la HauteGuienne, une route d'une utilité commune à l'étendue la plus considérable de la France, depuis Dunkerque jusqu'à Perpignan, était de première classe; elle fut abandonnée, ainsi que les travaux de nos départements du centre, à l'époque où les efforts du gouvernement se portaient vers les frontières et dans les pays conquis. Le Lot et la Corrèze furent réduits à terminer les travaux commencés sur leurs territoires. Nous ne réclamons pas contre cette fausse mesure : le projet de loi qui vous est présenté en donne la garantie la plus certaine; mais, pour prix de nos grands efforts, nous demandons, comme un vœu de nos localités, et comme une source de prospérité pour toute la ligne de Paris à Perpignan, que la partie de cette route à la charge de l'Etat soit ouverte en même temps que les nôtres.

En se dirigeant de Paris sur Perpignan, par la ligne la plus directe, la route est ouverte sur 120 lieues d'étendue, par Montargis, Bourges, Guéret et Eymoutiers. C'est seulement à ce point que commence la lacune qui entrave toutes nos communications. Les conseils généraux de nos départements n'ont cessé de réclamer cette confection comme une source de prospérité; elle n'exigera pas 700,000 francs depuis Bymoutiers jusqu'à Seilhac une seule ville a déjà fait construire à ses frais un pont qui a coûté plus de 70,000 francs. Ce dévouement mérite d'être signalé et d'être encouragé.

Je n'ai plus que quelques mots à dire pour justifier cette demande et la modicité de la dépense qu'elle nécessite. A partir d'Eymoutiers, la route cesse tout à coup : en la dirigeant par Treignac et Tulle, elle se réunit à une route royale jusqu'à Saint-Fortunade. Là commencent jusqu'à Figeac les travaux mis à la charge de la Corrèze et du Lot, et pour l'exécution desquels ils viennent réclamer un impôt extraordinaire. Arrivée à Figeac, la route est mise au rang des routes royales jusqu'à Villefranche, où elle se divise en deux branches, l'une par Rodez à Montpellier, et l'autre à Perpignan par Alby et Carcassonne.

Je n'hésite pas à dire à cette tribune que c'est une des routes les plus importantes et les plus indispensables de la France avec moins de 1,500,000 francs on peut la mettre en bon état de viabilité. On abrégerait ainsi de six jours le

roulage de Paris à Perpignan et à Montpellier; on ferait cesser ces longs circuits, ces transports à dos de mulets qui ruinent notre commerce, notre agriculture, et on mettrait un terme à cet isolement dans lequel nous sommes au centre du royaume.

Un ou deux millions ne sont rien pour le Trésor à côté des grands avantages qu'on peut assurer à nos contrées par cette dépense; et lorsque je vois la facilité avec laquelle on demande des millions pour des dépenses assez insignifiantes, telles par exemple que le projet de manutention à la barrière des Bons-Hommes, j'ai la plus grande confiance dans les décisions que nous sollicitons; et malgré l'état de détresse où se trouvent les contribuables de nos contrées, je vote en faveur du projet de loi.

M. Méchin. Messieurs, je ne viens faire qu'une très courte observation. L'andée dernière, mes honorables amis et moi nous aurions été très portés à nous réjouir du dégrèvement accordé aux contribuables, si nous n'eussions pas vu, à côté de ce dégrèvement, des besoins très nombreux et très pressants. Nous en fimes l'observation à la Chambre, et l'événement en justifie parfaitement aujourd'hui la justesse. Vous voyez que, dès cette année, les conseils généraux multiplient leurs demandes d'impôts extraordinaires, parce que vous vous êtes mis hors d'état d'augmenter le budget des ponts et chaussées. Il en résulte que, malgré le dégrèvement, les citoyens Vont supporter les mêmes charges, et que le seul effet de ce dégrèvement sera d'affaiblir beaucoup la jouissance des droits électoraux.

M. de Berbis. Il y a une erreur très grave dans ce que vient de dire M. Méchin. Il a confondu les routes royales avec les routes départementales. Ces dernières sont à la charge des départements; les routes royales, au contraire, sont à la charge du Trésor. Il n'y a donc rien de commun entre le dégrèvement accordé l'année dernière et l'impôt qu'il s'agit de voter aujourd'hui, puisque, quand même le dégrèvement n'aurait pas eu lieu, les routes départementales n'en seraient pas moins restées à la charge des dépar

tements.

M. Méehin. C'est juste !...

M. de Berbis. Sans doute, on peut désirer l'augmentation du budget des ponts et chaussées; mais quand même ce budget recevrait de nouvelles allocations, elles ne porteraient que sur les routes royales. Ainsi, l'observation de M. Méchin tombe d'elle-même et n'a aucun fondement.

M. Méchin. C'est bien répondu. (On demande à aller aux voix.)

M. le Président fait lecture de l'article unique du projet de loi, en ces termes :

Le département du Lot, conformément à la demande qu'en a faite son conseil général dans sa session de 1826, est autorisé à s'imposer extraordinairement, à dater de 1827, et pendant sept années consécutives, 6 centimes additionnels au principal des quatre contributions directes.

Le produit de cette imposition extraordinaire sera spécialement affecté à la confection et à l'achèvement des routes départementales situées dans ce département. »>

Cet article est mis aux voix et provisoirement adopté.

On vote ensuite au scrutin secret sur le projet de loi. Le nombre des votants est de 248. L'urne du vote contient 240 boules blanches et 8 noires. M. le président proclame en conséquence l'adoption du projet de loi.

M. le Président. Nous avons maintenant à nous occuper du projet de loi sur l'imposition extraordinaire votée par le département de la Loire-Inférieure, pour l'achèvement de ses routes départementales. Personne n'a demandé la parole sur ce projet de loi, qui est ainsi conçu:

Article unique. Le département de la LoireInférieure, conformément à la demande qu'en a faite son conseil général, dans sa session de 1826, est autorisé à s'imposer extraordinairement, à dater de 1827, et pendant quatre années consécutives, 2 centimes additionnels au principal des quatre contributions directes.

Le produit de cette imposition extraordinaire sera spécialement affecté aux travaux des routes départementales situées dans ce département.

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M. le Président met cet article aux voix; il est provisoirement adopté.

On vote au scrutin secret sur l'ensemble du projet de loi. Après l'appel, le réappel et le dépouillement, M. le Président proclame le résultat du scrutin.

M. le Président. Le nombre des votants est de 225. L'urne du vote contient 218 boules blanches et 7 noires. (Le projet de loi est adopté.)

L'ordre du jour pour demain sera la continuation de la discussion et de la délibération sur les autres projets de loi qui ont été renvoyés à l'ordre du jour. La Chambre continuera de se réunir dans ses bureaux à midi précis. La séance publique aura lieu à deux heures et demie.

La séance publique est levée. La Chambre va se former en comité secret.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.

PRÉSIDENCE DE M. RAVEZ.

Comité secret du lundi 8 janvier 1827 (1).

Le procès-verbal du comité secret du 28 décembre 1826 est lu et adopté.

M. le Président annonce que Messieurs les questeurs désirent entretenir la Chambre d'une affaire qui l'intéresse.

M. Dubruel,un de messieurs les questeurs, dit que le bail de la partie du palais Bourbon occupée par la Chambre, a pris fin depuis le 1er janvier 1819 et qu'elle continue d'en jouir par tacite reconduction. Déjà les questeurs se sont fait un devoir de signaler les inconvénients et l'inconvenance de cette position précaire.

La Chambre elle-même a exprimé le vœu de posséder irrévocablement les bâtiments nécessaires à ses séances, et c'est dans l'intention de

(1) Ce comité secret est inédit.

remplir ce vœu que des négociations ont été ouvertes, à plusieurs reprises, avec son Altesse Royale le prince de Condé qui s'est refusé à toute aliénation et qui a seulement consenti à passer un nouveau bail de quinze ans.

Dans cet état de choses, les questeurs ne pouvaient pas oublier que les réparations faites à la salle ne garantissaient sa solidité que pour quelques années. Une reconstruction devenait nécessaire et S. A. R. imposait une clause trop onéreuse pour que la question ne dût pas être soumise à la Chambre elle-même. Cette clause consiste à charger la Chambre elle-même de toutes les grosses et menues réparations de quelque nature qu'elles puissent être avec la convention que tous les travaux de construction et de distribution resteraient, à la fin du bail, la propriété de S. A. R. sans répétition.

Ce sera donc à la Chambre à prendre une décision, soit pour la location du palais qu'elle occupe aujourd'hui, soit pour l'achèvement du bâtiment du quai d'Orsay, et, dans l'un de ces deux cas, il sera nécessaire de s'adresser au ministre de l'intérieur afin que S. Ex. prenne les ordres du roi, à cet égard, car à S. M. seule appartient le droit de prescrire ce qu'elle peut juger convenable pour l'emplacement de la Chambre des députés.

M. Dubruel termine en disant que toutes ces considérations ayant été soumises à la commission de comptabilité qui a décidé qu'elle ne se croyait pas suffisamment autorisée pour faire des propositions à ce sujet, Messieurs les questeurs ont cru devoir soumettre ces divers projets à la discussion de la Chambre.

M. Hyde de Neuville s'attache à faire sentir l'inconvenance de la position de la Chambre. Le lieu de ses séances doit être sa propriété et la dignité nationale ne permet pas qu'elle reste plus longtemps à loyer. Il demande le renvoi à la commission de comptabilité afin qu'elle fasse un rapport digne de la Chambre et digne de la France.

M. Casimir Périer s'attache à faire sentir, comme le préopinant, l'inconvenance de la situation précaire dans laquelle se trouve la Chambre. Il pense que le bâtiment du quai d'Orsay pourrait devenir un lieu convenable pour ses séances. Deux années suffiraient pour l'achever et l'on aurait l'avantage d'être chez soi et dignement.

Un membre propose le renvoi à une commission spéciale.

On demande la priorité pour cette dernière proposition.

M. le Président met aux voix la question de priorité. La Chambre décide que la priorité est refusée au renvoi à la commission de comptabilité.

M. le Président met aux voix le renvoi à une commission spéciale.

Cette proposition est adoptée.

En conséquence, le rapport de MM. les questeurs sera mis à la disposition des bureaux qui devront procéder à la nomination de cette commission.

La séance est levée.

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