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à affranchir du dépôt les écrits publiés dans l'in- Delhorme, qui se dit habitant des Pays-Bas depuis térêt privé, à l'époque des élections? vingt ans.

M. de Peyronnet, garde des sceaux. Il n'y a point de doute que si un candidat est calomnié à l'occasion et au moment des élections, la réponse qu'il voudrait publier contre ces calomnies rentrerait dans la classification de l'alinéa qui vient d'être adopté.

M. Rouillé de Fontaine. Qu'entendez-vous par calomnié ? (Aux voix! aux voix !) Est-ce qu'il ne serait pas permis à un candidat d'établir ses titres à la confiance des électeurs? Ne pourrait-il pas dire que son concurrent n'a pas les mêmes titres que lui à la confiance générale? Regarderat-on cela comme une calomnie?

La loi de 1822 donne au ministère la faculté d'établir la censure, dans l'intervalle des sessions. Eh bien cette faculté cesse de droit au moment de la dissolution ou du renouvellement intégral de la Chambre, parce qu'on a voulu que toutes les opinions pussent avoir des organes. Il nous importe donc beaucoup que, dans ces moments, la liberté de la presse ne soit pas restreinte. Je crois qu'il vaut mieux adopter l'amendement que de laisser du louche sur la question.

Plusieurs voix: Il n'y en a pas!

La Chambre, consultée, ferme la discussion. (L'amendement de M. Sébastiani est mis aux voix et rejeté. L'article 2, ainsi qu'il a été amendé, est adopté.)

La Chambre décide qu'il n'y aura pas demain de réunion dans les bureaux, afin que la séance puisse commencer par un rapport de pétitions. La séance est levée à six heures.

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M. le Président appelle à la tribune M. le comte de Laurencin, rapporteur de la commission des pétitions.

M. le comte de Laurencin, rapporteur. Vingt-huit pétitions sous les numéros 172, 173, 174, 175, 176, 177, 179, 180, 182, 183, 184, 185, 186, 191, 192, 194, 209, 210, 211, 212, 213, 223, 224, 225, 226, 227, 228, ont été adressées à la Chambre par un grand nombre de libraires, d'imprimeurs, d'ouvriers d'imprimerie, de marchands et de fabricants de papiers.

Toutes expriment le vœu du rejet du projet de loi sur la police de la presse.

Conformément aux précédents de la Chambre, la commission propose le renvoi de ces pétitions à la commission chargée de l'examen du projet de loi. (La Chambre ordonne ce renvoi.) Sous le n° 195 se trouve la pétition d'un sieur

Au nom de mon ancienne patrie, s'écrie-t-il, ce qui annonce qu'il l'a quittée sans espoir de retour, et qu'il n'est plus Français, veillez à la sûreté du roi, de la famille royale, du peuple, Montrez-vous ce que vous êtes, ne vous laissez pas dominer par un ministère vendu autant au pape, au clergé, aux jésuites qu'au grand Turc.

Cette conclusion exclamative suffit pour vous donner une idée de l'esprit de la pétition qui n'est qu'une diatribe aussi inconvenante que déplacée contre le pape et le clergé.

Le pétitionnaire a perdu la qualité de Français, il n'a donc point de vœu national à émettre devant la Chambre. Votre commission vous propose l'ordre du jour.

MM. Forbin des Issarts, de Bourrienne et Josse-Beauvoir. Le pétitionnaire n'est pas Français... La question préalable!

M. Petou. Le pétitionnaire parle des jésuites aussi.

M. le Président met aux voix la question préalable. La Chambre décide qu'il n'y a pas lieu à délibérer.

M. le comte de Laurencin, rapporteur, continue:

Une pétition, sous le n° 196, est adressée à la Chambre par des pharmaciens du département de Seine-et-Oise.

Ils se plaignent de ce qu'au mépris de la loi du 21 germinal an II, les docteurs en médecine et officiers de santé, dans les communes rurales, où sont leurs établissements de pharmacie, tiennent des dépôts de médicaments dont ils font journellement la vente et la distribution; et, par cette infraction à la loi, leur causent un dommage notable, et peuvent compromettre la santé publique.

La disposition textuelle de l'article 27 de cette loi de germinal, sur l'organisation de la pharmacie, n'autorise cette vente ou distribution de médicaments simples ou composés qu'aux officiers de santé établis dans les bourgs, villages, ou communes oùil n'y aurait pas de pharmaciens ayant officine ouverte, et encore seulement aux personnes près desquelles ils seront appelés.

Mais comme la loi ne prononce aucune pénalité, les docteurs en médecine et les officiers de santé usent de l'autorisation nonobstant les deux conditions restrictives, et la contravention qu'ils commettent demeure impunie.

Les pétitionnaires se plaignent encore de ce que les artistes vétérinaires, à l'égard desquels la loi se tait, parce qu'à l'époque où elle fut rendue, il n'y avait aucun vétérinaire dans les communes rurales, se croient plus autorisés que les officiers de santé à vendre comme eux des médicaments. La plupart tiennent même une officine ouverte au public. Les membres du jury médical du département de Seine-et-Oise ont signalé cette contravention dans le procès-verbal de la visite qu'ils ont faite à Angerville en 1825.

Les pétitionnaires demandent dans leur intérêt privé, comme dans l'intérêt public, de deux chose l'une ou la suppression de l'article 27 de la loi du 21 germinal an ш, ou qu'il y soit ajouté une disposition pénale.

Votre commission a pensé que cette réclamation mérite d'être prise en considération, et elle vous

propose d'en ordonner le renvoi au ministre de l'intérieur. (La Chambre ordonne ce renvoi.)

Un sieur Vandael, ex-chirurgien-major du 88° régiment de ligne, né Belge, et décoré de l'étoile de la Légion d'honneur, en 1804, se plaint d'être privé du traitement de légionnaire, depuis le 1er janvier 1814.

Le sieur Vandael est né Belge, il réside dans son pays devenu étranger à la France depuis le traité du 30 mai 1814.

Par cette abdication volontaire de la qualité de Français qu'il avait acquise, il a perdu le droit qu'il aurait eu au traitement de légionnaire. Votre commission vous propose de passer à l'ordre du jour. (L'ordre du jour est adopté.)

La pétition sous le n° 198, est celle du sieur Garonne, ancien député de la ville de Cette auprès de l'Assemblée dite constituante.

Le pétitionnaire expose à la Chambre que depuis huit mois les ouvriers de Cette et leurs familles, qui forment le quart de la population de la ville, sont sans travail et sans pain. Ils vous adressent leur humble prière pour le rétablissement dans leur ville de l'ancienne manufacture de tabac, qui leur donnerait du travail.

Le sieur Garonne, qui se rend l'organe de cette population malheureuse, explique que la ville de Cette, avant la Révolution, avait une manufacture de tabac de puissants motifs avaient déterminé le gouvernement à lui accorder cette faveur.

La presqu'île de Cette, circonscrite du côté de la terre ferme par les communes de Frontignan et de Balaruc, n'a point de territoire, et reste dès lors sans ressources agricoles d'aucun genre.

L'aridité du terrain, la cherté des vivres, le manque absolu d'eaux douces propres à la fabrication du savon, aux teintures, etc., ne laissent aucune possibilité de former, sur un tel point, un établissement industriel autre que celui qui, par la nature du privilège, n'a à lutter contre aucune concurrence mercantile.

Le commerce de Cette, est réduit aujourd'hui au seul débouché des vins et aux-de-vie. Autrefois elle recevait en retour ou en échange de ses expéditions aux Etats-Unis, des tabacs de Virginie, Maryland et autres, pour être vendus au bénéfice du fret à la ferme générale.

Cette ressource serait encore la même à l'égard de la régie, et elle ferait valoir la marine et les propriétés d'une ville qui, par sa fidélité, a bien des droits à la sollicitude du gouvernement.

Le pétitionnaire appuie le vœu qu'il exprime d'une foule de réflexions que votre commission a jugées dignes d'attention; elle vous propose en conséquence le renvoi de la pétition au bureau des renseignements. (La Chambre adopte cette proposition.)

Sous le n° 199, le sieur Vilatte, juge de paix du canton de Sauzé, département des Deux-Sèvres, dénonce à la Chambre des inhumations qui se seraient faites dans une chapelle de l'église de Bigarroque, sans l'autorisation royale et les précautions sanitaires.

Votre commission a pensé que le pétitionnaire, à raison même de la magistrature dont il est revêtu, devait savoir mieux que personne que l'exécution des lois de police est remise à une administration spéciale dont il n'est pas permis d'intervertir l'ordre hiérarchique. En conséquence, elle vous propose l'ordre du jour.

M. Méchin. Rien n'est plus important que de maintenir les lois de police sur les inhumations. Il y a malheureusement beaucoup d'exemples

que dans la France on les transgresse; il me semble qu'il serait sage de renvoyer la pétition à M. le ministre de l'intérieur. Passer à l'ordre du jour serait encourager les infractions fréquentes, qui sont extrêmement dangereuses. Je demande, en conséquence, que la Chambre renvoie à M. le ministre de l'intérieur.

M. le comte de Laurencin, rapporteur. La commission ne s'est pas dissimulé l'importance de la plainte; mais elle a pensé que cette plainte, si elle était faite par un simple particulier, n'aurait dû parvenir à la Chambre qu'après avoir été adressée d'abord aux autorités compétentes; et que cette obligation devait être imposée à bien plus forte raison à un juge de paix qui ne saurait ignorer les divers degrés de la hiérarchie. C'est par ce motif que la commission a proposé l'ordre du jour.

M. Méchin. J'admettrais le raisonnement de M. le rapporteur, si la pétition était faite dans un intérêt privé; mais il s'agit d'un désordre public sur lequel il est impossible que la Chambre passe à l'ordre du jour. J'insiste donc sur ma proposition. (La Chambre, consultée, passe à l'ordre du jour.)

M. le comte de Laurencin, rapporteur, continue :

Sous le n° 200 est la pétition du sieur Dégut, maire de la commune de Notre-Dame de la Mer ou des Saintes-Maries, 3° arrondissement du déparlement des Bouches-du-Rhône.

Le pétitionnaire présente à la Chambre des observations sur les articles 119 et 120 du projet du Code forestier.

Ce serait mal à propos entrer aujourd'hui dans la délibération d'un projet dont vous aurez bientôt à vous occuper.

Votre commission se borne à vous proposer le renvoi de la pétition du sieur Dégut à la commission chargée de l'examen du projet de loi. (Cette proposition est adoptée.)

Sous le n° 201, le sieur André Stavard, propriétaire et aubergiste, demeurant au bourg et commune de Verruye, canton de Mazière, département des Deux-Sèvres, demande à la Chambre l'autorisation de poursuivre devant le tribunal compétent le sieur Proust, maire de Verruye qui, dans une lettre confidentielle, aurait parlé en termes peu avantageux de la moralité du pétitionnaire, et lui aurait, par là, causé la perte d'un procès.

Sans entrer dans l'examen de la plainte, la Chambre ne peut accueillir une pareille demande. La loi trace au pétitionnaire la marche qu'il aurait à suivre, et les divers degrés de l'ordre administratif qu'il aurait dû parcourir avant de recourir à la voie de pétition.

Votre commission vous propose donc l'ordre du jour. (L'ordre du jour est prononcé.)

Sous le n° 202, le sieur Laurent Leduc, cidevant propriétaire à Evreux, adresse à la Chambre des inculpations graves contre un magistrat de la cour royale de Rouen, et il réclame son intervention judiciaire.

Votre commission n'a rien vu qui justifiât pleinement les inculpations du pétitionnaire, et elle a pensé que s'il a réellement à se plaindre, toutes les voies de droit lui sont ouvertes. Elle vous propose donc l'ordre du jour.

(La Chambre passe à l'ordre du jour.)

La pétition sous le n° 203 est celle du sieur Blot, de Colleville, département du Cavados.

Le sieur Blot expose que les communes maritimes du Cavados sont dans la plus affreuse misère; que leurs habitants, les pêcheurs, gémissent sous le joug de règlements tortionnaires; que, dégoûtés d'un état stérile, leur nombre diminue d'une manière effrayante pour la marine, et que cependant le remède à ces maux graves serait facile.

Il paraîtrait effectivement que la diminution des marins pêcheurs et des barques pontées est le résultat d'un système erroné de prohibition. Le pétitionnaire a annexé à sa pétition un mémoire sur les causes qui ont dépeuplé nos côtes de poissons, et sur les moyens propres à les repeupler. Ce serait absorber inutilement les moments précieux de la Chambre que d'entrer plus avant dans cette discussion.

Votre commission se borne donc à demander à la Chambre le renvoi de la pétition du mémoire au ministre de la marine.

MM. Labbey de Pompierres et Pardessus. C'est au ministre de l'intérieur qu'il faudrait renvoyer

(il ne s'élève pas d'opposition, la Chambre prononce le double renvoi.)

M. le comte de Laurencin, rapporteur, poursuit La pétition sous le n° 204 est encore du sieur Blot de Colleville. Il demande ia vente des vases infectes qui existent à l'embouchure de l'Orne.

Le pétitionnaire explique que ces vases situées sur Ouistreham, tour à tour couvertes par la mer et échauffées par le soleil, sont une vraie source de mort, et répandent au loin le deuil et la désolation, tandis qu'il serait facile d'obtenir leur desséchement en les aliénant sous cette condition. Alors elles profiteraient à l'Etat et à l'agriculture; le pays serait assaini, et l'embouchure de l'Orne deviendrait plus navigable.

Il ajoute que l'on parle chaque année de ce desséchement, que des acquéreurs se sont présentés pour les soumissionner; mais qu'une influence malfaisante ne cesse de s'opposer à la vente de ces vases. Il est malheureusement trop vrai que les projets les plus utiles rencontrent souvent des obstacles à leur exécution; mais alors le gouvernement n'a besoin que d'être averti pour les faire disparaître.

Votre commission, qui a accueilli les réflexions du pétitionnaire, vous propose le renvoi de sa pétition au ministre de l'intérieur. (La Chambre ordonne ce renvoi.)

Sous le numéro 205, se trouve la pétition du sieur Ponlet, de Balan, département des Ardennes, ex-caporal au 16° régiment de ligne, pensionné à 170 francs et chevalier de l'ordre royal de la Légion d'honneur.

Le pétitionnaire réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir des bontés du roi, que le traitement de 245 francs accordé aux légionnaires, et qui leur est payé tous les douze mois, le soit par trimestre, ainsi que cela était originairement.

Il expose que la plupart des légionnaires, ainsi que lui-même, n'ont pour vivre que le traitement de 245 francs et une modique pension de 150 à 300 francs. En sorte, dit-il, que nous sommes hors d'état d'acquitter nos dettes de location, de chauffage et autres dépenses qui doivent se payer

us les six mois. Si nous tombons malades, nous

ne pouvons nous soulager, faute de moyens et de crédit; car si nous mourons, tout meurt avec nous, et nos créanciers s'exposeraient à tout perdre.

Votre commission a pensé que si, dans un temps, la pénurie des finances a obligé de remettre à un an le paiement du traitement des légionnaires, peut-être leur état prospère permettra-t-il de revenir au semestre. Elle vous propose le renvoi de la pétition au ministre de la guerre.

M. Casimir Périer. Je crois, Messieurs, qu'outre le renvoi à M. le ministre de la guerre, il faudrait ordonner aussi le renvoi à M. le ministre des finances; il est difficile de concevoir pourquoi l'on ne paye les légionnaires que tous les ans, tandis que les fonctionnaires publics sont payés tous les mois; on pourrait au moins payer les légionnaires tous les six mois. Cela ne serait pas dispendieux pour le Trésor, et il en résulterait beaucoup plus d'aisance pour les anciens militaires qui n'ont que leur solde de légionnaires pour vivre. J'insiste pour le renvoi MM. les ministres des finances et de la guerre, qui pourront s'entendre ensemble à cet égard.

M, de Villèle, ministre des finances. Les fonds des légionnaires sont inscrits en rentes au Trésor; l'intérêt en est servi tous les six mois comme pour les autres rentiers.

M. Casimir Périer. Cela n'empêche pas qu'il ne soit très facile de prendre une mesure administrative. La réponse de M. le ministre des finances n'est qu'une observation d'ordre, et celle que je présente à la Chambre est d'intérêt public; elle doit par conséquent passer par dessus tout. Au surplus, si les sommes sont placées sur le grand-livre, et que l'intérêt en soit payé tous les six mois, je ne vois pas pourquoi les légionnaires ne seraient payés que tous les ans.

M. le général baron Lafont. Vous devez être persuadés, Messieurs, que l'illustre maréchal qui est à la tête de la Légion d'honneur a pris le parti le plus favorable aux intérêts des mèmbres de l'ordre. Mais pourquoi les légionnaires ne sont-il payés que tous les ans? C'est qu'il y a un arriéré d'une année entière. C'est avec les fonds que le maréchal reçoit en 1827, qu'il acquitte les traitements de 1826. Il faut même, pour que les traitements puissent être payés au commencement de l'année, que M. le ministre des finances avance les fonds; car autrement les paiements ne pourraient avoir lieu qu'après le 22 mars. Sans doute, il serait possible que l'administration ne donnât au commencement qu'une moitié des traitements, et que l'autre moitié fùt délivrée vers le milieu de l'année; mais cela serait directement contraire à l'intérêt des légionnaires, puisqu'ils se trouveraient ainsi de six mois plus en arrière qu'ils ne le sont actuellement.

M. Méchin. La Légion d'honneur est arriérée d'une année. Les officiers de la Légion d'honneur, au nombre desquels j'ai l'honneur d'être compté, sont payés tous les six mois, mais toujours avec une année d'arrieré. Je rends toutejustice à l'administration de l'illustre maréchal qui est à la tête de la Légion d'honneur; mais je dis que nous ne serions pas fâchés de savoir à quoi tient cet arriéré. Les officiers sont payés tous les six mois. Pourquoi les simples légionnaires ne le sont-ils

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« Art. 3. Sera puni des peines portées par les articles 15 et 16 de la loi du 21 octobre 1814 tout imprimeur qui imprimerait un plus grand nombre de feuilles que le nombre énoncé dans la déclaration qu'il aura faite en exécution de l'article 14 de la même loi.

«Les feuilles qui excéderaient ce nombre seront supprimées et détruites. »

La commission propose de rédiger ainsi cet article :

<< Sera puni des peines portées par les articles 15 et 16 de la loi du 21 octobre 1814, tout imprimeur qui tirera un plus grand nombre d'exemplaires ou de parties quelconques d'exemplaires, que le nombre énoncé dans la déclaration qu'il aura dû faire en exécution de l'article 14 de la même loi.

« Les exemplaires ou parties d'exemplaires qui excéderaient seront supprimés et détruits. »

M. Pardessus a proposé d'ajouter, après le premier paragraphe, ces mots: Sans préjudice des excédants des ouvrages, connus dans l'imprimerie sous le nom de passe ou défaits. M. Pardessus demande, en outre, la suppression du second paragraphe.

La Chambre doit s'occuper d'abord de l'amendement de la commission sur le premier paragraphe.

M. Benjamin Constant. Il faudrait d'abord s'occuper de l'amendement de M. Pardessus.

M. Pardessus. Je demande la parole contre l'amendement de la commission... Messieurs, ce n'est pas que je veuille faire douner à ma proposition la priorité sur celle de la commission; je veux seulement que la Chambre s'aperçoive bien que mon amendement a pour objet de corriger la trop grande généralité de la disposition de la commission, et c'est pour cela que je crois devoir prier la Chambre de me permettre de développer très brièvement les motifs de mon amendement.

La plupart des membres de cette Chambre connaissent les procédés de l'imprimerie; ils savent parfaitement ce que c'est que tirer à tel ou tel nombre d'exemplaires. Lorsqu'un imprimeur tire un ouvrage à 500 exemplaires, il emploie pour chaque feuille une rame de papier; s'il tire à mille, il faut deux rames, et ainsi de suite. Mais l'expérience a révélé un inconvénient auquel il n'y a pas de remède; c'est que souvent dans les rames de papier il se trouve des mains qui devant avoir 25 feuilles n'en ont que 24; ce qui fait qu'en tirant une rame on n'arrive pas exactement aux 500 exemplaires; premier inconvénient.

Second inconvénient: il se fait quelquefois qu'en imprimant, les ouvriers gâchent des feuilles, pour employer le mot technique; de là résulte encore une perte de feuilles.

Pour parer à ces deux inconvénients, il s'est introduit depuis trois ou quatre cents ans un usage qui n'a jamais été contesté, c'est que sur

chaque rame, on ajoute une main de papier qu'on appelle main de passe, et qui est destinée à remplacer, soit les feuilles manquantes dans la rame, soit les feuilles maculées par les ouvriers. Ainsi, lorsqu'un ouvrage doit être tiré à 500 exemplaires, on le tire par le fait à 525. N'en concluez pas qu'il y ait toujours 525 exemplaires de l'ouvrage; car lorsque l'ouvrage se compose de plusieurs feuilles, s'il arrive qu'une de ces feuilles ne soit pas au complet, soit parce qu'il manqué du papier, soit parce que les imprimeurs ont fait des maculatures, les autres feuilles en surplus sont dépareillées, c'est ce qu'on appelle des défaits, qui dans plusieurs occasions peuvent être utiles, comme par exemple pour réparer les erreurs commises dans la brochure.

Vous avez pu voir quelquefois dans les livres qu'une feuille de tel numéro manque, et qu'une autre feuille se trouve doublée. Alors, comme souvent les livres sont envoyés dans la province, et qu'on ne rapporte pas au libraire la feuille doublée, il faut qu'il trouve dans les défaits de quoi remplacer cette feuille doublée, qui manque nécessairement dans un autre exemplaire. Je vous donne ces explications pour vous faire sentir la nécessité des mains de passe. Cette néces sité est tellement évidente, que jamais il ne s'est élevé de difficulté à cet égard.

Dans la législation actuelle, il est prescrit aux imprimeurs de faire la déclaration du nombre d'exemplaires qu'ils ont l'intention de tirer pour chaque ouvrage qu'ils impriment. Eh bien, M. le ministre de l'intérieur sait mieux que personne que quand un imprimeur déclare qu'il veut tirer à 500, on ne le considère pas comme dépassant sa déclaration parce que, suivant qu'il s'est trouvé dans le papier plus ou moins de mains n'ayant que 24 feuilles, ou que les ouvriers ont fait plus ou moins de maculatures, cet imprimeur arrive à avoir quelques exemplaires de plus que les 500 qu'il a déclarés. J'ai lieu de croire par conséquent que le ministre ne s'opposera pas à mon amen dement.

Quant à vous, Messieurs, vous devez d'autant plus adopter cet amendement, que dans l'ar ticle 1 vous avez admis, relativenient à la justification des pages, et comme étant constant, un usage qui dans le fait n'existe pas. Si donc, vous avez adopté l'usage de l'imprimerie, alors qu'il était à la charge de l'imprimeur, vous ne pouvez refuser d'admettre un usage qui, je le répète, est suivi depuis un temps immémorial sans que jamais personne l'ait contesté.

Je demande que la Chambre délibère en premier lieu sur ma proposition, qui est nécessaire pour expliquer le sens de la disposition de la commission.

M. Benjamin Constant. Je crois, Messieurs, que je vous démontrerai clairement la nécessité d'adopter la proposition de M. Pardessus, en vous prouvant que d'après l'article tel qu'il est rédigé par la commission, un imprimeur sera toujours sûr d'être en contravention, soit qu'il comprenne, soit qu'il ne comprenne pas les mains de passe dans sa déclaration.

D'après cet article de la commission, un im. primeur doit déclarer le nombre exact d'exemplaires qu'il veut imprimer. Eh bien! s'il ne com prend pas les mains de passe dans sa déclaration, pour un ouvrage qu'il tirera à mille exemplaires, il arrivera que, suivant le nombre de feuilles gåtées par les ouvriers, il aura 1,025 ou 1,050 exemplaires. Alors, comme rien ne peut sortir de chez

lui, la police arrivera, comptera les exemplaires, et dira: Vous avez déclaré mille exemplaires, en voilà 1,025; il y a contravention; vous être passible de l'amende et de la perte de votre brevet.

Si, au contraire, l'imprimeur comprend les mains de passe dans sa déclaration, il dira: Je veux tirer à 1,050 exemplaires. Mais les feuilles manquantes ou avariées réduiront naturellement ce nombre à celui de 1,022, comme je le disais tout à l'heure. Alors on viendra chez lui et on lui dira: Vous avez tiré à 1,050 exemplaires: il n'y en a plus chez vous que 1,025; c'est vingt-cinq exemplaires que Vous avez mis en circulation. Dès lors encore procès-verbal de contravention, jugement et possibilité de la perte du brevet.

Vous demandez comment il est possible de parer à cela. Je crois que l'amendement de M. Pardessus obvie à une partie de l'inconvénient, et je l'appuie; mais comme il sera possible encore d'élever beaucoup de chicanes, je préviens que je voterai contre l'article.

M. Bonet, rapporteur. L'usage dont vous a parlé M. Pardessus, pour ce qu'on appelle les mains de passe, est très constant. La commission, je l'avoue, n'a pas voulu entrer dans ces détails, parce qu'elle avait la conviction que l'imprimeur, tant qu'il se bornerait à cet usage ancien, serait à l'abri de tout danger. Il est vrai que l'usage dont il s'agit a un léger inconvénient, celui de mettre en surplus toujours un peu plus de feuilles qu'il n'y en a, soit de moins dans les rames, soit de meurtries par les ouvriers; mais cela est fort peu de chose; et si l'imprimeur n'excède pas ce qui se fait ordinairement, il n'y aura aucune contravention à lui reprocher. Au surplus, je crois qu'on pourrait renplir le but qu'on se propose, en ajoutant simplement au paragraphe: sauf les usages connus dans la librairie, relativement aux mains de passe.

M. Dudon. N'oubliez pas, Messieurs, que le législateur doit toujours supposer que les lois sont exécutées de bonne foi et appliquées avec sagesse par les tribunaux. Il est bien vrai que le papier sortant des manufactures n'est jamais bien compté exactement, pas même le papier vélin, qui est le plus précieux. Mais je crois que la Chambre ne doit pas se jeter dans le détail d'objets qu'elle ne peut apprécier. Les tribunaux seront assez sages pour appliquer la loi comme il convient. Il en sera devanteux du cas qu'on suppose, ce qu'il en est pour l'interprétation des contrats entre les imprimeurs et les auteurs je crois, par ces motifs, qu'il n'y a pas lieu d'adopter l'amendement de M. Pardessus; je le crois d'autant plus que, dans l'état actuel, la déclaration du nombre de feuilles est exigée, et qu'il ne s'est jamais élevé de difficultés à cet égard.

M. Casimir Périer. M. Dudon prétend qu'on ne peut dans un article de loi préciser des usages. Il aurait pu faire la même réflexion quand il s'est agi, dans l'article 1, de gêner les imprimeurs; et s'il ne l'a pas faite, peut-être devrait-il s'abste nir de même à l'occasion d'une disposition qui. comme celle de l'article 1er, est tout à fait relative aux usages de l'imprimerie; avec cette différence pourtant que, dans l'article 1er, il s'agissait d'un usage prétendu et qui n'a rien de réel, tandis que, dans l'article 2, c'est un usage que tout le monde connaît, et qui existe depuis des siècles. Faites bien attention, Messieurs, qu'il s'agit de contraventions emportant des peines très sévères, puisqu'elles peuvent aller jusqu'à la suppres

sion du brevet; et rappelez-vous bien qu'ainsi que vous l'a dit M. Benjamin Constant, si vous n'admettiez pas l'amendement de M. Pardessus, il sera impossible que l'imprimeur ne soit pas en contravention de quelque manière qu'il s'y prenne. En vain nous dit-on que les tribunaux n'appliqueront la peine que dans telle ou telle circonstance. La loi, Messieurs, doit être expresse : elle ne doit rien laisser à l'arbitraire des hommes, et elle doit faire ce qui peut être fait par elle.

M. Pardessus. M. Dudona euraison de dire que la déclaration n'avait jamais présenté de difficultés jusqu'à présent. Mais il y a une différence entre la législation actuelle et celle qui est proposée : il n'y avait pas de peine portée par l'ancienne loi, et il y en a dans la nouvelle. Là déclaration était jusqu'à présent que de règlement et on la convertit en obligation sous peine.

Peut être une explication de la part des ministres serait-elle suffisante (Voix à gauche: Non non!....) Mais cette explication ne se trouverait que dans le procès-verbal; elle ne lierait pas les tribunaux. Et puisque vous avez déjà parlé des usages de l'imprimerie dans une matière où ces usages sont très incertains, quel inconvénient peut-il y avoir à parler maintenant d'un usage que tout le monde connaît?

Je puis, Messieurs, vous faire juger d'une manière plus positive, et en vous donnant des exemples, de ce qui se passe souvent dans la librairie. Il n'y a pas quinze jours que, recevant ma distribution (c'était le rapport même de la commission chargée d'examiner le projet de loi sur la presse), je vis que, dans ce rapport, il y avait deux feuilles pareilles, et une feuille qui manquait. Puisqu'une erreur de ce genre peut être commise dans l'imprimerie royale, qui est celle qu'on doit supposer dirigée avec plus de soin, elle doit se produire souvent ailleurs.

Il n'y a pas encore deux ans que, voulant faire relier un livre, je m'aperçus qu'il y avait une feuille de moins. Le livre était imprimé depuis plus de vingt ans; c'était un ouvrage du fonds de M. Bastien, qui eut la complaisance de faire chercher dans ses magasins et de me donner la feuille qui manquait.

Je demande que la lot maintienne un usage constant depuis des siècles dans l'imprimerie.

M. Dudon. Si, au lieu de la désignation précise qu'on demande, on voulait simplement s'en tenir à l'expression générale employée dans l'article fer, il n'y aurait pas d'inconvénient, parce que les tribunaux ont toujours pour devoir d'appliquer les lois avec prudence et intelligence. Au surplus, je ne vois pas d'inconvénient réel à ce que l'imprimeur déclare exactement le nombre d'exemplaires qu'il veut tirer. Si, à la fin, il se trouvait quelques feuilles de moins, la cause serait facile à constater dans le cas où il n'y aurait pas de contravention; car les feuilles maculées ne sont pas mises sur-le-champ au pilon: rien n'empêche qu'on ne les conserve; et elles seraient une preuve contre laquelle il n'y aurait rien à dire.

Je dis, Messieurs, que les tribunaux appliqueront la loi avec discernement; il le faut bien; en voici la preuve. Les déclarations des imprimeurs se font ordinairement en ces termes: «Je, soussigné, déclare vouloir imprimer pour le compte de... un ouvrage sous tel titre, en tant de volumes; lequel je me propose à tirer à tant d'exemplaires.» Eh bien! si lorsque cette déclaration a

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