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(Mercredi 22 novembre 1815.)

(No. 154.)

L'ABONDANCE des nouvelles politiques, et le grand intérêt de plusieurs discours, nous ont engagés à y consacrer exclusivement ce numéro, et à renvoyer à une autre fois des articles qui devoient y entrer d'abord. Nous le faisons pour répondre aux désirs des abonnés qui, dans ce moment surtout, souhaitent que l'on donne plus d'extension à la partie politique.

NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES.

ROME. On dit qu'on a trouvé sur Murat, quand on l'a arrêté au Pizzo, une espèce de proclamation dans laquelle il appeloit aux armes ses prétendus sujets, et les exhortoit à chasser Ferdinand. Il y parloit de ses prétendus droits au trône et de ses victoires, et comme son auguste beau-frère, il assuroit aussi que sa femme et son fils lui seroient rendus. Les im posteurs ne peuvent pas toujours donner du nouveau, et sont obligés de se copier les uns les autres. Mais ce qui a paru singulier, c'est un passage de cette proclamation qui, s'il est fidèlement rendu, prouveroit que l'ex-roi avoit totalement perdu la tête. On lui fait dire à ses soldats: Marchons, amis, pour délivrer le Capitole, et sous le double étendard de la croix et de la liberté, rompons les chaînes de l'antique Italie, et assurons à jamais son bonheur et son indépendance. Ainsi, cet aventurier, dévoré d'ambition, aspiroit encore à conquérir l'Italie ! Il n'avoit pas un pouce de terre, et il prétendoit donner des lois à cette grande contrée! Il vouloit délivrer le Capitole avec l'étendard de la croix! C'eût été sans doute une plaisante croisade que celle que Murat eût dirigée contre la capitale du monde chrétien, et cette association de la croix et de la liberté est une idée plus folle encore que tout le resté du projet qu'avoit conçu ce soldat'en délire. Rome Tome VI. L'Ami de la Religion et du Rør. C

et Naples sont heureusement délivrées de ses phrases comme de ses complots.

PARIS. Les religieux de la Trappe ont été revus avec joie dans le pays qu'ils ont si long-temps édifié. Leur extrême pauvreté pourroit seule mettre un obstacle au bien qu'ils veu. fent faire. Ils répandoient autrefois beaucoup d'aumônes. Ils se proposent aujourd'hui d'élever une école, où les parens chrétiens sont bien assurés que leurs enfans ne prendront que des leçons et des exemples de piété. Mais ils ont besoin de secours pour former cet établissement, qui sera sans doute acsueilli par les personnes attachées à la religion.

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Plusieurs abonnés nous ont écrit au sujet de la brochure de l'abbé Vinson, et nous font part de différens faits qui prouvent que l'esprit qui a dicté cette brochure s'agite aussi en différentes provinces pour perpétuer de malheureuses divisions. L'ignorance et l'opiniâtreté vont jusqu'à taxer de nullité tout ce que font des prêtres soumis à l'autorité. De pareilles prétentions seroient méprisables si elles ne troubloient pas les consciences. Espérons qu'elles cesseront avec l'arrangement qui se prépare. Les négociations interrompues par nos derniers malheurs ont repris leur cours, et on a lieu d'espérer, d'après les dispositions réciproques, qu'elles amèneront bientôt un résultat dont l'église de France a tant de besoin, et qu'elle attend avec une si juste impatience.

NOUVELLES POLITIQUES.

PARIS. Le 17 novembre, jour anniversaire de la naissance du Roi, il y a eu messe en musique au château. Les officiers supérieurs de la garde nationale ont été présentés au Roi. La musique de la garde nationale a exécuté une sérénade, et les troupes ont célébré dans leurs quartiers l'anniversaire de la naissance de S. M.

- Le 20, à l'issue de la messe, le Roi a donné audience au prince de Hardemberg, grand-chancelier de Prusse, et au baron de Humbolt, qui ont fait à S. M. leur visite de congé.

Le même jour, MADAME s'est rendue, à onze heures,

au palais des députés, qu'elle a visité en détail. Au retour, S. A. R. a reçu les deux ministres de Prusse.

—Le 18, un détachement du 10. régiment de ligne est arrivé à Paris. Il a défilé sous les fenêtres du château, et S. M. a eu la bonté de se montrer, et d'adresser quelques paroles de satisfaction à ces braves, qui, résistant à tant d'exemples de défection, ont suivi avec zèle les drapeaux de M. le duc d'Angoulême. La garde nationale leur a donné un banquet.

- Le 19, l'inauguration du buste du Roi a été faite à la mairie du 11. arrondissement. M. Camet de la Bonnardière, maire; M. le colonel Acloque, et M. le lieutenant-colonel Légé de Bresse, ont prononcé des discours analogues à la cérémonie, et des airs françois ont été suivis de nombreux cris de Five le Roi.

-M. le duc d'Angoulême parcourt les provinces du midi, au milieu des témoignages de l'allégresse publique. S. A. R. arriva à Nîmes, le 5 novembre au soir, et Ꭹ fut recue avec enthousiasme. Ce fut une fête complète, danses, illumination. Le prince partit, le 7, visita Montpellier et Cette. Il étoit, le 14, à Toulouse. Les loyaux habitans du midi imaginent toute sorte de moyens pour prouver à S. A. R. leur joie, leur respect et leur dévouement.

La commission d'instruction publique a, par son arrêté du 31 octobre, supprimé les facultés des lettres d'Amiens, Bordeaux, Bourges, Cahors, Clermont, Douai, Limoges, Lyon, Montpellier, Nanci, Nimes, Orléans, Pau, Poitiers, Reunes et Rouen, et les facultés des sciences de Besançon, Lyon et Metz.

MM. Delmas et Ferdinand Berthier, sont nommés préfets de la Charente-Inférieure et du Calvados, et ont prêté serment en cette qualité.

-Il est hors de doute que le traité avec les alliés est signé. On dit que toutes les bases en avoient été admises dès le a octobre. Il étoit seulement resté quelques articles additionnels à régler. Des villes et des pays étrangers avoient réclamé des indemnités pour des pertes que Buonaparte leur avoit fait éprouver; car le nom de cet homme se retrouve toujours lorsqu'il est question d'injustice et de violence, et on ne sau

roit oublier que ce sont ses folies qui nous ont mis dans l'état où nous sommes. C'est surtout la ville de Hambourg qui avoit été le plus mal traitée, et qui réclame le plus. Il paroît que ces différens objets de discussion sont enfin terininés, le départ des ministres étrangers l'annonce assez.

On dit que la France paiera annuellement aux alliés 270 millions, dont 140 millions seront employés à l'extinction de sa dette, et 130 à l'entretien des troupes étrangères. Les puissances ont l'intention de diminuer d'une année à l'autre le nombre de ces troupes, si la situation intérieure de la France le permet. Alors la France pourroit mettre fin à l'occupation des troupes, en payant le reste de l'indemnité, d'après des arrangemens dont on conviendroit. Le 15 octobre, on arrêta l'évacuation des troupes qui ne devoient pas rester en France.

-Le maréchal Ney a voulu faire intervenir les puissances alliées dans son affaire, et a réclamé la convention du 3 juillet, qui porte qu'elles ne rechercheront personne pour sa conduite et ses opinions politiques. Lord Wellington a répondu que cette convention ne lioit point le Roi de France, et que les alliés n'avoient point à s'immiscer du gouvernement intérieur. On est étonné qu'un guerrier françois s'adresse ainsi à des étrangers; cela n'indiqueroit pas une grande confiance

en sa cause.

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On dit que le maréchal Masséna a demandé un passe port pour l'étranger.

MM Comte et Dunoyer, rédacteurs du Censeur, qui avoient attaqué M. Fellecoq, commissaire de police, pour violation de domicile, et atteinte à la liberté dans la saisie du VII. volume de leur ouvrage, ont été condamnés aux dépens par le tribunal de police, qui a rejeté leur plainte comme incompétente.

Quelques journaux ont annoncé la mort du sieur P... tanneur à Sens, qui s'est étranglé, le 10 de ce mois. Fou gueux orateur du club de Sens, P... y avoit provoqué l'exhumation des restes du Dauphin et de la Dauphine, et ses amis lui dirent alors: Si les Bourbons reviennent, tu seras pendu. Ce malheureux n'a cependant pas été inquiété; mais l'indulgence des Bourbons n'a pas fait taire les reproches de sa con

science, et la Providence a permis qu'aveuglé par ses remords, îl exerçât sur lui-même une affreuse justice.

CHAMBRE DES PAIRS.

Dans la séance du 16, la chambre a admis les récusations de MM. de Talleyrand et de Jaucourt, et des maréchaux Gouvion-Saint-Cyr et Augereau: 7 pairs ecclésiastiques se sont également récusés. Sur 214 pairs, 28 se trouvent dans quelque exception, et 25 sont absens pour différentes causes. M. Séguier à lu les résultats de l'instruction faite contre le maréchal.

Le 17, M. le procureur-général a lu, au nom des commissaires, l'acte d'accusation contre le maréchal Ney. La chambre, après en avoir délibéré, a décerné un mandat d'arrêt contre lui, et a fixé les débats à mardi, sauf à l'accusé à présenter avant l'ouverture ses moyens préjudiciels. 159 pairs siégeoient.

Le maréchal Ney a présenté une requête à la chambre pour que le Roi et les chambres déterminassent par une loi les formalités de la procédure. On ignore ce qui sera statué sur ce nouvel incident qui prolongeroit l'affaire.

Le 20, à neuf heures du matin, un grand nombre de troupes étoient rassemblées dans les alentours du Luxembourg. Dans la soirée, leur nombre a été doublé. Une partie sera logée en différens endroits du palais, le reste bivouacque dans les jardins. Toutes les grilles ont été fermées, et toutes les issues gardées avec soin. A huit heures du soir, le maréchal Ney a été transféré de la Conciergerie à la prison disposée pour lui dans l'enceinte du palais.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.

Dans la séance du 11, la chambre a pris en considération la proposition d'une loi d'amnistie faite par M. de la Bourdone

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