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NOTE

SUR LES FORÊTS' DU DÉPARTEMENT DE L'ISÈRE

La partie du Dauphiné, qui a formé le département de l'Isère, comprend deux régions bien distinctes. Au nord-ouest, les collines des Chambarands, les plateaux des Terres-Froides et du Bas-Dauphiné, constitués par des conglomérats et des mollasses de l'époque miocène, surmontés par place de cailloutis pliocènes, s'étendent sur une région de basse altitude (134 à 550 mètres d'altitude) qui correspond aux arrondissements de la Tour du Pin, Vienne et SaintMarcellin (partie) et que limitent le Rhône, au nord et à l'ouest, le département de la Drôme et le cours de l'Isère, de Saint-Hilaire-duRozier au bec de l'Echaillon, au sud, et le synclinal de Voreppe aux Echelles, à l'est. Au sud-est de cette région de plaines et de collines, sillonnée seulement par des vallées peu profondes où coulent quelques affluents du Rhône (Bièvre, Bourbre, Gère, Varèze, Dolon, Galaure, etc.), se trouve la zone montagneuse, comprenant l'arrondissement de Grenoble en entier et une partie de l'arrondissement de Saint-Marcellin. Le point culminant de cette partie du département est le pic Lory (4.083 m. d'altitude); on y trouve les massifs calcaires de la Grande-Chartreuse, du Villard-de-Lans et du.Vercors, les chaînes cristallines de Belledonne, des Grandes Rousses et du Taillefer, les puissants massifs de l'Oisans et du Pelvoux, constitués par les granites et les schistes azoïques, enfin les montagnes dénudées du Dévoluy, qui encadrent le plateau de la Mateysine, ainsi que la dépression marneuse et fluvio-glaciaire du Trièves. L'Isère, le Drac, l'Ebron, la Bonne, la Malsanne, la Romanche, le Vénéon, la Bourne ont creusé dans les calcaires et les roches cristallo-phylliennes des vallées profondes, encaissées, dont les aspects pittoresques et variés sont d'un vif attrait pour les touristes.

Les forêts occupent dans le département de l'Isère une surface totale de 211.300 hectares, soit 25,4 % de la superficie du territoire (30.736 hectares à l'Etat, 53.448 hectares aux communes, 127.119 hectares aux particuliers). Mais il convient de remarquer que 22.300 hectares environ sont occupés par des surfaces improduc

tives, vides, rochers, pâturages, etc., ce qui réduit l'étendue boisée à 189.000 hectares.

Les massifs boisés sont d'ailleurs répartis inégalement dans les deux régions que nous avons décrites plus haut et dans chacune d'elles les peuplements sont constitués par des essences différentes et soumis, par suite, à des modes de traitement en rapport avec leur constitution. Il est donc nécessaire de les étudier séparément.

Dans la région des plaines, les forêts n'occupent que 61.900 hectares; elles sont constituées par le chêne rouvre, 48 %; le hêtre, 2 %; les autres essences feuillues, 50 % et quelques résineux. Le mode de traitement adopté est le taillis simple ou sous-futaie, avec des révolutions de 10 à 25 ans, atteignant rarement 30 ans. 42.000 hectares sont traités en taillis simple, 18.600 hectares en taillis-sousfutaie, 171 hectares en futaie, 1.100 hectares sont improductifs. La production moyenne annuelle est de 140.400 mètres cubes dont 29 % en bois d'oeuvre et 71 % en bois de feu. 329 hectares appartiennent à l'Etat, 5.300 aux communes, 56.270 aux particuliers. Le seul massif important est celui des Chambarands (6.500 hectares), situé à l'est et au sud de Roybon qui s'étage sur les collines formant la ceinture du bassin de la Galaure.

La zone montagneuse est beaucoup plus riche en forêts. Celles-ci y couvrent 149.400 hectares, dont 21.200 hectares improductifs, sont occupés par des vides, des pâturages, des rochers et des glaciers; la surface boisée n'est donc en réalité que de 127.200 hectares, dont 61.500 sont soumis au régime de la futaie et 66.700 sont traités en taillis.

Les taillis ne se rencontrent généralement que sur les pentes inférieures des versants. Le peuplement est constitué par les hêtres, 44 %; les divers, 42 %; le chêne n'entre que pour 0,14 dans la composition des peuplements. 21.000 hectares sont traités en taillis sous futaie et exploités à des âges qui varient entre 20 et 36 ans. 45.700 hectares sont traités en taillis simple et coupés entre 15 et 30 ans. Dans les parties supérieures des versants, le chêne cède la place au hêtre et les taillis sont exploités à un âge plus avancé que dans les parties basses; ils sont d'ailleurs fréquemment envahis par les résineux, ce qui permet d'envisager leur conversion en futaie.

Les futaies sont situées sur les plateaux ou sur les versants des montagnes, entre les pâturages qui couronnent les sommets, et les vallées, occupées par les prairies et les cultures. Les essences qui entrent dans la composition des peuplements sont le hêtre, 29 %;

l'épicéa, 28 %; le sapin, 25 %; l'érable et diverses essences feuillues, 10%; le mélèze, le pin sylvestre, le pin de montagne et le pin cembro, 8 %. Le mode de traitement adopté est le jardinage, trop souvent intensif,, avec une dimension d'exploitabilité qui varie de 0 m. 20 à 0 m. 60, de diamètre; la durée des révolutions est de 40 à 130 ans dans les bois particuliers, de 120 à 160 ans dans les forêts soumises au régime forestier.

La production annuelle moyenne de la région montagneuse est de 231.600 mètres cubes, dont 47 % en bois d'œuvre et 53 % en bois de feu.

Les massifs les plus importants sont la forêt des Coulmes (9.000 hectares), sur le plateau du même nom qui domine, à 850 mètres d'altitude, les vallées de l'Isère et de la Bourne; la forêt de la Grande-Chartreuse (8.500 hectares), au pied des sommets altiers de Chamechaude (2.087 m. d'altitude), du Grand Som (2.033 mètres), de la Grande Sure et de la dent de Crolles, dont les masses sombres couvrent de leur puissante végétation les versants escarpés des pittoresques vallées des deux Guiers et servent de cadre grandiose au monastère; les forêts d'Autrans, Lans, Méaudre et du Villard-de-Lans (7.000 hectares), qu'on aperçoit au-dessus des riants alpages du pays de Lans, non loin de la crête des gigantesques escarpements qui surplombent de 1.300 mètres la vallée de l'Isère; la forêt de Corrençon (2.500 hectares), au sud-ouest du Villard-deLans, au pied du Chalimont (1.601 mètres d'altitude) et de la Moncherolle (2.280 m. d'alt.); la forêt de Chichilianne et d'Esparron (2.300 hectares), dont les noirs sapins revêtent de leur abri protecteur les versants de la haute vallée de l'Orbanne1 exposés au ravages des torrents; le beau massif de Prémol et Vaulnaveys (2.200 hectares), qui s'étend au-dessus de Saint-Martin-d'Uriage et de Vizille, que dominent sur les pentes rapides de la chaîne de Belledonne et les pâturages de Chamrousse (2.255 m. d'alt.); la forêt de Rionpéroux (2.600 hectares), située sur le versant oriental de la vallée de la Romanche, au pied de la montagne du Grand Galbert (2.565 m. d'alt.) qui cache les rochers de granit et de gneiss accrochés aux flancs des contreforts du Taillefer.

L'Etat possède dans le département de l'Isère 12.760 hectares de forêts, dont 329 hectares dans la région de plaine et 12.430 hectares dans la région montagneuse. Il a acquis en outre, depuis

(1) Affluent de la Gresse.

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1860, 17.980 hectares qui sont compris dans les périmètres de reboisement; 1.130 hectares sont situés dans la vallée du Grésivaudan, sur les flancs du massif de la Grande-Chartreuse, 9.830 hectares dans, les vallées du Drac et de ses affluents, l'Ebron, la Bonne et la Souloise, 2.770 hectares dans la vallée de la Romanche, 4.250 hectares enfin dans celle du Vénéon, où ils constituent le parc national de l'Oisans, au pied du cirque prestigieux de la Bérarde. Sur cette surface de 17.980 hectares, 7.134 hectares sont reboisés; les travaux de reboisement projetés doivent s'étendre en outre sur 2.450 hectares environ. Le surplus de la superficie est constitué par des rochers ou des glaciers, dont le reboisement ne pourra vraisemblablement pas être tenté. Au point de vue du iraitement, 12.320 hectares des forêts domaniales sont traitées en futaie jardinée, 380 seulement en taillis-sous-futaie. Dans les parties boisées des périmètres de reboisement, on se borne aux opérations culturales indispensables: nettoiements, éclaircies, recépages.

Tandis que 9,6 % de la surface boisée appartient à l'Elal, la contenance des forêts communales et d'établissements publics est de 53.450 hectares, soit 30 % de la superficie totale des forêts du, département. 25.600 hectares sont soumis au régime de la futaie; 11.950 hectares sont traités en taillis simple; 9.900 hectares en taillis sous futaie; 6.000 hectares n'ont pas de régime déterminé. Au point de vue de la durée des révolutions, les surfaces traitées en taillis dans les forêts soumises à la gestion de l'Administration se répartissent ainsi :

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Des travaux de reboisement sont effectués tous les ans par les communes et par les particuliers avec le concours de l'Etat et du département. La surface reboisée chaque année est d'environ 120 hectares; les plants sont fournis par les pépinières domaniales et par une pépinière départementale; celle-ci est entretenue par le dépar tement auquel l'Etat alloue une subvention en graines et en argent. Paul BUFFAULT.

CHRONIQUE SUISSE

Après une interruption d'une certaine durée, nous reprenons contact avec les lecteurs de la Revue en les mettant au courant du mouvement forestier dans notre pays. Peu de faits saillants se sont produits durant les derniers mois, car un lourd marasme a régné dans le monde des producteurs et des consommateurs de bois.

Cependant, à partir de l'été dernier, on a enregistré avec un réel soulagement une reprise des affaires et surtout une demande générale de la part des scieurs et des exportateurs de bois malgré une aggravation des circonstances de change. Le fait est qu'actuellement nous vendons nos grumes de résineux avec une augmentation de 35 à 50% sur les prix de l'hiver dernier; il en est de même des chauffages. Comme cela a été le cas durant la guerre, on constate dans la Suisse centrale et orientale des ventes toujours plus avantageuses que dans la Suisse romande surproductrice de bois.

Grâce à des démarches laborieuses et couronnées de succès, et dont le mérite revient en grande partie à l'actif directeur de l'Office central forestier suisse, M. Bavier, les chemins de fer fédéraux ont enfin consenti à abaisser les tarifs de transport des bois pour les grandes distances. Il en résulte que les grumes provenant des forêts vaudoises et neuchâteloises peuvent être maintenant acquises par des marchands de la région de Berne, Zürich et Lucerne.

L'exportation en France a pris de nouveau un réjouissant essor et les marchés conclus dernièrement, en particulier dans la zone jurassienne ont rendu un certain courage aux communes forestières dont les budgets avaient été bouleversés l'année dernière par la mévente des bois. Notons aussi une diminution appréciable des frais de façonnage des coupes et des transports. La crise agricole a eu pour effet de faire baisser les exigences des voituriers-paysans dont les tarifs durant la période de guerre et d'armistice avaient été vraiment excessifs. Les agriculteurs ont actuellement de moins hautes prétentions et ils sont heureux de gagner quelque chose en morte saison et de faire travailler à tout prix leurs attelages.

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