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Pour que la division ait lieu, il faut que chaque partie soit de la même qualité que le tout. Chaque partie pro diviso forme elle-même un tout qui, dans un plus petit espace, renferme toutes les propriétés du tout divisé. Ainsi un meuble est insusceptible de division matérielle, parce que la division qui en serait faite en amènerait la destruction, et que chaque fragment ne pourrait être un tout de la même qualité que le meuble. Il n'y a exception que pour les choses mobilières quæ pondere, numero, mensurá consistunt; parce qu'à leur égard tantumdem est idem. Ainsi plusieurs esclaves in genere sont susceptibles de division matérielle, parce qu'un esclave in genere vaut autant qu'un autre ; mais dès qu'ils sont déterminés in specie, la division intellectuelle est seule possible. (L. 117. D. de verb. oblig. Cujas, observ., lib. 15, cap. 24.)

Si des parties intellectuelles compètent à plusieurs sur une chose commune, il n'y a aucune division matérielle; mais, au contraire, il n'est aucun point de cette chose qui n'appartienne par indivis à chacun des ayantdroit pour sa quote part. Si le droit de chacun s'appliquait à des portions différentes de la chose, chaque partie ne serait plus de la même qualité que le tout. (L. 66, §2, de leg. 2o).

On voit par là qu'aucune division soit matérielle, soit intellectuelle, ne peut être faite que sous le rapport de quantité. Il suit de ce principe :

1. Que les obligations de faire sont indivisibles; car un fait ne pouvant être déterminé par quantité, n'est pas susceptible de division;

2. Que, parmi les obligations de donner, sont indivisibles toutes celles ayant pour objet un jus in re qui, en étant exercé, ne procure pas à l'ayant-droit la pro

priété d'une chose corporelle. En effet, les choses incorporelles, n'ayant pas d'existence dans l'espace, ne peuvent être déterminées en quantité, et conséquemment sont insusceptibles de division.

Ainsi est indivisible l'obligation qui a pour objet une servitude, à l'exception de l'usufruit seul qui, étant exclusivement relatif à l'acquisition de choses corporelles, c'est-à-dire des fruits, est susceptible de division (L. 72. pr. De verb. oblig.; L. 8, § 1; L. 11, L. 17, D. de serv. præd. rust.; L. 14, §1; D. de adim. leg.; L. 3, L. 7, D. de serv. leg.; L. 80, § 1. D. ad leg. falc.; L. 13, § 1. D. de acceptil.; L. 5. D. usufr. et quem. ).

Si une servitude compète à plusieurs, chacun d'eux n'a pas une partie de la servitude; mais il y a autant de servitudes que d'ayant-droit : chacun d'eux a une servitude entière (L. 16., D. quemadm. serv, amitt.). Il en est de même du droit d'usage prêté ou loué à plusieurs (L. 5, § 15., D. commod.)

Si la servitude appartient à plusieurs qui doivent l'exercer à des heures différentes, chaque ayant-droit à toute la servitude au moment où il l'exerce, et les autres n'ont au même moment aucun droit sur le fonds servant (L. 5, § 1, D. de. servit. ).

Si une servitude est étendue ou restreinte dans son exercice, elle n'est pas pour cela susceptible de division; mais c'est une nouvelle servitude qui est établie à la place de la première. La circonstance que l'usage est compris dans l'usufruit n'empêche pas la divisibilité de l'usufruit, parce que l'usage est entièrement subordonné à la jouissance (L. 20. D. de usufr. et quem.; L. 41. D. de us. et usufr. leg. ).

L'usufruit n'est toutefois susceptible que d'une division intellectuelle. Celui qui a une partie d'un usufruit

n'a que le droit d'acquérir la propriété commune avec les autres co-usufruitiers des fruits d'une chose. On pourrait opposer ce texte de Papinien ususfructus et ab initio pro parte indivisá vel divisa constitui et legitimo tempore similiter amitti. (L. 5. D. de usufr. et quem.) Mais Papinien veut parler d'une partie du fonds plutôt que d'une partie de l'usufruit (V. Pomponius, L. 25. D. quib. mod. usufr. ). Or, celui qui a l'usufruit d'une partie séparée du fonds n'a nullement une part de l'usufruit de tout le fonds. (V. L. 31. D. de usu et usufr. leg., L. 1, D. de usufr. accresc.)

Toute chose qui, par sa nature, ne peut être déterminée en quantité, est incerta, et toute obligation stricti juris qui a pour objet une pareille chose, est indivisible et produit une condiction incerti. Ainsi les obligations stricti juris, qui consistent à faire ou à transmettre un jus in re, procurent une condiction incerti (L. 75, § 7; D. de verb. obl.; L. 1, L. 3. D. de cond. sine causá; L. 5, § 1, D. de act. empti. L. 1, pr. D. de cond. tritic.; L. 8, D. de act. empt.; L. 35, D. de serv. præd. rust.; L. 22, § 1. D. de cond. ind. ).

Nous avons développé dans ce paragraphe la L. 2,§ 1, D. de verb. oblig. « Quædam non recipiunt (partium præstationem) ut in his quæ naturâ divisionem non admittunt, veluti cùm viam, iter, actum stipulamur.

$ 6. L'objet de l'obligation stricti juris est à la vérité divisible par sa nature, niais l'obligation est indivisible à cause de sa forme.

Le but de ce paragraphe est de montrer que les obligations qui, à cause de leur forme, produisent une condiction incerti, sont par là même indivisibles. Nous savons qu'il y a un incertum dès que l'un des trois caractères, quid, quale et quantum, vient à manquer dans l'objet de l'obligation. Une observation commune à tous

les cas que nous allons parcourir, c'est que le débiteur, pour remplir son obligation, a le choix parmi divers objets qui sont tous in obligatione.

1. Le quid n'est pas déterminé par exemple dans une obligation alternative. Le créancier doit diriger sa demande sur tous les objets qui sont compris dans l'obligation; s'il n'en demandait qu'un seul, il serait dans le cas de la plus-pétition ( § 33, I, de act.). Mais le débiteur se libère par la livraison de l'un des objets (L. 44, § 3. D. de oblig. et act. ). Ainsi, au moment où l'action est exercée, le créancier ne sait pas encore lequel des objets compris sous l'alternative lui sera payé.

Il résulte de là que l'obligation est indivisible; en d'autres termes, que par la livraison d'une partie de l'un ou de l'autre des objets, l'obligation n'est pas acquittée pour partie ( L. 26, § 13. D. de cond. ind.); autrement il faudrait dire que le créancier peut demander la partie restante du même objet, ou que le débiteur peut donner une partie de l'autre, ce qui est tout à fait contraire à la nature de l'obligation alternative.

II. Le quale n'est pas déterminé : c'est ce qui a lieu dans l'obligation qui a pour objet un genus incertum. Le genus est incertum, si l'on n'a pas déterminé toutes les propriétés qui doivent être prises en considération pour apprécier la valeur de la chose; ou si la qualité n'est pas déterminée de manière qu'on ne puisse plus relativement à elle admettre aucun degré. Par exemple, une certaine quantité de vin ou de blé est un incertum ; mais une certaine quantité du meilleur vin d'une espèce désignée ( de Campanie ) est un certum. (L. 75, § 1 et 2. D. de verb. obl.; L. 13. D. de leg. 1).

Si l'obligation porte sur un genus incertum, le débiteur a le choix de payer un des divers objets qui compo

sent le genre, et le créancier doit diriger son action sur tout le genre, pour éviter la plus-pétition (§ 33, vers. præterea I, de act.). Ici s'applique tout ce que nous avons dit relativement à l'obligation alternative (L. 13 S4. D. de acceptil.).

III. Le quantum est indéterminé. Il faut alors distinguer si l'objet qui a été promis sans détermination de quantité peut se réduire à une valeur insignifiante: par exemple, si l'on a promis du vin, du blé, un seul grain, une seule goutte suffisant pour remplir l'obligation, il s'ensuit que cette obligation n'est pas valable ; si, au contraire, l'objet, déterminé seulement par sa qualité, peut encore être utile au créancier, l'obligation sera valable, mais elle sera d'un genus incertum, Telle est l'obligation dont parle le jurisconsulte Paul, laquelle a pour objet lanx, vas ( L. 2, § 1. D. de v, o.); elle est donc indivisible par les mêmes raisons que celles indiquées aux alinéas I et II.

On peut conclure de ce qui précède, que si l'objet d'une obligation indivisible à cause de sa forme est livré en partie, cette prestation partielle, n'opérant aucune libération, donne lieu à une répétition de la part du débiteur. Si le débiteur n'exerce pas d'abord la condiction, il peut se faire qu'il paye ensuite le restant de la même chose, ou qu'il paye une autre chose parmi celles qu'il peut choisir. Dans le premier cas, la condiction cesse; dans le second, elle subsiste (V. L. 2, § 1. D. de o. v.): aut statim repeti potest, aut in pendenti est, donec alius detur.

Doneau', Scipio Gentilis, Dumoulins, n'accordent

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