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sage du public sur un chemin et qu'un habitant démolit ensuite comme placé arbitrairement sur sa propriété,1; - de la force obligatoire d'un arrêté qui prescrit aux parties lésées, par une ordonnance du conseil communal sur la voirie, d'en demander la réformation à l'autorité provinciale, les choses n'étant plus entières 2; - de la légalité des arrêtés d'autorisation pour l'établissement de fabriques et manufactures, ainsi que de la légalité des arrêtés en matière de brevets qui portent atteinte aux droits des tiers3.

de dommages-intérêts résultant d'un acte administratif, de la compétence des tribunaux, sauf à renvoyer le demandeur s'ils reconnaissent que l'acte n'avait rien d'illégal.

1 V. l'arrêté de conflit du 30 août 1835.

* Cass. de Belg., 11 nov. 1835; Bull., 1836, p. 192. Les tribunaux sont directement accessibles et seuls compétents, quand il s'agit, non plus d'empêcher l'exécution, mais de réparer, comme dans l'espèce, le dommage qu'elle a causé à la propriété.

3 Nous n'avons pas besoin de faire remarquer la différence immense de la législation française avec la nôtre en cette matière. En France, il est interdit au pouvoir judiciaire de connaître des actes ou opérations administratives, soit sous le rapport de leur légalité, soit sous celui de leur mérite au fond.

M. Lorieux, dans son Traité sur la prérogative royale, insiste sur l'inconstitutionalité des tribunaux ou juridictions administratives en France, et du principe qui défend aux tribunaux ordinaires de connaître des actes administratifs.

Nous devons mentionner ici un arrêt de la cour d'appel de Bruxelles du 16 novembre 1826 (Jurisp. du XIX® siècle, 1827, III, p. 84), qui décide que le pouvoir judiciaire n'est pas compétent pour INTERPRÉTER les arrêtés royaux portés entre des particuliers et des établissements publics (un hospice), en matière administrative; que si les parties ne sont pas d'accord sur le véritable sens de cet arrêté, les tribunaux ne peuvent interpréter. Nous n'avons qu'à faire remarquer l'espèce dans laquelle, et la législation sous l'empire de laquelle cet arrêt a été rendu.

IV. 2 SERIE.

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Il résulte des mêmes principes, que les tribunaux né peuvent juger ni la légalité des nominations à des fonctions quelconques émanées de l'autorité compétente, ni les contestations relatives au payement de traitements ou de dommages-intérêts que réclament les fonctionnaires ou agents du gouvernement qui les a révoqués ou suspendus. Les prétentions des demandeurs sont en connexité, en rapport avec leur nomination, la manière d'exercer leur emploi et d'autres objets qu'il appartient l'autorité administrative d'apprécier. Le droit que possède le chef de l'État ou son subordonné de nommer ou révoquer un fonctionnaire, et celui de l'agent de recevoir le traitement attaché à la nomination, sont des droits qui ne résultent point d'aucun contrat civil, ni de droits purement civils; ils sont la conséquence de la constitution, de l'organisation du corps politique; enfin, ce sont des droits politiques (sensu lato) dont le gouvernement use comme puissance publique, comme administrateur suprême de l'État. Le pouvoir exécutif peut sans doute faire de mauvaises nominations ou révocations; elles peuvent être basées sur des allégations erronées, sur des rapports ou motifs faux; encore n'est-ce pas au pouvoir judiciaire de s'immiscer dans ces actes purement administratifs, actes de puissance à sujet. Mais, dit-on, lorsque l'exercice du droit de nomination devient un sujet de contestation, les conséquences qu'il entraînerait ne peuvent se réaliser qu'autant que la juridiction compétente a prononcé sur la légalité, c'est-à-dire sur la validité de ce qui a été fait par l'autorité en exercice de ce droit, que quand par conséquent on aura examiné si la révocation est valable au fond, si elle est valable quant à la forme. Nous avons déjà répondu à ces arguments spé

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cieux: Le gouvernement fait les nominations ou révocations comme autorité publique ; comme corps politique, c'est à lui de connaître de leur validité1. Les tribunaux, dans les cas d'espèce, doivent se borner à examiner si la nomination ou la révocation émane de l'autorité compétente, si elle avait le pouvoir suffisant pour le faire

Ainsi, pour citer encore une fois des cas de jurisprudence belge: Un conseiller de régence ayant en cette qualité concouru à une nomination d'experts pour fixer la valeur locative d'une maison, le tribunal saisi du débat à ce sujet ne peut, sur la demande du propriétaire qui conteste la qualité de ce conseiller de régence, examiner si cette qualité lui est légalement attribuée'.

Les tribunaux sont incompétents pour statuer sur la question de savoir si un conseil de fabrique a été iégalement composé. Ils doivent renvoyer à l'autorité administrative la décision des contestations qui s'élèvent incidemment dans une instance, relativement à la qualité de marguilliers, dans laquelle les parties agissent, nommément lorsque ces contestations sont fondées sur l'irrégularité des nominations qu'on prétend n'avoir pas été faites d'après les règles prescrites par le décret du 31 décembre 1809 ".

1 V. les arrêtés cités page 261, note 3 ; les arrêtés de conflits des 30 juin 1826 et 22 février 1827, ainsi que l'arrêt de la cour de Bruxelles, du 13 fév. 1833; Jur. de Belg., 1833, 11, 179. Ce dernier arrêté déclare les adjudicataires des barrières agents de l'administration, et non termiers ou locataires; ils peuvent donc, porte-t-il, révoquer leurs agents quand bon leur semble, sans avoir une action judiciaire à craindre.

1 Liége, 23 déc. 1823; Jur. du XIXe siècle, 1826, III, 249.
333. Gand,
1 Cass. de Belg., 25 juin, 1840; Bull., 1840,

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Ils sont pareillement incompétents pour statuer sur l'opposition formée par des notaires contre l'admission à la prestation de serment d'un nouveau notaire, opposition fondée sur ce que l'arrêté de nomination est nul comme contrevenant aux art. 31 et 32 de la loi du 25 ventôse an XI, qui établissent les bases d'après lesquelles le nombre de ces fonctionnaires doit être réglé 1.

Par contre, les tribunaux connaissent de l'action en dommages-intérêts d'un fonctionnaire de l'État révoqué par arrêté royal de ses fonctions de commissaire aux découvertes des biens domaniaux, arrêté qui a réduit à 2 p. cent sa remise primitivement convenue sur ces découvertes à 10 p. cent.

Ils connaissent également de la demande en payement

18 mars 1834; Liége, 3 juillet 1839; Jur. de Belg., 1839, p. 405. Ainsi les tribunaux ne connaissent pas des actes de l'administration intérieure ou du règlement des attributions d'un corps administratif. La nomination des membres des conseils de fabrique, la régularité de leur composition, leur autorisation d'agir ou de ne pas agir, constituent autant d'actes administratifs qui entrent nécessairement dans le domaine de l'autorité administrative.

1 Le tribunal de première instance de Huy s'était déclaré compétent pour juger la légalité d'un arrêté royal qui avait nommé un notaire, contrairement à la loi du 25 ventôse an XI. Un arrêt de la cour de Liége, en date du 29 avril 1840, a réformé cette décision, en résolvant la question et fait, et en disant accessoirement que le tribunal de première instance, en interprétant les arrêtés du pouvoir exécutif pour induire une intention contraire au fait, a entrepris sur les attributions du gouvernement et commis un exces de pouvoir

L'arrêt de la cour de cassation, du 17 décembre 1840, est égale

ment motivé en fait.

Bruxelles, 6 mai 1837; cass. de Belg., 2 juillet 1838; Jur. de Belg., 1837, p. 432; Bull., 1838, p. 463.

des gages dûs par l'État à un maître de postes, aussi bien que du prix de ses prestations 1.

Ledit art. 107 ne concerne pas les arrêtés d'une administration inférieure qu'on prétendrait contraires à ceux de l'administration supérieure 1.

Il reste une dernière observation à faire sur l'art. 107 de la constitution, c'est qu'il n'est applicable qu'aux arrêtés et règlements postérieurs à sa publication. On a considéré que l'article est rédigé au futur; que le législateur constituant, en établissant des garanties pour l'avenir, n'a pas cru devoir jeter un regard inquiet sur le passé et prendre des mesures qui eussent été moins propres à régulariser l'action de la justice qu'à faire naître dans la société la confusion et le désordre 3.

Il est encore à observer, quant à l'art. 138 de la constitution cité ci-dessus, que le résultat de cet article n'est pas d'abroger toutes les dispositions législatives dont l'esprit est contraire aux principes qu'elle oblige le lé

1 Ainsi jugé par la cour de Bruxelles, le 28 juin 1834; Jur. de Belg., 1834, p. 270.

Je remarque qu'un arrêt de la cour de cassation belge, du 13 avril 1835, considère les maîtres de postes aux chevaux comme des agents ou préposés du gouvernement, révocables pour cause d'inaccomplissement de leurs obligations, et non comme des locataires ou des entrepreneurs de travaux publics.

2 Cassation de Belg., 28 avril 1834; Bull. de cass., 1834, p. 330. Cet examen ou cette réformation est du ressort de l'administration. 3 Arrêt de la cour de Liége, du 25 avril 1832; Jurisprudence de Belgique, 1833, p. 31. Il s'agissait de la force obligatoire du décret du 4 mai 1812 sur les permis de ports d'armes de chasse. L'arrêt a décidé que, vu que ledit décret avait été validé par l'arrêté-loi du 14 août 1814, il ne fallait plus rechercher s'il a été illégal dans son principe. Cette jurisprudence est au moins sage, sinon conforme au texte constitutionnel.

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