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répéter ce qu'elle a donné en dot à sa fille, bien qu'elle prétende ne l'avoir fait que parce qu'elle s'y croyait obligée. Sublatá enim falsá opinione, relinquitur pietatis causa ex quá solutum non repetitur (Julius, L. 32, §2, ff de cond. ind.).

Du reste, je crois qu'ici comme au cas précédent, il n'y a pas matière à compensation, car, pour compenser, il faut que les quantités dues soient déterminées; et la quotité de la dot due par la mère ne pourrait être fixée que par une appréciation par trop arbitraire. Si, au lieu de donner, la mère promettait la dot par erreur, la même raison qui l'empêcherait de répéter devrait l'empêcher d'opposer son erreur pour se soustraire à l'exécution de sa promesse. Son obligation resterait donc dans les termes d'une obligation civile.

Les principes auxquels nous avons rattaché les solutions que nous venons de présenter, nous dispensent d'examiner la question de savoir si un bienfait reçu impose, à celui qui le reçoit, une obligation naturelle.

Ce point ne me paraît point être plus douteux en droit positif qu'en droit moral. Il faut rappeler ici les paroles de Sénèque : Non est gloriosa res gratum esse, nisi tutum est ingratum fuisse.

Présentons en quelques mots les conclusións de ce travail. Après avoir déterminé quelle idée devait s'attacher aux mots obligation naturelle, nous en avons reconnu les caractères dans l'obligation résultant: 1o des pactes; 2o avant le sénatus-consulte d'Antonin, de l'engagement contracté par le pupille et dont il s'était enrichi; 3o des contrats passés par l'esclave qui était ensuite affranchi; 4o des conventions formées entre personnes soumises à la même puissance; 5o de l'emprunt fait par le fils de famille; 6o de certaines considérations d'équité,

dans des cas déterminés. Hors celles qui dérivent des deux dernières sources, cette espèce d'obligation nous a paru avoir sa raison d'être dans l'antagonisme qui existait entre les rigueurs ou les fictions du droit strict, et le droit plus équitable dont le préteur cherchait à faire prévaloir les principes par la voie des exceptions. Aussi la possibilité d'opposer une obligation comme exception dans les actions de droit strict, ou comme défense dans les actions de bonne foi, nous a-t-elle paru être la pierre de touche de l'obligation naturelle.

Après avoir dit les sources, la raison, le caractère et les effets de cette obligation, nous n'avons, pour compléter ce sujet, qu'à ajouter qu'elle s'éteint ipso jure, d'abord par les modes qui éteignent l'obligation civile, et en outre par tous ceux qui n'empêchent celle-ci de produire ses effets qu'autant qu'ils sont opposés dans l'exception.

(La suite à un prochain cahier.)

S. VIDAL.

XXVI. Sur les brevets d'invention en Autriche1. Observations communiquées par un jurisconsulte autrichien.

En Autriche, comme en France, les brevets d'invention sont délivrés sans examen préalable de l'invention ou de ses produits : aussi le gouvernement, en accordant ces brevets, n'entend garantir en aucune manière, ni la priorité, ni le mérite, ni le succès de

1. dans la Revue, t. V, p. 64, l'analyse de la loi autrichienne sur la matière.

* Arrêté du 5 vendémiaire an XI.

l'invention. Celui qui réclame un brevet, procède à ses risques et périls: que son invention et les produits de la fabrication lui procurent ou non des avantages, il n'en sera pas moins obligé de payer la taxe prescrite.

Les étrangers peuvent, aussi bien que les sujets autrichiens, obtenir des brevets dans les États de S. M. impériale et royale; mais comme la loi renferme des dispositions spéciales relatives aux brevets sollicités par les étrangers, il sera toujours prudent de prendre l'avis d'un homme spécial', avant de commencer les démarches officielles nécessaires pour l'obtention du brevet.

En Autriche, il est délivré des brevets pour toute espèce d'inventions, de découvertes et de perfectionnements dans tous les genres d'industrie. Sont seulement exceptés :

1° La préparation de comestibles, de boissons et de remèdes.

2o Les inventions, découvertes ou perfectionnements dont l'exploitation offrirait des dangers dans l'intérêt de la salubrité publique ou de la sécurité générale. Le premier cas se présente, par exemple, dans la fabrication des parfumeries; le second, dans les exploitations qui peuvent occasionner un incendie. C'est sous ce double rapport que les demandes de brevets sont crdinairement soumises à l'examen préalable, soit de la faculté de médecine, soit de l'institut polytechnique. S'il est reconnu que l'exploitation peut préjudicier à la salubrité ou à la sûreté publique, le brevet ne sera

1 Entre plusieurs praticiens d'un mérite reconnu, en Autriche, nous croyons devoir signaler ici M. Antoine Schüller, à Vienne, qui nous a déjà fourni, sur la matière des brevets, des renseignements fort utiles.

pas accordé, et le mémoire descriptif, ainsi que les dessins et modèles, seront restitués au pétitionnaire, ensemble les droits par lui payés à l'avance, à la seule exception d'une somme de 25 florins de convention (64 fr. 90 c.) que la faculté de médecine est autorisée à exiger à titre d'honoraires; l'institut polytechnique n'a aucuns honoraires à réclamer.

En renvoyant au pétitionnaire les pièces ci-dessus, l'autorité lui fait connaître en même temps les motifs du refus. Il lui est loisible d'exercer un recours devant l'autorité supérieure, ou de présenter une nouvelle demande accompagnée d'un mémoire descriptif modifié dans le sens des motifs qui ont fait refuser le brevet ; toutefois, dans ce dernier cas, le pétitionnaire perd son droit de priorité, en ce sens que le brevet qu'il obtiendra par la suite ne prendra date que de la présentation de la nouvelle demande. Si, dans l'intervalle, un tiers a réclamé pour la même invention un brevet qui n'a pas été l'objet d'un refus, ce dernier aura la préférence sur le premier.

La taxe des brevets est, en Autriche comme en France, proportionnée à la durée des brevets : mais elle est moins considérable. Aujourd'hui, et aux termes de l'ordonnance impériale qui a été mise à exécution le 1o novembre 1840, la taxe est, pour la première année, de 25 florins de convention (64 fr. 90 c.); elle est de 10 florins (25 fr. 96 c.) pour chacune des quatre années suivantes; de 15 florins (44 fr. 40 c.) pour la sixième année; ensuite elle s'accroît tous les ans de 5 florins (14 fr. 80 c.), de manière à s'élever, pour la quinzième

1 Loi du 25 mars 1791. M. Renouard, Traité des brevets d'invention, p. 291 et suiv.

IV. 2 SERIE.

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année, à 60 florins (155 fr. 76 c.); ainsi la taxe entière pour un brevet de 15 ans est de 440 florins (1142 fr. 24 c.). La taxe est la même, qu'il s'agisse d'un brevet d'invention, d'importation ou de perfectionnement. Les droits de timbre et d'expédition sont fixés à 10 florins de convention (25 fr, 96 c.), quelle que soit la durée du brevet. Aux termes de l'ordonnance précitée, la taxe du brevet, ainsi que les droits de timbre et d'expédition, seront acquittés en totalité au moment de la présentation de la pétition. En outre, selon les circonstances, il y a lieu au payement de 25 florins (64 fr. 90 c.) à titre d'honoraires de la faculté de médecine, dont nous avons parlé suprà 2.

Tout individu qui exerce, en Autriche, une industrie quelconque, est tenu de payer l'impôt d'industrie (Erwerbsteuer); le breveté se trouve donc soumis à la même obligation. Afin d'encourager les industries brevetées, les autorités sont dans l'usage de fixer cet impôt à un taux peu considérable, ordinairement à 6 florins de convention (15 fr. 58 c.), payables deux fois par an, aux mois de janvier et de juillet.

La durée des brevets peut varier de un à quinze ans. Il est de règle que celui qui a pris un brevet pour un temps inférieur à quinze ans, obtient sans difficulté une prolongation ou même deux prolongations, en payant le complément de la taxe; toutefois, ces prolongations ne peuvent s'étendre au delà de quinze ans à partir de la date du brevet primitif. C'est pourquoi il est rare de voir demander de prime abord un brevet de quinze ans ;

1 V. la Revue, t. VII, p. 415.

2 Les premiers frais à faire avant l'obtention du brevet s'élèvent à environ 125 florins de convention (324 fr. 50 c.).

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