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manuels de MM. Thibaut, Wening et Mühlenbruch, concernant le style et l'exposé des détails, qui manquent quelquefois de clarté; mais ce n'est pas ici le lieu de discuter ces questions.

M. Thibaut est bien supérieur aux deux autres, quoique le manuel de Wening soit amélioré dans la cinquième édition, publiée par les soins de M. Fritz.

L'ouvrage de M. Mühlenbruch passe aujourd'hui en Allemagne pour le meilleur manuel de droit romain; il serait cependant à désirer que plusieurs parties, traitées avec moins de faveur que le reste, fussent retouchées. L'édition allemande de ce livre est préférable à l'édition latine, à cause de la latinité de l'auteur, qui, quoique bonne et classique en général, n'a pas la clarté facile et la simplicité que l'on peut désirer dans un manuel.

Les trois manuels de droit romain les plus récents sont ceux de MM. Schilling, à Leipzig, de Vangerow à Marbourg, et de feu Goschen, à Gættingue. Ces ouvrages ne sont point achevés. Le premier est à la fois un exposé historique et dogmatique; nous n'en avons vu que l'introduction, publiée en 1834, et la partie relative aux droits réels, qui a paru en 1837. L'ouvrage est excellent, surtout pour un professeur ; car il y trouve ce qu'il est nécessaire de savoir. L'histoire cependant y est subordonnée à la dogmatique. Le livre de M. de Vangerow est une table des matières, éclaircie par des textes et par des notes destinées à expliquer les plus célèbres questions controversées qu'on a l’habitude de discuter dans les cours de pandectes. Il est impossible d'exposer d'une manière plus lucide et plus piquante ces controverses. L'ouvrage de Goschen est le premier de ce genre en Allemagne ; il rappelle les

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Recitationes d'Heineccius, et peut être recommandé aux élèves. Cependant il y manque parfois la vigueur de raisonnement qu'on aime à trouver dans un manuel de droit.

En résumé, l'Allemagne est fort riche en manuels de droit romain, très-propres à en faciliter l'étude aux élèves.

5. Quant à des commentaires étendus sur le droit romain, nous n'avons toujours que le grand ouvrage de Glück, que M. Mühlenbruch a continué, en le menant jusqu'au quarantième volume. Dans cet ouvrage, toutes les discussions qui ont été élevées sur les questions de détail, sont traitées fort au long, sinon avec finesse, du moins avec précision, avec une érudition et un savoir qu'on ne trouve dans aucun autre commentaire. Les volumes rédigés par M. Mühlenbruch sont supérieurs aux autres; on peut cependant lui reprocher un peu de prolixité. Le vingt-huitième livre des Pandectes forme déjà sept volumes, et il n'est pas encore achevé.

La science du droit romain vient d'être enrichie d'un

ouvrage dont le premier volume a paru il y a trois mois. Cet ouvrage avait excité au plus haut degré la curiosité de nos jurisconsultes; c'est un commentaire étendu que publie M. de Savigny, sous le titre de Système du droit romain. Dans cet ouvrage, l'illustre auteur du Droit de la possession veut léguer à la postérité les résultats de toute sa vie littéraire, de toutes les recherches faites pendant quarante ans. Comme tout ce qui sort de la plume de M. de Savigny est marqué au coin du génie, on a l'espoir fondé de voir paraître, sur toutes les matières du droit civil des Romains, des traités aussi bien faits, aussi mûrs que son Traité de la possession.

Quoiqu'il n'ait encore paru que deux volumes du Système du Droit romain en usage chez les peuples modernes, il est possible de saisir la tendance et d'apprécier le mérite de l'ouvrage. M. de Savigny ne passe point en revue, soit pour les combattre, soit pour les adopter, les doctrines émises depuis cinquante ans. Son but est de faire connaître ses propres opinions. Il expose donc au monde savant ce qu'il a enseigné lui-même, ce qu'il croit vrai et conforme aux sources qu'il a explorées avec un esprit supérieur, avec une érudition rare et profonde. Mais sa manière de voir, qu'elle soit neuve et tout à fait personnelle, ou qu'elle coïncide avec des doctrines depuis longtemps professées ou récemment émises par les interprètes allemands, est toujours le fruit d'une étude mûrie par l'examen critique de ce qu'ont enseigné les maîtres de la science depuis la résurrection du droit romain au moyen âge. Il s'attache de préférence aux célèbres jurisconsultes français du XVIe siècle, tels que les Cujas et les Doneau, et aux subtils interprètes de l'École batave; et parmi les modernes, tous n'ont pas non plus le même poids à ses yeux. Le lecteur ne trouve donc pas ici cette masse de citations d'auteurs qu'on rencontre chez presque tous nos commentateurs du droit romain. Tout est choisi et subordonné au but que M. de Savigny s'est proposé. Ceux même qui l'ont combattu ne sont cités par lui que lorsqu'il trouve convenable de les réfuter. Son livre s'adresse aussi bien aux jurisconsultes praticiens qu'aux professeurs. Ce n'est ni un traité purement historique, ni un ouvrage destiné aux antiquaires. L'auteur attaque toutes les questions célèbres que l'application du droit romain a soulevées dans les pays où il a encore force de loi. Il indique même les solutions que plu

sieurs ont reçues dans les nouveaux Codes, et entre autres dans le Code civil des Français.

En même temps, M. de Savigny montre combien on a eu tort de décrier son école comme anti-philosophique. Dans une introduction de 50 pages, il expose d'une manière claire et précise l'esprit de ses doctrines, et, dans tout le premier volume, il fait voir qu'elles reposent sur une base philosophique, en même temps qu'elles s'appuient sur la réalité historique. En un mot, il montre dans le jurisconsulte l'alliance de l'histoire et de la philosophie, de la théorie et de la pratique.

Il serait inutile d'insister sur le mérite de cet ouvrage, que nous regardons comme la plus haute expression et le plus beau monument du progrès de la science du droit romain en Allemagne. - Le premier volume de la traduction française a paru: nos lecteurs peuvent juger par eux-mêmes.

6. Passons aux traités particuliers et aux monographies du droit romain.

Il y a peu de questions qui n'aient été discutées dans des dissertations spéciales. Les recueils périodiques particulièrement destinés à ces publications en font foi. Ainsi les Archives de la jurisprudence du droit civil sont arrivées au 22° volume; le recueil publié à Giessen par MM. Linde, Marezoll et Schroeter, au 13°; le musée du Rhin, au 9°; le journal pour la jurisprudence historique, au 11°; celui de M. Rosshirt, au 3o. En outre, nos plus célèbres professeurs réunissent des dissertations de ce genre dans des collections intitulées : Essais sur le droit civil (Civilistische Versuche), Dissertations (Abhandlungen), et Études (Beitrage), etc., etc. Nous citerons parmi les jurisconsultes les plus ré

cents, MM. Dirksen, Francke, Buchholz, Müller, Buchel et Sell.

C'est ainsi que plusieurs questions célèbres, par exemple celle des effets de l'accomplissement des conditions résolutoires, ont été traitées une dizaine de fois. Nous avons encore un grand nombre de recueils de questions pratiques de droit romain fort estimés, p. e., ceux de MM. Pfeiffer à Cassel, Langenn et Kori en Saxe, Elvers, Seuffert et Bulow.

Quant aux traités particuliers sur des matières spéciales, il en est peu qu'on puisse mettre à côté de l'ouvrage de M. de Savigny sur la possession. Cependant celui de M. Hasse sur la responsabilité des fautes, dont une deuxième édition a paru en 1838; ceux de M. Unterholzner sur la prescription, de M. Mühlenbruch sur la cession (le transport) des créances, de M. Keller sur la litiscontestation et les jugements, ont une réputation justement méritée. Un livre fort utile est le Traité des hypothèques et du gage de M. Sintenis (1836). Nous ne devons pas non plus passer sous silence les traités de MM. Bluntschli et Francke, sur la légitime et la succession nécessaire en droit romain (1829 et 1831); de M. Marezoll, sur l'honneur civil et sa perte ( 1824 ); de M. Rosshirt, sur les legs (1836); de M. Burchardi, sur la restitution en entier (1836); l'ouvrage inachevé de M. Hasse, sur la dot (1824), et celui de Puchta, sur le droit coutumier (1828-1839), sans parler de plusieurs autres de moindre importance.

Il en est d'autres qu'on attend avec impatience. Tel est un traité des obligations, écrit par feu M. Unterholzner. Tel est aussi un traité des successions que fait imprimer en ce moment un jurisconsulte aussi profond

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