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ment commercial et industriel, qui est l'effet nécessaire du mouvement dans lequel est engagée la nation anglaise, n'est autre chose qu'une démoralisation progressive, une viciation graduelle des parties saines du corps social, et l'envahissement prochain du corps tout entier, par une plaie gangreneuse que le malade lui-même aura pris soin d'alimenter et d'agrandir. Ceux qui, depuis longtemps, ne cessent de montrer à nos voisins d'outre-Manche, pour terme de la carrière en apparence si brillante, qu'ils parcourent, un abîme inévitable où doivent s'engloutir en un jour cette prospérité et ces richesses si vantées, ceux-la verront sans doute, dans les chiffres ci-dessus, un symptôme de plus à ajouter à ceux qu'ils ont déjà recueillis à l'appui de leurs menaçantes prédictions.

Tous les crimes n'ont pas également contribué à l'accroissement que présente l'année 1838 sur celle qui l'a précédée. Pour quelques-uns, le chiffre de 1837 n'a même pas été atteint. Cette contribution est indiquéc par l'auteur du compte rendu, ainsi qu'il suit, pour chacune des six catégories entre lesquelles sont répartis tous les crimes dans les tableaux :

Idem.

9.8

Crimes contre les personnes. . augmentation sur 1837 8,1 p. 100.
Crimes contre la propriété, ac-
compagnés de violences con-
tre les personnes....
Crimes contre la propriété, non
accompagnés de violences
contre les personnes....
Entreprises contre la propriété,
avec intention de causer un
préjudice. . . . . .

Faux en écriture au fausse mon

naie. . . . Autres crimes non compris dans les cinq catégories ci-dessus.

diminution

3,3

Idem.

21.9

augmentation

10,3

J

diminution

20,4

On voit que l'augmentation est due principalement au mouvement ascendant des crimes commis avec violence. Ce résultat est d'autant plus remarquable, que, pendant les quatre années antérieures à 1838, quelques variations qu'ait éprouvées, en plus ou en moins, le nombre total des crimes, ceux commis avec violence avaient constamment suivi une progression décroissante. M. Redgrave fait remarquer que les peines exorbitantes prononcées par l'ancienne législation contre quelques-uns des crimes de cette espèce, ayant été considésidérablement réduites par les actes rendus depuis l'avénement de la reine Victoria, il a dû en résulter plus d'exactitude et de rigueur dans la poursuite. Mais cette observation n'atténue que faiblement, ce nous semble, la signification qu'on doit attribuer à ce changement de la progression décroissante suivie jusqu'à présent par les crimes graves, en une progression croissante. On conçoit que, le nombre des crimes commis restant le même, celui des condamnations puisse augmenter par le seul effet de l'adoucissement d'une peine qui n'était pas proportionnée à la gravité des actes qu'elle devait réprimer; mais les chiffres ci-dessus représentent le nombre des emprisonnements et non celui des condamnations; or, il nous paraît difficile d'admettre, surtout lorsqu'il s'agit de crimes contre les personnes, ou de crimes contre les propriétés accompagnés de violences contre les personnes, que la seule considération de la sévérité excessive des peines prononcées par la loi, ait pu faire négliger la poursuite des coupables dans un assez grand nombre de cas, pour que tout à coup, après la réduction de ces peines, l'on voie le chiffre des emprisonnements croître de 8 et de 9 p. 100 ou d'environ 1712, indépendamment de toute autre cause.

Il y a donc eu augmentation réelle du nombre des crimes accompagnés de violence; et il eût été intéressant de rechercher si cette augmentation n'est pas imputable, pour une portion quelconque, à la diminution de l'intimidation, résultat naturel de l'adoucissement des peines. Toutefois, si le chiffre de 1838 est supérieur à celui de l'année 1837, prise isolément, il est encore inférieur d'environ 1 p. 100, à la moyenne des quatre années 1834-37'.

L'auteur du compte rendu anglais examine ensuite quelle a été, en 1838, sur l'administration de la justice criminelle, l'influence des lois qui ont, pour un grand nombre de crimes, aboli la peine de mort. C'est la partie la plus intéressante de ses observations; c'est aussi le point sur lequel nous nous arrêterons le plus longtemps.

Le Code pénal anglais a été, jusqu'à ces derniers temps, une législation draconienne, uniquement basée sur le principe de l'intimidation et où la peine de mort était répandue avec une déplorable prodigalité. Depuis vingt ans environ, l'on s'est occupé, à diverses reprises, de modifier cette législation, pour la rendre plus humaine. La chambre des communes prit l'initiative de ces mesures, et sur les instances d'une de ses commissions, la peine de mort fut d'abord abolie pour vingt et une espèces de crimes. A la vérité, la mesure ne s'ap

1 En 1839, les crimes contre les personnes ont continué d'augmenter dans la même proportion de 8 p. 100; mais les crimes contre les propriétés accompagnés de violence, présentent une dimi. nution de 6,9 p. 100, eu égard au chiffre de 1838. En réunissant ces deux catégories de crimes en une seule, on voit qu'en 1839 les crimes commis avec violence ont augmenté dans la proportion de 1,2 p. 100 seulement.

pliquait qu'à des crimes peu fréquents, et, par suite, elle n'eut qu'une faible influence sur le nombre des condamnations capitales.

En 1827, sous le règne de Georges IV, plusieurs lois furent rendues dans le but d'amender et de consolider le droit criminel. La seule modification notable qui en résulta quant à l'application de la peine de mort, consista en ce que la valeur que devaient représenter les objets volés, pour que le vol dans une maison habitée constituât un crime capital, fût élevée de 40 schellings (50 fr. 40 c.) à 5 liv. sterl. (126 fr. 25 c.).

Après la promulgation de ces lois, on trouve encore, dans le droit criminel anglais, trente et une espèces de crimes, sur les soixante-dix huit espèces différentes contenues dans les tableaux, qui entraînent l'application de la peine capitale.

Bientôt, de nouvelles modifications furent faites. Dès 1832, la peine de mort était abolie pour les crimes ci-après désignés :

Vol de bestiaux.
Vol de chevaux.

Vol de moutons.

Vol dans une maison habitée, d'objets d'une valeur de 5 liv. sterl.

Fabrication de fausse monnaie.

Faux en écriture (excepté faux testament et fausse procuration pour transférer des rentes.)

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En 1833, la peine capitale fut supprimée pour vol avec effraction, commis pendant le jour; en 1834. pour retour d'un lieu de déportation; en 1835, pour sacrilége et pour soustraction de lettres par les agents de la poste; enfin, en 1837, plusieurs lois promulguées par la reine Victoria, abolirent la peine de mort

-

pour tous les crimes qui y étaient jusque-là restés soumis, excepté pour les douze suivants :

1. Meurtre ou tentative de meurtre accompagnée de voies de fait qui ont mis la vie en danger.

2. Rapt et viol de jeunes filles âgées de moins de dix

ans.

3. Outrages contre nature.

4. Vol de nuit avec effraction, accompagné de violences contre les personnes.

5. Vol sur la voie publique, avec mutilations ou bles

sures.

6. Incendie de maisons habitées ou de navires, lorsque la vie des personnes a été mise en danger.

7. Piraterie accompagnée de tentatives de meurtre. 8. Faux signaux faits à un navire dans le but de le faire échouer.

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10. Altroupement séditieux pour détruire des édifices.

11. Détournements commis par les agents de la banque d'Angleterre.

12. Haute trahison.

Il reste donc maintenant, des trente et une espèces de crimes qui, sous la loi de 1828, étaient punies de la peine capitale, douze espèces seulement, qui continuent d'être soumises à cette peine. Encore même, M. Redgrave fait-il remarquer que les six dernières espèces de l'énumération qui précède, se présentent si rarement, qu'on peut dire qu'il n'y a plus aujourd'hui que six cas dans lesquels la peine de mort soit appliquée. - Quelle distance entre cette législation et celle qui régissait l'Angleterre il y a vingt ans !

On a dû remarquer, dans ce court historique des

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