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Les deux maximes principales de ces libertés sont, 1°. que les apôtres, le pape, et toute l'église même, n'ont reçu de puissance de Dieu que sur les choses spirituelles et qui concernent le salut, et non sur les choses temporelles et civiles; 2°. que l'autorité du concile œcuménique, c'est-à-dire général, estau-dessus de celle du pape.

En 1789, la France ecclésiastique était divisée en 18 provinces, qui consistaient chacune en un archevêché dont elle portait le nom, et 113 évêchés qui en étaient suffragants.

D'après le dénombrement donné par l'abbé d'Expilly, on comptait alors dans le royaume, environ 40,000 paroisses et annexes; 115 abbayes d'hommes en règle; 255 abbayes, et 64 prieurés de filles; 655 collégiales.

Il faut ajouter à cette énumeration, 19 chapitres nobles d'hommes; 27 chapitres nobles de chanoinesses; 14 maisons chefs d'ordres ou de congrégations, et 6 à 700 couvents ordinaires de religieux et religieuses de tous Ordres de Moines.

Pour l'Ordre de Malte, on y comptait 6 grands prieurés, et 4 bailliages affectés aux grands croix; 350 autres commanderies, dont 200 pour les chevaliers, et 50 pour les servants-d'armes, et deux convents de religieuseschevalières.

Ces divers établissements de l'Ordre jouissaient, en France, d'un revenu de 1,748,996 livres.

Les archevêchés et évêchés du royaume formaient environ, par an, 49,000,000 de revenu, et leur taxe en cour de Rome, montait à 1,595,000 livres.

On estimait que le total général des ecclésiastiques du royaume, tant séculiers que réguliers, de l'un et l'autre sexe, montait à 500,000 ames, et leurs revenus au-delà de 130,000,000, dont à peu près 40 composaient le revenu des curés.

Le clergé payait 10 à 11,000,000 de contributions annuelles à l'Etat. (M. Necker. )

Tel était l'état du clergé de France en 1789; il changea entièrement de face à cette époque.

Le 2 povembre 1789, un décret de l'assemblée natio-" nale mit les biens du clergé à la disposition de la nation. L'archevêque d'Aix, l'abbé Maury, l'évêque de Nîmes et l'abbé de Montesquiou, furent les principaux membres

qui parlèrent contre ce décret. On y ajouta que dans les dispositions à faire pour l'entretien des ministres de la religion, il ne pourrait être assuré pour la dotation des cures, moins de 1,200 francs par an, non compris leur logement et le jardin en dépendant.

Le 9 avril 1790, l'assemblée nationale décréta que les dettes du clergé seraient payées par l'Etat. A la même époque, elle déclara qu'elle ne pouvait et ne devait délibérer sur la question de savoir si la religion romaine serait la religion de l'Etat.

Enfin, l'on sait que sous les assemblées suivantes, et particulièrement sous la convention, toute espèce de religion nationale fut proscrite, les temples fermés pendant long-temps, les prêtres qui ne se mariaient pas, ou ne donnaient pas des preuves d'une abjuration absolue, étaient bannis, malgré quelques décrets qui semblaient favoriser la liberté des cultes.

Cet ordre, ou plutôt ce désordre, a cessé entièrement à l'époque du concordat.

On appèle de ce nom un acte diplomatique passé entre le pape, comme chef de l'église, et le gouvernement français, le 26 messidor an 9, et dont les ratifications ont été échangées à Paris, le 23 fructidor suivant (10 septembre 1801.)

Par cet acte, il est arrêté, 1o.. que le gouvernement français reconnaît que la religion catholique, apostolique et romaine, est la religion de la grande majorité des citoyens français; 2°. que S. S. reconnaît également que cette religion a retiré et attend encore en ce moment le plus grand bien et le plus grand éclat de l'établissement du culte catholique en France; 3°. que la religion catholique, apostolique et romaine, sera librement exercée en France; son culte sera public; 4°. qu'il sera fait par le saint-siége, de concert avec le gouvernement français, une nouvelle circonscription des diocèses français; 5°. que le premier consul, depuis empereur, nommera dans les trois mois qui suivront la publication de la bulle de S. S., aux archevêchés et évêchés de la nouvelle circonscription.

Plusieurs règlements sur l'exécution du concordat ont été convertis en lois le 18 germinal an 10 (8 avril 1802 ), sous le titre d'organisation des cultes.

Conformément à l'article LVIII de ces règlements, il doit y avoir en France 10 archevêchés, auxquels a été ajouté depuis celui de Turin, ce qui fait 11; et 50 évêchés, auxquels ont été ajoutés ceux du Piémont, ce qui en porte le nombre à 57.

Le traitement des archevêques est fixé par les loix organiques, à 15,000 fr.; celui des évêques, à 10,000 fr. Les curés sont distribués en deux classes: ceux de la première ont 1,500 francs de traitement; ceux de la seconde, 1,000 francs.

Il y a une paroisse au moins par arrondissement de justice de paix; ainsi, leur nombre n'est pas au-dessous de 3,559, qui est celui des justices de paix.

Outre leur traitement, fixé par les réglements d'organisation, les conseils-généraux des grandes communes accordent, en vertu de l'article LXVII des mêmes lois, une, augmentation de traitement aux évêques et archevêques, lorsqu'ils le jugent utile.

Les comptes rendus du trésor public, en l'an 12, n'offrent qu'une dépense de 2,182,787 francs pour le culte pendant l'an 11.

L'état des dépenses de l'an 13 porte à 13,000,000 les dépenses du cultes, et 22,000,000 les pensions ecclésiastiques pour cette même année.

Ici se termine ce que nous avions à dire de l'organisation politique, administrative, judiciaire et religieuse des 108 départements, comme un accessoire nécessaire et instructif à l'analyse statistique que nous en ayons' présentée.

Nous répétons ce que nous avons déjà dit, que nous exposerons ce qui tient à l'organisation financière et militaire, en parlant des revenus et des forces de l'Etat.

L'ordre des matières demande que nous passions maintenant à la population: ce sera l'objet du chapitre suivant, que nous diviserons en autant de paragraphes que le sujet l'exigera,

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CHAPITRE V.

De la Population de la France.

QUOIQU'ON puisse assez généralement estimer la valeur

ou la force d'un Etat par l'étendue de son territoire et de sa population combines ensemble, il faut cependant que la disproportion du territoire à la population ne soit pas trop considérable; car, toutes choses égales d'ailleurs, une nombreuse population sur un petit territoire, est bien préférable à une égale population répartie sur un

vaste territoire.

Cette considération fondamentale a donné lieu à quelques personnes de dire, avec raison, que la force des États devait être estimée par la somme de la population, divisée par l'étendue des terrains sur lesquels elle est répandue, et les a portées à dire, peut-être avec quelque exagération cependant, qu'une population de 24,000,000 d'habitants sur une surface de pays très-étendue, était à peu près égale à celle de 2,000,000, resserrée dans quelques

cantons.

Il est certain que la population n'a jamais plus d'action et de ressort que lorsqu'elle est rassemblée. Dans cet état, tous les hommes travaillent pour l'utilité commune, abrègent les opérations qu'exigent les besoins d'un seul individu, et par la balance avantageuse d'un travail combiné, forment un excédant de valeurs ou d'objets de consommation dont profite la société.

Aussi a-t-on pu voir dans l'analyse statistique des départements, que les produits on revenus levés sur ces produits, sont quelquefois dans une proportion plus forte que la population, et que mille hommes dans une lieue carrée, supportent plus du double d'impositions, que cinq cents répartis dans la même étendue.

Il est constant, par des exemples aisés à citer, que la dispersion ou la concentration de la population produit des effets différents; en sorte que pour connaître l'influence

du nombre des habitants sur la force et la richesse d'un Etat, il ne suffit pas d'en connaître la quantité; il faut encore savoir sur combien de surface de terrain cette population est dispersée.

La concentration de la population n'opère pas avec moins d'énergie encore, lorsqu'une nation cherche à reconquérir ses droits au dedans contre l'oppression, et à soutenir son indépendance au dehors contre l'ambition étrangère.

C'est ce que nous ont montré les prodiges opérés dans la Grèce, et ceux plus étonnants encore des armées françaises, depuis douze ans.

On a prétendu que dans l'état actuel de la civilisation de l'Europe, la guerre n'était qu'une affaire d'argent : oui, pour la guerre de mer; mais celle de terre doit se calculer sur les ressources de la population; autre principe dont nous venons d'avoir la confirmation sous les yeux.

Il résulte de ces considérations, que la puissance intérieure et extérieure des Etats consiste essentiellement dans sa population; par conséquent, qu'il est du plus grand intérêt d'en bien connaître les divers rapports avec les autres éléments de la fortune et de la force publique. On a fait des recherches très-nombreuses de tout temps pour y parvenir les dénombrements, les calculs des naissances, des morts, des mariages, ont été successivement employés; enfin, après plusieurs essais, on est parvenu à établir des rapports suffisamment exacts, et à connaître, avec le nombre des habitants de la France, la proportion des sexes et des âges à sa totalité.

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Ces connaissances forment une des plus importantes parties de la Statistique, et se rattachent à toutes les branches de l'économie politique; nous allons donc en présenter l'exposé, aussi sommairement que l'importance de la matière nous le permettra.

Nous parlerons,

1o. Du nombre des habitants de la France, avant et depuis la révolution;

2o. De son rapport à l'étendue territoriale;

3o. De ses rapports aux naissances, aux morts, aux mariages, aux sexes, aux levées militaires.

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