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lait aux fromageries. Dans la plaine et dans la montagne, cet usage n'existe pas; le propriétaire recueille de seconds fruits sur les prés.

Les prairies, tant naturelles qu'artificielles, annonçaient, en mai, des produits très abondans, mais les pluies de juin leur ont beaucoup nui; les pluies s'étant prolongées jusqu'au moment de la récolte, les rivières et les ruisseaux sont sortis de leurs lits, ont inondé les plaines et ensablé les herbes des prés. La perte a été considérable sous ce rapport, dans la partie basse du département, mais dans les montagnes, où l'on ne récolte qu'un mois après la plaine, les foins ont été abondans et de bonne qualité.

Toutefois, les prairies de l'une et de l'autre espèce, favorisées par les pluies de la fin d'août, ont donné des seconds fruits assez considérables et de bonne qualité.

Les irrigations méthodiques et en grand ne sont exécutées que sur les prairies de Montbéliard qui avoisinent l'Allan et la Savoureuse. Une commission des prairies administre les irrigations, fait exécuter les travaux, et répartit les frais entre les propriétaires. Cette association existait déjà avant la conquête de la Franche-Comté par Louis XIV, car en 1682, époque où ce monarque s'était mis en possession du comté de Montbéliard, un intendant de Franche-Comté homologua un état de frais de répartition pour l'irrigation des prairies. Cette pièce existe aux archives de la mairie. ( V. dans l'Annuaire de 1830, page 267, l'historique de l'administration de cette irrigation.)

Les procédés employés pour l'irrigation de ces prairies, et même pour l'essai tenté dans les prairies de SaintVit, ne reposent que sur l'emploi de cours d'eau dont la source est plus élevée que les terres à submerger, et l'on en conclut que l'irrigation ne peut avoir lieu que sur

les prés favorisés par cette heureuse situation. Cependant la croûte extérieure du département, composée de terrains calcaires, traversée en tout sens par des cours d'eau souterrains provenant des revers des montagnes, offre, sur une multitude de points, la possibilité de faire des irrigations sur les prairies, au pied des collines, en perçant des puits artésiens propres à donner des eaux jaillissantes au-dessus du sol.

Si l'hydrographie, au moins jusqu'à une certaine profondeur, était mieux connue, on saurait quels sont les lieux qui offrent des moyens certains d'amener des eaux à la surface du sol; mais au lieu de connaissances positives à cet égard, nous en somme réduits à des hypothèses, à des tâtonnemens et à des essais souvent improductifs. Cependant les causes des eaux jaillissantes des puits forés est facile à concevoir; les sources jaillissantes naturelles, telles que le puits de la Brême, dans certains cas, quelques-unes des sources du Dessoubre, les jets d'eau de la fontaine de Cléron, etc., ayant lieu parce qu'il existe un bassin ou un cours d'eau supérieur qui presse de son poids sur le canal inférieur, donnent la certitude qu'on obtiendra un semblable résultat en pratiquant une ouverture artificielle sur le sol superposé à une nappe d'eau alimentée par une source souterraine supérieure, ou en perçant le terrain qui recouvre le cours d'eau qui alimente cette nappe d'eau. Dans ces deux cas, l'eau jaillira à la surface par l'effet très naturel de la pression du poids des eaux supérieures. Toutefois il faut observer que le cours d'eau en pente ne donnerait de l'eau jaillissante qu'autant que le canal serait entièrement rempli d'eau courante, et éprouverait une forte pression des eaux supérieures sur le point percé par la sonde. C'est ainsi que le puits de la Brême ne lance un jet d'eau au-dessus de son orifice que lorsque l'a

bondance des eaux remplit complétement le canal souterrain en amont qui l'alimente.

S VIII.

Arbres fruitiers.

Dans les hautes montagnes, les arbres fruitiers sont rares, et il est très peu d'espèces qui puissent supporter la température habituelle de ces localités. Dans la moyenne montagne, les arbres fruitiers sont peu communs, et on ne voit dans cette zone aucune des espèces délicates cultivées dans de plus heureuses contrées.

C'est dans la plaine seule, que toutes les espèces de fruitiers se cultivent avec succès. Nos vignes, favorisées par une exposition à mi-côte, comme dans les vallons de Beure et ceux de la Loue, sont peuplées de pêchers et de cerisiers dont l'ombre légère ne saurait nuire à la maturité du raisin. Dans nos nombreux vergers, dans nos jardins d'agrémens, dans nos potagers, on cultive en plein vent les cerisiers, les pommiers, poiriers, abricotiers, péchers, pruniers; on y soigne en espaliers et en quenouilles, les belles et nombreuses variétés de ces diverses espèces. Le noyer, arbre de première grandeur, si précieux par son bois et par ses fruits, est cultivé le long des chemins, sur les terrains vagues. Il est à désirer toutefois que l'on s'occupe de multiplier ce bel arbre, ornement de nos cultures. Le nombre en diminue, et il est urgent que l'attention des agriculteurs et des autorités se porte sur les moyens d'encourager les plantations d'une espèce aussi utile.

La récolte des arbres fruitiers a été très faible en 1831. Plusieurs causes ont concouru à l'atténuer : 1o les gelées excessives du long hiver de 1829-1830 qui a fait périr une partie des racines; 2o les pluies qui ont suivi; et 3o plus que tout cela encore, l'innombrable quantité de

chenilles qu'une température douce et humide, secondée par l'insouciance des cultivateurs, a fait développer sur tous les points du département. Doit-on espérer que les cultivateurs, éclairés par l'expérience, donneront enfin des soins à l'échenillage que l'administration supérieure leur recommande chaque année, et que tous les agens de l'autorité se réuniront pour obtenir la conservation des oiseaux, ennemis naturels des chenilles, et pour empêcher surtout la capture des nids dans les bois et dans les bosquets? Il est du devoir des maires et des agens forestiers de seconder les mesures de l'administration, puisqu'elles n'ont évidemment pour but que le bien public.

S IX.
Économie rurale.

Habitations. En général, les habitations des cultiva→ teurs de nos campagnes sont basses, enterrées dans le sol, peu aérées et malsaines. Les portes et les fenêtres en sont petites et étroites, et encore les croisées s'ouvrentelles très rarement, car la plupart sont à chassis dormant; l'air n'est conséquemment point assez renouvelé, et l'humidité qui en résulte ne peut qu'être contraire à la santé des hommes et les prédisposer à l'influence pernicieuse des maladies épidémiques. Presque partout l'écurie touche le logement du fermier, et a une porte ouvrant dans la cuisine.

Il serait bien utile, dans un moment où le choléramorbus semble vouloir s'étendre en France, que nos cultivateurs sentissent combien il est important pour eux d'assainir leurs demeures et les rues de leurs communes, en enlevant partout les amas de débris sujets à donner des émanations insalubres, en renouvelant souvent l'air

des habitations et en entretenant le soir de grands feux à leurs foyers.

Les maisons de la haute et de la moyenne montagne sont couvertes avec des morceaux de bois de sapin ou de chêne façonnés en pièces quadrangulaires qui se posent les unes sur les autres. Ce mode de toiture, dangereux dans les cas d'incendie, cause une énorme consommation de bois, qui pourrait être économisé par l'emploi de la tuile. On remarque avec satisfaction que les maisons nouvelles des cultivateurs un peu aisés se couvrent de cette manière, et sont mieux disposées dans leur intérieur.

Dans la plaine, le grangeage et l'aire pour battre le grains sont au rez-de-chaussée; dans les montagnes, le grangeage est au-dessus de l'écurie, et on y monte les chariots chargés, par une pente rapide, qui fatigue considérablement les attelages.

Les écuries et les étables sont généralement trop basses; elles sont enfoncées et étroites, n'ont qu'une fenêtre qui ne s'ouvre presque jamais, de sorte qu'elles ne prennent de l'air que par la porte. Les murs en sont crevassés, les poutres vermoulues et remplies d'insectes; les toiles d'araignées y sont étendues de toutes parts, et la litière des bestiaux n'y est renouvelée que rarement, parce que le cultivateur veut laisser pourrir ses pailles avant de les transporter sur ses fumiers. Il résulte de cet état de choses que les émanations de ces litières, tenues en fermentation par les urines et les excrémens des animaux, sont la cause permanente de ces maladies épizootiques, qui atteignent si facilement le bétail du département. Des étables toujours propres, recrépies et blanchies chaque année avec du lait de chaux, seraient les moyens simples à employer pour prévenir ces pertes de bétail qui, chaque année, ruinent des familles entières de cultivateurs.

Cet état de choses si pernicieux n'est pas l'effet de l'in

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