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facilement se passer temporairement des services de deux des attachés de la chancellerie.

Mais il arriva ceci : c'est que deux de ces attachés avaient avec eux leurs femmes et leurs familles, tandis que les autres étaient tous célibataires. Je choisis donc comme les plus propres à être renvoyés de Paris les deux hommes mariés, l'un desquels s'est trouvé être M. Atlée.

Ainsi que le sait Votre Seigneurie, M. Atlée est porteur d'une lettre patente qui le nomme consul; ses principales fonctions sont celles d'attaché bibliothécaire et de greffier (registrar) d'ambassade. En temps ordinaire, il y a quelques avantages pratiques à faire exercer les fonctions de consul par une personne qui soit immédiatement en rapport avec l'ambassade; au nombre de ces avantages est celui de permettre la perception, pour le compte du Gouvernement de Sa Majesté, des tarifs consulaires qui excèdent de beaucoup le chiffre des salaires alloués aux consuls.

Maintenant, dans les circonstances sous l'empire desquelles se fit mon départ, nulles fonctions spéciales n'était assurément d'une nature telle, qu'elles pussent être mieux remplies par un consul que par un secrétaire d'ambassade. Il n'était point en mon pouvoir d'enlever d'entre les mains du comité chargé de l'administration du fonds de secours la distribution des somines destinées à être réparties parmi les sujets anglais nécessiteux. Il n'entre nullement dans mes vues ni dans mes désirs de le faire. Au contraire, j'avais la confiance la plus entière dans les divers membres du comité, que les motifs les plus généreux avaient portés à rester à Paris, et le noble et incessant dévouement qu'ils ont mis à accomplir leur devoir a justifié pleinement la bonne opinion que j'avais eue d'eux.

En définitive, l'objet qui rendait désirable la présence d'un membre de l'ambassade à Paris, c'était de le mettre à même de correspondre officiellement avec le Gouvernement français et d'exercer sur lui quelque influence en faveur des sujets de Sa Majesté; et il me sembla que j'arriverais plus facilement à mon but en présentant un secrétaire d'ambassade au ministre des affaires étrangères comme représentant de l'ambassade, plutôt qu'un consul que je laisserais purement et simplement dans la ville. J'introduisis donc M. Wodehouse auprès de M. Jules Favre en cette qualité.

En réalité, M. Wodehouse, pouvant parfaitement remplir toutes les fonctions inhérentes à la qualité de consul, se trouvait être dans une meilleure condition que n'aurait été un consul pour communiquer officiellement avec le ministre des affaires étrangères ou d'autres autorités françaises. On comprendra que, naturellement, je suis dési

reux de ne pas exposer sans nécessité un seul des sujets de Sa Majesté Britannique, et j'ai pensé qu'en établissant M. Wodehouse et le général Claremont, attaché militaire à Paris, je pourvoyais de mon mieux à la protection des sujets de Sa Majesté Britannique qui continuaient de résider à Paris.

Je laissai à M. Wodehouse l'ordre de quitter lui-même Paris si l'on menaçait de le bombarder, et alors de faire tous ses efforts pour obtenir un sauf-conduit pour tous les sujets anglais. J'ai pensé que, dans une telle éventualité, la protection de nos compatriotes ne saurait être remise en de meilleures mains que celles du général Claremont, qui, à raison de son intimité avec le général Trochu et de ses liaisons avec des officiers supérieurs français et de son influence auprès d'eux, aurait des moyens particuliers d'assister les sujets anglais si un danger imminent provenait des opérations militaires.

Le ministre de la marine étant établi à Tours, et comme il était clair que l'on ne pourrait avoir pendant le siége aucune nouvelle par voie de mer, j'aurais emmené avec moi le capitaine Horé, attaché naval, s'il n'avait pas été trop malade pour voyager. Vous savez que je lui avais donné l'ordre de me rejoindre aussitôt que sa santé le lui permettrait. Depuis mon départ de Paris, je n'ai plus d'autre service actif que celui consistant à envoyer à M. Wodehouse les ordres de Votre Seigneurie.

Mais j'ai la confiance que Votre Seigneurie pensera que toute ma correspondance avec elle, avant et après mon départ de Paris, fournit la preuve que ma sollicitude n'a pas cessé de se préoccuper des intérêts des sujets britanniques à Paris, et que j'ai constamment manifesté le désir que l'on fit tous les efforts possibles pour leur venir en aide.

Ci-joint la liste des principales dépêches que j'ai eu l'honneur d'adresser à Votre Seigneurie à ce sujet.

Signé: LYONS.

N° 1123.

L'EMPEREUR D'ALLEMAGNE A L'EMPEREUR DE RUSSIE.

(Télégramme.)

Versailles, 26 février 1874, 2 h. 7 m.

C'est avec un sentiment inexprimable et en rendant grâce à Dieu, que je vous annonce que les préliminaire de la paix viennent d'être signés par Bismarck et Thiers. L'Alsace, mais sans Belfort, la Lor

raine allemande avec Metz sont cédées à l'Allemagne; cinq milliards de contribution seront payés par la France; au fur et à mesure du paiement de cette somme, le pays sera évacué en trois ans. Paris sera occupé en partie jusqu'à la ratification de la paix par l'Assemblée nationale de Bordeaux.

Les détails de la paix se traiteront à Bruxelles. Si la ratification a lieu, nous voilà à la fin de cette guerre aussi glorieuse que sanglante, qui nous a été octroyée avec une frivolité sans exemple.

Jamais la Prusse n'oubliera que c'est à vous qu'elle doit que la guerre n'a pas pris des dimensions extrêmes. Que Dieu vous en bénisse. Pour la vie votre ami reconnaissant.

N° 1124.

Signé: GUILLAUME.

L'EMPEREUR ALEXANDRE II A L'EMPEREUR GUILLAUME.

(Télégramme.)

Saint-Pétersbourg, le 45 (27) février 1874.

Vous remercie pour détails des préliminaires de paix et partage votre joie. Dieu donne qu'une paix solide en soit la conséquence. Suis heureux d'avoir pu vous prouver mes sympathies en ami dévoué. Puisse l'amitié qui nous lie assurer le bonheur et la gloire de nos deux pays.

Signé: ALEXANDRE.

N° 1125.

M. BANCROFT A M. HAMILTON FISH.

Berlin, le 27 février 1871.

Sir, le télégraphe vous aura apporté la nouvelle des préliminaires de paix entre la France et l'Allemagne, signés samedi soir, sur la base de cession de l'Alsace, moins Belfort, et de la Lorraine allemande, y compris Metz, avec une indemnité de guerre de cinq milliards.

La forteresse de Belfort commande le passage sud des Vosges dans le centre de la France. Pour une puissance allemande désireuse d'une

guerre avec la France, la possession de Belfort serait d'une grande importance, puisqu'elle assure l'accès des parties les plus riches de la Bourgogne. Comme position défensive, elle n'est pas d'une grande importance pour l'Allemagne. Fidèle, en conséquence, au principe de ne pas demander de cessions territoriales autres que celles nécessaires à la défensive, l'Allemagne a très-sagement restitué Belfort à la France. Cette ville est essentiellement française et l'a toujours été depuis des siècles. La forteresse de Metz est retenue par l'Allemagne parce que les autorités militaires allemandes la considèrent comme étant essentielle comme ligne de défense, mais sa position était de telle importance pour la France, pour sa propre protection, que sa cession aurait pu être difficilement réclamée, si l'Allemagne, il y a quatre ans, n'avait pas été forcée par la France de renoncer à la forteresse de Luxembourg.

L'indemnité pécuniaire demandée pèsera lourdement sur la France, car l'argent doit être trouvé et payé en trois ans, et la guerre a causé dans le crédit de la France un ébranlement dont elle ne se relèvera pas de sitôt. Le conseil de l'empire d'Allemagne, qui ressemble assez à notre Sénat, est assemblé en ce moment à Berlin, et forme la réunion des hommes d'État les plus distingués de l'empire. L'époque de la première Diète de l'Allemagne renouvelée est fixée au 16 mars. L'Empereur est attendu ici plus tôt. On dit qu'il ressent très-vivement la perte de tant de braves officiers et soldats dans la guerre, qu'il rentrera dans sa capitale avec le moins d'éclat possible, et, qu'en place de réjouissance pour la victoire, un de ses premiers actes sera de proposer un deuil public pour le pays tout entier. Lorsque ceci sera fait et que la plus grande partie de l'armée sera rappelée, il pourra y avoir une entrée triomphale dans Berlin, à laquelle l'Empereur prendra part.

L'Empereur a probablement annoncé déjà au Président des ÉtatsUnis son élévation à la dignité impériale. Dans ce cas, j'espère bientôt recevoir la réponse du Président à cette communication.

Recevez, etc.

Signé: G. BANCROFT.

No 1126.

EXPOSÉ DES MOTIFS DU PROJET DE LOI RELATIF AUX PRELIMINAIRES DE PAIX, PRÉSENTÉ A L'ASSEMBLÉE NATIONALE, LE 28 FÉVRIER 1871, PAR M. THIERS, CHEF DU POUVOIR EXÉCUTIF.

Messieurs, vous m'avez imposé une mission douloureuse. Tous les efforts dont j'étais capable, tous ceux dont était capable mon honorable collègue, M. Jules Favre, nous les avons faits pour nous montrer dignes de vous, dignes du pays. D'ailleurs, la Commission que vous avez envoyée avec nous à Paris, et qui a vu tout ce qui s'est passé, qui a été témoin de tous nos efforts, de toutes nos douleurs, aura plus tard à s'en expliquer devant vous.

Pour le présent, je me bornerai à vous lire le projet de loi suivant, que nous vous proposons.

Je vous demanderai la permission de charger ensuite un de nos collègues de lire le texte du Traité. Dans l'impatience où j'étais de me rendre au milieu de vous, je n'ai pas pris un instant de repos. Voici le texte du projet de loi :

Le Chef du Pouvoir exécutif de la République française propose à l'Assemblée nationale le projet de loi dont la teneur suit:

L'Assemblée nationale, subissant les conséquences de faits dont elle n'est pas l'auteur, ratifie les préliminaires de paix dont le texte est ci-annexé, et qui ont été signés à Versailles, le 26 février 1871, par le Chef du Pouvoir exécutif et le ministre des affaires étrangères de la République française, d'une part;

Et, d'autre part, par le chancelier de l'empire germanique, M. le comte Otto de Bismarck-Schoenhausen, le ministre d'État et des affaires étrangères de S. M. le Roi de Bavière, le ministre des affaires étrangères de S. M. le Roi de Wurtemberg et le ministre d'État représentant S. A. R. le Grand-Duc de Bade; et autorise le Chef du Pouvoir exécutif et le ministre des affaires étrangères à échanger les ratifications.

Teneur des préliminaires de paix, dont la lecture a été faite à l'Assemblée nationale et dont l'instrument authentique reste déposé aux archives du ministre des affaires étrangères.

Je demande à la Chambre de déclarer l'urgence. Des circonstances de la plus haute gravité exigent que nous perdions le moins de temps possible pour l'échange des ratifications. Ce sera le signal du retour de nos prisonniers et de l'évacuation d'une grande partie du territoire, y compris Paris.

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