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l'approbation précédemment donnée ne s'applique pas à l'ensemble du texte, lequel, par la généralité de ses termes, implique un engagement dont l'Allemagne ne saurait apprécier la portée; que l'acceptation qu'il confirme ne porte que sur le recouvrement des avances spéciales faites à l'industrie alsacienne en vertu de la loi de 1860, et que le paragraphe en question doit dès lors être modifié dans ce sens restreint et précis.

Le plénipotentiaire français explique que, dans la pensée de son Gouvernement, il ne s'agit nullement de dettes publiques, impôts ou contributions, pour lesquelles le Traité de paix a consacré le principe général de subrogation au profit de l'Empire, mais bien de créances privées absolument étrangères à la question de souveraineté; que, le droit de recouvrement par la France étant reconnu pour les prêts aux industriels, on ne peut pas exclure des créances ayant le même caractère et une origine semblable. La rédaction proposée, ajoute-t-il, n'a pas d'autre but que de prévenir les difficultés pratiques et de spécifier nettement que le Trésor sera autorisé à exercer.

Le plénipotentiaire allemand fait observer que ses instructions ne lui permettent pas d'accepter un texte embrassant autre chose que les créances provenant des avances remboursables susmentionnées.

Caisses de retraite.

Rappelant les explications fournies par lui dans la précédente Conférence au sujet des pensions sur fonds spéciaux, M. de Clercq dit être chargé de demander la suppression des deux derniers alinéas de l'article 2 (1). Un grand nombre de fonctionnaires ou agents départementaux et communaux employés dans les territoire cédés, ayant été replacés en France, ne peuvent plus verser leurs retenues dans les caisses de retraite à la fondation desquelles ils ont concouru; d'un autre côté, la Caisse des dépôts et consignations, chargée de garder et faire valoir les fonds, est désormais hors d'état d'exercer son mandat tutélaire à l'égard d'agents qui ont changé de nationalité. Dans l'intérêt des ayant droit eux-mêmes, il n'y a donc qu'un parti à prendre, celui de décider que toutes ces caisses seront liquidées par les soins de la commission mixte des finances.

Le comte Uxkull annonce que, sous toutes réserves quant à l'appréciation des conséquences que peut entraîner cette proposition, laquelle implique la dissolution des caisses dont il s'agit, il en rendra compte à son gouvernement.

(1) Article 2: Pensions.

ARCH. DIPL. 1873.

- I.

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Dettes des communes et départements.

La question des dettes à échéances variables, contractées par les communes et départements dans un intérêt d'utilité publique ayant été introduite, le plénipotentiaire français, après avoir rappelé les antécédents, fait remarquer que, par suite de changement de souveraineté et des conditions dans lesquelles ces dettes ont été souscrites, il n'est pas possible de maintenir les contrats qui leur servent de base, puisque le créancier se trouve placé dans l'impuissance d'exercer ni recours, ni surveillance, ni pression administrative à l'encontre de ses débiteurs. La France demande donc que l'Empire allemand prenne à son compte cette nature de dettes, en se mettant au lieu et place des personnes civiles devenues ses sujets; que la commission mixte des finances liquide et fixe les sommes à rembourser à la Caisse des dépôts et consignations contre endossement et délivrance part celle-ci des obligations ou titres d'emprunts souscrits à son profit par les communes ou départements intéressés.

Le comte Uxkull déclare, faute d'instructions, ne pouvoir se prononcer définitivement sur une pareille combinaison, qui, en réalité, transformerait la dette en faisant dès aujourd'hui recouvrer par la France des créances qui ne doivent être éteintes qu'à des échéances plus ou moins éloignées. Traduisant son opinion personnelle, il exprime la pensée que l'on pourrait se contenter de dire, comme on l'a fait dans l'article 16 pour les concessions de rentes, contrats, etc., que l'Empire allemand facilitera l'exact accomplissement des obligations souscrites par les communes.

M. de Clercq répond que la situation n'est pas la même. Dans l'article cité, il s'agit de simples particuliers pour lesquels le recours légal devant les tribunaux du pays reste ouvert, tandis que, dans l'espèce, le créancier est un établissement public étranger, la caisse des dépôts. En ce qui concerne la transformation de la dette, elle est, dit-il, le résultat forcé de circonstances qui ont fait passer le gage de la dette entre les mains du gouvernement qui deviendra propriétaire, par endos, du titre même de la créance. Or ce titre a une valeur vénale parfaitement connue qui en rendrait la négociation des plus faciles, dans le cas où la trésorerie allemande ne voudrait pas le conserver jusqu'à complet amortissement.

Archives et documents.

A propos de l'article 11, intitulé Archives et documents, le plénipo

tentiaire français demande que le texte soit complété par l'adjonction d'un paragraphe spécifiant la restitution des actes et registres concernant les services publics des communes que la nouvelle frontière a détachées de leurs anciens centres administratifs; il cite spécialement les matricules ou rôles des contributions pour certaines portions de l'arrondissement de Belfort.

Banque de France. Amnistie.

M. de Clercq signale ensuite à son collègue l'urgence d'une solution pour l'affaire de la Banque de France. Ce grand établissement a fourni toutes les justifications qui lui ont été demandées sur son droit de propriété à l'égard des 6 millions de monnaies divisionnaires, et pourtant le séquestre dont cette somme a été frappée il y a un an n'est pas encore levé, et il ne lui est toujours pas permis de disposer librement des fonds provenant de la rentrée de ses avances et escomptes, ce qui accroît la somme des intérêts qu'elle a à réclamer à l'Allemagne. Par ordre de son Gouvernement, le plénipotentiaire français insiste pour une prompte solution et place sur la même ligne l'article de l'avant-projet relatif à l'amnistie. Il annonce que la France est toujours disposée à ne pas attendre la signature de la Convention pour appliquer aux sujets allemands intéressés le bénéfice de l'amnistie convenue en principe; mais qu'elle est arrêtée faute d'être certaine de la réciprocité et d'être fixée sur le doute soulevé à propos des condamnations à mort prononcées par certains tribunaux militaires allemands, et qui ont été ultérieurement commuées en détention dans des forteresses. Le comte Uxkull annonce qu'il va provoquer les instructions dont il a besoin pour pouvoir résoudre ces deux questions.

Matériel servant à la vérification des poids et mesures.

Le plénipotentiaire français mentionne, parmi les objets dont l'administration des contributions indirectes attacherait du prix à recouvrer la possession, le matériel servant à la vérification des poids et mesures, qui sont sans valeur aucune pour le Gouvernement impérial. Sans vouloir se prononcer autrement sur l'accueil réservé à cette demande, le plénipotentiaire allemand fait remarquer que, le système métrique restant en vigueur en Alsace, les autorités locales pourront juger utile de conserver par devers elles ces instruments de contrôle.

Cautionnements et consignations judiciaires ou administratives,

L'article 4 du Traité de paix sur la restitution des cautionnements et consignations judiciaires ou administratives étant à la veille de recevoir son exécution, le plénipotentiaire français pense qu'il serait utile de bien s'entendre sur les mesures d'application. Ainsi, dans sa pensée, pour les agents financiers qui cesseront d'appartenir au service français, le remboursement n'aura lieu qu'après l'apurement des comptabilités et sur le vu du quitus final. Quant aux cautionnements de ceux qui ne seront pas devenus fonctionnaires publics allemands, ou qui se seront retirés dans la vie privée après avoir opté pour la nationalité française, ils auront, comme tout autre particulier, à poursuivre individuellement, auprès du Trésor, le remboursement des sommes qui leur sont dues. Tel semblerait aussi devoir être le cas pour le cautionnement des journaux publiés en Alsace-Lorraine.

Le comte Uxkull répond qu'il ne conteste pas qu'il y ait lieu de faire une réserve quant à l'apurement de la comptabilité des fonctionnaires publics, et qu'il déférera à son gouvernement les questions dont il vient d'être saisi.

Plans et documents du chemin de fer de l'Est.*

Le plénipotentiaire allemand rappelle la demande qu'il a faite pour la remise des plans et documents relatifs aux terrains possédés par la compagnie de l'Est dans les territoires cédés.

M. de Clercq répond qu'il est à sa connaissance que l'on s'occupe, en France, de rassembler et de transmettre au Gouvernement impérial les pièces dont il s'agit.

(Suivent les signatures.)

No 7. CONFÉRENCE DU 19 OCTOBRE 1871.

Présents, M. de Clercq et M. le comte Uxkull.

Assistaient à la conférence, en qualité de secrétaires, M. Dutreil et M. le baron de Buddenbrock.

Le plénipotentiaire français demande, avant d'ouvrir la discussion, à faire part à son collègue des dispositions conciliantes que le prince de Bismarck a manifestées à Berlin dans le cours des négociations qui viennent d'y avoir lieu, à l'égard de la solution des questions qui se

traitent à Francfort, et du désir qu'il a émis de voir résolues le plus promptement possible les difficultés qui arrêtent encore la conclusion du Traité additionnel de paix. Il est heureux de pouvoir se rendre l'interprète de la satisfaction que son Gouvernement a éprouvée lorqu'il a été informé des intentions du chancelier de l'Empire,

Chemins de fer séquestrés pendant la guerre.

M. de Clercq donne ensuite lecture d'une note relative aux chemins de fer français séquestrés pendant la guerre.

Le plénipotentiaire allemand présente quelques observations sur la partie de cette note dans laquelle la restitution du matériel roulant séquestré est réclamée; il fait observer, sans vouloir toutefois entrer dans le fond de la question, qu'il serait utile de désigner quelles sont les Compagnies allemandes qui détiennent le matériel français ; que le Gouvernement fédéral n'est pas en mesure de fournir des indications, et que même sur le territoire de l'Empire, les wagons appartenant aux Compagnies des différents États allemands sont encore mélangés par suite des transports inusités-pendant la guerre.

Le plénipotentiaire français répond que l'administration allemande est seule responsable d'une prise de possession opérée en son nom par les autorités militaires allemandes, et que d'ailleurs il est impossible aux Compagnies françaises de faire rechercher par leurs agents les wagons ou locomotives qui ont été emmenés hors de la frontière.

Le plénipotentiaire allemand présente également quelques observations sur la liquidation des comptes des compagnies séquestrées ; il exprime l'opinion que le principe de la liquidation a été formulé dans la Convention de Ferrières et qu'il lui parait superflu d'y revenir.

Le plénipotentiaire français expose que la Convention de Ferrières s'est bornée à énoncer un principe général, en réservant aux négociateurs de Bruxelles et de Francfort le soin de déterminer d'une manière précise les différents cas dans lesquels il devra être appliqué. Il prie son collègue de vouloir bien communiquer à la chancellerie fédérale les considérations développées dans la nouvelle note dont il lui fait en même temps la remise.

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