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MÉTHODIQUE ET COMPLÈTE

DE

t

LA FRANCE

COMPAREE AUX AUTRES GRANDES PUISSANCES DE L'EUROPE

PAR J.-H. SCHNITZLER,

Chevalier de la Légiou-d'Honneur et de l'Ordre de St-Stanislas de Russie;
Membre du conseil d'administration de la Société française de Statistique universelle;
Membre correspondant

de l'Academie imperiale des sciences de Saint-Pétersbourg, de l'lustitut national de Washington
et de la Société courlandaise pour la littérature et les arts.

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PRÉFACE.

Qu'est-ce que la statistique?

Ce qui prouve qu'il n'est pas hors de propos de s'expliquer sur le sens de ce mot, d'origine allemande, c'est un fait récent qu'on nous permettra de commenter brièvement.

Il y a quelques mois à peine, un homme célèbre, en qui, chose rare! à côté d'un grand poëte, il y a eu place pour un orateur politique peut-être plus admirable encore, a jeté aux économistes, du haut de la tribune de la Chambre des députés, ces dédaigneuses paroles:

« J'ai beaucoup étudié l'économie politique en ma vie, bien qu'on ne m'en soupçonne pas, et mes « études sur ce point m'ont appris ce que valent les

«

statistiques. Les prestidigitateurs font leurs tours

<< avec des gobelets, les économistes font leurs théo«ries avec des statistiques.

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Il faut en convenir, cette attaque n'était pas exempte de rudesse; mais, à notre sens, elle regardait uniquement les économistes : les statisticiens, dont nous sommes un des plus humbles, n'avaient point à s'en émouvoir. Dieu nous garde de nous faire l'avocat des statistiques! il n'est rien au monde dont on ait plus abusé, rien dans la science où l'on ait mis moins de critique, plus d'arbitraire, plus de mauvaise foi. Les statistiques, nous les abandonnons à la colère des orateurs dont elles contrarient les opinions; nous savons que plus souvent encore elles sont complaisantes, élastiques, et qu'on en fait au service de tous les partis. D'ailleurs ce mot s'applique à tout le premier venu n'a-t-il pas dans sa poche sa petite statistique de n'importe quoi, statistique des bals champêtres, statistique des coiffeurs de Paris, des omnibus, des coulisses; celui-ci nous en promet une de la peste et du choléra, celui-là, à propos des prix Montyon, fait la statistique de la vertu. Et vous appelez cela de la science, mes très chers confrères? Ce ne peut être votre sérieux, et si le public est incrédule, en conscience, je ne saurais l'en blâmer. Il l'a été en effet, et il en est résulté pour les statisticiens en général,

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bons ou mauvais, un immense discrédit dont ils ne se sont pas encore tout à fait relevés.

Ainsi, en ce qui concerne les statistiques, ces amas de chiffres entassés pêle-mêle au hasard ou alignés suivant les besoins et les convenances du moment, M. de Lamartine avait raison, et, loin de le contredire (en supposant que nous eussions eu ce courage, nous, écrivain obscur, vis-à-vis d'une de nos plus hautes célébrités littéraires), nous n'aurions sité, au contraire, à nous ranger à son avis.

pas

Restait le trait décoché aux économistes. Sans doute, on pouvait le ramasser et le renvoyer aux assaillants; mais, au fait, était-ce notre affaire à nous? Ces économistes, seuls attaqués, n'avaient pas besoin de nous pour se défendre; d'eux-mêmes ils ont immédiatement relevé ce qu'il y avait d'acerbe et d'injuste dans l'attaque: leur réponse, empreinte d'une politesse qui ne nuit pas même à la meilleure des causes, était ferme néanmoins et telle qu'on devait l'attendre d'un de leurs chefs d'école les plus estimés. Aussi ne manqua-t-elle pas son but : des deux camps on se tendit la main, et la paix fut conclue.

Mais les frais de la guerre, qui les paya? qui fut la victime immolée sur l'autel de la paix ? Ce furent les statisticiens. Écoutez plutôt la réparation faite à M. Blanqui par l'illustre poëte : « Pardonnez-moi,

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