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acquérir force de chose jugée séparément de la disposition principale d'où elle derivait par voie de conséquence. En effet, une fois qu'il y a une décision rendue sur l'objet principal du litige, il n'échet plus de provoquer une nouvelle contestation, soit sur les fruits, soit sur les dommages-intérêts, soit sur les dépens.Post absolutum dimissumque judicium, nefas est litem alteram consurgere ex litis primæ materiá (L. 3, C., De fructibus et litium expensis). — La demande en dommages-intérêts est essentiellement inhérente à la demande principale; celle-ci étant une fois inNec enim duæ sunt actentée, on n'en peut séparer l'autre. tiones, alia sortis, alia usurarum, sed una, ex quá condemnatione facta, iteratè actio rei judicate exceptione repellitur (L. 4, C., Depositi vel contrà. V. sur ce point vis Arbitrage, no 466, et Cautionn., no 95 et 104 s.; V. aussi vo Accessoire.)-Néanmoins, de ce qu'un décret du gouvernement a réintégré une société charbonnière dans la possession de ses anciennes limites, résulte-t-il de

prétendu droit d'en appeler serait inconciliable avec la déchéance d'appeler de celui du 10 juill. précédent; - Reçoit les mariés Mazières opposants, pour la forme seulement, envers l'arrêt rendu le 25 janvier. Du 13 mars 1833.-C. de Bordeaux, 4o ch.

(1) (Soc. de Marimont C. Hestre, etc.)-LA COUR; - Attendu qu'une demande en dommages-intérêts n'était pas même enveloppée dans la requête présentée au roi; qu'ainsi, il ne peut y avoir chose jugée à cet égard; que, d'ailleurs, dans la supposition même que l'on pût considérer la demande faite par-devant le conseil d'État comme ayant eu lieu devant sa majesté et que l'arrêté du 1er nov. 1814 eût vivifié le décret de Paris du 21 fév. 1814, il deviendrait évident, en rapprochant les motifs des dispositions qu'il renferme entre la société intimée et la société appelante, qu'il n'a statué qu'au possessoire; que la demande en dommages-intérêts formée par la société contre l'intimé était subordonnée à la réclamation de la propriété des portions de terrain ci-dessus mentionnées, qui étaient .comprise dans l'action en fixaction des limites, nommée en droit romain finium regundorum; d'où il suit qu'en renvoyant cette question de propriété devant les tribunaux, le conseil d'État a aussi renvoyé, par une conséquence nécessaire, la demande en dommages-intérêts, en tant qu'elle était accessoire à cette même question de propriété; que les lois romaines citées ne trouvent pas leur application dans l'espèce; - Confirme. Du 22 fév. 1816.-C. de Bruxelles, 2 ch.

(2) Espèce :-(Bardot C. Moreau.) — En 1807, le sieur Juillet prend une inscription sur Derain. Celui-ci en conteste le montant et en demande la radiation. Le 29 déc. 1819, jugement qui maintient l'inscription, sauf En 1821, à la réduire par suite du compte à faire entre les parties. Moreau, créancier inscrit sur Derain, intervient dans cette instance, soutenant que la créance de Juillet est simulée et frauduleuse à l'égard des créanciers. Le 8 juin 1822, jugement qui déclare Derain et Moreau non recevables et mal fondés dans leurs demandes et exceptions, et liquide la créance de Juillet. - Appel par Derain, qui bientôt s'en désiste. Moreau a aussi interjeté appel. En cet état, Derain vend ses immeubles. Un ordre est ouvert entre les créanciers inscrits. La collocation de Juillet, représenté par Bardot, est réglée par un jugement du 24 juill. 1823, qui passe en force de chose jugée. Moreau donne suite à son appel. Pour le désintéresser, Bardot se désiste, à son égard, du bénéfice du jugement de 1822, et consent à être primé par lui dans l'ordre de collocation définitive. Moreau refuse ce désistement et conclut à des dommages-intérêts pour l'exécution déjà donnée au jugement de 1822. Derain, qui s'était désisté de son appel du même jugement, intervient sur l'appel de Moreau, et demande tous les dépens auxquels il avait été condamné.

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19 mars 1831, arrêt de la cour de Dijon, ainsi conçu :- « Considérant que le désistement d'appel signifié, le 9 mars dernier, à Moreau, de la part de Bardot, est insuffisant, en ce qu'il ne répare pas le préjudice causé à Moreau, par l'exécution, de la part de Bardot, du jugement même dont il se départ; que, soit par le désistement, soit par les faits de la cause et la correspondance, il est suffisamment établi que le jugement dont est appel n'a eu lieu que par le résultat d'un concert frauduleux entre les parties, qui ne peut être sanctionné par la justice, maintenant que les faits sont connus; que la demande incidente de Moreau, en réparation d'un préjudice, est parfaitement fondée en droit sur l'art. 464 c. pr. civ.; que, dès lors, elle est recevable...; Considérant que la cause, au fond, ❘ n'étant pas terminée, on ne peut encore prononcer sur la demande en renvoi de Derain, non plus que sur les dépens; Sans s'arrêter au désisteFaisant droit à l'appellation ment de Bardot, le déclare insuffisant; interjetée par Moreau, du jugement rendu en la cause, le 8 juin 1822, met icelle et ce dont est appel au néant; et, par nouveau jugement, sans s'arrêter aux demandes et conclusions de Bardot, en première instance, non plus qu'au compte présenté par Juillet et Bardot, rejette lesdites demandes et conclusions, ainsi que ledit compte, et déclare ce compte non opposable à Moreau en qualité de créancier de Derain; déclare recevable la demande en dommages-intérêts formée par Moreau, et, avant de statuer au fond, ainsi que sur la demande de Derain, renvoie la cause, etc. »

ce décret, rendu en matière contentieuse, une exception de chose jugée à l'égard des dommages-intérêts sur lesquels il n'est pas statué? La négative a été consacrée par un arrêt de la cour do Bruxelles, du 22 fév. 1816 (1).

340. Au reste, il a été jugé que le jugement qui valide une saisie-arrêt sur les revenus d'une femme normande ne frappe que les revenus ameublis au jour de sa prononciation, de sorte qu'il ne peut y avoir autorité de chose jugée pour les revenus à échoir (Req., 8 mars 1832, aff. Chanu, vo Contr. de mar.).

341. Dans ce même ordre d'idées, il a été jugé: 1o que l'autorité de la chose jugée acquise contre les parties principales ne l'est pas par cela seul à l'égard des parties intervenantes ayant un intérêt distinct; celles-ci peuvent toujours appeler du jugement qui n'a point acquis cette autorité à leur égard (Req., 13 nov. 1833 (2), V. Appel, no 439 et suiv.); — 2o Que la chose jugée, quant à une question de compétence, s'oppose à ce que la

Le 21 mai suivant, second arrêt ainsi conçu : « Considérant que la conduite de Bardot, lors des collocations à l'ordre des biens de Derain, ayant porté préjudice à Moreau, ainsi que cela a été jugé par arrêt du 19 mars dernier, il en résulte que des dommages-intérêts sont dus par Bardot à Moreau et qu'ils doivent être de la valeur de l'éviction qu'a éprouvée ce dernier; qu'aucune des parties ne s'oppose à l'adjudication des conclusions de Derain; - Que la partie qui succombe doit supporter les dépens; - Faisant droit sur la demande en dommages-intérêts formée par Moreau contre Bardot, condamne ledit Bardot à payer audit Moreau la somme de 7,962 fr. 47 c., avec intérêts de ladite somme à dater du 50 juill. 1829, jour de la collocation; déclare le présent arrêt commun avec Derain; condamne Bardot en tous les dépens des causes principale et d'appel envers toutes les parties. >>

reau;

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Pourvoi par Bardot. On soutient, pour lui: 1o que Moreau n'était intervenu en première instance que comme partie jointe à la partie principale; que jugement ayant acquis force de chose jugée à l'égard de celle-ci, l'intervention, qui n'était que l'accessoire de l'instance principale, avait péri avec elle; que le pouvoir de la cour était restreint à la simple révision des jugements de première instance susceptibles d'appel; que, dans l'espèce, non-seulement le jugement n'était point attaquable par cette voie, mais encore que l'appel n'avait eu pour but qu'une demande nouvelle en dommages-intérêts par une partie personnellement étrangère à la première contestation; qu'ainsi, lors même qu'il eût été recevable, la cour était incompétente pour juger la demande nouvelle de l'intervenant Mo2° Que la cour n'avait pu déclarer dommageable pour Moreau, la collocation de Bardot qui n'était que l'exercice d'un droit légitime et incontestable, puisqu'en supprimant même l'effet du jugement attaqué, celui de 1819 subsistait toujours et maintenait l'effet des inscriptions jusqu'à l'apurement nouveau du compte qu'elle garantissait, et qui seul pouvait établir si Moreau avait en effet souffert un préjudice; que, sous un autre rapport, la cour était incompétente pour statuer sur ces diverses contestations qui, par leur nature, n'étaient que des contestations sur ordre soumises à des règles particulières, et qui devaient être portées devant les juges saisis de l'ordre; - 3° Enfin, que la cour avait violé l'autorité de la chose jugée, en condamnant Bardot aux dépens de première instance, lorsque, par jugement passé en force de chose jugée, ils avaient été mis à la charge de Derain qui y avait acquiescé. Arrêt.

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LA COUR; Statuant sur le premier moyen, tiré d'un excès de pouvoir, de la violation des art. 339 et 340 c. pr., et de la loi du 24 août 1790; de la violation de l'autorité de la chose jugée et de la fausse application de l'art. 464 c. pr.: Attendu qu'il est constaté, par l'arrêt, que le jugement du 8 juin 1822 n'avait pas acquis l'autorité de la chose jugée à l'égard du sieur Moreau; qu'appelant de ce jugement, et soutenant qu'il était le résultat d'un concert frauduleux, le sieur Moreau a pu demander la réparation d'un préjudice, à lui causé, pendant le cours de l'instance; qu'ainsi, sa demande était une défense à l'action principale;

Sur le deuxième moyen, tiré de l'incompétence, de la violation de l'art. 1350 c. civ., no 4; de la fausse application de l'art. 1382 même code; de la violation des art. 750 et suiv. c. pr. :- Attendu que la cour, en déclarant que le désistement donné par le demandeur était insuffisant et ne réparait pas le préjudice porté au sieur Moreau, n'a fait qu'une juste application de l'art. 1382 c. civ.;

Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l'autorité de la chose jugée et des art. 1350 et 1351 c. civ., en ce que le demandeur a été condamné en tous les dépens des causes principale et d'appel envers toutes les parties: Attendu qu'il est constaté par l'arrêt, que devant la cour royale le sieur Derain était demandeur incident; qu'il demandait à être renvoyé de l'instance d'appel avec dépens, et que ses conclusions ne furent contestées par aucune des parties; Attendu, enfin, que le demandeur succombant sur l'appel, a pu être valablement condamné, par la cour, aux dépens des causes principale et d'appel; - Rejette, etc.

Du 13 nov. 1833.-C. C., ch. req.-MM. Zangiacomi, pr.-Jaubert, rap,Tarbé, av. gén., c. conf.-Desclaux, av.

même question soit jugée par un second jugement, en même temps que le fond (Rej., 25 juill.1836, V. n°100-2°);-3° Que le jugement confirmé en appel qui, sur la demande du saisi, tendant: 1° à la nullité du titre, et 2° à l'annulation de tous actes de poursuite faits en vertu de ce titre (sans préciser aucun moyen spécial contre eux), valide en même temps, soit le titre, soit les actes de poursuite, doit être réputé avoir acquis l'autorité de la chose jugée relativement à la validité de ces actes, alors que cette validité était l'objet d'une question distincte, posée au tribunal, et que le défendeur y concluait formellement (Rej., 14 août 1838) (1).

$3.

Cas où il y a lieu à interpréter les jugements passés en force de chose jugée. — Obscurité. · · Ambiguïté.

342. Est-ce violer la chose jugée que d'interpréter un jugement? Il est clair que lorsqu'une disposition d'un jugement ou d'un arrêt est conçue en des termes qui peuvent donner lieu à des doutes raisonnables, la décision qui l'interprète ne saurait être considérée comme une violation de la chose jugée (Req., 5 avril 1832, aff. Gémond, V. Contrat de mariage).

343. Il a été jugé, en effet, que la voie d'interprétation d'un arrêt par les juges qui l'ont rendu n'a point été abrogée par l'ordonn. de 1667 qui n'a aboli que la proposition d'erreur, ni par la déclaration du 21 avril 1671 qui, en prohibant l'abus qui consistait à rétracter les arrêts sous prétexte de les interpréter, confirmait au lieu de détruire la faculté de les interpréter sans les rétracter (Rej., 4 mars 1808, aff. veuve Hery, V. Jugement).— C'est aussi ce qui est admis pour les transactions, lesquelles, comme on le sait, ont de l'affinité avec les principes de la chose jugée (V. Transaction). - Il suit donc de là que les tribunaux peuvent interpréter leurs jugements, pourvu que les termes en

(1) (Biron C. Plinguet.) — La cour (ap. délib.); — Attendu qu'à l'époque de la demande formée par les frères Biron, toutes les procédures existaient pour parvenir à l'adjudication préparatoire; qu'elles avaient été bien connues des demandeurs et qu'ils n'ont cependant élevé contre elles aucun moyen de nullité, et n'ont même fait aucune réserve à ce sujet; Attendu, d'ailleurs, que les frères Biron, après avoir soutenu d'abord qu'ils avaient payé leur dette, et ensuite qu'ils n'avaient pas reçu la somme prêtée, avaient conclu ensuite à la nullité du commandement du 9 avril 1831 et de tous autres exploits, sommations et commandements jusqu'à ce jour (celui de la signification), et à ce que le tribunal déclarât nuls, tant le susdit commandement que tous actes de poursuite qui auraient pu ou pourraient suivre: Que Plinguet concluait, de son côté, à ce que le tribunal déclarât valides les poursuites faites jusqu'à ce jour; que trois questions furent posées dans le jugement (depuis confirmé par arrêt); que la troisième question était celle-ci : « Si le commandement du 9 avril 1831, ainsi que tous les autres commandements, ou autres actes de poursuites, seront validés; » que, sur la contestation ainsi liée, le jugement du 30 août 1831 (confirmé depuis par l'arrêt du 26 mai 1832) déclara valables les poursuites faites par Plinguet, en exécution de l'acte, et ordonna qu'il serait passé outre; Que, dans cet état de choses, d'un côté les frères Biron étaient non recevables à demander la nullité des procédures, lors même qu'ils auraient employé d'autres moyens; - Que, de l'autre côté, l'arrêt a jugé conformément à l'art. 1351 du code, en décidant qu'il y avait chose jugée par l'arrêt de 1832, qui avait rejeté la demande en nullité des poursuites et ordonné qu'il serait passé outre; D'où il suit qu'il n'y a point, dans l'espèce, violation de l'art. 173 c. pr., et que l'arrêt a fait une juste application de l'art. 1551 c. civ.;-Rejette. Du 14 août 1858.-C. C., ch. civ.-MM. Portalis, 1er pr.-Bonnet, rap.Laplagne-Barris, 1er av. gén., c. conf.-Ledru-Rollin et Scribe, av.

(2) Espèce:(Hérit. Lieutaud C. hérit. Guillot.-Lieutaud et Lambarine étaient en instance avec Guillot pour le payement de différentes sommes. En 1820, toutes les parties étant décédées, l'instance fut reprise par leurs héritiers; et, par jugement du 11 août 1820, les héritiers Lieutaud et Lambarine furent condamnés, conjointement et solidairement, à payer aux héritiers Guillot 15,179 fr. Ce jugement reçut sa complète exécution; mais une nouvelle contestation s'éleva bientôt entre les parties au sujet de l'exécution du jugement; elle portait principalement sur le point de savoir si les héritiers Lieutaud devaient chacun payer solidairement le montant des condamnations portées au jugement du 11 août 1820.- Le 19 fév. 1824, jugement qui, attendu que les héritiers Lieutaud et Lambarine ont déjà été condamnés solidairement entre eux, les condamne de nouveau à payer tous et chacun la somme de 13,179 fr., sauf la déduction de ce qui aurait été payé.

Sur l'appel, arrêt confirmatif de la cour de Bourges, du 3 janv. 1827, en ces termes : « Considérant....., sur la troisième question, qu'à la véTOME VIIL

soient obscurs ou ambigus: c'est là la condition absolue de l'extraordinaire mission qu'on leur reconnaît (Conf. Besançon, 7 janv. 1818, aff. N....; Amiens, 24 août 1825, aff. Choquet, V. Jugement).-Lors donc qu'on décide que les juges peuvent interpréter leurs décisions et rectifier les qualités des parties (Rennes, 9 mars 1813, aff. N..., V. n° 234), comme aussi accorder des dommages-intérêts à la partie dont les qualités ont dû être rectifiées, on va évidemment trop loin. Le pouvoir du juge ne peut s'exercer de nouveau qu'autant qu'il y a ambiguïté ou erreur matérielle échappée à l'inadvertance et se rectifiant en quelque sorte d'elle-même (V. no 384 ). Aussi les arrêts des cours de Besançon et d'Amiens qu'on vient de citer, ont-ils posé avec raison le principe que le droit d'interprétation pour les cas douteux ou obscurs ne doit être accordé qu'à la condition que la sentence ne sera ni modifiée ni changée.

344. Il a aussi été décidé: 1° que le jugement qui, interprétant une décision précédente passée en force de chose jugée, lui attribue un sens qu'elle n'a pas nécessairement, et qu'elle ne pourrait avoir sans violer la loi, encourt par là la cassation. Ainsi, par exemple, la condamnation prononcée solidairement contre les héritiers de deux parties ayant le même intérêt, doit être entendue en ce sens, que la solidarité n'existe qu'entre chaque branche d'héritiers, et non entre les individus dont chaque branche est composée; et l'arrêt qui, se fondant sur cette condamnation passée en force de chose jugée, déclare qu'il en résulte une solidarité entre ces derniers, doit être cassé comme violant les art. 870 et 873 c. civ., relatifs à la division des dettes entre héritiers, et l'art. 1351, sur l'autorité de la chose jugée........; l'on dirait en vain qu'il n'ya là qu'une simple interprétation de la première condamnation, irrefragable devant la cour de cassation (Cass., 5 juill. 1831) (2);— 2° Q'une cour royale ne peut, sous le prétexte rité les héritiers des deux débiteurs solidaires ne peuvent être poursuivis que pour leur part et portion; mais que ce même jugement de 1820 condamne les héritiers Lieutaud et Lambarine solidairement au payement; qu'il est définitif, sans appel dans un temps utile, et qu'au surplus il y a acquiescement; Par ces motifs, confirme. »

Pourvoi par les héritiers Lieutaud pour violation des art. 870 et 873 et fausse application des art. 1350 et 1351 c. civ.-Il est bien clair, d'après les art. 870 et 873, a-t-on dit, que les héritiers d'un individu ne sont tenus des dettes de la succession que dans la proportion dans laquelle ils viennent y prendre part: « Les cohéritiers contribuent entre eux au payement des dettes, porte l'art. 870, chacun dans la proportion de ce qu'il y prend; ils sont tenus des dettes et charges, porte l'art. 873..... pour leur part et portion virile. » — Nulle part on ne trouve de dispositions contraires à celles-là; nulle part on ne voit que les héritiers soient tenus solidairement des dettes de leur auteur. Cependant la cour de Bourges le décide ainsi; elle a donc violé les art. 870 et 873. Elle motive sa décision sur ce qu'il y a chose jugée à cet égard par le jugement du 11 août 1820; mais elle commet en cela une erreur, et viole en outre les art. 1350 et 1351 c. civ. En effet, le jugement du 11 août 1820 ne décide pas que tous les héritiers Lieutaud seront tenus solidairement entre eux au payement des condamnations qu'il prononce; il décide seulement que les héritiers Lieutaud tous ensemble, d'un côté, et les héritiers Lambarine tous ensemble, de l'autre, seront tenus de payer conjointement et solidairement les condamnations de ce jugement, parce que les sieurs Lieutaud et Lambarine, leurs auteurs, étaient engagés solidairement entre eux par leur acte d'acquisition. Ainsi, c'est par une fausse application de la chose jugée que l'arrêt attaqué a violé les art. 870 et 873 c. civ.

Les défendeurs (les héritiers Guillot) ont répondu que la cour de Bourges ayant décidé, en interprétant un jugement, que les héritiers Lieutaud avaient été condamnés, chacun solidairement, au payement des condamnations, et ayant décidé qu'il y avait chose jugée et acquiescement à ce jugement, sa décision échappait à toute censure.- - Arrêt.

LA COUR; - Vu les art. 870, 873, 1350 et 1351 c. civ.; Attendu que les art. 870 et 873 c. civ. veulent que les héritiers ne répondent des dettes de la succession que chacun en droit soi et pour leur part et portion; qu'un jugement, conforme à ces dispositions de la loi, avait été rendu, le 11 août 1820, entre les héritiers Lieutaud et les héritiers Guillot, et qu'il n'en avait point été appelé dans le délai fixé par la loi; qu'il avait, dès lors, acquis l'autorité de la chose jugée; qu'au contraire, par l'arrêt attaqué, la cour royale de Bourges a prononcé la solidarité des héritiers Lieutaud, et a décidé qu'ils devaient, solidairement et chacun pour le tout, la totalité des dettes réclamées par les héritiers Guillot; - Qu'en co faisant, la cour royale de Bourges à expressément violé les dispositions des art. 870 et 873 et des art. 1350 et 1351 c. civ. précités; - Casse.

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Du 5 juill. 1831.-C. C., ch. civ.-MM. Portalis, 1er pr.-Chardel, rap.Nicod, av. gén., c. conf.-Piet, Lanvin et Guény, av. 46

d'interpréter un de ses arrêts, changer ou modifier la position que cet arrêt a faite aux parties respectivement. Spécialement, lorsqu'un arrêt, passé en force de chosé jugée, a décidé que les cessionnaires d'un adjudicataire de travaux publics seront payés par préférence sur le prix de l'entreprise de certains ouvrages, tandis que des sous-adjudicataires ne seront payés que sur le prix d'ouvrages différents, ajoutant qu'en cas d'insuffisance de fonds toutes les parties viendraient, par contribution, sur les sommes dues à l'entrepreneur, sans distinction, un second arrêt, statuant par voie d'interprétation du premier, ne peut ordonner que la totalité desdites sommes sera répartie entre les sous-adjudicataires, à l'exclusion des cessionnaires, sous le prétexte que ceux-ci ne peuvent avoir plus de droits que leur cédant qui n'en aurait aucun (Cass., 1er mars 1842) (1);—3° Que les

(1) Espèce: - (Dame de Polereski C. Maury et consorts.) - En 1820, les travaux de construction de la salle de spectacle de la ville du Havre furent adjugés au sieur Maury, qui se substitua le sieur Neveu, en gardant seulement pour son compte, en vertu d'un sous-traité, les travaux de charpente. Neveu, entrepreneur général, fit des sous-traités successifs, avec divers ouvriers, pour des travaux de serrurerie et autres; il ne resta spécialement chargé que des travaux de maçonnerie et de menuiserie. En 1822 et 1823, par deux transports signifiés à la ville du Havre, Neveu transporta au sieur Bazire une somme totale de 112,000 fr. à prendre sur ce qui pourrait être dû au cédant, par la ville, pour les travaux de maçonnerie et menuiserie. Bazire céda à la comtesse de Polereski, qui signifia cette sous-cession à la ville, une somme de 30,000 fr. sur le montant des délégations qui lui avaient été faites. - Le sieur Neveu étant décédé en 1826, ses héritiers bénéficiaires ont formé une demande, tant contre les concessionnaires que contre divers soustraitants qui avaient formé opposition entre les mains du maire, à l'effet de procéder à la distribution des sommes dues par la ville à Neveu. Un jugement du tribunal de la Seine, du 27 avril 1827, ordonne que le sieur Bazire et la dame de Polereski seront payés par préférence à tous autres, attendu qu'ils ont signifié leurs transports avant toute opposition.

Sur l'appel, un arrêt infirmatif de la cour royale de Paris, du 19 janv. 1828, a ordonné que la somme encore due par la ville du Havre serait répartie, tant entre les délégataires de Neveu qu'entre les ouvriers sousadjudicataires, et par préférence aux autres créanciers personnels de Neveu, savoir: aux délégataires, jusqu'à concurrence seulement de ce qui restait dû pour les travaux de maçonnerie et de menuiserie faits personnellement par Neveu, et aux sous-adjudicataires, pour ce qui pourrait leur rester dû sur le montant de leurs travaux et fournitures; et, en cas d'insuffisance des deniers pour le payement intégral desdites créances, a ordonné qu'il serait procédé entre les cessionnaires et les sous-adjudicataires à la distribution de la somme par contribution. - Un arrêt de la cour royale de Rouen, du 8 mars 1836, a réglé la dette de la ville du Havre, et en a fixé le montant à 769,169 fr. 81 cent. Le sieur Neveu avait reçu 728,515 fr. 29 c. comme entrepreneur général : la ville ne devait donc plus que 41,351 fr. 87 c. Dans ce solde, le sieur Neveu figure pour 29,696 fr. 77 c., à raison des travaux de maçonnerie et de menuiserie. Les sieurs Maury et autres sous-traitants, se fondant sur ce que Neveu ne leur aurait pas tenu compte de la totalité des sommes qu'il avait touchées pour eux, ont formé, en novembre 1856, devant le tribunal de la Seine, une demande ayant pour but de se faire attribuer la totalité du solde de 41,351 fr. 87 c. Ce tribunal a renvoyé les parties à compter devant la chambre des avoués, qui a pensé que les prétentions des soustraitants étaient fondées. C'est alors que la dame de Polereski s'est pourvue devant la cour royale de Paris à fin d'interprétation de son arrêt du 19 janv. 1828, prétendant qu'aux termes de cet arrêt, elle avait seule droit au prix des travaux de maçonnerie et menuiserie s'élevant à 29,696 fr. 77 c.

24 juillet 1838, arrêt de cette cour qui déboute la dame de Polereski de sa demande; en conséquence, fait mainlevée des significations de cessions et de rétrocessions faites ès mains de la ville du Havre; ordonne que les sommes en principal et intérêts, dues par la ville du Havre, seront versées és mains des intimés (les sous-traitants) pour être réparties entre eux.- Voici les motifs de cet arrêt: « Considérant que l'arrêt de 1828 a posé en principe que les délégataires n'ayant pas plus de droits que le cédant, les délégations n'ont pu les saisir que de la portion de fonds qui pouvait appartenir a Neveu pour les travaux qu'il s'était réservés, et non de ceux qui revenaient aux sous-entrepreneurs, lesquels étaient considérés comme adjudicataires et seuls responsables des travaux dont ils étaient chargés; qu'il suit de là que si, dans l'ensemble des comptes relatifs aux travaux de la salle du Havre, il a été reconnu qu'il n'était rien dû à Neveu pour les travaux qu'il s'était réservés, les délégataires n'avaient plus aucun droit sur les sommes restant dues, lesquelles devaient être attribuées aux sous-entrepreneurs, qu'il importe peu que, dans les calculs faits par les experts, on ait attribué une somme de 29,000 fr. pour les travaux de maçonnerie et de menuiserie, puisque Neveu avait

chargeurs qui ont réclamé leur cargaison comme n'étant pas contrebande de guerre, ne sont pas recevables, parce que leurs conclusions sont visées dans l'ordonnance qui a validé la prise, sans aucune exception ni restriction, à prétendre qu'il y a omission, et à demander par voie d'interprétation, ce qui leur a été implicitement et virtuellement refusé par une première décision contradictoire (Cons. d'Ét., 25 mars 1830) (2).

345. Mais le droit existe à l'égard des jugements émanés de toutes les juridictions.Il y a toutefois cette différence entre les juridictions temporaires ou passagères comme celles des arbitres ou du jury, ne matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, et les tribunaux ordinaires, que l'interprétation ne peut leur être demandée dès qu'elles ont rendu leur sentence ou leur verdict: c'est aux tribunaux ordinaires qu'on doit s'a

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déjà reçu des sommes qui ne lui appartenaient pas, et devaient être attribuées aux sous-entrepreneurs. » — Pourvoi de la dame de Polereski, pour violation de la chose jugée. Arrêt (après délib. ). LA COUR; Vu les art. 1350 et 1351 c. civ.; Attendu que, par son arrêt du 19 janv. 1828, rendu sur l'appel d'un jugement du 27 avril précédent (qui avait ordonné que Bazire et la comtesse de Polèreski seraient payés par préférence du montant de leurs délégations), la cour royale de Paris décida, en infirmant, que les sommes restant dues pour la construction de la salle de spectacle du Havre seraient réparties entre les délégataires de l'adjudicataire des travaux et les ouvriers sous-adjudicataires, à savoir aux délégataires jusqu'à concurrence de ce qui pouvait être dû sur les travaux de maçonnerie et de menuiserie faits par l'adjudicataire Neveu, leur cédant, et aux sous-adjudicataires jusqu'à concurrence de ce qui pouvait leur rester dû sur les travaux et fournitures à leur charge, et qu'en cas d'insuffisance des deniers, il serait procédé, par contribution, entre les délégataires, d'une part, et les sous-adjudicataires, de l'autre; que le pourvoi en cassation contre cet arrêt a été rejeté; -Attendu qu'un arrêt de la cour de Rouen, du 8 mars 1856, a fixé à 769,169 fr. 81 c. la somme totale due par la ville du Havre, pour la construction. de la salle de spectacle, dont 41,351 fr. 87 c. restaient encore à payer; que, sur cette somme, 29,696 fr. 67 c. étaient dus à Neveu pour travaux de maçonnerie et de menuiserie; que les 11,655 fr. 20 c. qui restaient, devaient, aux termes de l'arrêt de Paris, du 19 janv. 1828, être alloués aux sous-adjudicataires; que ceux-ci prétendirent cependant qu'ils avaient droit à la somme totale de 41,351 fr. 87 c.; Que, sur cette demande par eux introduite devant le tribunal de première instance de la Seine, les parties furent renvoyées devant la chambre des avoués pour compter et se concilier, s'il se pouvait; Que cette chambre donna un avis favorable à la demande des sous-adjudicataires; que le sens de l'arrêt de la cour royale de Paris, du 19 janv. 1828, paraissant à la demanderesse avoir été méconnu, elle se pourvut en interprétation de cet arrêt devant la cour qui l'avait rendu; Attendu que cette cour, au lieu de procéder par voie d'interprétation et de maintenir les dispositions de la chose par elle jugée en développant et en expliquant le sens de son précédent arrêt, s'est saisie de questions nouvelles soulevées à l'occasion de l'exécution de cet arrêt, et actuellement pendantes au tribunal de première instance de la Seine, et les a résolues comme si l'arrêt du 19 janv. 1828 n'avait pas décidément fixé la position respective des délégataires et des sous-adjudicataires; qu'en ce faisant, elle a excédé ses pouvoirs et les bornes de sa compétence, et expressément violé la règle du double degré de juridiction et l'autorité de la chose jugée irrévocablement, et, par suite, les lois précitées; Casse.

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Du 1er mars 1842.-C. C., ch. civ.-MM. Portalis, 1er pr.-Piet, rap.Hello, av. gen., c. conf.-Piet et Huet, av.

(2) (Coen-Solal, etc.) — CHARLES, etc.; - Vu la requête à nous présentée, tendant à ce qu'il nous plaise interpréter notre ordonnance du 4 mars 1830, laquelle a déclaré valable la prise du navire sarde la Madonna di Montenoro, arrêté devant Alger au moment où il tentait de violer le blocus de cette place; ce faisant, dire que cette ordonnance a omis de statuer sur les conclusions prises par les requérants, et tendant à demander que, lors même que le navire serait déclaré de bonne prise, les marchandises qui en formaient le chargement, et qui leur appartenaient, leur fussent restituées, attendu qu'elles n'étaient point marchandises de contrebande; En conséquence, réparant ladite omission, prescrire la restitution desdites marchandises aux requérants, et les renvoyer devant qui de droit pour la liquidation des dommages qui leur sont légitimement dus; Vu notre ordonnance du 4 mars 1850; - Considérant que les conclusions présentées devant nous, par les sieurs Coen-Solal et Antinori, en leur qualité de chargeurs, lors de l'instruction de l'affaire relative à la prise du navire la Madonna di Montenoro, sont les mêmes que celles qu'ils reproduisent aujourd'hui; que ces conculsions ont été visées dans notre ordonnance du 4 mars 1830, et que cette ordonnance a déclaré valable, sans restriction ni exception, la prise de ce bâtiment.

Art. 1. La requête des sieurs Coen-Solal et Antinori est rejetéo, etc. Du 25 mars 1830.-Ord. cons. d'Ét.-M. de Rozières, rap.

dresser pour faire expliquer ce qui reste sans signification claire et certaine pour les parties. Et, s'il arrive que le juge auquel on aura demandé cette interprétation, soit incompétent pour la donner, il doit surseoir jusqu'à ce qu'elle ait été fournie par le juge dans les attributions duquel elle rentre, mais non se dessaisir, à moins qu'il ne soit également sans compétence pour juger et le fonds et l'exception préjudicielle. — V. no 60.

346. Ces prémisses posés, il serait nécessaire de tracer quelques règles sur la mission du juge interprétateur. En général, il doit se tenir en deçà plutôt qu'au delà des termes de sa première décision. Cela ne veut pas dire qu'il lui soit loisible de rétracter ce qu'il a accordé; mais, dans le doute, c'est toujours le sens le moins onéreux pour la partie qui succombe qu'il doit adopter; c'est la somme la plus faible qu'il allouera de préférence. Si diversis summis condemnent judices, minimam spectandam esse Julianus scribit (L. 38, § 1, D., De re jud.). Au reste, on n'a pas besoin de faire remarquer que c'est à l'explicatton naturelle que le juge doit s'attacher plutôt qu'à celle qui se laisse découvrir avec difficulté ou à l'aide d'une subtilité logique qui ne résulterait pas ouvertement des motifs ou du dispositif de la décision passée en force de chose jugée. Dans un tel travail, on comprend aussi que les conclusions des parties seront presque toujours consultées avec fruit, car c'est sur elles que le juge est censé avoir basé sa décision, d'après le vieux Brocard Libello conformis debet esse sententia, —Et c'est surtout lorsque les termes d'un jugement sont généraux qu'il est utile d'y recourir en cas pareil, M. Zachariæ, t. 5, p. 756, dit avec raison que, quelque absolus que soient les termes dispositifs d'un jugement, la chose jugée doit, en général, être restreinte au point qui avait fait l'objet des conclusions des parties. C'est en ce sens qu'il a été décidé: 1o qu'une cour d'appel, après avoir déclaré, par un premier arrêt, qu'une société verbale comprenait, vis-à-vis de tous les associés, toutes les spéculations qui avaient eu lieu, et après avoir renvoyé les parties devant des commissaires pour liquider et apurer leur compte, a pu, par un deuxième arrêt, et sur l'avis des commissaires, déclarer que cette société générale se trouvait réduite, à l'égard d'un des associés, à certaines spéculations seulement, faute, par ses coassociés, de justifier qu'il ait pris part aux autres c'est là interpréter un arrêt précédent, mais non violer la chose jugée (Req., 21 août 1810) (1); — 2° Que, bien qu'un jugement passé en force de chose jugée semble appliquer à toutes les communes en cause un seul et même règlement constitutif des mêmes droits d'usage en leur faveur, jugement doit être réputé n'avoir pas préjudicié à un règlement postérieur modifiant le premier, à l'égard de l'une des communes seulement, quant à l'assiette des droits d'usage, alors qu'aucunes conclusions n'ont été prises sur ce point, et que le

(1) Espèce

ce

(Massip C. Dardenne.) Société par convention verbale, entre Massip père et fils, et Dardenne, pour un commerce d'exploitation de bois. - 21 juill. 1787, Dardenne verse dans la société 1o une somme de 15,678; -2° Le 15 janv. 1788, une autre somme de 3,360 fr. Le 18 brum. an 4, Massip père cède à ses deux fils et à Dardenne son intérêt dans l'exploitation d'une forêt. Le prix de la cession, pour la part de Dardenne, fut de 7,000 fr., dont la quittance de Massip porte « qu'il 'a reçue à valoir sur les avances et mises de fonds faites à la société par Dardenne. »- Le 7 fruct. an 6, à la fin de la société, qui n'avait pas té heureuse, Dardenne demande un compte, déclarant qu'il ne s'est pas associé à toutes les opérations de Massip; et il détermine celles auxquelles a pris part. An 11, jugement arbitral qui porte que l'association de Dardenne ne comprend pas effectivement tous les achats et ventes de bois, t condamne Massip à payer à Dardenne 57,557 fr. — Appel.

11 fév. 1806, arrêt de la cour de Toulouse qui infirme et déclare que la société par convention verbale des parties est une société générale, mais Renvoie néanmoins devant des juges commissaires afin d'apurer et de liquider le compte de la société, et de distinguer autant que possible les opération faites pour le compte particulier de Massip d'avec celles de la société. Les commissaires, dans leur rapport, sont d'avis que Massip doit à Dardenne une somme de 43,193 fr., faute par lui de justifier par livres, carnets ou autrement que Dardenne a pris part à certaines opérations désastreuses. -Les parties étant revenues à l'audience;-4 juill. 1809, arrêt définiti qui, vu le rapport des commissaires, réduit la société aux spéculations que Dardenne convient avoir été sociales et qui sont comprises dans son compte. Quant à la somme de 7,000 fr. provenant de la portion de la ces

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jugement ne déclare nullement déroger à ce nouveau règlement, ce qu'il n'aurait pu faire compétemment (Cass., 7 mars 1842, aff. commune de Mesnay, V. Usage).

347. Pour qu'un jugement produise la chose jugée, il n'est pas nécessaire que le droit qu'il reconnaît ait été l'objet direct et principal du jugement (Arg. Cass., 8 avril 1812, aff. Leroy, V. Cassation, no 1509).

De même, quoique les mots sauf à telle partie à exercer ses droits (d'usage), etc., impliquent l'idée d'une simple réserve qui, en général, ne constitue pas la chose jugée, il est cependant des cas où un tel mode de disposer produit la chose jugée (Cass., ch. réun., 15 juill. 1841, aff. com. de Saint-Thiébault, V. Usage, et plus haut n° 87).

Enfin, il paraît inutile de faire remarquer, en présence des décisions recueillies ci-dessus nos 163 et suiv., que la chose jugée peut résulter d'une disposition simplement implicite, pourvu que cette décision soit une suite nécessaire de la disposition expresse. Cette opinion de M. Zachariæ, p. 765, n'est que l'application de l'adage eadem vis taciti ac expressi. C'est ainsi qu'un jugement qui déclare valables des poursuites faites en exécution d'un titre a l'effet de la chose jugée quant à la validité et à l'efficacité de ce titre. Ainsi le jugement qui décide qu'un acte constitue un véritable partage, juge implicitement que ce partage n'est pas simplement provisionnel (Req., 9 mars 1846, aff. Muel, D. P. 46. 1. 285. —V. aussi, nos 335 et suiv,).

348. Lorsque les termes employés dans la décision originaire n'ont pas par eux-même une signification bien déterminée, ou lorsqu'il peut être douteux que le juge ait entendu leur donner un sens qui irait manifestement au delà du juste et du raisonnable, il est nécessaire que les parties forment une nouvelle demande, à l'effet d'obtenir l'explication de ce qui paraît être obscur ou indéterminé. Là, arrive le secours de l'interprétation qui, en général, est demandée au tribunal duquel émane la décision; car il connaît mieux que tout autre le sens qu'il a entendu donner aux expressions dont il s'est servi. Nous allons passer en revue un assez grand nombre d'espèces, dans lesquelles la cour de cassation a reconnu que les juges avaient fait un usage légitime de leur droit d'interprétation. — Il a été jugé, en effet : 1° Que le tribunal qui, après avoir jugé insuffisante la production de l'extrait d'une procuration, ordonne que le mandataire sera tenu de produire l'expédition de l'acte entier, contenant ses prétendus pouvoirs, ne viole pas l'autorité de la chose jugée par cet interlocutoire, en décidant, par un nouveau jugement, que c'était la production de la grosse originale, et non une expédition collationnée de l'acte, qu'il avait entendu ordonner; - « Attendu, porte l'arrêt, que par l'explication donnée à son jugement du 10 fruct. an 13, le tribunal de Pont-l'Évêque a d'autant moins violé l'autorité de la chose par lui jugée, qu'effec

sion faite à Dardenne du droit dans la société de Massip, ordonne qu'il en sera fait compte par le premier, mais seulement la valeur réduite conformément au tableau de la dépréciation du papier-monnaie.

Pourvoi par Massip: 1o violation de l'art. 5, tit. 27 de l'ord. de 1667, 1550 c. civ., 480 c. pr., en ce que le premier arrêt ayant jugé que la société était générale, il y a violation de l'autorité de la chose jugée par le second qui la restreint à certaines opérations seulement; 2° contravention aux art. 1134, 1256, 1291 c. civ., et aux lois sur les transactions contractées pendant la dépréciation du papier-monnaie, en ce que les parties étant convenues que le prix de la cession serait compensé jusqu'à concurrence, avec les mises de fonds de Dardenne dans la société, cette stipulation faisait leur loi. Or c'est en numéraire que les mises de fond avaient été faites, donc le prix de la cession devait se compenser en numéraire et non d'après sa réduction suivant l'échelle de proportion pendant la dépréciation du papier-monnaie. Arrêt.

LA COUR;

- Attendu sur le premier moyen que l'arrêt dénoncé n'a fait autre chose qu'interpréter et fixer le véritable sens de l'arrêt précédent du 11 fév. 1806, ce qui n'est pas violer l'autorité de la chose jugée ;Attendu sur le deuxième moyen, que la cour d'appel ne s'est fondée que sur l'interprétation des conventions des parties, lorsqu'elle a décidé que l'imputation de 7,000 fr. devait être faite sur l'exploitation des forêts de Villeneuve et de Tauriac, et qu'en partant de ce point de fait qu'il s'agissait d'une somme promise pendant la dépréciation du papier-monnaie, l'arrêt dénoncé a fait une juste application à l'espèce des lois de la matière; Rejette.

Du 21 août 1810.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Botton, rap.

tivement, par l'un des considérants, il avait annoncé suffisamment que c'était la première expédition ou la grosse de la procuration dont il entendait ordonner la communication; rejette. » (Req., 31 janv. 1810; M. Rupérou, rap. ; aff. Cottu-Millon C. Chamberlin);-2° Que, lorsque, par un jugement passé en force de chose jugée, un vendeur a été condamné à souffrir l'arpentage du domaine vendu dans les limites et pour la quantité exprimée au contrat, et jusqu'à concurrence d'une étendue déterminée (14 hect. 69 ares 84 cent.), il n'y a pas violation de la chose jugée par ce jugement, dans l'arrêt qui, sur la question de savoir si l'arpentage se fera d'après les anciennes ou les nouvelles mesures, déclare que le jugement n'a rien statué à cet égard (Req., 19 avr. 1810) (1); · 3° Que le prix de la cession de son droit, dans une opération commerciale, faite par un individu à son coassocié pendant la dépréciation du papier, a pu être déclaré réductible suivant sa valeur en assignats, alors même qu'il aurait été stipulé dans la quittance, que ce prix venait en compensation des sommes en numéraire que le coassocié avait versées dans la société (Req., 21 août 1810, aff. Massip, V. n° 347-1o); -4° Que, lorsqu'un arrêt, saisi d'une demande en validité d'offres réelles, se borne à déclarer cette demande fondée, et renvoie les parties à compter, on ne peut pas prétendre qu'il a reconnu par là la suffisance de ces offres : un arrêt postérieur pourra donc, sans violer l'autorité de la chose jugée, rejeter ces mêmes offres comme insuffisantes d'après l'examen du compte (Req., 8 oct. 1810) (2).— 5o Que l'arrêt qui investit un tribunal du droit de statuer sur la suffisance d'offres réelles, est censé l'autoriser virtuellement à fixer le montant de la créance, tellement que ce tribunal, en faisant cette fixation, ne contrevient pas à la chose jugée (Req., 22 fév. 1841, aff. Lafond, V. Oblig.); -6° Que le jugement qui a ordonné la licitation d'un immeuble, sur une mise à prix convenue entre les parties, ne fait pas obstacle à ce que le partage de cet immeuble, demeuré invendu faute d'enchérisseurs, puisse être ultérieurement demandé, si l'intention des parties n'a été de le mettre en vente qu'autant que leur mise à prix serait atteinte ou couverte (Caen, 24 avril 1845, aff. Lechaudey, D. P. 45. 4. 85 ); 7° Que le jugement déclaré commun avec le créancier intervenant, et qui ordonne la liquidation et le partage de la communauté et des successions des époux, simultanément et par un seul et même procès-verbal, ne préjuge rien sur la forme du partage, et ne fait point obstacle à la demande du créancier, tendant à ce que le

(1) Espèce: (Mouchy C. Bertangles.) — Dans l'espèce que retrace la proposition énoncée ci-dessus, un arrêt de la cour de Rouen du 7 janv. 1809 avait ordonné qu'il serait sursis à l'arpentage jusqu'à ce qu'il eût été statué sur la contenance à délivrer, le jugement ne contenant qu'une simple énonciation et non une décision sur la question de mesure. — Pourvoi par Mouchy violation de l'autorité de la chose jugée, en ce que le jugement acquicscé par le payement des frais et non attaqué par l'appel, avait formellement décidé que le vendar serait tenu de souffrir l'arpentage jusqu'à concurrence de 14 hect. 69 ares 84 cent. - Arrêt. LA COUR; Attendu 1° sur le premier moyen qu'en interprétant, comme elle en avait le droit, le jugement rendu par le tribunal des Andelys le 11 fév. 1806, la cour d'appel de Rouen n'a point violé l'autorité de la chose jugée; - Rejette.

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Du 19 avril 1810.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Minier, rap.

(2) (Alliette et cons. C. Damileville.) — La cour ; - Considérant sur le premier moyen, que par le jugement du 23 mars 1795, confirmé sur l'appel le 6 brum. an 2, les offres des héritiers du sieur Leferon n'ont pas été déclarées entières et suffisantes; - Qu'il a été uniquement décidé par ce jugement que nonobstant l'arrêt d'envoi en possession du 30 mars 1787, les héritiers du sieur Leferon avaient pu faire des offres réelles à la dame Leferon; - Que l'intégrité et la suffisance des offres ont été subordonnées au compte ordonné par ce jugement; Que, par conséquent, la cour dont l'arrêt est attaqué en reconnaissant d'après le compte rendu que les offres étaient insuffisantes, n'a pas violé l'autorité de la chose jugée; - Rejette.

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partage ait lieu distinctement pour la communauté et pour chacune des deux successions (Cass., 31 mars 1846, aff. Michel, D. P. 46. 1. 135); -8° Que l'arrêt interlocutoire qui donne mission à des experts de déterminer la limite du lit d'un fleuve navigable en recherchant la hauteur de ses eaux moyennes, a pu, sans violation de l'autorité de la chose jugée, être interprété dans l'arrêt définitif, en ce sens que les experts ont dû déterminer la plus grande hauteur des eaux livrées à leur cours normal, c'est-à-dire avant d'atteindre les points extrêmes d'étiage ou d'inondation (Req., 9 juill. 1846, aff. Vauchel, D. P. 46. 1. 270).

349. Il a été jugé pareillement : 1o Que l'arrêt qui déclare que le bois mort et chu, qui appartient à des communes désignées, ne comprend pas celui abattu par les orages et les frimas, ne porte point atteinte à une décision irrévocable, qui accorde à ces communes le bois mort et chu, sans autre désignation (Req., 1er juin 1813) (3); 2° Que l'arrêt qui annulle un testament ne fait pas obstacle à ce qu'un arrêt subséquent déclare que cetto nullité ne s'applique qu'aux actes de libéralité y énoncés et non à une constitution de rente viagère, qu'il renferme en faveur d'un créancier de la testatrice, lequel n'a pas voulu exiger le remboursement de sa créance et à qui elle avait promis de faire cette rente par son testament.... alors qu'il apparaît que ce n'est que depuis l'ouverture du testament, et lorsqu'il a su que sa créance y était relatée, qu'il a lacéré le titre originaire de la créance (Req., 19 nov. 1816, aff. Roquelaure, V. Disp. test.);

3° Que la chose jugée par un jugement qui a maintenu une partie dans la possession de terrains litigieux, sauf le bornage après les anciens titres, n'est pas violée par l'arrêt postérieur, qui déclare, par interprétation de ce jugement, que les titres féodaux ne pourront servir à fixer la délimitation (Req., 25 avr. 1822) (4); · 4o Que l'arrêt, qui condamne un légataire universel de l'usufruit de l'immeuble et de la propriété d'un mobilier, à participer aux dettes de la succession, proportionnellement à son legs, ne s'oppose pas à ce qu'un arrêt subséquent déclare que, dans la base de cette participation, n'entre pas le mobilier, lequel est grevé d'une charge à sa valeur (Req., 22 août 1821, aff. Strohl, V. Succession); 5° Que la chose jugée par un premier arrêt qui, sur l'action dirigée contre le gérant de la liquidation d'une société, condamne par corps, tant cette liquidation que son liquidataire, à payer certaine somme, n'est pas violée, mais seulement interprétée, par un second arrêt qui, sur commandement dirigé contre le gérant, déclare que c'est la liquidation, et non le

tants le mort bois, etc...; les motifs de cet arrêt tombent dans une simple interprétation de la sentence de 1467, interprétation qui sort du domaine de la cour; - Rejelle.

Du 1er juin 1813.-C. C., sect. req.-MM. Lasaudade, pr.-Vallée, rap.

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(4) Espèce (Cosme et cons. C. Falguel-Travail.) — Outre la violation de la chose jugée, le demandeur en cassation reprochait à l'arrêt une fausse application des lois abolitives de la féodalité, en ce que la nullité des actes féodaux n'a été établie que dans l'intérêt des individus dépossédés, ou qu'on chercherait à déposséder au moyen de ces titres.- Or, dans le cas particulier, c'est l'hypothèse inverse qui se présente; ce sont les habitants d'une commune qui contestent contre les ayants cause du ci-devant seigneur la propriété de terrain que des actes primordiaux de concession leur ont accordée. Il est évident, d'après l'esprit dans lequel ont été conçues ces lois, que le législateur n'a pas voulu imposer aux communes l'obligation de fournir d'autres titres que ceux qu'on voulait bien leur octroyer pendant ces temps de domination et d'exploitation de la masse par quelques hommes. Arrêt.

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LA COUR; Attendu que la cour de Grenoble, par l'arrêt attaqué, n'a fait qu'interpréter, ainsi qu'elle en avait le droit, le jugement passé en force de chose jugée, rendu en dernier ressort entre les parties par le tribunal de Vaucluse, le 29 frim. an 7, et le mode de l'exécution de ce jugement; que ledit jugement de l'an 7, ayant ordonné purement et simplement une délimitation, conformément aux anciens titres, il n'existe et ne peut exister aucune violation de la chose jugée, dans la disposition de l'arrêt attaqué qui statue sur la question de savoir quels sont les titres qui peuvent être consultés pour cette délimitation; qu'il n'existe non plus aucune fausse application des lois du 28 août 1792 et juin 1793 dans cette disposition dudit arrêt, interprétatif de ceux de ces titres qui peuvent être regardés comme contradictoires entre les parties, et applicables à la délimitation ordonnée par le jugement et consacrée par l'arrêt attaqué; Rejette.

Du 25 avr. 1822.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Lefessier, rap.

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