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manifester le dessein d'expulser des charges. publiques tous les hommes qui ont pris part à la révolution et qui ne l'ont point combattue, quels que soient d'ailleurs et leur mérite et les services qu'ils ont rendus à l'état? Que signifie à côté de pareils actes, qui sont des actes du moment, un stérile et tardif hommage rendu à la constitution? Que peuvent de vains discours contre une semblable réunion de faits, et comment pourraient-ils détruire les justes inquiétudes que ces faits sont de nature à inspirer?

Nous avons déjà fait connaître ailleurs la tactique du parti qu'on peut accuser de vouloir opérer un changement dans nos institutions nouvelles. Pour affaiblir, autant qu'il est en lui, les soupçons que sa conduite imprudente ne cesse d'éveiller, aussitôt qu'on parle de ses projets de révolution, il crie, aux jacobins, aux démagogues, et les défenseurs de la constitution sont traités de révolutionnaires et de désorganisateurs par des factieux qui veulent la détruire. Nous espérons qu'à l'avenir ce manège impudent et grossier n'en imposera plus à personne, personne, et que cet article

ne laissera pas de doute sur la manière dont il convient d'entendre le mot révolutionnaire et d'en faire l'application. Les personnes attachées à nos nouvelles lois sont révolutionnaires, si l'on veut, dans ce sens que ces lois sont une suite de la révolution et en consacrent tous les bons principes. Ils sont aussi révolutionnaires dans ce sens, qu'ils pensent qu'on pourra, dans la suite, corriger ces mêmes lois pour en faire disparaître les défauts qu'une longue expérience y aurait fait découvrir, ou ceux qui seraient nés des progrès du temps. Mais ces révolutionnaires-là sont très-honorables et ne peuvent mériter que des éloges ; tandis que les ennemis de la constitution, les hommes qui tra vaillent à l'affaiblir et à la détruire, et tous ceux qui voudraient renverser l'ordre établi, sont des révolutionnaires qui méritent d'être voués à l'exécration des gens de bien, de véritables factieux dignes des plus rigoureux châtimens. Nous ne devons pas craindre sans doute que ces hommes parviennent jamais à asservir la France; d'assez fortes et d'assez nombreuses considérations peuvent nous

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TOME III.

tranquilliser à cet égard: mais ils peuvent empêcher que les lois ne s'établissent, que les mœurs ne renaissent, et avec elles l'ordre et la tranquillité. Ils peuvent entretenir l'état d'incertitude, d'agitation et d'anxiété dans lequel la nation languit depuis plusieurs mois, et finir peut-être par provoquer de nouvelles crises; nous ne serons, en effet, véritablement à l'abri de toute révolution violente que lorsque le gouvernement aura fait cesser cet état inquiétant, en se ralliant de bonne foi à ses propres institutions, et en travaillant sincèrement à l'affermissement de son ouvrage.

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DU SYSTÈME REPRÉSENTATIF.

L'HOMME est doué des facultés nécessaires pour se perfectionner et pour transmettre aux générations qui viennent après lui les connaissances qu'il a acquises. Ces facultés qui, à la longue, doivent le faire passer par tous les degrés de connaissances possibles, amènent un changement presque continuel dans ses goûts et dans ses habitudes, et s'opposent à ce qu'il soit soumis à des lois cons-tantes et invariables. :

Les lois fondamentales des états, quoique moins sujettes que les autres au changement, sont soumises comme elles à l'influence des besoins et des lumières des peuples. Il n'est point de gouvernement qui, après avoir fait le bonheur de quelques générations, ne fit le désespoir des générations suivantes, si elles n'avaient pas la faculté de le changer. Tous les hommes un peu éclairés désirent aujourd'hui d'être libres, c'est-à-dire, de

n'être soumis qu'à l'autorité des lois; cependant quel est celui qui voudrait voir rentrer les Français dans l'indépendance dont ils jouissaient sous le règne de Clovis, ou qui consentirait à faire les sacrifices continuels qu'exigerait l'établissement et le maintien d'un gouvernement tel que la république Romaine? La liberté qui nous convient n'est donc pas celle qui convenait à nos pères ou aux peuples de l'antiquité.

Des hommes sobres, robustes et vigilans, qui sortent à peine de l'état sauvage, et qui ne connaissent d'autre art que celui de la guerre, peuvent aisément se soumettre à un gouvernement démocratique ; parce qu'un tel gouvernement les éloigne le moins possible de l'état qu'ils abandonnent, et contrarie rarement les habitudes qu'ils ont contractées. Mais si quelqu'un leur proposait de se soumettre au gouvernement absolu d'un seul, et essayait de leur faire entendre que le repos dont on jouit sous les gouvernemens de cette nature est l'état qui leur convient le mieux, il risquerait beaucoup de n'être pas écouté.

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