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M. l'abbé le Hericey, grand-vicaire de Versailles, vient de mourir presque subitement. Il occupoit cette place depuis 1802, et avoit montré dans l'organisation, et ensuite dans l'administration du diocèse, des talens qui justifioient le choix de M. l'évêque, qui lui avoient attiré l'estime.

Vincennes, qui avoit été, il y a dix ans, le théâtre d'un grande iniquité, devoit, ce semble, donner l'exemple d'une réparation éclatante. Aussi on y a célébré, le lundi 16, un service solennel pour le jeune et vertueux Prince, mis à mort en ce lieu d'une manière si barbare. M. le curé de Vincennes a prononcé son oraison funèbre. On sait que cette malheureuse victime de la tyrannie demanda un confesseur, qui lui fut refusé. Elle n'obtint que quelques instans pour se préparer à la mort.

Tous les jours, S. M. reçoit de nouvelles députations qui sont admises à lui être présentées. Elle entend leurs discours avec bonté et intérêt, et y répond avec cette présence d'esprit et cette facilité qui la caractérisent. Elle reçut, le 17 mai, les curés de Paris, et leur dit qu'elle savoit combien leur corps méritoit son estime et sa confiance, et qu'elle leur demandoit le secours de leurs prières pour l'aider à faire le bien. La ville de Blois a témoigné le désir de recouvrer son ancien évêque, M. de Thémines, qui étoit exilé en Angleterre. Le Roi a répondu qu'il verroit ce qu'il pourroit faire à cet égard. Il paroît certain que S. M. s'entendra avec le Pape sur les arrangemens à prendre, et il y a lieu de penser qu'il sera rédigé un nouveau Concordat qui limitera moins le nombre des évêchés, et assurera à la religion plus d'avantages. On prendra sans doute un milieu entre l'ancienne circonscription, qui étoit fort inégale, et qui comptoit un grand nombre de diocèses, et la circonscription de 1801, qui n'en admettoit pas assez.

CARCASSONNE, 5 mai. Notre ville a été consolée successivement par la présence de plusieurs membres d'une famille auguste. Me. l'évêque d'Angoulême étoit ce matin dans nos murs. Il entendit hier la messe dans l'église

cathédrale. M. l'évêque lui servit d'aumônier. S. A. R. est partie aujourd'hui pour Toulouse. Son arrivée dans nos provinces a été la première lueur d'espérance qu'il nous ait été donné d'entrevoir après tant d'orages et de malheurs. Cependant lorsque nous gémissions encore sous la tyrannie, nous avons eu le plaisir de voir ici d'autres Bourbons, non moins respectables et non moins malheureux que ceux qui viennent de nous être rendus. Le 19 mars dernier, le roi d'Espagne, Ferdinand VII, passa par cette ville avec les infans D. Antonio et D. Carlos, son oncle et son frère. M. l'abbé Pinel, curé de Saint-Vincent, leur servit d'aumônier. Après la messe, revêtu encore des habits sacerdotaux, il osa adresser à un Prince opprimé par celui qui régnoit encore, un discours que ce dernier ne lui auroit sans doute pas pardonné, s'il l'avoit connu : « Sire, lui dit-il, vous commandez à une grande nation. Vous allez faire son bonheur, et la récompenser des preuves éclatantes de valeur, d'héroïsme, de fidélité, de dévouement, qu'elle donne depuis six ans à V. M.... Ministre d'un Dieu qui a versé tout son sang sur une croix pour obtenir le pardon de ses bourreaux, qu'il me soit permis, Sire, de conjurer, V. M. de rappeler à ses peuples cette noble générosité qui les caractérise. Inspirez-leur l'oubli des injures, des atrocités, des forfaits inouis, dont des François égarés se sont rendus coupables. Les bons François, et c'est la grande majorité de la nation, en sont aussi émus, aussi indignés que les braves Espagnols ». Ce discours charma le Roi, qui depuis six ans, entouré d'espions, n'étoit plus accoutumé à entendre ce langage. Il s'entretint longtemps avec l'orateur, et lui fit remettre, par son intendant, un rouleau de pièces d'or, dont le montant a été distribué aux pauvres. On a été touché de la piété et de l'affabilité de ce Prince malheureux, et sa présence a contribué à faire paroître plus odieux celui qui l'avoit si iudignement traité. On sait que le Roi et les deux autres Princes avoient été successivement privés de la société des Espagnols fidèles qui avoient consenti à partager leur

exil. On leur avoit même ôté leurs aumôniers. L'infant don Antonio a dit la larme à l'oeil au même ecclésiastique que nous venons de nommer, que depuis deux ans il n'avoit pu faire ses pâques à Valençay, n'ayant pu y avoir un confesseur qui entendit l'espagnol. Cette inhumanité de leur ennemi mérite de trouver place parmi les autres traits de sa politique impie et méchante.

Le prince Henri de Reus-Plauen, gouverneur général de Venise, pour S. M. l'Empereur d'Autriche, a publié dans cette ville, le 10 mars, une proclamation curieuse et fort sage sur une matière importante. En voici le texte :

<< Depuis que le contrat de mariage a été élevé par la religion catholique à la dignité de sacrement, le sacerdoce a toujours exercé sur le mariage une autorité presqu'exclusive. Les Princes catholiques reconnurent que le sacrement devoit avoir la préférence sur le contrat, et qu'il seroit trop facile d'altérer les maximes de la religion et le dogme, si la puissance séculière exerçoit sur cette matière une autorité exclusive. En conséquence, les autorités civiles, en se conformant aux lois ecclésiastiques, et spécialement à celles du concile de Trente, ont promulgué très-peu de lois sur le mariage.

» Le Code Napoléon, en ne considérant le mariage que sous le rapport du contrat civil, et cherchant toujours à étendre la juridiction séculière, a publié des lois en contradiction avec les lois ecclésiastiques.

» Le même Code a prononcé que pour la légitimité du mariage et des enfans, la célébration du contrat civil suffisoit, et ne s'est occupé en rien de la célébration du sacrement; et quoique la religion catholique réclam t hautement la maxime consacrée par la bouché même de Jésus-Christ: Quod Deus conjunxit, homo non separet, il a sanctionné la dissolubilité du mariage pour différentes

raisons.

» Ainsi, les lois du Code Napoléon sont en opposition manifeste avec nos coutumes les plus anciennes et nos

lois les plus sacrées. Il est résulté de ce conflit, que la conscience des fidèles et celle des magistrats s'est souvent trouvée exposée aux incertitudes et aux combats les plus pénibles, et que la religion, ce précieux patrimoine des Italiens, a été réduite à gémir sous le poids d'une législation qui semble avoir pour but de réduire le mariage au seul contrat civil, et à le dépouiller de l'auguste caractère de sacrement.

>> Une telle contradiction entre les lois civiles et les lois ecclésiastiques, aussi nuisible à la morale sur laquelle repose la félicité des peuples qu'à la sûreté des trônes, ne peut pas exister plus long-temps ».

En conséquence, le gouvernement général, religieux dans ses principes, sage dans ses mesures, voulant réformer le Code Napoléon dans les parties qui ne sont pas conformes à la pureté du dogme catholique et de la morale, a publié le décret suivant:

« Le gouvernement général, civil et militaire actuel, voulant prendre provisoirement quelques dispositions relatives au mariage qui lui ont paru convenables et nécessaires même dans les circonstances, a déterminé ce qui suit : 1o. Indépendamment de publications de mariage, qui, en vertu du Code civil provisoirement en vigueur, doivent être faites par l'officier de l'état civil, devant la porte de la maison commune, il en sera fait trois autres pour les catholiques, dans l'église, par le cure; et pour ceux des autres religions, par leurs papas, leurs pasteurs, leurs rabbins, etc., dans leurs temples respectifs et dans leurs synagogues; 2°. le contrat de mariage entre catholiques, ne sera valide, et les enfans ne seront légitimes, que du moment où ce contrat aura été suivi du sacrement; et, pour ceux d'une autre religion, que du moment où ce même contrat aura été suivi des cérémonies prescrites par leurs cultes respectifs; 3°. le divorce légalement prononcé, pour quelque cause que ce soit, ne produira point, pour les catholiques, la dissolution du contrat de mariage, mais seulement la séparation

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personnelle et les effets de cette séparation; 4°. les fils et les filles de deux sexes, auxquels le consentement de leurs ascendans est nécessaire pour contracter le mariage, pourront, en cas de refus, présenter leurs réclamations fondées au gouvernement, qui prononcera. Les présentes déterminations auront leur exécution à compter du 1°. avril prochain »>.

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NOUVELLES POLITIQUES.

Une ordonnance du Roi réunit le ministère de la police générale et la préfecture de police de Paris, sous le titre de direction générale de la police du royaume.

-Une autre ordonnance donne aux généraux de brigade l'ancien titre de maréchaux de camp; et aux généraux de division, celui de lieutenant-généraux.

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- Mr. le duc d'Orléans est arrivé à Paris, le 17 mai, et est descendu à l'hôtel Grange-Batelière, en attendant que tout soit disposé pour le recevoir dans le palais de ses pères.

Mme. la duchesse de Bourbon, née princesse d'Orléans, est arrivée à Perpignan, le 9 mai, venant de Figuières. S. A. a été reçue avec les plus grands honneurs, et le peuple a fait éclater sa joie de voir une personne de cette famille exilée depuis si long-temps, et qui se relève de ses ruines, plus brillante et plus aimée que jamais.

-MM. d'Ambray, de Montesquiou et Ferrand ont été chargés de rédiger un projet de constitution, qu'ils mettront sous les yeux du Roi.

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La commission du Corps-Législatif, nommée par le Roi pour l'examen de la nouvelle constitution, est composée de MM. Lainé, Félix-Faulcon, ChabaudLatour, de Bois-Savary, Duhamel, Duchesne de Gillevoisin, Faget de Baure, Clauzel de Coussergue et Blancart de Bailleur. Mr. le chancelier de France a adressé aujourd'hui à chacun de ces membres la lettre suivante:

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