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c'est qu'il se jouoit de toutes les croyances. En Egypte, il ne manquoit pas, dans ses proclamations, d'invoquer le prophète Mahomet, et il se vantoit d'avoir détruit le grand muphti des chrétiens. Matérialiste, il ne voyoit dans les hommes que des machines de guerre. Ainsi son irréligion fortifioit son inhumanité; car on ne doit pas être disposé à faire beaucoup de cas de ce qu'on ne regarde que comme de la matière. Toutes les idées se touchent, et un faux systême conduit à des actions atroces. Il est honorable. pour la religion d'avoir eu pour ennemi celui qui l'étoit de l'humanité, et pour l'Eglise d'avoir été attaquée par celui qui faisoit la guerre à toutes les idées justes et généreuses. Il ne parloit des prêtres qu'avec mépris, et la moindre plainte contr'eux suffisoit pour motiver les plus grandes rigueurs. Ils étoient exilés, emprisonnés, bannis sur le moindre soupçon d'avoir déplu au despote. Il sapoit la morale, il pervertissoit l'instruction. Comme le vieux de la Montagne, il auroit voulu n'avoir autour de lui que des hommes sans foi, sans règle, qui eussent été ses admirateurs serviles et ses instrumens aveugles.

Nous avons examiné le régime intérieur de l'usurpateur qui vient d'être renversé. Nous parlerons une autre fois de ce qu'il a fait au dehors, et nous nous bornerons, sur cet article, à deux chefs, sa conduite en Espagne, et celle qu'il a tenue contre le chef de

l'Eglise. Il y en aura bien assez pour apprécier la perfidie et la noirceur de l'ennemi commun du genre humain.

NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES.

Au palais des Tuileries, le 19 avril 1814.

Nous, CHARLES-PHILIPPE DE FRANCE, fils de France, MONSIEUR, frère du Roi, lieutenant-général du royaume, etc. etc. etc.

Apprenant avec douleur que le chef vénérable de l'Eglise, en même temps qu'il avoit été arraché de sa capitale, avoit été dépouillé de plusieurs insignes et ornemens, et même des sceaux servant à l'exercice du souverain pontificat; que ces objets se trouvent en dépôt à Paris; désirant, par la promp titude d'une trop juste restitution, manifester au saint Père notre zèle, notre dévouement, et prouver à l'Europe et à la chrétienté, combien les excès passés ont été et sont loin de notre pensée et de notre cœur, de la pensée et du cœur des François :

Vu le rapport du commissaire provisoire des départemens de l'intérieur et des cultes,

Le conseil d'Etat provisoire entendu,

Avons arrêté et arrêtons ce qui suit :

Les insignes, ornemens, sceaux et archives, et généralement tous les objets à l'usage de Sa Sainteté pour l'exercice du souverain pontificat, qui se trouvent actuellement à Paris, ou se trouveroient dans d'autres lieux du royaume, seront sur-le-champ mis à la disposition de Sa Sainteté, et elle sera priée d'en agréer la restitution.

es amis de la religion verront avec intérêt qu'un des Premiers actes de MONSIEUR ait été de rendre au souverain

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Pontife ce qu'on lui avoit si injustement enlevé. Ainsi le SaintSiége va recouvrer ses archives qu'on avoit fait vénir de Rome à grands frais. Nous avons ouï dire qu'il en avoit coûté un million pour le transport de tous les papiers et registres du Vatican et des congrégations. Quelle folie dans ce déplacement! quelle nécessité de faire venir à Paris cet immense dépôt! Nous l'avons parcouru plus d'une fois, et nous avons gémi sur cette violation du droit des gens. Les archives sont une chose sacrée, une propriété respectable, un secret. Il étoit aussi absurde qu'injuste d'amener à Paris cette énorme collection de monumens antiques, dont la place véritable étoit dans le chef-lieu de la chrétienté. Honneur au gouvernement qui répare cette iniquité! Il n'y a pas encore deux mois qu'il est arrivé à Paris un chargement de plus de cinquante caisses.

En vertu de l'arrêté de S. A. R., on va également rendre au saint Père la tiare qu'on lui avoit enlevée, et le sceau connu sous le nom d'anneau du pécheur. Ce sceau a été retrouvé. Il est en or, et représente saint Pierre jetant son filet. On croit qu'il sera remis entre les mains de Mgr. de Grégori, secrétaire de la congrégation du concile, et récemment délégué apostolique à Rome. Son zèle pour son souverain l'avoit fait condamner à la prison, il y a plus de quatre ans. Il vient d'en sortir, et se dispose à retourner à son poste, ainsi que plusieurs autres victimes de la dernière persécution.

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Les évêques qui se trouvent à Paris s'étoient empressés, dès l'arrivée de MONSIEUR à Paris, d'aller présenter leurs hommages à S. A. R., qui les avoit reçus avec une bienveillance particulière. Le 22 de ce mois, ils se sont réunis pour aller de nouveau rendre tous ensemble leurs devoirs au Prince. M. le cardinal de Bayanne a exprimé, en leur nom, la joie qu'a ressenti le clergé du retour du Roi très-chrétien, son dévouement

pour une famille auguste qui a si bien mérité de la religion, et les fermes et justes espérances qu'il conçoit, pour l'avenir, d'une protection spéciale pour l'Eglise et ses ministres. S. A. R. a répondu que le Roi son frère se feroit un devoir de protéger la religion; qu'il savoit assez combien elle est nécesaire à la stabilité des Etats et au maintien de la morale publique, et que le clergé pouvoit compter sur son estime et sa bienveillance. Il a ajouté que le Roi ne manqueroit pas de se concerter avec le souverain Pontife pour les mesures à prendre, et que la plus heureuse harmonie régneroit entre les deux puissances. Nous rendons, sans doute, foiblement cette réponse, où S. A. R. a témoigné le vif intérêt qu'elle prend à la religion. Elle s'est fait nommer ensuite tous les prélats qui se trouvoient présens, et parmi lesquels étoient plusieurs anciers évêques. Tous étoient en rochet et en camail violet.

Le chapitre de Paris a été admis aussi à l'audience de MONSIEUR.

M. l'abbé de la Myre, vicaire-général capitulaire, portant la parole, a dit :

« Monseigneur, le chapitre de la Métropole vient déposer aux pieds de V. A. R. l'hommage de son respect, de son amour et de son dévouement pour le Roi et son auguste famille.

» Si nous n'avons pas hérité des nombreux monumens de la magnificence et de la piété de nos rois, nous n'en sommes pas moins animés des mêmes sentimens que nos vénérables prédécesseurs dans l'église de Paris: et, après avoir eu l'honneur de recevoir V. A. R. le jour de son entrée, nous nous répétions, l'un à l'autre, dans les transports de la joie, de l'admiration et du bonheur, les paroles mémorables que MONSIEUR avoit daigné nous adresser : Quel beau jour pour la religion..... »>!

S. A. R. a répondu :

<< Faites connoître, Messieurs, notre sainte religion, propagez-la, répandez-la, rien ne peut être plus agréable au Roi».

Ensuite, S. A. R. a daigné permettre à M. Adrien Le Clere, imprimeur de N. S. P, le Pape et de l'Archevêché, qui se trouvoit avec le chapitre, de lui faire hommage du premier exemplaire de l'Ami de la Religion et du Roi.

S. A. R. lui a adressé, avec bonté ces paroles, que nous rapportons fidèlement :

« Je vous remercie, Monsieur. Je lirai avec plaisir un ouvrage qui s'annonce sous ces auspices ».

M. l'abbé Dastros et M. l'abbé Perrot, viennent de recouvrer leur liberté. On sait que ces respectables ecclésiastiques avoient été emprisonnés à l'occasion du bref au cardinal Maury. On leur fit un crime d'avoir reçu ce bref, et on se rappelle quelle fut, à cette occasion, la colère d'un homme qui ne pouvoit souffrir la moindre résistance à ses volontés. M. l'abbé Dastros, alors premier vicaire-général du chapitre de Paris, pendant la vacance du siége, et M. l'abbé Perrot, furent mis à Vincennes au mois de janvier 1811. Ils ont supporté leur captivité avec un courage qui prenoit sa source dans une piété vraie et profonde. Cet hiver on les avoit transportés au château d'Angers. Ils viennent d'arriver à Paris, où les ames sensibles ont revu avec intérêt ces honorables victimes de la tyrannie.

Le Pape arriva à Parme, le 25 mars, et à Bologne le 31. Il repartit, le 2 avril, pour Imola, dont il a été évêque. Il a reçu sur sa route les honneurs dus au chef de l'Eglise, et c'étoit un spectacle attendrissant de le voir rentrer en triomphe dans cette Italie, dont il avoit été arraché par la violence.

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