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Arrimage des marchandises.

Lorsque les

156. IMPORTANCE D'UN BON ARRIMAGE. marchandises sont embarquées, le capitaine doit les faire. arrimer convenablement à bord, c'est-à-dire les disposer et les assembler de telle sorte qu'elles courent le moins de risques de détérioration possible. Les règles de l'arrimage sont des règles techniques et non des règles de droit: elles sont de la compétence du praticien et non du jurisconsulte.

Cependant certaines règles de droit doivent être posées en cette matière.

157. LE CAPITAINE N'A PAS LE DROIT DE CHARGER DES MARCHANDISES SUR LE TILLAC (Pont supérieur de son navire) SANS LE CONSENTEMENT PAR ÉCRIT DU CHARGEUR (art. 229, Code com.). Au tillac du navire il faut assimiler les constructions couvertes édifiées sur le pont, mais qui ne font pas corps avec la membrure du navire.

La raison de cette règle est facile à donner: les marchandises chargées sur le pont sont exposées à des risques exceptionnels; elles sont exposées aux intempéries; elles peuvent être enlevées facilement par des coups de mer; en cas de jet, elles ne donnent pas lieu à contribution (V. no 336), etc.

157 bis. Exception pour le petit cabotage. Toutefois cette prohibition n'est pas applicable au petit cabotage (V. n° 41), les navires qui font cette navigation ne pouvant souvent, à cause de leurs faibles dimensions, prendre certaines marchandises autrement que chargées sur le pont. Mais, bien entendu, il pourrait être valablement convenu que, même sur les navires faisant le petit cabotage, les marchandises devraient être chargées dans la cale'.

158. - Si le capitaine, malgré la disposition précise et

1. Certaines législations ont supprimé l'exception relative au petit cabotage (V. Cohendy, Code de commerce, art. 229).

impérative de l'article 229, charge sans le consentement par écrit des chargeurs des marchandises sur le tillac, il est responsable de tous les sinistres qui affectent les marchandises et qui résultent de ce mode défectueux de chargement, par exemple, des dégâts causés par la pluie, par les coups de mer qui balayent le pont, etc. Mais il ne répond pas des dégâts occasionnés par fortune de mer aux marchandises et qui ne sont pas une conséquence du mode de chargement adopté.

159. Le Code paraît exiger que le consentement des chargeurs, pour dégager la responsabilité du capitaine, soit donné par écrit. Mais il faut décider que, malgré les termes absolus de l'article 229, un consentement verbal serait suffisant s'il n'était pas méconnu. L'article 229, quand il exige un consentement par écrit, entend mettre simplement le capitaine dans l'impossibilité de prouver ce consentement par témoins ou par présomptions. Le capitaine pourrait même, si le chargeur niait son consentement, lui déférer le serment et, si le chargeur refusait de prêter ce serment, ce dernier devrait être considéré comme avouant le consentement (art. 1361, C. civ.).

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160. Quant aux règles proprement dites d'arrimage, nous nous bornerons à signaler que le capitaine doit arrimer les marchandises de telle sorte que leur stabilité soit assurée et puisse résister au roulis et au tangage, qu'il doit éviter de juxtaposer des marchandises dont les unes risqueraient par leur voisinage de détériorer les autres, etc., etc.

160 bis. D'ailleurs, une loi du 20 décembre 1892 décide qu'à l'avenir, des décrets d'administration publique pourront déterminer les règles d'après lesquelles devra être effectué l'arrimage à bord des navires de commerce. Un décret du 1er décembre 1893 a été rendu en exécution de cette loi.

Le texte de ce décret est rapporté dans Champenois : Les Armements maritimes, p. 336.

CHAPITRE V

PRÉCAUTIONS CONTRE LES RISQUES DE LA NAVIGATION CONCLUSION D'UNE ASSURANCE

161. - §1. CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES. Le navire est armé et affrété; les marchandises sont chargées. Il semble qu'il ne reste plus qu'à partir. Cependant, avant que le navire prenne la mer, la prudence commande aux intéressés certaines mesures de précaution. Si le commerce comporte par sa nature même un certain aléa, qui motive et justifie ses bénéfices parfois considérables, cet aléa se trouve décuplé pour les opérations maritimes. Alors, en effet, aux risques de la spéculation viennent s'ajouter ceux de la navigation, beaucoup plus fréquents et beaucoup plus étendus dans leurs effets que les premiers. Il était donc naturel que les négociants se livrant au commerce maritime cherchassent à mettre leur fortune à l'abri de tant de hasards, et c'est ce qu'ils ont tenté de tout temps. Pendant une longue suite de siècles, le contrat à la grosse a été principalement employé dans ce but; aujourd'hui, il n'est plus guère employé que dans un but tout différent (V. no 397 à 402) et encore assez rarement, et il est remplacé par le contrat d'assurance.

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L'assurance

162. CE QUE C'EST QUE L'ASSURANCE. maritime est le contrat par lequel l'un des contractants (l'assureur) s'oblige envers l'autre (l'assuré), moyennant une ré

munération (prime ou coût de l'assurance), à l'indemniser de la perte pouvant résulter des risques de mer. C'est là, pour le négociant, un contrat de garantie par lequel il sépare des chances de ses spéculations les risques des événements de mer, et s'en décharge sur l'assureur.

L'assureur pourra prendre à sa charge les risques courus soit par le navire, soit par la cargaison. Dans le premier cas, l'assurance est dite assurance sur corps, et s'étend, à moins de réserve expresse, à tous les accessoires du navire, quille, mâts, agrès, apparaux, victuailles, etc. L'assurance des marchandises est souvent désignée par les mots : assurance sur facultés. Parfois enfin, l'assurance est faite à la fois sur corps. et facultés, et elle s'étend alors au navire et à son chargement.

163. ORIGINE. Quelle que soit l'utilité des assurances et si vivement que le besoin de leur institution ait dû se faire sentir, elles furent bien lentes à s'introduire et sont de date relativement récente. Inconnu dans l'antiquité, le contrat d'assurance n'apparut qu'au xiv° siècle. Ce n'est même qu'aux xvo et xvIe siècles, après que l'invention de la boussole eut permis aux navires de s'aventurer vers la haute mer et surtout après que la découverte de l'Amérique et de la route maritime des Indes eut multiplié dans des proportions inouïes les transports maritimes, que de nombreux textes législatifs commencèrent à réglementer cette matière. La raison de cette tardiveté est facile à saisir : l'assurance repose sur le calcul des probabilités. Le hasard n'existe que pour des faits isolés; mais l'ensemble des faits d'un même ordre obéit à des lois, et il devient possible par exemple, en connaissant les sinistres qui se sont produits dans une période de temps écoulé, en comparant leur nombre avec celui des voyages entrepris, de supputer les sinistres à venir et de déterminer leur nombre d'une façon approximative sans doute, suffisamment précise cependant pour servir de base à une convention

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sérieuse et qui ne soit point un simple pari. Une fois connu ainsi, sur un nombre de navires assurés, le nombre de ceux dont il faut attendre la perte, il ne reste plus qu'à calculer les primes en conséquence, de telle sorte que leur somme totale couvre tous les sinistres et laisse même une marge soit pour rémunérer l'assureur, soit pour parer aux erreurs de calcul. Mais il fallait, pour arriver à ce résultat, des éléments d'appréciation qui ont longtemps manqué; il fallait attendre qu'une science toute récente, la statistique, eût fait elle-même assez de progrès pour fournir des données exactes, et ce n'est guère que de nos jours, grâce à la multiplicité des moyens d'information, que ce résultat a pu être atteint. Aujourd'hui, le contrat d'assurance a pris dans les opérations commerciales une importance capitale; c'est sur lui que reposent tout le commerce des armements et le transport des marchandises par mer; il constitue sans contredit l'un des éléments qui ont le plus contribué au magnifique essor du commerce maritime moderne.

164. ASSURANCES A PRIMES. ASSURANCES MUTUELLES. -On distingue deux grandes catégories d'assurances: les assurances à primes et les assurances mutuelles.

L'assurance à prime est le contrat par lequel un individu, ou plus généralement, à cause des capitaux considérables nécessités par ces sortes d'opérations, une compagnie s'engage à supporter les conséquences des risques auxquels une chose est exposée, moyennant un prix déterminé à l'avance ou une prime fixe.

Au contraire, il y a assurance mutuelle lorsque plusieurs propriétaires s'associent et s'engagent réciproquement les uns envers les autres à supporter en commun la perte ou la détérioration survenue à la propriété de l'un d'eux, de sorte qu'ils se garantissent réciproquement par l'obligation de contribuer, chacun dans une proportion déterminée, au moyen d'une cotisation, au dommage éprouvé par l'un d'eux.

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