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pulation ne peut plus la révoquer, si le tiers « a déclaré vouloir en profiter. >>

On trouvera dans mon Recueil de questions de droit, au mot STIPULATION POUR AUTRUI, les développements dont cette matière est susceptible.

Du reste, comme le dit l'art. 1122 : « On « est censé avoir stipulé pour soi et pour ses a héritiers et ayant-cause, à moins que le con. << traire ne soit exprimé ou ne résulte de la << nature de la convention. >>

5o Que les choses licites puissent seules faire la matière d'un contrat, c'est une vérité qui se sent de soi-même. Comment en effet pourrait-on valablement stipuler ou promettre une chose qui serait répréhensible, si on la faisait? C'est, au surplus, de ce principe que découle l'article 6 du Code civil: « On ne «< peut, dit-il, déroger, par des conventions « particulières, aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes mœurs. »

IX. Ce n'est pas tout, pour la validité d'une convention, qu'elle ait été faite entre personnes capables de s'obliger, ni qu'elle l'ait été de leur consentement, pour un objet certain, de libre disposition et licite; il faut encore que l'obligation qui en résulte ait une

cause.

Qu'est-ce que la cause d'une obligation? C'est ce qui donne lieu à l'obligation même, le motif qui porte à la contracter, ce que Blackstone, liv. II, chap. 30, appelle en anglais, considération, inductment, et en latin, id quod inducit ad contrahendum.

Dans les contrats à titre onéreux ou intéressés de part et d'autre, la cause de l'obligation que s'impose l'une des parties est, ou ce que l'autre lui donne, ou ce qu'elle s'engage de lui donner, ou le risque dent elle se charge. Dans les contrats de bienfaisance, la libéralité que l'une des parties veut exercer envers l'autre, est la cause de l'engagement que contracte celle-là envers celle-ci.

De là les dispositions suivantes du Colle civil:

« Art. 1131. L'obligation sans cause, ou sur « une fausse cause, ou sur une cause illicite, << ne peut avoir aucun effet.

« 1132. La convention n'est pas moins valable, quoique la cause n'en soit pas expri« mée.

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L'art. 1135 ajoute : « Les conventions obli<< gent non-seulement à ce qui y est exprimé, << mais encore à toutes les suites que l'équité, « l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'a« près sa nature. »

De la première disposition du premier de ces articles, il résulte clairement que les tribunaux ne peuvent pas se permettre de dispenser une partie d'exécuter une convention contre laquelle la loi ne lui fournit aucun moyen de nullité ou de rescision; et que, s'ils le faisaient par des jugements en dernier ressort, ces jugements seraient attaqués avec succès par le recours en cassation.

Mais il ne faut point conclure de là que la cassation puisse atteindre un jugement en dernier ressort qui, en rendant hommage à la force obligatoire d'un contrat, ne ferait que l'interpréter dans tel sens plutôt que dans tel autre. Voyez le Répertoire de jurisprudence, au mot SOCIÉTÉ, sect. 2, § 3, art. 2, no 3.

Au surplus, « les conventions n'ont d'effet << qu'entre les parties contractantes; elles ne << nuisent point au tiers; elles ne lui profitent « que dans le cas prévu par l'art. 1121, » rapporté au no VIII. Ce sont les termes de l'art. 1165.

« Néanmoins, continue l'art. 1166, les créan« ciers peuvent exercer tous les droits et << actions de leur débiteur, à l'exception de « ceux qui sont exclusivement attachés à la « personne. »>

Quels sont les droits qui, dans le sens de cet article, doivent être considérés comme attachés à la personne du débiteur? C'est sur quoi l'on n'est pas généralement d'accord. Voyez mon Recueil de questions de droit, au mot HYPOTHÈQUES, Sect. 4, n°* 4 et 5.

XI. Ce que nous venons de dire des jugements interprétatifs des contrats nous conduit naturellement aux règles qui doivent, en cette matière, servir de guide aux tribunaux.

Ces règles, éparses dans une foule de textes du droit romain, sont rassemblées dans les articles suivants du Code civil:

« 1156. On doit, dans les conventions, re«< chercher quelle a été la commune intention « des parties contractantes, plutôt que de « s'arrêter au sens littéral des termes.

« 1157. Lorsqu'une clause est susceptible « de deux sens, on doit plutôt l'entendre dans <<< celui avec lequel elle peut avoir quelque « effet, que dans le sens avec lequel elle n'en « pourrait produire aucun.

« 1158. Les termes susceptibles de deux << sens doivent être pris dans le sens qui con« vient le mieux à la matière du contrat.

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CONTRAVENTION. (Législation.) C'est rigoureusement un acte qui est en opposition avec ce que permet, ordonne ou défend la loi.

Dans l'acception vulgaire du mot, la contravention ne comprend que les manquements envers les lois d'ordre public.

Les contraventions, selon qu'elles sont plus ou moins graves, sont appelées contraventions, délits ou crimes. Les crimes sont communément punis de peines afflictives infamantes les délits, de peines afflictives; les contraventions, dans la plupart des cas, de peines pécuniaires; quelques-unes pourtant entraînent l'emprisonnement: telles sont celles qui ont lieu en violation des lois de la presse et de celles d'ordre public.

Un fait quelconque ne saurait être réputé contravention qu'autant qu'il est formellement désigné comme tel par une loi promulguée antérieurement. De même, il ne saurait être puni de peines qui n'étaient pas prononcées par la loi avant qu'il fût commis. En un mot, tous les principes de la législation pénale, relatifs aux délits, sont également applicables aux contraventions. Elles sont, comme les délits, dans le domaine du ministère public, qui poursuit le redressement de tous les torts matériels faits à la société. En matière de compétence, les crimes sont dans les attributions des cours d'assises; les délits sont jugés

par les tribunaux, les contraventions par les tribunaux de simple police.

Tous les actes qui ont pour but d'éluder le payement des droits de douane et d'octroi, sont qualifiés de contravention lorsqu'ils ne se compliquent pas de faits plus graves, tels que la résistance ou le faux.

Il y a cependant une autre sorte de contravention qui n'exige point l'intervention du ministère public, et qui est toute dans les attributions des tribunaux civils : c'est celle que le Code a appelée quasi-délit, et qui consiste en un préjudice, un dommage quelconque que l'on a fait souffrir à autrui. Cette sorte de faute n'est point punissable dans l'intérêt de la société; mais elle entraîne une réparation envers la personne dont elle blesse les intérêts.

La théorie des peines est sans contredit un des points les plus délicats de la législation. Elle doit être exactement basée sur la moralité de l'action; « mais pour juger une action, dit Bentham (t. II, p. 266), il faut considérer d'abord quels sont ses effets, abstraction faite de toute autre chose. » Cette difficulté de bien apprécier les faits rend la classification des manquements à la loi difficile et incertaine. Avant la nouvelle législation, on les bornait aux crimes et aux délits. La contravention est venue ensuite; il est évident qu'elle complétait la nomenclature des fautes. Il ne restait plus, pour mettre la législation en harmonie avec les véritables besoins du temps, qu'à modifier la pénalité; mais voilà qu'après trente années de réformes législatives, il a été tout à coup imaginé une nouvelle sorte de manquement par delà la contravention: celui-ci, moins grave qu'elle, est bien plus sévèrement puni : c'est la tendance en matière d'écrits politiques, faute majeure, qui se compose d'une suite de fautes si légères, qu'elles ne seraient pas punissables si elles étaient prises isolément.

La jurisprudence criminelle militaire ne connaît pas de contraventions, ni même de délits. Les règlements autorisent le chef à punir lui-même à son gré le subalterne par voie de discipline; celui-ci n'est traduit devant les tribunaux compétents que pour crime; mais comme, par suite du vice de cette législation, et pour ne pas laisser certains délits graves impunis, on a été obligé de les considérer comme crimes, il arrive souvent que la conscience du juge répugne à appliquer la loi, ou que l'humanité souffre de son application. Une réforme complète dans le code militaire est depuis longtemps attendue on désirerait y trouver des dispositions précises pour soustraire les contraventions à une pénalité arbitraire, et déterminer d'une manière plus précise les limites où le pouvoir discrétionnaire des chefs devrait s'arrêter.

Par une bizarrerie qui trouve son explication dans les besoins toujours renaissants des gouvernements, la contravention, inconnue dans la jurisprudence militaire, prend, en matière fiscale, un caractère d'aggravation trèsmarqué. Elle devient même un crime, selon les circonstances qui l'accompagnent, et long. temps elle a été jugée par des tribunaux qui natureilement n'auraient dù connaître que des crimes; c'est ce qui arrivait dans la plupart des cas prévôtaux. Aujourd'hui que la juridiction exorbitante des cours prévôtales est abolie, la pénalité qui pèse sur les contraventions fiscales est renfermée dans des limites plus voisines de l'équité.

Mais dans cette matière, comme dans toutes celles qui sont du domaine de la loi pénale, on se plaint avec raison que la gravité des répressions ne soit pas exactement graduée sur l'importance des contraventions. Les lumières de l'époque réclament une législation plus conforme à l'équité. Les publicistes, qui ont beaucoup écrit sur l'abolition de la peine de mort, se sont trop peu occupés des peines infligées pour les contraventions. La morale et l'huma. nité réclament également que l'emprisonne. ment soit désormais réservé pour les délits, et qu'aucune peine afflictive ne puisse atteindre l'individu uniquement convaincu de contravention.

CONTRE. (Musique.) Ce mot, harmoniquement parlant, sert à désigner une partie mise au-dessus ou au-dessous d'une autre, c'est-à-dire auprès ou contre.

Anciennement, pour représenter les sons, on ne se servait que de points, au lieu des signes ou des notes qui maintenant sont en usage; ce qui fit alors appeler la science de placer des points sur des points, l'art du contre-point, dénomination qui est restée en usage.

On désigne aussi, dans une fugue, la partie qui sert à accompagner le sujet principal, par le titre de contre-sujet. Quand elle est à plus de deux sujets, on les désigne ainsi : premier contre-sujet; second contre-sujet,

etc.

Quand on renverse le sujet de la fugue, et que l'on répond à une seconde, ou à une tierce, à une quarte, ou à une quinte, etc., etc., en montant par une seconde, par une tierce, par une quarte ou par une quinte, en descendant, cette manière de répondre au sujet, se nomme contre-fugue ou fugue à l'in

verse.

Contre-temps, expression dont l'emploi sert à désigner une partie musicale qui, dans les divisions de la mesure, ne se fait jamais entendre qu'après qu'une ou plusieurs parties ont articulé le commencement de chacun des temps de la mesure.

La préposition contre sert aussi à qualifier divers instruments; mais il est à remarquer que cette expression ne s'emploie que pour désigner ceux qui, ayant des proportions gigantesques par rapport à leurs homogènes, vibrent à une octave au-dessous d'eux.

Ainsi, pour désigner l'instrument qui a la même forme que notre basse ou violoncelle, on se sert du mot contre, et l'on dit contrebasse.

etc.

On se sert également, et par les mêmes motifs, de cette préposition, pour désigner la nature et le caractère de gravité de différents instruments, et l'on dit contre-basson, etc., H. BERTON. CONTRE-ALTO. ( Musique. ) Nom que l'on donne à la voix de femme qui, par son étendue et son caractère de gravité, est, dans ses rapports avec celle du premier-dessus ou soprano, ce qu'est la voix de basse-taille à celle du premier ténor. On écrit assez ordinairement la partie de contre-alto sur la clef d'ut, posée à la troisième ligne; quelquefois aussi sur la clef d'ut, à la première ligne. Son étendue or dinaire est la même que celle des autres voix, c'est-à-dire, dans les proportions communes, d'une octave et demie.

Il serait désirable que l'on cherchât, en France, des moyens d'étude particuliers et propres à développer les voix de ce genre auquel on ne se livre habituellement qu'après avoir échoué, et usé ses organes par des exercices de premier soprano, qui, lorsque le caractère naturel de la voix est celui de contre-alto, ne peuvent qu'être infructueux et nuisibles.

Cette qualité de voix est d'un grand effet dans les morceaux d'ensemble et servirait à remplacer avec avantage les glapissements de la haute-contre.

H. BERTON.

CONTREFAÇON. On appelle ainsi la reproduction illégale d'un objet manufacturé on d'une œuvre scientifique, artistique, litté raire. Le droit de disposer à son gré de son ouvrage, et de jouir seul des avantages qu'il rapporte, constitue une véritable propriété pour celui qui a fabriqué, inventé ou écrit. Il peut en disposer, garder ses droits pour lui ou les transmettre à un autre. Cette propriété se trouve naturellement lésée et amoindrie, si quelque frelon vient en partager les avantages, et attirer à lui les bénéfices de l'invention sans en avoir eu le mérite. Celui qui la possède à titre d'inventeur ou d'acquéreur se trouve alors victime d'une véritable spoliation. La contrefaçon est donc un vol, ou guère s'en faut.

Si la loi ne l'a pas tout à fait considérée comme tel, si elle n'a pas assimilé compléte ment celui qui reproduit, sans y avoir droit, l'oeuvre d'un autre, au filou qui fait passer

de la poche d'autrui dans la sienne une bourse ou une montre, elle n'est pas non plus restée muette et aveugle en face d'un pareil délit, et elle s'est occupée de protéger contre les tentatives du plagiat les droits réels de l'invention, soit qu'elle fût appliquée aux ouvra ges de l'esprit, soit qu'elle eût dirigé ses efforts du côté des arts mécaniques.

La propriété des fabrications industrielles est garantie aux inventeurs par des brevets d'invention qu'ils peuvent, à leur gré, exploi ter eux-mêmes ou transmettre à d'autres : ils n'obtiennent ce brevet que par l'accomplissement de certaines formalités et le payement d'un droit fixé d'avance. A ces conditions, la toi les protége, et leur assure à eux seuls les avantages résultant de leur travail; elle leur accorde cette protection pendant un temps déterminé, après lequel l'invention tombe dans le domaine public, et peut être mise en œuvre par tout le monde. De même, s'il s'agit de des. sins sur étoffes, de sculptures, de moules, estampes, gravures en médailles ou pierres fines, les imitations sont regardées comme contrefaçons et justement punies. En effet, pour prendre un exemple, il est évident que les manufactures rivales, reproduisant des dessins pour lesquels elles n'ont point à payer l'idée et l'invention, à supporter les frais nécessités peut-être par des essais d'abord infructueux, fabriqueraient leurs étoffes à des prix bien inférieurs, et porteraient par conséquent un grand préjudice à la manufacture d'où les dessins sont sortis. Les marques de fabrique et les peines imposées aux contrefacteurs, amendes, dommages-intérêts, con. fiscations des objets contrefaits, viennent audevant de cet inconvénient, et l'amoindrissent, si elles ne peuvent le détruire tout à fait.

La contrefaçon littéraire est de même prohibée par de sévères règlements. Les ouvrages de l'esprit, demandant plus à l'invention et attendant moins de la main-d'œuvre, sont plus sujets à la reproduction illégale que les produits industriels. L'écrivain, le compositeur de musique, vendent à l'éditeur l'œuvre sortie de leur cerveau; et l'éditeur la paye fort cher, dans ces temps où le talent, crotté jadis, prétend à son tour éclabousser les autres, et veut un lit d'or pour faire oublier sa paille d'autrefois. L'acquéreur a seul le droit de revendre à son tour au public la communication de cette pensée écrite, et, par une juste disposition, nul ne peut empiéter sur ce droit sans s'exposer à payer des dommages-intérêts calculés d'après le préjudice que la contrefaçon a pu porter au véritable propriétaire, et à voir saisir les exemplaires de l'œuvre contrefaite par lui. Les auteurs cèdent la propriété de leur ouvrage, soit en totalité, soit partiellement.

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Dans le premier cas, les cessionnaires et leurs héritiers jouissent des mêmes droits pendant dix ans encore après la mort de l'auteur. Pour les enfants de celui-ci, s'il n'a vendu sa propriété qu'en partie ou temporairement, et qu'elle leur soit revenue, la durée de la propriété exclusive est portée à vingt ans, et la veuve en jouit même toute sa vie.

Pour avoir le droit de poursuivre le contre. facteur, il faut faire le dépôt de l'ouvrage à la direction centrale de la librairie, en un nombre d'exemplaires déterminé par la loi, et qui est de deux actuellement.

Au milieu de l'attention protectrice accordée aux opérations internationales du commerce, il existe une lacune, ruineuse pour ceux qui en sont victimes, honteuse pour ceux qui la laissent subsister. Tandis que les balles de coton, les pièces d'étoffes et les tabatières en écorce de bouleau trouvent une protection active au dedans, et au dehors jouent un rôle dans les conventions, et ont leur place dans les contrats diplomatiques, les œuvres de l'esprit sont traitées avec une inexplicable insouciance. La propriété littéraire, garantie à l'intérieur par des lois insuffisantes, est complétement livrée, sans aide et sans défense, aux oiseaux de proie qui la guettent de l'autre côté de la frontière. Cette insouciance, déshonorante pour ceux qui s'en rendent coupables, plus déshonorante pour ceux qui en profitent, n'a pas même pour.se justifier l'excuse d'une réciprocité, réparant un dommage par l'autre, et apportant au pays blessé un baume pour la lésion dont il est victime. Non. Les pays qui volent ne produisent pas et n'ont pas besoin de produire. Pas si niais! Le fléau qui tombe sur la littérature et la librairie n'offre donc pas de réparation, et ne porte pas avec lui le remède d'une illégalité pareille. Aussi y a-t-il longtemps qu'en France on s'en plaint amèrement. En fait de littérature surtout, notre pays, en ce siècle, est presque seul à produire, et presque toute l'imagination qui se dépense pour amuser la vieillesse de l'ancien monde et l'enfance du nouveau, éclôt dans ce petit coin de terre. Or, en ce temps où les vendeurs sont maîtres dans le temple et partout, les moissons de l'intelligence sont cotées sur les marchés tout comme les récoltes du sol ou les ouvrages de l'industrie. La propriété littéraire constituerait donc parfois un riche domaine, si le crime de ceux qui gouvernent ne laissait passer aux mains étrangères ce bien effrontément pillé. Et en quelles mains encore! Il y a, au nord de la France, un pays qui lui doit tout : son indépendance, son bienêtre, son existence. Hé bien! c'est dans ce pays surtout que s'organise le vol dont la France est victime. La première édition d'un ouvrage de quelque valeur, appelé à quelque succès, n'est qu'une copie envoyée aux imprimeurs

belges, qui n'ayant à payer que la main-d'œu vre, envoient ensuite par tout le monde, et jusqu'en France, l'ouvrage contrefait par eux. Le gouvernement voit la plaie et ne dit rien; la littérature en souffre, la librairie en meurt. Au reste, nous devons dire que certaines mesures prises récemment promettent à cet égard un meilleur avenir. Ainsi un traité conclu entre la France et la Sardaigne a décidé que les auteurs jouiraient également de leurs droits dans les deux pays. L'Angleterre et la Prusse viennent de conclure, le 1er septembre 1846, un traité semblable, et invitent les autres nations à y adhérer. C'est un premier pas de fait espérons qu'on n'en restera pas là. En attendant, rappelons-le, notre réputation littéraire est répandue par tout le monde, et au lieu de venir directement de chez nous, elle vient de la Belgique, qui en palpe les avantages matériels; en attendant, le théâtre de Paris alimente de drames, de comédies et de vaudevilles, traduits ou non, tous les théâtres d'Europe, qui, pour rendre bien visible une origine, garantie du succès, accolent à toutes les pièces, en Italie, l'unique nom de M. Scribe, en Espagne, celui de M. Bouchardy ou de M. Th. Gauthier, etc., etc. Les auteurs le savent et s'en réjouissent sans doute; mais ne serait-il pas juste qu'à ce plaisir de vanité se joignit un plaisir plus matériel. La gloire toute nue est belle sans doute; mais le plus épris de ses charmes la trouvera-t-il moins belle, parce qu'elle aura un manteau d'or aux épaules?

SAINT-AGNAN CHOLER. CONTRE-LETTRE. ( Législation.) Une contre-lettre est un acte secret par lequel on déroge à un autre acte, pour en étendre, en expliquer ou en restreindre la teneur. Ainsi le contrat et la contre-lettre sont deux actes séparés l'un de l'autre, qui cependant doivent être réunis; de telle sorte que le premier ne puisse produire d'effet qu'en ce qui n'est pas détruit ou changé par la contre-lettre.

De leur nature, les contre-lettres n'ont rien d'odieux ni d'illicite; ce sont de véritables contrats qui révoquent d'autres contrats primitivement consentis. Cependant, comme elles peuvent servir à couvrir ou à préparer des fraudes contre des actes qui doivent paraître en public, elles sont ordinairement regar. dées avec défaveur par la justice. C'est par suite de la défiance qu'elles inspirent, qu'il a été admis en principe parmi nous, depuis longtemps, qu'elles ne peuvent avoir d'effet qu'entre les parties contractantes et jamais à l'é. gard des tiers.

Il y a même des cas où les contre-lettres sont vues avec plus de rigueur encore. Ainsi l'art. 1396 du Code civil dispose qu'en matière de contrat de mariage, « nul changement ou con« tre-lettre n'est valable sans la présence et

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«<le consentement simultané de toutes les par«ties dans le contrat de mariage. » — Et l'art. 1397 ajoute « Tous changements et con« tre-lettres, même revêtus des formes prescrites par l'article précédent, seront « sans effet à l'égard des tiers, s'ils n'ont été rédigés à la suite de la minute du contrat de « mariage, et le notaire ne pourra, à peine de dommages-intérêts des parties, et sous plus grande peine, s'il y a lieu, délivrer i "grosses ni expéditions du contrat de mariage sans transcrire à la suite le change<<ment ou la contre-lettre. >>

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En vain quelques jurisconsultes, s'armant du texte de la loi du 22 frimaire au 7, art. 40, ont-ils prétendu que la contre-lettre faite sous signature privée, qui aurait pour objet une augmentation du prix stipulé dans un acte passé, ou dans un acte sous seing privé, précédemment enregistré, devait être déclarée nulle et de nul effet. La jurisprudence qui a prévalu eu maintient la validité, en exigeant seulement, à titre d'amende, quand l'existence en est constatée, une somme triple du droit qui aurait eu lieu sur les sommes et valeurs ainsi stipulées.

Il est vrai cependant que les contre-lettres destinées à déguiser le véritable prix des offices ministériels dont l'investiture appartient au gouvernement, sont aujourd'hui invariablement annulées par les tribunaux ; mais cela tient à un autre ordre d'idées. Toute stipulation en dehors du traité public, soumis à l'approbation du gouvernement, est contraire à l'ordre public; de là la nullité des actes qui contiennent ces stipulations.

G. DE VILLEPIN.

CONTRE-POINT. (Musique.) La science du contre-point est, à l'art de la composition musicale, ce qu'est à l'art de la peinture la science du dessin, et, si l'on peut s'exprimer ainsi, la connaissance des possibilités géométriques et mathématiques de l'harmonie.

La musique étant un langage particulier, pour transmettre ce langage, pour en former le vocabulaire, on pensa qu'il fallait une écri ture ad hoc, et l'alphabet musical fut créé.

Le son, qui est l'essence primitive de la musique, fut donc représenté par des signes que l'ou inventa pour désigner ses différentes natures. Ces signes reçurent originairement le nom de points, et c'est sans doute par cette raison que l'art de faire entendre simultanément plusieurs sons différents fat appelé l'art du contre-point, ou de point sur point. Puisque maintenant l'on nomme note ce qu'au trefois l'on nommait point, il serait plus convenable, pour être entendu de tout le monde, de dire l'art des contre-notes ou de notes sur notes; mais l'ancien usage a prévalu, et l'on dit toujours, pour désigner cette partie des

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