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dans la confiscation, que quand le navire et la cargaison appartiennent au même individu, ou quand les propriétaires de la cargaison ont donné leurs pleins pouvoirs au capitaine (1). La tentative de sortir d'un port bloqué constitue une violation du blocus tout aussi bien que celle d'y entrer. Cependant la coutume anglaise permet la libre sortie de la place bloquée, quand le navire a pris son chargement antérieurement à la déclaration du blocus. A différentes époques certaines Puissances maritimes ont cherché à donner aux droits de blocus une extension arbitraire, aussi contraire aux principes les plus élémentaires du Droit des Gens sur la matière, qu'attentoire aux libertés et aux intérêts des neutres. On a prétendu interdire à ceux-ci toute relation avec des pays entiers, des côtes fort étendues, en les déclarant en état de blocus et en faisant stationner quelques croiseurs dans leur voisinage. Cet usage pratiqué dès le seizième siècle par la Suède, l'Angleterre et la Hollande, fut une des causes qui vers la fin du dix-huitième amenèrent la coalition et le système de la neutralité armée. Dans les dernières guerres entre l'Angleterre et l'Empire français on alla encore plus loin. On inventa le « blocus sur papier », blocus auquel manque la première et la plus essentielle condition, pour constituer une mesure de ce genre, la présence de forces bloquantes sur les lieux déclarés bloqués. Ce sont là des mesures extraordinaires, possibles au milieu d'une situation exceptionnelle et par l'abus de la force, mais qui tombent d'elles-mêmes, comme tout ce qui est exagéré et extrême, aussitôt que les événements rentrent dans une voie plus régulière. Ni le système continental de Napo

(1) Tout ces principes dont la connaissance est si essentielle pour le commerce neutre, se trouvent exposés dans une série de jugements de Sir William Scott, dont le texte authentique se trouve dans ROBINSON, Admirality's Rep. I, p. 83-154.

léon, ni les prétentions de l'Angleterre relativement au blocus sur papier ne sauraient constituer des antécédents pour le Droit des Gens, ce sont des faits d'un haut intérêt historique mais sans aucune valeur pour la détermination rationnelle des droits et des devoirs réciproques des neutres et des belligérants.

IV.

UNE seconde restriction de la liberté commerciale des neutres concerne le commerce des articles qu'on est convenu d'appeler « contrebande de guerre. » L'origine de cette restriction doit être cherchée dans un droit que les gouvernements belligérants ont exercé à toutes les époques de l'histoire, celui de défendre à leurs sujets de fournir certains objets à l'ennemi et de soumettre à une pénalité ceux qui contreviendraient à cette défense. Le Droit des Gens moderne a généralement admis les belligérants à appliquer ces défenses au commerce des neutres avec la partie adverse, quand ce commerce a pour but de fournir à cette dernière des objets qui peuvent lui être d'un service ou d'une utilité immédiats et réels pour ses fins de guerre. Depuis les trois derniers siècles toutes les Puissances maritimes de l'Europe ont reconnu ce droit aux belligérants, et il y a peu de principes aussi définitivement acquis au Droit des Gens que celui qui se trouve consacré par ces concessions réciproques des gouvernements entr'eux.

Il se présente ici une première question, celle de savoir, quels sont les objets compris dans la dénomination de contrebande de guerre? On en a essayé à différentes reprises des définitions générales, mais aucune d'elles n'a reçu une sanction universelle. Celle qui paraît avoir réuni le plus de suffrages, entend par contrebande de guerre la vente et le transport des marchandises qui servent directement à la guerre, en faisant entrer dans cette catégorie principalement les armes et les munitions.

Dans l'énumération des objets qui doivent être considérés comme armes, il n'y a presque pas de diversité dans les documents réglant la matière. On spécifie comme tels les canons, mortiers, armes à feu, pistolets, bombes, grenades, boulets, balles, fusils, pierres à feu, mêches, poudre, salpêtre, souffre, cuirasses, piques, épées, ceinturons, gibernes, selles et brides.

La même unanimité est loin d'exister à l'égard du sens précis dans lequel le terme de « munitions » doit être pris. Les uns entendent par là les munitions de guerre proprement dites, telles que la poudre à canon, les matières qui entrent dans sa fabrication et les projectiles de toutes espèces, objets que nous avons mentionnés parmi les armes parce que sans eux on ne peut fairè usage de certaines de ces dernières. D'autres y ajoutent les chevaux, d'autres encore y comprennent sous la dénomination de «munitions navales » tous les matériaux nécessaires dans la construction des navires, tels que bois, voiles, chanvre, cordages, cuivre en feuille, poix, goudron, etc. Il en est en dernier lieu qui vont jusqu'à faire porter la prohibition sur les provisions de bouche, les métaux précieux et l'argent monnayé. Il est difficile de concevoir une plus grande diversité que celle qui existe dans les opinions des auteurs du Droit des Gens et dans les stipulations des traités au sujet de cette seconde catégorie de contrebande de guerre. Rien n'est plus fréquent que de

voir la même Puissance changer plusieurs fois d'avis, et dans un traité subséquent déclarer contrebande, ce que dans un traité précédent elle avait considéré comme l'objet d'un commerce parfaitement licite et permis aux neutres. Dans la plupart des traités conclus entre les Puissances maritimes de l'Europe depuis le 17me siècle, les chevaux ont été compris parmi la contrebande de guerre et défense est faite explicitement aux neutres d'en amener à un belligérant. L'Angleterre a introduit cette disposition dans les traités qu'elle a faits avec l'Espagne, la Hollande, la France, le Danemark, le Portugal et d'autres Puissances, tandis que dans les conventions de navigation et de commerce qu'elle a conclues avec la Russie, le commerce des chevaux ne se trouve soumis à aucune restriction. Il en est de même de ce que l'on appelle « munitions navales », dénomination qui comprend une foule d'objets, dont le commerce peut former une partie importante du commerce du neutre pendant la paix et dont la prohibition pendant la guerre frapperait ses intérêts les plus essentiels. Quelques traités excluent ces objets de la contrebande de guerre et laissent le neutre parfaitement libre d'en amener aux belligérants, d'autres en défendent strictement jusqu'au transport et frappent de confiscation le navire contrevenant. Dans le cas où de pareils objets sont trouvés à bord d'un navire dont le gouvernement n'a pas stipulé avec l'Angleterre par un traité ce qu'il faut comprendre par contrebande de guerre, la jurisprudence maritime anglaise a établi certains principes, qui servent de guide aux juges et dont la connaissance est fort importante pour les neutres, auxquels il manque la protection d'une convention particulière.

Les cours de prises distinguent dans ces cas. Quand l'objet qualifié de «< munition navale » compte au nombre des produits que le pays, auquel le navire neutre appartient, est dans l'ha

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