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voyant qu'il n'y avait rien à attendre de ces hommes qui s'intitulent hommes d'ordre, et qui n'ont pas le courage de le maintenir et de seconder ceux qui en sont les représentants légaux, le capitaine Dabos, du 25 de ligne, s'enferma dans la citadelle avec le sous-préfet, les autorités de Sisteron et le capitaine du génie Veinelier, résolu à se défendre et à tenir jusqu'à la dernière extrémité.

Enfermé dans ce fort inexpugnable, le capitaine Dabos amena les insurgés à composition et les força, sous les canons de sa forteresse, de lui apporter des vivres pour quatre mois. C'est avec des canons en mauvais état que les commandants Dabos et Veinelier ont fait capituler l'insurrection.

Le 8, une bande d'insurgés, venant du Dauphiné, fut repoussée vigoureusement par les canons de la citadelle; elle se dispersa avant de passer le pont de la Durance, pour se rendre à Digne. La caisse du receveur particulier et la ville ont été sauvées du pillage par l'énergie et le courage de quelques hommes d'ordre et surtout des autorités renfermées dans la citadelle.

Les insurgés, commandés par Buísson, le liquoriste de Manosque, allèrent à la mairie, demander la tête de trois cents notables du pays et le pillage pendant trois heures; mais l'énergie du commandant de la citadelle, qui menaça de les bombarder; et le refus obstiné de la mairie d'obtempérer à des ordres si barbares, demoralisèrent l'émeute; et Buisson, après avoir vainement tenté de réussir dans ses funestes projets en proposant de placer au premier rang les filles et les femmes pour empêcher le capitaine du génie qui commande la citadelle de remplir son devoir, s'achemina sur Digne.

COMBAT DU MÉES.

A l'approche des troupes qui étaient envoyées de différents points pour délivrer Digne, la terreur s'empara des insurgés qui occupaient cette ville.

Les chefs ne savaient que résoudre, tout le monde voulait faire prévaloir son avis; ce fut une confusion, une panique` générale.

Enfin, il fut décidé qu'on marcherait au devant des troupes, et qu'on s'opposerait à leur passage.

5,000 insurgés environ, bien armés et ayant du canon, sortirent de la ville de Digne. et vinrent se poster aux Mées, sur la Durance, près la commune d'Oracian. Protégés par l'escarpement de montagnes peu élevées et servant d'entrée à une gorge très profonde, le point qu'avaient choisi les insurgés pour attendre nos soldats en faisait une position très forte.

Cependant une colonne de 500 hommes environ du 14 léger, envoyée de Marseille le 7, par le général commandant la 70 division et commandée par le lieutenant-colonel Parson, se présente.

Ce brave officier, plein de vigueur et de discernement, a bientôt jugé qu'il ne peut emporter le passage de vive force. Il cherche à le tourner, et une fusillade des mieux nourries s'engage entre nos troupes et les insurgés.

Après deux heures de combat, le bataillon se retire sur Venon-sur-le-Verdun, lisière du Var, n'ayant perdu que quelques hommes, et après avoir tué beaucoup de monde à l'en

nemi.

Une compagnie qui flanquait l'attaque par les crêtes, conduite sans intelligence, s'égara et tomba dans une embuscade de e cinq ou six cents hommes, qui s'emparèrent de quinze soldats et d'un officier. Ces prisonniers furent renvoyés le lende,main, après avoir été désarmés.

S'étant mis un jour plus tard en rapport avec le colonel de Sercey, qui, à la tête de cinq cents hommes, vingt-cinq chevaux et une section d'artillerie, venait de rétablir l'ordre à Brignolles et aux environs, les deux colonnes réunies marchèrent sur Digne, qui fut évacuée et délivrée le lendemain 11 décembre.

Dans cette insurrection, on estime que dans un rayon assez étroit du département se trouvaient vingt mille insurgés à peu près en armes, recrutés dans chaque commune, qui toutes ont fourni leurs contingents.

Ainsi, dès le 11 décembre, cette insurrection, formidable au premier abord, était anéantie. Tous les points de Forcalquier, de Manosque, d'Apt étaient parcourus et pacifiés; Sisteron était dégagé; Digne, chef-lieu du département, point le plus éloigné de tout secours, puisqu'il est à trente-sept lieues d'Avignon, trente-neuf lieues de Marseille, villes de garnison, était évacué par les insurgés; le Var réduit; enfin, dans les Basses-Alpes, il ne restait plus que des débris de bandes.

Et veut-on savoir avec quel effectif de troupes tous ces résultats ont été obtenus? Avec deux mille cinq cents hommes au plus et quelques pièces de canon.

Alpes (Hautes).

Le département des Hautes-Alpes a été un peu agité. L'arrestation des principaux meneurs a maintenu la tranquillité.

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A la nouvelle des événements de Paris le sieur Bezard, ancien maire de Chalabre, révoqué depuis plusieurs mois, s'est transporté à la mairie de cette ville, escorté par une troupe de démagogues, en a chassé l'administration municipale et s'y est installé au nom du peuple.

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Le sous-préfet de Limoux, prévenu de ces faits, s'est immédiatement rendu sur les lieux, avec cinquante hommes de troupes. Le sieur Bezard, averți de l'approche du sous-préfet, a pris

Ja fuite avee ses acolytes. L'un d'eux a été arrêté et ramené à la prison de la ville, cù il a été incarcéré, malgré les efforts de quelques perturbateurs, qui ont tenté de le délivrer.

Grâce aux mesures énergiques prises par l'autorité mnnicipale, solennellement réinstallée dans ses fonctions, l'ordre a été retabli dans l'arrondissement.

Cher.

"

A Saint-Amand, dans la journée du 4 des groupes armés se sont formés, l'un d'eux a cerné et maltraité le sous-préfet et le commissaire de police; ce dernier, saisi, frappé, terrassé, a tué d'un coup de pistolet l'homme qui menaçait sa vie..

du

Le sous-préfet, les autorités, la gendarmerie, les grenadiers 41, la compagnie entière d'artillerie de la garde nationale, les pompiers et de nombreux volontaires ont été promptement sur pied, et leur énergie a suffi pour rétablir l'ordre dans la ville.

Le commissaire de police, M. Lambert, admirable de dévoûment pendant le choléra de 1849, s'est montré aussi courageux devant l'émeute..

La famille Rémond, dépositaire des clés du clocher, a repoussé les armes à la main une troupe armée qui voulait sonner le tocsin.

Les hommes d'ordre se sont montrés unanimes et résolus à Saint-Amand, comme ils l'étaient à Sancerre.”

Aveyron.

Des troubles assez grands ont jeté pendant quelques heures la perturbation dans le département de l'Aveyron.

La nuit du 4 au 5. avait été assez agitée à Rodez. Le matin on sut qu'une bande d'hommes armés étaient partis de Villefranche et se dirigeaient sur Rodez; ils arrivèrent en effet vers le milieu du jour, nommèrent une commission démagogique et envoyèrent des délégués sommer le géncral commandant le département de reconnaître cette commission comme autorité départementale. Ces délégués furent arrêtés.

Les meneurs étaient réunis dans une maison d'un faubourg bâtie sur une pente rapide, et qui, indépendamment de son entrée sur la rue, possède plusieurs issues sur les derrières, par lesquelles on peut entrer dans les gorges de l'Aveyron..

On craignait que les insurgés n'opposassent une vive résistance; par bonheur, il n'en a pas été ainsi. La troupe n'a pas eu à faire usage de ses armes. Dix personnes ont été arrêtées; lorsqu'elles ont traversé la ville entre les soldats, toute la population témoignait la joie la plus vive.

Les bandes d'insurgés qui s'étaient rendues à Rodez se sont alors dispersées dans la campagne; l'une d'elles a fait une

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vaine tentative pour s'emparer de l'Hôfel-de-Ville de Villefranche.

A Milhau, les insurgés se sont emparés de l'Hôtel-de-Ville et des fusils de la garde nationale qui y étaient déposés. Ils ont abandonné leur position dès que les brigades dé gendarmerie de l'arrondissement, réunies à la hâte, se sont présentées.

A Rignac, chef-lieu de canton, une bande d'insurgés a voulu forcer le maire à donner les armes de la garde nationale; le maire a résisté avec la plus noble énergie: il a fait entrer dans la maison commune des hommes sûrs, leur a distribué des armes et a effrayé ainsi les insurgés, qui se sont retirés en désordre.

Au milieu des sentiments douloureux et indignés qu'inspirent ces tentatives de guerre civile, on est heureux de dire que l'immense majorité de la population s'est montrée animée d'un grand dévoûment pour la cause de l'ordre, et que tous, ouvriers et bourgeois, ont énergiquement flétri les menées des révoJutionnaires.

Bouches-du-Rhône.

Le 5 décembre, les ouvriers employés aux principaux chantiers de Marseille, ont, à l'instigation de quelques meneurs, abandonné leurs travaux et se sont réunis en grand nombre pour se porter en masse sur la préfecture et l'Hôtel-de-Ville.

Instruites de ces projets de désordre, les autorités civiles et militaires ont pris toutes les mesures nécessaires pour en prévenir l'exécution. Des arrestations ont été faites. Des pièces d'artillerie ont été braquées sur le cours Saint-Louis, et des troupes ont occupé la place Saint-Ferréol et les rues voisines de la préfecture, où la circulation était interdite, ainsi que sur la place Saint-Louis. De fréquentes patrouilles ont circulé dans les rues qui présentaient une physionomie fort animée, sans néanmoins que l'on y remarquât la moindre crainte sur la coupable manifestation dont l'annonce avait couru.

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Quelques cris de: Vive la République! ont été poussés; mais ils n'ont pas eu le résultat que s'étaient proposé les fauteurs du désordre, et la tentative d'insurrection a échoué, grâce aux mesures énergiques qui ont été prises tant par les autorites civiles qué par les autorités militaires. La jacquerie était pourtant bien organisée à Marseille, et d'importantes saisies de poudre, cartouches et autres munitions de guerre ont été opérées par les agents de la brigade de sûreté, et les militaires de la garde municipale, qui ont accompli leur tâche avec une intrépidité digne de tout éloge.

A Lorgues, les insurgés se sont emparés du maire, du juge de paix et de plusieurs habitants notables. Ils les ont emmenés avec eux dans leur marche sur Draguignan, et les ont placés,

au premier rang, pour mettre les troupes dans l'impossibilité de faire feu sans frapper des hommes d'ordre. M. de Gasquet père avait été laissé, à cause de la longueur du chemin. Nous désirerions que ce fait eût été inspiré par un sentiment d'humanité. Malheureusement, il n'en est pas ainsi : cet homme honorable, que son âge aurait fait respecter par des troupes étrangères, fut accablé d'injures et de mauvais traitements, et abandonné seulement lorsque, exténué de fatigue, il déclara que, quelle que fût l'intention de ces forcenés à son égard, ilne pouvait continuer sa route.

Côte-d'Or.

Dijon possédait quelques sections démagogiques. Pour assurer la tranquilité de la ville, l'autorité, à la nouvelle des événements de Paris, jugea nécessaire de faire saisir les principaux

méneurs.

Ces arrestations émurent vivement les frères et amis qui se rendirent dans les ateliers de Mme Noëllet, pour y faire imprimer, malgré elle, des placards incendiaires, ayant pour objet d'annoncer la chute du Président de la République, et l'intronisation à l'Hôtel-de-Ville de Dijon de la fameuse commune rouge. Cette ridicule comédie s'est terminée par l'arrestation de douze meneurs, parmi lesquels il faut citer MM.Carion, Flasselière, Limaux, Dumez et Perrot.

Le soir, des groupes nombreux stationnèrent sur la place d'Armes; mais, bientôt ils furent dispersés par la troupe, et la ville reprit bien vite son aspect ordinaire.

Beaune, Nuits, Louhans eurent aussi leurs tentatives de désordre, mais comme à Dijon elles ont échoué devant l'attitude de l'autorité. Seulement un crime digne de la lâcheté des socialistes a plongé dans la désolation la ville de Nuits.

M. Arthur Marey, jeune homme de vingt-cinq ans, rentrait chez lui vers 11 heures du soir, après avoir fait son service de garde national, lorsque deux misérables sicaires des sociétés secrètes se précipitent sur son passage, et l'un d'eux lui tire un coup de pistolet qui l'étend mort sur la place. Ce malheureux jeune homme, victime d'un lâche guet-apens, a emporté dans la tombe les regrets unanimes de tous les honnêtes gens.

Deux-Sèvres.

Le 4 décembre, quelque fermentation a régné à Niort. Vers trois heures, des groupes nombreux se sont formés sur la place de la mairie. La Marseillaise a été chantée; les cris de Vive la république! aux armes! ont été proférés...

L'attroupement grossissait, lorsqu'un peloton d'infanterie a paru et s'est rangé devant la mairie. Il a été bientôt suivi d'un. détachement de cavalerie, qui a cerné la place du Donjon.

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