Page images
PDF
EPUB

ont fait couler le sang innocent, et commis un attentat monstrueux contre la société tout entière.

Les sociétés secrètes n'avaient pas, à Paris, d'après les calculs les plus exacts, plus de trois mille à trois mille cinq cents recrues enrôlées, véritablement dangereuses, et prêtes à livrer bataille. Les mesures prises depuis le 2 décembre auront pour résultat d'avoir à peu près détrnit ou enlevé cette armée du commu

nisme.

D'abord, les pertes des sections derrière les barricades ont été énormes, et dépassent même les résultats des journées de juin; ensuite les arrestations, qui dépassent déjà seize cents, et qui continuent par quarante par jour, en moyenne, éclaircissent singulièrement les rangs de l'émeute. On peut croire que d'ici à jours, tout le personnel actif et militaire des sociétés secrètes sera prisonnier.

peu de

La conduite du Président aura donc eu pour résultat final de délivrer la France de la tyrannie des factions, de lui rendre sa liberté, sa souveraineté, sen repos; d'avoir permis de purger le pays, à coup sûr, des hommes corrompus et dangereux qui formaient l'armée du socialisme; et d'avoir ouvert pour le pays une ère de véritable liberté, de repos, de confiance, de travail et de bien-être.

On peut déjà chiffrer le résultat matériel de l'acte du 2 décembre.

Le 1°r décembre, la rente 5 pour cent était à 91 fr. 60.
Le 16 décembre, elle était à 100 fr. 90.

C'est donc une hausse de près de 10 francs, c'est-à-dire une augmentation d'un dixième de la fortune publique et privée.

Paris.-Imprimerie LANGE LÉVY et Comp., 16, rue du Croissant.

[graphic]
[graphic]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[merged small][merged small][ocr errors][merged small]

Cour d'assises de la Seine du 24 avril 1841,

Dans les derniers jours de janvier 1844, la Chambre était en proie à une agitation singulière. La discussion du projet de loi des fortifications de la capitale avait ranimé dans son sein des luttes ardentes, passionnées, tumultueuses. La tribune était un champ de bataille où les orateurs venaient attaquer et défendre tour à tour avec acharnement le projet du gouvernement. La presse entière s'était associée à ce mouvement et la population de Paris, ordinairement si indifférente pour tout ce qui se discute an Palais-Bourbon, attendait avec anxiété la solution d'une question si dangereuse pour la liberté.

Au milieu de la préoccupation générale le journal la France publie des fragmens de lettres attribuées à Louis-Philippe. Le lendemain, plusieurs journaux les reproduisent. Cette publication audacieuse provoque à l'instant même une effervescence extraordinaire. Le ministère du 29 octobre pour éviter des interpellations qui pouvaient compromettre le sort de la loi de l'embastillement, et donner à l'opinion publique la satisfaction qu'elle exigeait, fait saisir le journal la France. Quelques heures après, des commissaires de police envahissent les bureaux du National, du Commerce, de l'Echo Français, de la Gazette de France et de la Quotidienne. Des perquisitions et des saisies y sont faites et l'envoi des numéros qui avaient reproduit les lettres est arrêté. Le même jour, le Moniteur s'exprimait ainsi :

« Plusieurs journaux publient des fragmens de lettres faussement et » criminellement attribuées au roi. Des poursuites viennent d'être or» données et pour crime de faux et pour offense à la personne du roi. » Le Messager, journal officiel du soir, ajoutait :

« Le journal la France qui le premier a publié les fausses lettres postérieures à 1830 est un journal ignoré, sans retentissement, sans publicité sérieuse. Si d'autres journaux n'avaient pas reproduit cette publication, le scandale nouveau n'aurait en quelque sorte pas existé. L’impunité de cette feuille inconnue laissée à son isolement n'avait rien dont on dût s'alarmer; mais lorsque la France a trouvé des échos empressés dans des journaux répandus, lorsque le concert de ces feuilles de couleurs diverses a rendu l'outrage véritablement dangereux, on a dû poursuivre et on l'a fait immédiatement sans la moindre hésitation. »>

En conséquence, le ministère ne se contente pas de poursuivre le journal la France et les feuilles reproductrices pour délit de presse, il fait arrêter sous l'inculpation de faux, MM. de Montour, gérant de ce journal, et Lubis, son rédacteur en chef. Ces messieurs sont interrogés par M. Jourdain, juge d'instruction, et écroués à SaintePélagie. Après une instruction qui pouvait être beaucoup plus complète « on a arrêté la procédure au moment où on était sur la voie (1) de la

(1) Plaidoirie de M. Berryer.

» vérité. » Une ordonnance de non lieu, en date du 5 mars, décharge MM. de Montour et Lubis de l'inculpation de faux, déclare qu'il n'y a pas lieu à suivre sur ce point, et met hors de cause M. Lubis et les journaux reproducteurs. M. de Montour reste seul prévenu du délit d'offense à la personne du roi.

C'est sur ce chef d'accusation qu'il a à répondre aujourd'hui devant la cour d'assises.

Le Palais de Justice présente un aspect très animé. La foule des curieux assiége les portes de l'audience et se presse dans l'enceinte. Toutes les notabilités de la magistrature, du barreau, de la presse, s'étaient donné rendez-vous à cette solennité judiciaire.

On le comprendra sans peine. Il s'agissait du procès le plus grave qui ait eu lieu depuis dix ans. Voici à ce sujet ce qu'on lit dans le Journal des Débats:

» Aujourd'hui le gérant du journal la France, traduit devant la cour d'assises à raison de la publication de lettres faussement attribuées au roi, a été acquitté par le jury.

Voici comment la Gazette de France s'exprime à ce sujet :

« Le jury de Paris vient de rendre une décision d'une immense por»lée, dans les circonstances si graves où la France se trouve aujour» d'hui placée.

» L'affaire des lettres de Louis-Philippe, poursuivies d'abord comme >> fausses, puis comme offensantes, se résumait en une accusation déférée » aujourd'hui aux juges du pays.

» Ces juges ont souverainement prononcé. Le journal la France est » acquitté.

» Les conséquences d'un pareil verdict n'ont pas besoin d'être dive» loppées aujourd'hui. Le public les comprend et en sentira toute la gras »vité.»

L'audience est présidée par M. Poultier. M. Patarrieu-Lafosse occupe le banc du ministère public. M. de Montour est assisté de Me Berryer,

son avocat...

Le greffier donne lecture de l'acte d'accusation, duquel il résulte que M. de Montour est prévenu d'offense envers la personne de Louis-Philippe, pour publication de lettres remontant aux premières années de la révolution de 1830.

[ocr errors]

M. LE PRÉSIDENT, au prévenu. Avant que les débats s'engagent par le réquisitoire de M. l'avocat général et la plaidoirie de votre avocat, je dois vous demander si vous avez l'intention de produire quelques pièces dont vous n'ayez pas donné connaissance dans le cours de l'instruction. M. DE MONTOUR. Ces pièces se produiront dans ma défense.

[ocr errors]

M. LE PRÉSIDENT, -· Vous vous rappelez quel a été votre système dé défense dans l'instruction. Vous aviez dit, lorsqu'on vous demandait vos preuves, que vous les produiriez devant ceux que vous appelez vos juges. M. DE MONTOUR. Elles seront produites quand il en sera temps. M. LE PRÉSIDent. Je dois vous interpeller formellement sur le point de savoir si, à l'heure qu'il est, au moment où il vous est permis de produire les documens, originaux, pièces originales, vous avez l'intention de les produire. Il faut, en effet, que le ministère public, comme la défense, s'appuient sur ces mêmes pièces. Qu'avez-vous à répondre ?

M. LE PRÉSIDent.

M. DE MONTOUR. C'est à l'accusation à faire sa preuve. C'est après l'avoir entendue, que nous verrons ce que nous aurons à faire. Il est cependant un point essentiel à établir. En matière de presse, le délit est dans l'écrit publié; mais, par suite de la singularité de cette affaire, il a été question, dans cette même affaire, de quelque chose autre que l'écrit publié. Vous avez parlé de pièces que vous avez dites originales, et qui ont servi de base à l'accusation. Maintenant, pour savoir si le délit qui vous est reproché aura la qualification fixé par l'arrêt de mise en accusation, nous avons à vous demander si Vous avez à invoquer autre chose que le journal publié ou d'autres documens dont il serait essentiel de donner connaissance avant l'ouverture de la discussion.

« PreviousContinue »