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entre le père et la mère, le choix du culte appartient à celui des deux qui a la garde de l'enfant1.

§ 1. Garde, éducation, apprentissage, choix de l'état de la fille mineure née hors mariage soumise à la puissance paternelle.

180. En réalité, quant à sa personne, la situation de l'enfant naturel reconnu diffère peu de celle des enfants légitimes. Ici encore la loi est d'accord avec la nature : pouvait-elle donner à cet enfant de meilleurs défenseurs, de plus sûrs protecteurs que son père et sa mère?

« L'enfant à tout âge doit honneur et respect à ses père et mère.» « Il reste sous leur autorité jusqu'à sa majorité ou son émancipation'. »

L'enfant naturel reconnu n'attend-il pas d'un moment à l'autre sa légitimation par le mariage de ses père et mère?

Cette autorité naît de l'obligation naturelle des père et mère de nourrir, entretenir, élever leur enfant et de pourvoir à ses besoins.

Le père et la mère lui doivent une éducation conforme à leurs moyens. C'est à eux de surveiller leur jeune fille, de lui choisir un pensionnat, une école, des professeurs, des institutrices.

Il leur appartient aussi de la diriger et de la préparer pour un état, une profession de leur choix, de la mettre en apprentissage, en consultant ses aptitudes, sa fortune et leurs propres ressources.

1. Massé et Vergé, t. Ier, p. 432, note 1.

2. C. civ., art. 371, 372.

Bien qu'en principe les frais d'éducation et d'apprentissage soient à la charge des père et mère naturels, j'estime que ces frais doivent être supportés par l'enfant qui a des revenus personnels suffisants, par la raison que ses biens sont exempts de l'usufruit légal des père et mère1.

En aucun cas l'enfant n'a d'action contre ses père et mère pour un établissement par mariage ou autrement.

181. La jeune fille ne peut, avant sa majorité ou son émancipation, quitter la maison paternelle, travailler dehors, faire un apprentissage, exercer une profession, sans la permission du père ou de la mère qui l'a reconnue; en cas d'absence, d'empêchement ou de mort du père, sans la permission de la mère; à moins qu'elle n'y soit contrainte par de mauvais traitements".

Elle ne peut contracter aucun vœu comme novice dans une congrégation hospitalière de femmes, si elle n'a seize ans révolus. A partir de seize ans, les vœux de la jeune fille âgée de moins de vingt et un ans ne seront reçus que pour une année et avec le consentement de son père, ou de sa mère à son défaut, ou bien d'un curateur ad hoc nommé par un conseil de famille à défaut de père et de mère. A vingt et un ans accomplis une novice peut s'engager pour cinq années sans avoir besoin d'autorisation ".

1. Bastia, 29 déc. 1856.

2. C. civ., art. 204.

3. Massé et Vergé, t. Ir, p. 365, note 3.

4. Décr. 18 févr. 1809.

De même pour se marier, le consentement de son père ou de sa mère est indispensable à la jeune fille tant qu'elle n'a pas vingt et un ans. Il lui faudra le consentement d'un tuteur ad hoc nommé par le conseil de famille, quand le père et la mère seront décédés ou empêchés de manifester leur volonté 1.

182. En vue de préparer l'adoption de la jeune fille

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qui en principe ne saurait avoir lieu avant sa majorité cette enfant peut, avant l'âge de quinze ans révolus et non après, être placée sous la tutelle officieuse d'une personne âgée de plus de cinquante ans n'ayant pas de descendants légitimes; mais pour cela il faudra le consentement du père et de la mère qui l'ont reconnue, ou à leur défaut celui d'un conseil de famille (ou enfin, si l'enfant n'a point de parents connus, en obtenant le consentement des administrateurs de l'hospice qui l'a recueillie ou de la municipalité du lieu de sa résidence).

Notons que la tutelle officieuse offre un avantage exceptionnel, en permettant au tuteur officieux d'adopter par son testament l'enfant placé sous sa tutelle depuis cinq années, quoiqu'il ne soit pas encore majeur.

On ne conteste plus aujourd'hui qu'un enfant naturel puisse être adopté par le père ou la mère qui l'a reconnu; tandis que l'adoption ne pourrait être faite conjointement par le père et la mère tant qu'ils ne seraient pas mariés ensemble. Or la reconnaissance ne met pas obstacle à ce que le père ou la mère s'attache, en outre,

1. C. civ., art. 158, 159.

son enfant par le lien de la tutelle officieuse; et cette tutelle offrira l'avantage que l'enfant pourra être adopté testamentairement, dans le cas où l'adoptant viendrait à mourir cinq ans après la date de la tutelle et avant la majorité de l'enfant1.

De là je conclus que deux époux qui auraient reconnu un enfant depuis qu'ils se sont mariés ensemble, c'està-dire trop tard pour qu'il soit légitimé, seront admis conjointement ou séparément à l'adopter en la forme ordinaire, et même à l'adopter après l'avoir pris sous leur tutelle officieuse; tandis que, si la reconnaissance était antérieure au mariage, l'enfant se trouvant légitimé ne serait pas sujet à adoption.

183. Lorsque tous deux ont fait la reconnaissance, si le père disparaît, la mère aura la surveillance de l'enfant et l'exercice des droits paternels sur sa conduite et son éducation.

De même cette direction revient à la mère si, au lieu de disparaître, le père se trouve dans l'impossibilité de l'exercer pour cause d'interdiction judiciaire ou légale, de placement dans une maison d'aliénés, ou de déchéance de la puissance paternelle.

Elle revient à la mère après la mort du père.

Bien plus, encore que le droit d'éducation appartienne d'abord au père, cependant les tribunaux peuvent confier à la mère le soin de cette éducation et la garde de l'enfant, lorsque son intérêt l'exige, surtout sur une jeune fille2.

1. C. civ., art. 343-366. 2. Voir loi 30 juin 1838.

Quand la mère conteste sérieusement la paternité de celui qui se dit le père, et qu'il s'agit de décider à qui des deux la garde et l'éducation seront confiées, la mère doit avoir la préférence au moins jusqu'au jugement du litige.

La surveillance et l'éducation pourraient aussi faire l'objet de conventions particulières, soit entre le père et la mère, soit avec un tiers, suivant l'intérêt de l'enfant '.

Si le père et la mère ont tous deux disparu ou bien sont empêchés légalement, le tribunal civil nommera un administrateur à la personne de l'enfant naturel mineur reconnu, en ordonnant des mesures de garantie, après avoir consulté un conseil de famille s'il le juge à propos1.

184. Enfin, après avoir élevé leur enfant, après l'avoir mis en état de vivre de son travail, le père et la mère naturels doivent lui fournir des aliments, et réciproquement l'enfant leur doit des aliments, si l'un d'eux est dans le besoin, à moins que ce besoin ne vienne d'inconduite ou de paresse. A défaut de disposition dans la loi, ces aliments sont dus par suite de l'obligation naturelle résultant du fait de paternité ou de maternité3.

Question: La dette alimentaire existe-t-elle entre l'enfant naturel et les ascendants de ses père et mère? Il est vrai que la loi prohibe le mariage entre tous les ascendants et descendants naturels; sous ce rapport la loi reconnaît à l'enfant naturel des aïeuls et des aïeules; elle ne peut méconnaître le lien de la nature, elle s'y attache

1. Toullier, t. II, no 1076; Caen, 27 août 1828.

2. Voir rej., 14 juill. 1878.

3. Voir Chardon, Puissance paternelle, no 9; rej., 27 août 1811.

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