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III. La femme témoin en justice.

11. On ne lui conteste point la capacité de déposer devant la justice sous l'égide des formes et des garanties ordinaires non seulement aucune loi ne s'y oppose, mais encore l'intérêt de la vérité veut qu'il en soit ainsi, elle n'a jamais trop d'organes.

IV. La femme admise à prêter serment.

12. Le serment a son principe dans la conscience; chacun de nous, ayant conscience de ses actes, doit toujours être disposé à dire la vérité, parce qu'il se sent engagé intérieurement avant d'avoir répondu à la formule qui lui est proposée. Par cela même, le serment, dans tous les temps et chez tous les peuples, s'est élevé en quelque sorte à la hauteur d'un dogme, identique au fond, ne variant que dans la formule selon le degré de foi religieuse ou de développement moral d'une société. Est-on obligé de prêter serment?

Oui, sans nul doute, quand la législation l'ordonne, par la raison que toute loi promulguée est obligatoire.

Prêter serment devant un juge ou devant un tribunal n'est pas faire un acte ordinaire, c'est concourir à l'œuvre de la justice, à son exercice, c'est faire un acte public, et vous y êtes admises, mesdames. Il n'en a pas toujours été ainsi, il fut un temps où l'on vous écartait de la prestation du serment.

J'ajouterai que vous-mêmes avez le pouvoir de

déférer le serment, quand deux plaideurs vous ont confié le jugement de leur procès en qualité d'arbitres juges.

Mais il n'y a pas que le serment judiciaire, il y a encore le serment professionnel, qui participe du serment politique, par exemple celui que prête la femme nommée directrice d'un bureau de poste ou d'un débit de tabacs.

V. La femme gardienne de scellés.

13. Le 6 vendémiaire an III (27 septembre 1794), la Convention nationale décrétait qu'à l'avenir une femme ne pourrait être établie gardienne des scellés. Mais, quelques jours après, c'est-à-dire le 21 du même mois de vendémiaire, un autre décret disposait que cette incapacité ne s'appliquerait qu'aux scellés mis sur les effets et meubles appartenant à la Nation. D'où il résulte qu'une femme peut être préposée à la garde de scellés apposés sur les meubles et objets qui appartiennent à un particulier.

Voilà, mesdames, une disposition de la loi qui permet aux juges de paix de vous investir d'une fonction judiciaire ou semi-judiciaire, d'une mission de confiance s'ajoutant à la série que nous venons de retracer. Mais cette fonction vous impose une grande responsabilité, vigilance et circonspection. Par compensation - s'il est permis de parler de compensation en pareille matière - le tarif alloue au gardien des scellés, homme ou femme, sans distinction, une rétribution, bien faible, mais qui vous mettra une fois de plus à même de pra

tiquer la maxime économique de Benjamin Franklin : Une épingle épargnée chaque jour fait six-blancs au bout de l'année.

VI. La femme témoin dans un acte authentique.

14. Suivant la jurisprudence établie, certains actes authentiques font foi en justice des faits qu'ils constatent jusqu'à preuve contraire. Et, en principe, nos lois n'admettent que les hommes à signer un acte de notoriété, mais cette règle reçoit quelques exceptions. La plus remarquable de ces exceptions est celle qui, dans le cas où l'un de deux futurs époux serait dans l'impossibilité de se procurer son acte de naissance pour se marier, lui permet de le suppléer en rapportant un acte de notoriété délivré par le juge de paix du lieu de sa naissance ou par celui de son domicile, et contenant « la déclaration faite par sept témoins, de l'un ou de l'autre sexe, parents ou non parents », des prénoms, nom, profession et domicile du futur époux, et de ceux de ses père et mère s'ils sont connus, le lieu et, autant que possible, l'époque de la naissance et les causes qui empêchent d'en rapporter l'acte1.

Nous ne parlons pas des autres circonstances dans lesquelles la loi admet les femmes à signer des actes de notoriété rédigés sur l'attestation de sept témoins, quelquefois de quatre seulement.

Vous voici donc, mesdames, associées une fois de plus à la rédaction d'actes authentiques auxquels vous contri

1. C. civ., art. 70 et 71.

buez à imprimer un caractère public. J'ai vu des notoriétés revêtues de sept signatures de femmes.

VII. La femme exerçant la puissance paternelle.

15. C'est entre ses mains un pouvoir tutélaire que la mère exerce sur ses enfants, dont le père n'existe plus ou bien est absent ou empêché. Cette autorité maternelle lui confère notamment la capacité légale d'émanciper ses enfants, de consentir ou de s'opposer à leur mariage, à leur adoption, à leur enrôlement militaire, à leur entrée dans les ordres sacrés, d'autoriser sa fille à s'engager dans une congrégation hospitalière de femmes. Ne sont-ce pas là des actes qui relèvent du ministère public?

VIII. La femme tutrice, subrogée tutrice, curatrice, administratrice judiciaire, membre d'un conseil de famille.

16. Il fut un temps qui dura des siècles - où les femmes étaient soumises à une tutelle perpétuelle, c'està-dire pendant toute leur vie. On ne leur reconnaissait pas la capacité d'être tutrices ou curatrices. Cette législation a fait place à un ordre de choses plus rationnel et plus humain non seulement une femme n'est plus en tutelle après l'âge de vingt et un ans accomplis ni quand elle est mariée, mais encore elle devient tutrice de ses enfants âgés de moins de vingt et un ans, si elle perd son mari; et une grand'mère peut être nommée tutrice de ses petits-enfants quand elle est veuve. La femme

peut aussi être nommée tutrice de son mari s'il vient à être interdit. Même capacité d'être subrogées tutrices.

En outre, la mère peut être nommée curatrice de ses enfants émancipés par elle ou par leur père.

Remarquez, mesdames, que la tutelle, de même que la curatelle, est une fonction civique qui participe des fonctions publiques.

IX. La femme directrice d'école publique

(maternelle, communale ou normale).

17. Ici encore elle participe aux fonctions publiques, elle en remplit une, la plus belle et la plus élevée, en dirigeant l'enfance, en formant son cœur pour la vertu, sa personne pour les grâces. Quelle mission de confiance, et que d'efforts vous devez faire pour vous en rendre dignes! Quelle est la fonction politique qui pourrait être plus enviable?

Et à mesure que la jeune élève grandit, si elle a des dispositions pour les arts, pour le dessin, la gravure ou la musique, quels maîtres seront chargés du soin de développer ses aptitudes, de lui donner des leçons? C'est encore vous, mesdames, qui serez autorisées à cet effet.

X. La femme directrice d'un bureau de poste, de télégraphe, etc.

18. Vraiment, mesdames, il semble que cette sorte d'emploi ait été créée pour vous exclusivement: coup d'œil, finesse, dextérité, agilité dans l'exécution. Je ne dis rien du secret, qui sans doute ne sied pas moins à

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