Page images
PDF
EPUB

bonnes mœurs, l'ordre public, la sûreté des personnes et des propriétés;

2° Quand l'objet du litige est un immeuble situé en France;

3° Quand il s'agit de questions d'intérêt privé à raison desquelles des traités diplomatiques ont formellement reconnu la juridiction française;

4° Toutes les fois qu'un différend quelconque existe entre Français et étranger.

Dans ces quatre hypothèses, les tribunaux français doivent juger, à peine de déni de justice', et les plaideurs domiciliés ou non domiciliés ne sauraient décliner la juridiction.

5° La compétence est encore obligatoire pour les tribunaux et pour les plaideurs, quand le procès existe entre deux étrangers domiciliés ou dont un seul est domicilié en France;

6° Et aussi quand il s'agit de litige relatif à une succession dévolue à des étrangers non domiciliés et comprenant des biens meubles ou immeubles sis en France.

Mais, en dehors de ces six hypothèses, quand il s'élève une contestation d'intérêt privé entre deux étrangers, la compétence est facultative d'un côté comme de l'autre, le défendeur peut décliner la juridiction française, et s'il l'accepte, le tribunal reste néanmoins libre de juger ou de ne pas juger, à moins de convention diplomatique contraire.

Il est un sujet, un seul sur lequel les tribunaux fran

1. C. civ., art. 4.

çais sont incompétents: c'est la question qui touche à l'état civil d'un étranger domicilié ou non, à sa capacité personnelle, question dont ils ne sauraient connaître, lors même que l'intéressé ou les intéressés consentiraient à leur soumettre le différend; sauf en un cas exceptionnel1.

Du reste, sans exception, quelle que soit la nature du litige, la forme de procéder est toujours réglée par la loi du lieu où la demande est intentée, tandis que le fond du procès reste soumis aux lois qui gouvernent la convention, l'acte ou le fait qui engendre la contestation.

SECTION I. Contestations entre Français et femme étrangère.

295. Une étrangère, résidant ou non en France, domiciliée ou non domiciliée, peut traduire un Français devant les tribunaux de France pour l'exécution des obligations par lui contractées envers elle «<en pays étranger», à plus forte raison pour les obligations contractées en France; et les juges sont obligés de juger.

Ce qui comprend non seulement les engagements nés d'un contrat, mais encore toute obligation née d'un quasi-contrat, d'un délit, d'un quasi-délit, de la loi, et généralement de tout fait qui engendre une action personnelle, n'importe où ce fait a eu lieu3.

Ce qui s'applique à toute espèce d'obligations civiles ou commerciales, quelle qu'en soit la cause : vente,

1. Voir les numéros 301 et 308, infra.

2. C. civ., art. 15.

3. Dalloz, Répertoire, vo DROIT CIVIL, no 257.

louage, mandat, testament, donation, partage de succession, demande alimentaire entre époux, enfants, parents, exécution de société, payement de billets, lettres de change, etc.

Ainsi une étrangère a action pour demander l'exécution de ses conventions matrimoniales, par suite de son mariage contracté en France ou à l'étranger avec un étranger depuis naturalisé Français.

Elle peut demander la séparation de biens ou la séparation de corps contre son mari devenu Français; des mesures provisoires, telles qu'une provision alimentaire, la garde des enfants, l'autorisation d'habiter hors de la maison conjugale.

296. Règle générale : dans toute instance, l'étrangère qui est demanderesse principale ou intervenante contre un Français doit donner caution pour le payement des frais et des dommages-intérêts résultant du procès1.

Mais elle est dispensée de fournir cette caution judicatum solvi:

Quand elle possède en France des immeubles d'une valeur suffisante;

Quand elle a été admise au domicile en France; Quand il y a dispense formelle dans un traité international.

En est aussi dispensée l'étrangère, demanderesse en appel, qui était défenderesse en première instance.

Toujours dispensée quand elle plaide en matière commerciale, c'est-à-dire commerciale des deux côtés.

1. C. civ., art. 16; C. pr., art. 166.

2. C. civ., art. 16.

297. Par réciprocité l'étrangère, résidant en France ou n'y résidant pas, domiciliée ou non domiciliée, peut être citée devant les tribunaux français pour l'exécution des obligations par elle contractées en France ou à l'étranger envers un Français1: il n'importe que celuici ait un établissement industriel à l'étranger, qu'il réside en France ou ailleurs; le tribunal saisi de l'action est obligé de juger, et l'étrangère ne saurait décliner la compétence.

Ce qui comprend toute espèce d'obligations, quelle qu'en soit la cause, civile, commerciale, naturelle.

Ainsi, un Français ou une Française a devant les tribunaux de France l'action en demande d'aliments contre l'étrangère qu'il désigne comme étant sa mère, par conséquent l'action en recherche de la maternité".

Un enfant de nationalité française a également action en France contre sa mère étrangère en qualité de tutrice, pour faire ordonner un emploi de fonds dans un intérêt de protection et de conservation *.

Un mari devenu Français peut actionner sa femme restée étrangère en prestation d'aliments, séparation de corps, séparation de biens.

De même un Français peut demander contre une étrangère la validité ou la nullité d'un testament fait par un étranger décédé en France ou en pays étranger. Et, généralement, l'acceptation par une étrangère

1. C. civ., art. 14.

2. Dalloz, Répertoire, vo DROIT CIVIL, no 265.

3. Cass. 19 juill. 1848.

4. Rej., 25 août 1847.

5. Paris, 12 janv. 1853.

d'une hérédité ouverte en France ou ailleurs et sur laquelle un Français réclame un legs, rend l'étrangère justiciable de la juridiction française pour l'exécution du testament1.

Enfin, un Français peut saisir les tribunaux de France d'une demande contre sa cohéritière ou sa coassociée étrangère, afin de faire liquider et partager une succession ou une société dont le siège est en France ou à l'étranger'.

Dans ces divers cas, la compétence est obligatoire pour les juges et pour la femme étrangère résidant ou non en France, domiciliée ou non.

Mais le Français qui serait cessionnaire d'une obligation contractée en pays étranger entre deux étrangers ne pourrait poursuivre le débiteur devant la juridiction française, à moins que cette obligation ne soit transmissible par voie d'endos ou bien que le débiteur ne soit domicilié en France.

298. Des conventions diplomatiques dérogent quelquefois à ces règles de compétence judiciaire concernant les obligations personnelles entre étrangers et Français. Ainsi un traité conclu entre la France et la Suisse veut que les sujets helvétiques soient traduits devant la juridiction de leur pays par les demandeurs français, sans pouvoir être actionnés devant les tribu

6

1. Montpellier, 12 juill. 1826.

2. Rej., 8 juill. 1840.

3. Rej., 19 avril 1852.

4. Massé et Vergé, t. Ier, p. 85, note 10.

5. C. civ., art. 11.

6. Traité diplomatique, 18 juill. 1828.

« PreviousContinue »