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Le plus prudent, surtout pour les locations à durée un peu longue, est de faire le bail devant notaire, aujourd'hui que le droit d'enregistrement de 25 centimes par 100 francs se perçoit même sur les locations verbales.

408. Tant qu'un bail sans écrit n'a reçu aucun commencement d'exécution, si l'une des parties le nie, aucun moyen de preuve n'est admissible, quelque modique qu'en soit le prix et quoiqu'on allègue qu'il a été donné des arrhes ou un denier à Dieu; mais le serment peut, en certaines circonstances, être déféré à celui qui nie le bail'.

La remise des clefs par le propriétaire, jointe à l'occupation des lieux par le locataire, établit suffisamment qu'il y a location, à moins qu'il ne soit prouvé que l'habitant est là à un autre titre, par exemple à titre de tolé

rance.

409. A Paris, pour les locations verbales, presque toujours le preneur, au moment où il traite, remet au concierge une petite somme appelée denier à Dieu. Néanmoins, d'après l'usage, le locataire et le propriétaire ont la faculté réciproque de se dédire dans les vingt-quatre heurés (jusqu'au lendemain toute la journée)3, l'un en reprenant le denier à Dieu, l'autre en le rendant, pourvu que la promesse de bail n'ait pas encore reçu un commencement d'exécution. Alors pas de preuve admissible; pas même de serment.

taire ne laisse entrer chez lui aucune boisson appartenant à un détaillant sans avoir fait avec ce détaillant un bail authentique des lieux destinés à ce dépôt de boissons.

1. C. civ., art. 1715.

Si vingt-quatre heures s'écoulent sans qu'il y ait eu dédit, que devient le denier à Dieu ? Il est acquis définitivement au concierge dès que le locataire prend possession des lieux loués. Mais si, avant cette possession, le propriétaire nie la location verbale, son concierge doit encore rendre le denier à Dieu au preneur, tandis que celui-ci ne peut le réclamer si c'est lui qui nie la location verbale. Alors le serment pourra être déféré '.

410. En outre, dans les locations verbales, le preneur remet quelquefois au propriétaire une somme d'argent à titre d'arrhes, qui ont de l'analogie avec le denier à Dieu. Suivant l'usage ordinaire, basé sur la convention tacite, tant que le bail n'a pas reçu un commencement d'exécution, les parties peuvent se dédire, l'une en perdant les arrhes, l'autre en les rendant au double, avec faculté de se déférer le serment sans autre moyen de preuve 2.

Dans les locations écrites, les arrhes ont un autre but et un autre caractère; elles consistent dans une somme plus ou moins importante que le preneur verse au bailleur et qui est imputable sur le prix du loyer en un mot, c'est un acompte payé d'avance.

411. Quelquefois encore le bailleur reçoit un pot-devin, c'est-à-dire une somme d'argent qui n'est pas autre chose que des loyers supplémentaires capitalisés et payés par anticipation. Si donc le bail venait à être résilié, ce pot-de-vin devrait être restitué proportionnellement à la durée que la location avait encore à courir, lors même

1. C. civ., art. 1715.

2. Ibid.

que cette résiliation aurait lieu par la faute du preneur 1.

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412. Il importe au propriétaire, et non moins au locataire, avant ou au moment de l'entrée en possession, de faire constater le bon ou le mauvais état des lieux loués, les dégradations et détériorations, le nombre et l'état des glaces, chambranles, serrures et autres objets susceptibles d'être détachés et changés.

Cet état, fait double, signé par les parties intéressées, dressé par un architecte à frais communs, profite surtout au preneur; car, s'il n'en a pas fait dresser un, il sera présumé avoir reçu les lieux en bon état de réparations locatives, sauf la preuve contraire, qui pourra être faite même par témoins, et il devra les rendre tels à la fin de sa jouissance, il pourra même être inquiété pour les dégradations et détériorations qui n'auront pas été constatées au début.

Si l'une des parties se refuse à faire un état de lieux, l'autre y parviendra en commençant par appeler le récalcitrant sur les lieux et en faisant dresser un constat par un huissier commis par la voie du référé.

A défaut d'état de lieux, le bailleur pourrait, à la fin du bail, réclamer des objets non représentés par le locataire, en prouvant par témoins ou autrement qu'ils existaient dans les lieux loués 2.

1. V. Agnel, Code manuel des propriétaires et des locataires, no 63; Douai, 30 dée. 1839, et 7 nov. 1845.

2. Duvergier, Du louage, no 444.

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413. Si le locataire sortant refuse de quitter les lieux à l'expiration de sa location, son expulsion sera ordonnée par le juge de paix de la situation pour une location n'excédant pas 400 francs par année, et par le tribunal civil ou le juge des référés pour un loyer supé

rieur.

Si le locataire entrant est empêché d'emménager par le refus du propriétaire ou par une autre cause, il pourra se pourvoir en référé devant le président du tribunal civil, qui statuera sur l'heure et prescrira des mesures propres à faire cesser l'obstacle mal fondé, quand la location est supérieure à 400 francs; mais, pour une location moindre, le locataire n'a que l'action ordinaire devant le tribunal d'arrondissement.

Le locataire entrant fera bien de ne pas emménager, ni recevoir les clefs des mains du locataire sortant, ni acheter ses meubles, sans avoir l'assurance que celui-ci a payé ses loyers et contributions et fait les réparations.

414. La première obligation est de garnir les lieux. de meubles, instruments ou autres objets suffisants pour répondre du loyer et des charges du bail; autrement le bailleur pourra s'opposer à son entrée. Mais cette obligation s'appliquera moins rigoureusement quand le locataire aura donné des arrhes ou payé des loyers d'avance.

Un locataire commerçant ou industriel est aussi tenu

de garnir les lieux de meubles. Mais il a la faculté de vendre et renouveler les marchandises sans que le bailleur puisse s'y opposer.

Le bailleur a un privilège, c'est-à-dire un droit de préférence pour les loyers, fermages, réparations et autres charges de la location, sur tout ce qui garnit les lieux loués, meubles, marchandises, instruments et récoltes'. Les objets empruntés ou loués, par exemple un piano, sont aussi le gage privilégié du bailleur de l'immeuble, à moins qu'il n'ait été prévenu du prêt par une signification faite avant l'introduction de ces objets dans les lieux, ou bien qu'il en ait eu connaissance d'une autre manière.

A défaut de payement, ce privilège s'exerce au moyen de la saisie-gagerie suivie de la vente du mobilier. Il suffira même de former une saisie-arrêt sur le prix des meubles qui auraient été saisis et vendus par un autre créancier 2.

415. Si, au cours de la location, les meubles, récoltes ou matériel sont déplacés sans son consentement, le bailleur peut les suivre, faire saisir et réintégrer dans les lieux loués, pourvu qu'il les revendique dans les quarante jours quand il s'agit de mobilier garnissant une ferme, et dans les quinze jours quand il s'agit de meubles nantissant une maison; et qu'il fasse valider cette revendication par le juge de paix pour un loyer annuel qui

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1. C. civ., art. 2102. - En cas de faillite du locataire, le bailleur doit se conformer aux dispositions de la loi du 19 février 1872, qui a modifié les articles 450 et 550 du Code de commerce.

2. Paris, 5 ch., 28 avril 1868.

3. C. civ., art. 2102.

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