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Or, en poursuivant l'examen dans ce sens, nous trouvons que, par son agression contre Monte-Video, le roi du Brésil

qu'elles ont adoptée de conserver, par tous les moyens en leur pouvoir, la paix du monde achetée par de si grands sacrifices, les ont déterminées à prendre connaissance de cette affaire, avec l'intention de la terminer de la manière la plus équitable et la plus conforme aux intérêts et à la tranquillité des autres Etats; Que lesdites cours ne se dissimulent pas qu'une querelle entre le Portugal et l'Espagne pourrait troubler cette tranquillité et occasioner une guerre en Europe, qui non seulement serait funeste aux deux Etats, mais incompatible avec les intérêts et le repos des autres puissances;

Qu'en conséquence elles ont résolu de faire connaître au Gouvernement de Sa Majesté Très-Fidèle leurs sentimens à ce sujet; de l'inviter à fournir des explications suffisantes sur ses projets, à prendre les mesures les plus promptes et les plus efficaces pour dissiper les alarmes bien fondées que son invasion des possessions espagnoles a déjà causées en Europe, et à satisfaire aux justes réclamations de l'Espagne, aussibien qu'aux principes de justice et d'impartialité qui dirigent les puissances médiatrices.

1* Exposait son pays à une attaque de la part des Espagnols;

2° Diminuait ses forces par l'emploi qu'en exigeait sa nouvelle possession, et l'opposition probable de Buenos-Ayres ;

3° Portait à des mécontentemens intérieurs.

Les preuves de ces trois assertions ne se sont point fait attendre.

Le refus d'écouter des demandes aussi équitables ne laisserait aucun doute relativement aux intentions réelles du cabinet de Rio-Janeiro. Les désastres qui pourraient en résulter pour les deux hémisphères seraient imputés entièrement au Portugal; et l'Espagne, après avoir vu l'Europe entière applaudir à sa conduite pleine de sagesse et de mesure, trouverait dans la justice de sa cause et l'assistance de ses alliés des moyens suffisans pour le redressement de ses griefs.

Les Soussignés, en s'acquittant des ordres de leurs cours respectives, ont l'honneur d'offrir à Son Excellence le marquis d'Aguiar l'assurance de leur haute considération.

Signé, VINCENT, RICHELIEU, STUART, GOLTZ,
POZZO DI BORQU.

Car, 1° Artigas s'est lancé sur la partie du Brésil qui avoisine son territoire; il a fait à la fois la guerre et l'insurrection; et quelle insurrection? La plus désastreuse de toutes, celle des Nègres esclaves. De son côté, Buenos-Ayres, débarrassé des armées royales du Chili et du Pérou, enflé par ses succès, s'apprête à demander au Brésil un compte sévère de son agression. Qui sait jusqu'où le ressentiment menera ce nouveau Gouvernement, et s'il ne tentera pas de se débarrasser d'un voisin incommode, dont l'existence politique n'a plus rien de commun avec la sienne propre?

2o Le roi du Brésil, attaqué par ses propres sujets, peut avoir le temps de regretter les troupes qu'il a comme perdues dans cette entreprise infortunée. Quel temps ne fautil pas pour les ramener de Monte-Video à Fernambouc, et qu'en restera-t-il après tant de courses dans ces climats meurtriers?

Dans cet acte, tout est donc aussi mal calculé en morale qu'en politique, et il est rare de réunir à la fois plus d'inconvéniens et plus

le

d'inconvenances. Mais ce qui est le plus à remarquer, c'est comment, par cet acte, gouvernement du Brésil, sans le savoir ni le vouloir, se faisait l'auxiliaire très-actif de l'indépendance américaine. Suivons ceci. Le Portugal arme en Amérique. L'Espagne arme en Europe.

Mais ces armemens sont pris sur ceux que réclamait l'agonie de la domination espagnole en Amérique. Tout ce qui est retiré des envois qui pouvaient y être faits, est donc autant de retiré des moyens de la combattre; ce sont autant d'allégemens en faveur de l'Amérique; par conséquent, le roi du Brésil faisait une diversion très-active en faveur de l'indépendance américaine, en forçant l'Espagne à retenir en Europe les troupes dont elle avait besoin en Amérique. C'est ainsi que dans ce moment le complot de Lisbonne, en la forçant de se prémunir chez elle, tourne encore au profit de l'indépendance américaine, et que le Portugal lui est aussi fatal en Europe que le Brésil l'est en Amérique, et que l'un lui nuit à ses portes

autant que l'autre le fait loin d'elle... Voilà comme tout se tient et se perd à défaut d'être bien remarqué... Il y a plus : le roi du Brésil, en attaquant Monte-Video, se déclarait l'ennemi des indépendans; en même temps par sa diversion il les soutenait en Europe; il s'exposait en Europe aux coups de l'Espagne, en Amérique à ceux des indépendans, et compromettait à la fois ses anciens et ses nouveaux domaines.

2° Qu'avait à faire le roi du Brésil? La réponse est simple : le contraire de ce qu'il a fait... Le succès de cette direction aurait correspondu à l'infortune de celle qu'il a suivie.

Ici se développent dans tout leur jour les inconvéniens de faire gérer les affaires nouvelles par les hommes anciens, l'incompatibilité de la vieillese des idées et des mains avec la jeunesse des objets auxquels on veut les appliquer, ou que l'on prétend manier : c'est le procès de l'hiver contre le printems ; il est toujours perdu d'avance et avec dépens. Ceci vaut la peine d'être examiné.

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