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Dans un but de célérité, le décret organique de 1852 avait chargé la Chambre des requêtes de statuer définitivement sur les pourvois de celle nature. Pour hâter encore plus la solution, la loi du 30 novembre 1875 (art. 1er, § 5) a décidé que les pourvois en cassation relatifs à la formation et à la revision des listes, seraient portés directement devant la Chambre civile.

La Cour de cassation, saisie du pourvoi, n'a pas à examiner les points de fait, qui sont souverainement appréciés par le juge de paix; elle se borne à rechercher s'il y a, soit dans les formes de la procédure, soit dans la décision qui lui est soumise, une violation des dispositions de la loi. Si la Cour déclare le pourvoi irrecevable pour défaut d'accomplissement des formalités prescrites ou le rejette pour des motifs tirés du fond du droit, la décision du juge de paix conserve toute sa force et l'inscription ou la radiation faite en vertu de cette sentence est maintenue. Si, au contraire, la Cour casse la décision du juge de paix, elle renvoie la cause devant le juge de paix d'un autre canton, qui statue à nouveau sur l'appel de la décision de la commission municipale.

91. Dispense des frais. La loi a voulu lever tous les obstacles qui pourraient s'opposer à l'exercice du droit de réclamation en matière électorale. Nous avons déjà rencontré diverses dispositions exemptant les réclamations des frais et des lenteurs qu'entraînent les procédures ordinaires. L'article 24 du décret organique de 1852, complétant ces dispositions, porte que « tous les actes judiciaires sont, en matière électorale, dispensés du timbre et enregistrés gratis. Les extraits des actes de naissance nécessaires pour établir l'âge des électeurs sont délivrés gratuitement, sur papier libre, à tout réclamant. Ils portent, en tête de leur texte, l'énonciation de leur destination spéciale, et ne peuvent servir à aucune autre ». Toutefois la gratuité ne s'étend pas aux instances dans lesquelles se discutent préjudiciellement des questions d'état et de nationalité (Cass., 28 mai 1895).

92. Clôture des listes électorales.

«Le 31 mars de chaque année, la commission municipale opère toutes les rectifications régulièrement ordonnées et arrête définitivement les listes électorales de la commune. Le maire transmet au préfet le tableau de ces rectifications » (D. R. 1852, art. 7; L. 7 juillet 1874, art. 1er).

« L'élection est faite sur la liste revisée pendant toute l'année qui suit la clôture de la liste » (D. O. 1852, art. 25). 93. Rectification au cours de l'année. «La liste électorale reste, jusqu'au 31 mars de l'année suivante, telle qu'elle a été arrêtée, sauf néanmoins les changements qui y auraient été ordonnés par décision du juge de paix, et sauf aussi la radiation des noms des électeurs décédés ou privés des droits civils et politiques par jugement ayant force de chose jugée» (D. R. 1852, art. 8).

Cette disposition ne doit pas être entendue en ce sens que le juge de paix pourrait, après le 31 mars, être saisi soit de demandes directes en inscription, soit d'appel contre la décision des commissions chargées de la revision des listes. Il y aurait là un double excès de pouvoir. D'une part,

le juge de paix n'est jamais, en matière d'inscription sur les listes électorales, juge du premier degré; d'autre part, il ne peut statuer que sur les appels formés au cours de la revision annuelle. Par conséquent, les seules décisions judiciaires qui puissent, au cours de l'année, modifier la liste électorale close le 31 mars, sont celles qui ont été rendues postérieurement à cette date, par le juge de paix ou la Cour de cassation, mais sur réclamations formées devant la commission municipale dans le délai de vingt jours à compter du 15 janvier.

Toutefois le maire doit opérer d'office, même après le 31 mars, la radiation des noms des électeurs décédés ou privés de leurs droits civils ou politiques par jugements ayant acquis l'autorité de la chose jugée, sur la représentation des actes de décès ou des jugements et arrêts de condamnation (D. R. 1852, art. 8).

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94. Conservation et communication des listes électorales. - Les minutes des listes électorales sont réunies en un registre et conservées dans les archives de la commune. Tout électeur peut en prendre communication et copie (L. 7 juillet 1874, art. 4, §§ 3 et 4). Les tableaux rectificatifs, transmis au préfet, restent déposés, avec la copie des listes électorales, au secrétariat général de la préfecture. Communication en doit être donnée aux citoyens qui la demandent (D. R. 1852, art. 7).

SECTION III. Les élections.

95. — I. LÉGISLATION. Les règles édictées par le législateur relativement aux élections ont toutes pour but de garantir la liberté des électeurs et d'assurer la sincérité des votes. Ces règles sont, à peu de chose près, les mêmes pour les élections des députés, des conseils généraux, des conseils d'arrondissement et des conseils municipaux. Elles se trouvent éparses dans un grand nombre de textes (décrets organique et réglementaire du 2 février 1852, loi du 30 novembre 1875 et loi du 5 avril 1884). Nous en donnons ci-après une analyse complète.

96. II. OPÉRATIONS PRÉLIMINAIRES. La loi ne veut pas qu'il y ait de surprise et que les électeurs soient convoqués à l'improviste pour voter sans avoir eu connaissance de l'élection, ou du moins sans avoir eu le temps de se faire une opinion au sujet des candidats. De là les règles suivantes relatives à la convocation des électeurs, à la période électorale, à la fixation des bureaux de vote.

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97. Convocation des électeurs. Les collèges électoraux sont convoqués par un décret du pouvoir exécutif, s'il s'agit d'élections législatives ou départementales (1), et par arrêté du préfet, s'il s'agit d'élections municipales. L'acte de convocation est toujours nécessaire, lors même que la loi aurait fixé l'époque précise des élections, comme elle l'a fait pour le renouvellement des conseils municipaux. Il doit être publié un certain

(1) Sous la dénomination d'élections départementales, on comprend les élections aux conseils généraux et aux conseils d'arrondissement.

temps avant l'élection pour que les candidatures puissent se produire et être discutées par les électeurs. L'intervalle est de 20 jours au moins pour les élections des députés, et de 15 jours au moins pour les élections départementales et municipales.

Afin que les électeurs ne soit pas empêchés par leurs occupations particulières de venir voter, le jour du scrutin doit être, autant que possible, un dimanche ou un jour férié pour les élections législatives, et toujours un dimanche pour les élections départementales et communales.

98. — Période électorale. Pendant cet intervalle de 20 ou de 15 jours qu'on désigne sous le nom de période électorale, les candidats font afficher et distribuer leurs professions de foi, circulaires, bulletins, etc. La loi les dispense d'autorisation préalable pour ces affichages et distributions. Depuis la loi du 29 juillet 1881, sur la presse, il n'y a plus là un privilège spécial, puisque l'affichage et le colportage sont libres; mais un autre privilège subsiste en faveur des affiches électorales, c'est la dispense du timbre des affiches des candidats, contenant, soit leur profession de foi, soit une circulaire portant leur signature ou seulement leur nom. Les affiches émanées d'un tiers qui voudrait soutenir la candidature, ne jouissent pas de la même dispense. Toutefois, les affiches ne peuvent être blanches, cette couleur étant exclusivement réservée aux actes de l'autorité (L. 29 juillet 1881, art. 15). De plus, pour éviter toute apparence de pression électorale, il est interdit à tout agent de l'autorité publique et municipale de distribuer des bulletins de vote, professions de foi ou circulaires des candidats.

99. Fixation des bureaux de vote.

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En principe, le vote a lieu au chef-lieu de la commune. Néanmoins, chaque commune peut être divisée, par arrêté du préfet, en autant de bureaux ou sections de vote que l'exigent les circonstances et le nombre des électeurs. L'arrêté qui l'établit doit être prononcé au moins dix jours à l'avance.

100. Cartes électorales.

Pendant la même période, il est délivré à chaque électeur une carte électorale indiquant le lieu où l'électeur doit voter. Ces cartes électorales permettent de constater l'identité des électeurs lorsqu'ils se présentent pour voter. Elles étaient déjà prescrites par les instructions ministérielles; la loi du 5 avril 1884 en a rendu la délivrance obligatoire. Mais elles ne sont pas exigées comme une condition essentielle de l'exercice du droit électoral, et, par suite, l'électeur pourrait être admis à voter en justifiant par tout autre moyen de son identité.

101. III. OPÉRATIONS DU VOTE. Au jour fixé par l'acte de convocation, les élections ont lieu dans la forme suivante :

102. Constitution et pouvoirs du bureau. - Le bureau de chaque assemblée de vote est composé d'un président, de quatre assesseurs et d'un secrétaire. Lorsqu'il n'y a qu'une seule assemblée de vote, le bureau est présidé par le maire, s'il y a plusieurs assemblées, le bureau de la première section est présidé par le maire et les autres par les adjoints ou des conseillers municipaux dans l'ordre du tableau.

A défaut d'adjoints et de conseillers municipaux, les présidents sont désignés par le maire parmi les électeurs. A Paris, les bureaux de vote

sont présidés, dans chaque arrondissement, par le maire, les adjoints ou les électeurs désignés par eux.

Pour les élections législatives ou départementales, les assesseurs sont pris, suivant l'ordre du tableau, parmi les conseillers municipaux, et, à leur défaut, les assesseurs sont les deux plus âgés et les deux plus jeunes électeurs présents à l'ouverture de la séance et sachant lire et écrire. A Paris, les fonctions d'assesseurs sont remplies, dans chaque bureau, par les deux plus âgés et les deux plus jeunes électeurs sachant lire et écrire. - Pour les élections municipales, les assesseurs sont toujours les deux plus âgés et les deux plus jeunes électeurs présents à l'ouverture de la · séance.

Le secrétaire est désigné par le président et les assesseurs. Dans les délibérations du bureau, il n'a que voix consultative.

Trois membres du bureau au moins doivent être présents pendant tout le cours des opérations.

Le président a seul la police de l'assemblée. Nulle force armée ne peut, sans son autorisation, être placée dans la salle des séances ni aux abords du lieu où se tient l'assemblée. Les autorités civiles et les commandants militaires sont tenus de déférer à ses réquisitions. L'assemblée ne peut s'occuper d'autres objets que de l'élection qui lui est attribuée. Toute délibération, toute discussion lui sont interdites. Le bureau juge provisoirement toutes les difficultés qui s'élèvent sur les opérations de l'assemblée. Ses décisions sont motivées. Toutes les réclamations et décisions sont insérées au procès-verbal; les pièces et les bulletins qui s'y rapportent y sont annexés, après avoir été parafés par le bureau.

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Le scrutin ne dure qu'un jour (L. 30 nov. 1875,

Pour les élections législatives, le scrutin doit être ouvert de huit heures du matin à six heures du soir. Toutefois, les préfets peuvent, après avis des maires, prendre un arrêté pour que le scrutin soit ouvert plus tôt dans les communes où cela parait nécessaire. Pour les élections départementales, il est ouvert de sept heures du matin à six heures du soir. Pour les élections municipales, le préfet fixe l'heure d'ouverture et de clôture du scrutin, qui doit rester ouvert six heures au moins.

Au commencement de l'opération, le président constate l'heure à laquelle le scrutin est ouvert. A la fin, il constate l'heure à laquelle il déclare le scrutin clos. Après cette déclaration, aucun vote ne peut être reçu.

Pendant toute la durée des opérations, une copie de la liste des électeurs, contenant les noms, domicile et qualification de chacun des inscrits, reste déposée sur la table autour de laquelle siège le bureau.

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104.- Votes. Avant le commencement du vote, le président ouvre la boîte du scrutin et s'assure publiquement qu'elle ne contient aucun bulletin; puis, il la ferme à deux serrures dont les clefs restent, l'une entre ses mains et l'autre entre les mains de l'assesseur le plus âgé.

Le vote est secret. Le secret du vote étant exigé en vue de garantir la liberté des élections, n'est pas un droit auquel on puisse renoncer (C. d'Ét., 6 janv. 1859).

Les électeurs sont appelés successivement par ordre alphabétique. Ils apportent leur bulletin préparé en dehors de l'assemblée. Le papier du bulletin doit être blanc et sans signes extérieurs. A l'appel de son nom, l'électeur remet au président son bulletin fermé. Le président le dépose dans la boîte du scrutin. Le vote de chaque électeur est constaté par la signature ou le parafe de l'un des membres du bureau apposé sur la liste, en marge du nom du votant. L'appel étant terminé, il est procédé au réappel de tous ceux qui n'ont pas voté.

La formalité de l'appel et du réappel n'est qu'une mesure d'ordre destinée à faciliter les moyens de voter, et, s'il est établi que le vote a été libre et complet, l'absence de cette formalité ne saurait vicier l'élection.

Nul électeur ne peut entrer dans l'assemblée s'il est porteur d'armes quelconques. Il faut que la liberté des électeurs soit à l'abri de toute influence.

105. IV. OPÉRATIONS POSTÉRIEURES AU VOTE. Après la clôture du scrutin, il est procédé au dépouillement du scrutin, à la rédaction des procès-verbaux, au recensement général des votes et à la proclamation des élus.

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106. Dépouillement du scrutin. La boîte du scrutin est ouverte et le nombre des bulletins vérifié. Si ce nombre est plus grand ou moindre que celui des votants, il en est fait mention au procès-verbal. Le bureau désigne, parmi les électeurs présents, un certain nombre de scrutateurs, lesquels se divisent par tables de quatre au moins. Le président répartit entre les diverses tables les bulletins à vérifier. A chaque table, l'un des scrutateurs lit chaque bulletin à haute voix et le passe à un autre scrutateur. Les noms portés sur les bulletins sont relevés sur des listes préparées à cet effet. Le président et les membres du bureau surveillent l'opération du dépouillement. Ils peuvent y procéder eux-mêmes, s'il y a moins de 300 votants. Les tables sur lesquelles s'opèrent le dépouillement sont disposées de telle sorte que les électeurs puissent circuler à l'entour (D. R. 1852, art. 27-28).

Les bulletins sont valables bien qu'ils portent plus ou moins de noms qu'il y a de candidats à élire. Les derniers noms au delà de ce nombre ne sont pas comptés. Les bulletins blancs ou illisibles, ceux qui ne contiennent pas une désignation suffisante ou dans lesquels les votants se font connaître, n'en trent pas en compte dans le résultat du dépouillement, mais ils sont annexés au procès-verbal (L. 5 avril 1884, art 27-28).

Immédiatement après le dépouillement, le président proclame le résultat du scrutin. Les bulletins autres que ceux qui doivent être annexés au procès-verbal sont brûlés en présence des électeurs (D. R. 1852, art. 31). 107.Procès-verbal des opérations; dépôt des listes d'émargement.Le procès-verbal des opérations électorales est dressé en double par le secrétaire, il est signé par lui et les autres membres du bureau. L'un des doubles reste déposé au secrétariat de la mairie, l'autre double est transmis au sous-préfet de l'arrondissement qui le fait parvenir au préfet. Lorsqu'il s'agit d'élections municipales. l'extrait en est immédiatement affiché par les soins du maire (L. 1884, art. 29).

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