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statuer conformément aux conclusions des demandeurs, s'est borné à viser son premier jugement du 16 mai 1831, en y ajoutant la contrainte par corps comme nouveau moyen d'exécution; que Lemoine Reclus est fondé à se prévaloir de cette irrégularité, et qu'il y a lieu de faire droit à son appel, sans préjudice aux intimés de se prévaloir par action nouvelle en vertu de leur titre; Faisant droit de l'appel que Lemoine Reclus a interjeté du jugement rendu par le tribunal de commerce de Bergerac; émendant, décharge l'appelant des condamnations contre lui prononcées; condamine Peyronnet et compagnie aux dépens de première instance et d'appel, sauf à eux à se pourvoir ainsi qu'ils aviseront. Du 18 juillet 1833. - 2o. ch.

Observations. La question jugée par cet arrêt ressemble beaucoup à celle dont nous avons fait l'objet d'une dissertation, tom. 42, pag. 322; à savoir si le tribunal qui, par un jugement par défaut, a condamné le défendeur seulement par les voies ordinaires, quoique le demandeur eût conclu à la contrainte par corps, peut, sur l'opposition du défaillant, prononcer ce mode d'exécution qu'il n'a pas ordonné par sa première décision. Il y a toutefois cette différence que, dans l'espèce soumise à la Cour de Bordeaux, le demandeur n'avait pas demandé la contrainte par corps, et que par suite le jugement par défant n'avait pas refusé de la prononcer. Il suit de là que ce jugement n'ayant pas examiné si la contrainte par corps devait être prononcée contre le failli (non en cause) pour le cas éventuel où il recouvrerait l'administration de ses biens, la question était entière à juger. Elle ne pouvait plus être tranchée que sur une action nouvelle contre lui, et par un nouveau jugement indépendant de celui prononcé contre ses syndics.

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N'est point passible d'amende le notaire qui dans un acte emploie la dénomination d'une ancienne mesure (l'aune), en ajoutant que c'est une mesure de 120 centimètres, lors même qu'il n'aurait point répété cette addition pour tous les articles compris dans l'acte. (Art. 9, 10 L. 1. vend. an IV; art. 2, Déc. 12 fév. 1812) (1).

(Ministère public C. M. Sauvée. )

Me. Sauvée, notaire, avait dressé un inventaire des marchandises d'un commerçant décédé. Au lieu d'énoncer les mesures par la dénomination de mètre, il l'avait fait en employant le mot

(1) V. infrà p. 376, l'arrêt de la Cour d'Aix, du 23 janvier 1834.

aune; mais à côté de ce mot il avait placé l'équivalent de l'aune en centimètres. Toutefois, il n'avait pas réitéré cette addition à tous les articles inventoriés. Poursuites, jugement et arrêt de la Cour de Nîmes qui relaxent le notaire. Pourvoi de la régie pour violation des articles 9 et 10 de la loi du 1er. vend. an IV, 17 de celle du 25 vent. an XI ; 1, 2, 3 du décret du 12 fév. 1812.

ARRÊT.

La Cour ; — Considérant en droit que le décret du 12 février 1812 ordonne la confection, pour l'usage du commerce, d'instrumens de pesage et de mesurage qui présentent, soit les fractions, soit les multiples des unités fixées par la loi du 19 frimaire an VIII; que cette modification dans les dispositions précédentes ayant pour objet de faciliter et d'accélérer l'établissement de l'universalité des poids et mesures, comportait la faculté d'énoncer les fractions ou multiples desdites unités; Considérant en fait que le jugement attaqué constate, ce qui est d'ailleurs justifié par la production de l'inventaire dressé le 18 août 1832 par Me. Sauvée, notaire au Pont-Saint-Esprit, que les marchandises inventoriées contenaient tant d'aunes composées de 120 centimètres chacune, longueur de l'instrument de mesurage autorisé par le décret du 12 février 1812; Considérant que si, dans les articles qui suivent, cette énonciation de la mesure légale n'est point répétée avec la même précision, il est évident que l'expression première contient une définition applicable aux articles subséquens, et qu'ainsi l'énonciation contenue audit inventaire remplit le vœu des art. 9 et 10 de la loi du 1er. vendémiaire an IV, combiné avec l'art. 2 du décret du 12 février 1812;

Rejette.

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Observations. La question jugée par cet arrêt a été trop bien éclaircie parl M. le conseiller rapporteur, pour que nous omettions de rappeler ses paroles.

«En droit, a dit ce magistrat, l'expression d'aune, mesure usuelle de 120 centimètres, est-elle suffisante pour l'exécution de la loi ? Toute la solution de cette question repose, ce semble, sur le décret du 12 février 1812. Il est impossible de ne pas reconnaître que le décret a modifié l'exécution rigoureuse des premières lois introductives du système métrique; ces dernières lois n'admettaient ni la confection, ni l'usage de fractions ou multiples dans chacune des catégories de mesures ou poids, et par exemple, pour l'aune, l'art. 1er, de la loi du 1er, vendémiaire an IV lui substituait exclusivement le mètre, à dater du Ier. nivôse an IV, et cette substitution devait s'opérer progressivement dans le reste de la France, à mesure des fabrications des nouvelles mesures. En 1812, le gouvernement ordonne la confection pour l'usage » du commerce, d'instrumens de mesurage qui présentent soit les frac» tions, soit les multiples desdites unités (1), le plus en usage dans le » commerce et accommodées aux besoins du peuple. »

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(1) L'article rappelait la loi qui avait fixé définitivement les unités du nouveau système, 19 frimaire an VIII.

Qu'est-il résulté de ce décret? C'est que le mètre ne devait plus être substitué à l'aune; cette ancienne mesure équivalait à 43 pouces 8 lignes, suivant l'étalon fixé sur les murs du Louvre; cette longueur excédait de 7 pouces environ ou 20 centimètres le mètre, unité de longueur. On substitua donc aux aunes anciennes, même au mètre, qui depuis l'an IV l'avait remplacé légalement, mais pas effectivement, des mesures de 43 pouces environ, 120 centimètres, très-rapprochées de l'ancienne aune de Paris. Voilà, en fait et en droit, ce qui s'est passé pour la confection et l'usage de cette mesure; mais quant aux dénominations, quel résultat doit obtenir cette modification? Faut-il exclusivement employer le mot de mètre, ou adopter l'expression employée dans l'art. 2 de l'inventaire litigieux, aune de 120 centimètres ? La dénomination exclusive de mètre est soutenue par M. le procureur général demandeur; la question paraît s'être prolongée en état de doute jusqu'aux temps les plus récens; car, dans une instruction de la régie de l'enregistrement, du 7 janvier 1833, on la trouve discutée.

Contre cette opinion du ministère public et du gouvernement, ne peut-on pas opposer une espèce d'antinomie. Le décret de 1812 ordonne la confection pour l'usage du commerce d'instrumens d'une longueur de 120 centimètres. Cette longueur, d'un usage non pas seulement toléré, comme l'indique l'instruction, mais autorisé formellement, ne pourrait plus être énoncée dans les actes. Il faudrait que cette longueur, légalement introduite dans l'usage du commerce, ne puisse jamais être énoncée qu'après une traduction en mètre, et ainsi réprouver même la dénomination d'aune métrique, et soumettre ces mesures légales à une traduction l'énonciation. Le décret de 1812 semble proscrire, non pour pas expressément, mais implicitement, cette rigueur.

COUR ROYALE D'AIX.

Officiers ministériels. Mesures anciennes.- Contravention.

Les officiers ministériels peuvent dans leurs actes ajouter à l'énonciation des nouvelles mesures, comme simple renseignement, celle des anciennes. (Art. 9, L. 1er, vend. an IV) (1).

(N. C. la Régie ).— ARRÊT.

LA COUR ;- Attendu qu'il s'agit dans la cause, de savoir si le notaire, en énonçant concurremment dans les actes les quantités de mesures en mesures nouvelles et en mesures anciennes, a contrevenu, soit aux lois, soit aux arrêtés du gouvernement concernant les mesures ainsi que la numération décimale, et s'il est ainsi devenu passible de l'amende portée en l'art. 17 de la loi du 25 ventòse an XI, contre ces sortes de contraventions ;- - Attendu qu'on ne trouve, ni dans les lois, ni dans les actes du gouvernement, aucune disposition prohibitive de cette double énonciation, qu'en supposant qu'on voulût considérer l'art. 9 de

(1) V. l'arrêt précédent.

la loi du er. vendémiaire an IV, non pas seulement comme obligeant le notaire à énoncer les quantités en nouvelles mesures, mais encore comme prohibant l'expression en anciennes mesures, les articles 18 et 19 de la même loi éclaireraient bien vite ce texte ;- Qu'en effet, ces articles veulent qu'à partir du 1. brumaire an IV, la double énonciation ait lieu dans les décrets et procès-verbaux du corps législatif, et dans les autres actes de l'autorité publique, jusqu'à ce que, disent ces articles, les mesures nouvelles puissent être exclusivement employées sans inconvéniens ;- Que sans avoir à examiner si les contrats notariés sont des actes de l'autorité publique dans le sens de l'art. 19, il faut reconnaître qu'il n'est pas possible que le législateur ait rejeté et puni pour les actes notariés ce qu'il a souhaité, conseillé et prescrit pour tous les actes publics; d'où il suit, par voie d'analogie et de déduction rigoureuse, que les notaires ont dû aussi, à titre d'enseignement public, et pour prévenir les erreurs entre citoyens, insérer dans leurs actes la double énonciation jusqu'à ce que les mesures nouvelles pussent être exclusivement employées, c'est-à-dire énoncées sans inconvénient ;;Attendu que la loi ne dit point, dans les art. 18 et 19, jusqu'à ce que le nouveau système des poids et mesures soit devenu obligatoire, mais bien jusqu'à ce que l'expression exclusive des quantités en nouvelles mesures puisse avoir lieu sans inconvéniens; - Qu'il y a là deux époques distinctes qu'il ne faut pas confondre ; la première s'est vérifiée pour toute la France par l'arrêté du 13 brumaire an IX au Ier, vendémiaire an X; et dès ce moment (1er. vendémiaire an X ), les notaires n'ont pu négliger l'énonciation des nouvelles mesures sans encourir une amende; mais la seconde époque ne s'est pas encore vérifiée, car on ne trouve aucun acte gouvernemental public' et solennel fait pour tous et notoire à tous, dans lequel le gouvernement du roi, usant des droits que lui conféraient les lois sur la matière, ait proclamé que l'expression exclusive des quantités en nouvelles mesures dans les actes publics pouvait avoir lieu sans inconvéniens, et ait ainsi rendu le fait de la double énonciation illégal et punissable ;— Attendu que le décret impérial du 12 février 1812 ne saurait tenir lieu de l'acte dont on vient de parler; qu'en appliquant à ce décret les règles de la saine interprétation des lois, il devient évident que son art. 5 n'a d'autre objet que de maintenir ce qui est, sans rien innover, et par conséquent sans établir la prohibition pour les notaires et autres d'énoncer les anciennes mesures concurremment avec les nouvelles, et qu'au contraire son art. 3 fait ressortir d'une manière saillante le maintien de deux bases essentielles des lois sur la matière: l'une qui se rapporte à l'usage exclusif des poids et mesures métriques, l'autre qui se rapporte à l'énonciation simultanée et à la concordance des nouvelles et anciennes mesures partout où cela peut se faire, toujours dans le but de prévenir les erreurs et de rassurer la timidité et l'ignorance des citoyens ;- Attendu, de plus, qu'il y aurait encore à considérer par un sentiment d'équité que la loi a été interprétée dans ce sens par les notaires, saus opposition du gouvernement ni du ministère public, ce qui constituerait pour les notaires une erreur commune qui aurait pour le passé fait droit pour eux et les relèverait forcément de toute peine;- Par ces motifs, sans s'arrêter à l'appel émis par le ministère public, maintient

le jugement du tribunal de première instance de Sisteron, du 5 août dernier, pour être exécuté suivant sa forme et teneur, sans dépens. Du 23 janvier 1834.

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Un huissier est responsable de la nullité d'un protét par lui fait, non-seulement à l'égard de celui des endosseurs qui l'a chargé de le faire, mais encore à l'égard de tous les autres. (Art. 173-176, C. Com.; 1992, C. C. ) (1).

(Cabure C. Grenet.)

Un billet à ordre avait été souscrit par le sieur Bodin au profit du sieur Vernier. Celui-ci l'endossa au profit du sieur Grenet, qui l'endossa à son tour à d'autres individus. Le sienr Bertrand, porteur, chargea M. Cabure, huissier à Paris, d'ea faire le protêt. Cet acte fut vicié d'une nullité radicale. Bertrand fut remboursé par des endosseurs immédiats, et d'endos en endos on remonta jusqu'au sieur Grenet, qui paya et ensuite recourut contre Vernier. Celui-ci fit prononcer la nullité du protêt, et par suite son affranchissement de toute garantie. Alors Grenet intenta contre l'huissier une demande en payement de dommages-intérêts. Cet officier soutint: 1°. qu'il ne pourrait être responsable de la nullité du protêt qu'envers celui qui l'en avait chargé; 2°. que Grenet ne pouvait plus invoquer cette nullité, puisqu'il l'avait couverte en payant le billet sur le vu du protet même. Jugement qui repousse cette défense. Appel.

ARRÊT.

LA COUR ; - Attendu que les huissiers sont les hommes de la loi et les mandataires forcés de tous les endosseurs, et ainsi responsables à l'égard de tous; Confirme et condamne Cabure à payer les dommages-intérêts demandés.

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COUR ROYALE DE TOULOUSE.

Ordre.- Intérêts.- Production.- Demande.

La demande en collocation dans un ordre fait produire des intérêts à la créance pour laquelle on veut être colloqué. (Art. 2224, C. C.) (2).

(1) Le 29 août 1832, la chambre des requêtes a décidé qu'un huissier chargé de faire le protêt d'une lettre de change, n'est responsable de la nullité de ce protêt que vis-à-vis du porteur au nom duquel il a protesté, parce qu'il ne tient de mandat que de ce porteur, et qu'un mandataire ne doit répondre de sa mission qu'à celui qui la lui confie. (J. A. t. 45, p. 515).

(2) V. dans le même sens, Arr. çass. 2 avril 1833, J. A. t. 44, p. 307 et la note.

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