dont deux sont ruinées, ainsi qu'on verra sur le plan, que depuis la métairie de M. l'Evêque, où nous avions cru pouvoir nous en servir pour la navigation jusqu'à ladite Robine en ses sinuosités, elle a trente-trois mille six cent vingt-neuf toises de cours, et ladite Robine jusqu'à Narbonne, neuf mille six cent trente-trois ; qu'il est vrai qu'on la pourroit rendre navigable avec trois ou quatre pieds d'eau, en y construisant de fréquentes chaussées et écluses, pour mettre la superficie de l'eau au-dessus des rochers et des peyssières des moulins, en resserrant son lit en divers endroits; mais que l'intention de Sa Majesté étant de faire faire un Canal de profondeur considérable, pour porter de grandes barques, et y ayant beaucoup de dépense à faire aux ouvrages nécessaires pour une médiocre navigation, lesquels les inondations par trop fréquentes dudit fleuve pourroient ruiner, il nous sembla plus à propos de chercher un chemin pour un Canal neuf de profondeur raisonnable du côté dudit fleuve d'Aude, et se servir de ses eaux, les soutenant par plusieurs digues ès lieux où il seroit trouvé nécessaire; quoi faisant, l'on auroit la navigation libre en tout temps, avec un fond suffi

sant.

Sur quoi, après une très-ample discussion des inconvéniens qui pourroient arriver, si l'on s'arrêtoit au lit d'Aude, il fut résolu par lesdits seigneurs commissaires, que nousdits experts ferions toute

rivière qui y entre près Saint-Martin de Grave, nous mesurâmes dix mille quarante-trois toises de longueur en soixante-douze stations, puis continuâmes notre travail toujours à gauche d'Aude jusqu'à la peyssière qui soutient l'eau du Canal, ou Robine qui passe à Narbonne, et laisse passer pardessus le reste des eaux d'Aude, qui descendent par la plaine de Coursan, et trouvâmes qu'en trentedeux stations, il y avoit deux mille quatre cent cinquante-deux toises de longueur.

Et le même jour, après avoir passé la barque et pris ledit Canal ou Robine à droite, aurions fait continuer notre mesurage par la plaine de Narbonne, et depuis l'entrée d'Aude dedans le Canal jusqu'à la ville, trouvé qu'il y avoit, en quatre-vingtseize stations, neuf mille six cent trente toises de longueur; ce fait, nous serions retirés audit Narbonne, la nuit s'approchant.

Et sur le soir du même jour, en l'assemblée tenue par lesdits seigneurs commissaires, nousdits experts fîmes notre rapport de l'état d'Aude comme fleuve. S'en suit que le fleuve qui prend son origine dans les Pyrénées, au-devant de Quilla, descend par des rochers si scabreux et avec une pente si précipitée jusqu'à la Robine de Narbonne, que jusqu'à cette heure il n'a été navigable que pour de petits radeaux pendant ses crues et débordemens, étant entre-coupé, en divers endroits, de rochers élevés à travers son lit, et de treize peyssières de moulins,

dont deux sont ruinées, ainsi qu'on verra sur le plan, que depuis la métairie de M. l'Evêque, où nous avions cru pouvoir nous en servir pour la navigation jusqu'à ladite Robine en ses sinuosités, elle a trente-trois mille six cent vingt-neuf toises de cours, et ladite Robine jusqu'à Narbonne, neuf mille six cent trente-trois ; qu'il est vrai qu'on la pourroit rendre navigable avec trois ou quatre pieds d'eau, en y construisant de fréquentes chaussées et écluses, pour mettre la superficie de l'eau au-dessus des rochers et des peyssières des moulins, en resserrant son lit en divers endroits; mais que l'intention de Sa Majesté étant de faire faire un Canal de profondeur considérable, pour porter de grandes barques, et y ayant beaucoup de dépense à faire aux ouvrages nécessaires pour une médiocre navigation, lesquels les inondations par trop fréquentes dudit fleuve pourroient ruiner, il nous sembla plus à propos de chercher un chemin pour un Canal neuf de profondeur raisonnable du côté dudit fleuve d'Aude, et se servir de ses eaux, les soutenant par plusieurs digues ès lieux où il seroit trouvé nécessaire; quoi faisant, l'on auroit la navigation libre en tout temps, avec un fond suffi

sant.

Sur quoi, après une très-ample discussion des inconvéniens qui pourroient arriver, si l'on s'arrêtoit au lit d'Aude, il fut résolu par lesdits seigneurs commissaires, que nousdits experts ferions toute

D

diligence pour trouver les moyens de mener et construire un Canal hors du lit d'Aude, et nous servir de ses eaux, après toutefois avoir reconnu l'état du Canal ou Robine de Narbonne à SainteLucie, de l'étang de Bages, du grau de la Nouvelle et du port de la Franqui; il fut délibéré que le lendemain lundi premier dudit mois de décembre 1664, lesdits seigneurs commissaires descendroient en barque sur ladite Robine, et que les eaux seroient par nous visitées en leur présence.

Ledit jour lundi premier décembre, lesdits seigneurs et nous serions descendus en barque du pont de Narbonne jusqu'à Sainte-Lucie, sondant en divers endroits ladite Robine, qui à cause de la crue fut trouvée profonde d'environ quatre pieds et demi jusqu'audit lieu de Sainte-Lucie, et entre les murailles qui conduisent de ladite Robine dans l'étang de Bages, où ne furent trouvés que deux pieds et demi ou trois pieds de fond, puis entrant dans ledit étang pour tourner du côté de la Nouvelle, trouvâmes qu'il y avoit encore moins de fond pendant plus de cent toises; de sorte que les barques, pour peu qu'elles soient chargées, ont peine ou n'y sauroient passer; de là l'étang se trouve cinq à six pieds de profondeur jusqu'au lieu dit de SoulleTaillad, où pendant cent cinquante toises il n'y a que trois pieds d'eau au plus; mais passant plus avant, et dans le même étang, nous entrâmes dans un Canal profond de plus de douze pieds, qu'on

appelle Canal royal, et qu'on dit avoir été fait de main d'hommes, où les barques donnent fond du côté de l'hôtellerie de la Nouvelle, et dure ledit Canal jusques deux cents ou trois cents toises de l'embouchure de la mer dans ledit étang, qu'on nomme le grau de la Nouvelle, où la mer a fait un banc de sable, et n'y a que quatre pieds d'eau ; bien est vrai qu'en un endroit où le banc semble être rompu pendant dix ou douze toises de travers, il y a six pieds d'eau; mais il est si mal-aisé, que quand la mer est agitée, les barques n'y peuvent entrer; et d'effet le jour précédent cette visitation, une s'y assabla, et en fut tirée par un coup de mer contre toute espérance : ce fait, partie desdits seigneurs commissaires se retira à Narbonne, et nousdits experts, avec les géomètres et autres ouvriers à Sijean, après y avoir employé les mardi et mercredi, second et troisième dudit mois.

Et le jeudi quatrième dudit mois de décembre 1664, nousdits experts, avec lesdits géomètres, niveleurs et ouvriers, partîmes dudit Sijean, et allâmes au port de la Franqui, où ayant fait équiper deux esquifs par des patrons et mariniers qui étoient audit port, après avoir considéré attentivement les lieux, nous nous embarquâmes pour sonder le port, l'un d'un côté et l'autre de l'autre, afin que si nos sondes et mesures se rapportoient, nous en fissions un jugement plus assuré, et trouvâmes en conformité, que depuis la plage jusqu'aux ro